- Bien sûr que non. Soufflai-je.

Me tromper sur les basiques… Evidemment que ça n’était pas le cas. Je ne me tromperais jamais sur cela. J’étais compétente, au moins pour ça, si ce n’était pour le reste. Et imaginer que je puisse me tromper sur les basiques… Non. C’était indigne de moi. Malgré le peu de confiance que je pouvais avoir en ce qu’il fallait que je fasse à l’avenir, je n’avais jamais douté de mes capacités en potions… Alors… Alors Matt avait raison. Et je soupirai à ce fait.

- Tu marques un point. Lui annonçai-je alors. J’ai l’impression que l’angoisse de ne pas réussir à gérer ce genre de choses me fait un peu… Paniquer.

Ce n’était pas qu’une impression. C’était le cas. Et c’était peut-être pour cela que je préférai dévier la conversation vers quelque chose de tout aussi peu agréable mais qu’au moins je maîtrisais pour avoir baigné de temps toute ma vie : les Sang-Pur. Ne pouvant m’empêcher de rire à sa remarque, j’haussai doucement les épaules.

- Si tu préfères, je peux aussi te faire un résumé. Il y a tout un tas d’épisode d’Amour Gloire et Sang Pur que tu pourras avoir comme ça sans te coltiner tous les numéros du journal de l’école. Plaisantai-je. Et crois-moi, il y en a vraiment beaucoup, des épisodes. Ça n’arrête jamais. Les mariages, les fiançailles, les ruptures, les infidélités et même des trahisons horribles qui te feraient trembler.

Evidemment, ce n’était là que des plaisanteries, quoiqu’à vrai dire… Je n’étais pas si loin de la réalité que l’on aurait pu l’imaginer… D’autant qu’il avait raison sur un point. Pour être tranquille, nous devions nous montrer soudés. Prouver que nos familles étaient en accord et que rien ne pourrait briser ce qui avait été fait. Mais était-ce, pour autant, une raison de risquer la pâture ? Il était évident que les murmures se feraient grandissants sur notre passage. Nous avions bien assez fait couler « d’encre » pour que cela ne soit pas le cas…

- Marcus est intelligent. Soufflai-je. Je n’en ai jamais douté. Surtout lorsque l’on connait sa sœur. Je ne connais pas encore son mari par contre. Je ne l’ai même pas vu en photo. Un Rosier… Ca me parle, mais je t’avoue que son visage m’échappe. Alors je ne pourrais pas vraiment te le présenter en avance. Il y aura aussi Amara. On peut lui faire confiance. Et… Je suppose que mon frère sera toujours une façon de prouver que nos familles sont soudées. Soufflai-je à mi-voix, peu convaincue par cette dernière solution.

J’esquissai néanmoins un sourire, le laissant embrasser mon front pour venir me serrer contre lui, bienheureuse, sereine et ô combien amoureuse de tout ce qu’il pouvait être. Je n’avais aucun doute sur ce fait… J’avais une chance incommensurable. Personne n’était parfait, certes. J’étais la première à l’admettre quand bien même je désirais l’être moi-même. Mais lui était tout ce qu’il me fallait. Son calme m’apaisait. Sa colère me galvanisait. Tout en lui répondait à ce que j’étais. Et ses mots résonnaient en moi comme des réponses à tous mes doutes et à toutes mes peurs.

- Je ne doute pas. Lui murmurai-je ainsi. Pas de nous. Encore moins de toi. Me redressant pour plonger mon regard dans le sien, je caressai sa joue, tendrement. Tu es intelligent, tu es réfléchi, du moins quand tu ne me revendiques pas devant toute une assemblée, me moquai-je éhontément. Je sais que tu t’adapteras et que tu ne te perdras pas, qu’ils ne feront pas de toi leur pantin ou je ne sais quoi d’autres. Je sais que je pourrais t’aider. J’ai la légilimancie avec moi. Je pourrais au moins être utile, te permettre de meilleures réponses encore.

Il était fort seul. Mais nous étions encore plus forts à deux. Je serais toujours avec lui, derrière lui, à le soutenir. En un sens, c’était là ce que l’on pouvait attendre d’une femme Sang-Pur. Mais je ne le faisais pas par obligation. Bien au contraire. Je le faisais par amour, par envie. Autant que lui me soutenait et m’encourageait, d’ailleurs. Nous étions un tout. Nous resterions un tout, envers et contre tous.

- Je sais qu’on s’en sortira. Lui soufflai-je alors. Je n’ai aucun doute là-dessus. Mais je veux juste que tu te rappelles que je t’aime. Que je suis fière d’être ta fiancée. Et… Laissant un instant de silence, j’émis un léger rire, secouant la tête de gauche à droite. Et qu’on fera taire toutes ses mauvaises langues « pures » en leur prouvant que les Gaunt et les Gimhae ne se trompent pas… Pour la peine, je te promets que je serais la parfaite petite femme sang pur dont tout le monde rêve.

Ce n’était pas difficile, pas même un rôle à jouer. Du moins… Cela allait l’être à ses côtés. Mais c’était un rôle que je connaissais par cœur, auquel je m’étais entraîné sans relâche toutes ces années. Caressant son torse distraitement, j’embrassai ce dernier pour reprendre à mi-voix.

- Il faudra seulement que tu me dises quelle femme tu désires… Pot de fleur ? Charmante ? Capable de conversation avec ces messieurs ? Je suis multiusage.

Voir les femme être objectivé paraissait être affreux, impensable. C’était pourtant une chose presque courante pour bien des femmes, pour nos mères, notamment. Et je serais ainsi ce qu’il désirait que je sois. Ni plus, ni moins. Parfaite. A leurs yeux plus qu’aux siens, bien évidemment.

- D’ailleurs… Pour ce qui est de ta franchise… Tu n’auras qu’à la laisser s’exprimer dans ton esprit, je serais peut-être la seule à l’entendre, mais au moins tu ne seras pas seul. Pas tout à fait. Plaisantai-je finalement.

S’il y avait bien une chose sur laquelle je devais prendre exemple, sur laquelle je devais m’appuyer, ce n’était ni son ouverture d’esprit ni même son jemenfoutisme constant sur la plupart des sujets mais bien cette confiance qu’il pouvait avoir quand il le fallait. Cela allait être compliqué, évidemment. J’avais toujours été anxieuse quant à mes résultats, à ma façon de me tenir, à mon apparence, à tout ce qui pouvait composer ma vie. Mais aujourd’hui, il aurait été faux de dire que je ne me sentais pas apaisée à son contact. Sa patience, son calme réussissait à calmer mes nerfs peut être trop souvent à vif quoique masqué par ce vernis de neutralité désagréable qu’il avait ainsi fendu bien trop rapidement pour mon bien.

Ma confiance peu rétablie, certes, mais apaisée par Matthew, ce fut un tout autre sujet qui vint alors sur le tapis. Un sujet que je maîtrisais parfaitement, tant pour être la directrice du Journal de Poudlard que pour faire partie de ce monde-là. Ainsi, j’hochai la tête, visiblement malgré tout satisfaite de ce que j’entendais.

- Hé bien. Tu es quand même au courant. Soufflai-je presqu’admirative de ses connaissances même sommaires de ce qu’il se passait chez les Sang Pur. Mais oui. Alors… M’installant plus confortablement, je me mis à réfléchir. Le Rowle gay, c’est Keith. Ça risque de ne pas passer d’ailleurs. L’homosexualité c’est pas… Enfin… C’est assez…

Comment lui dire que c’était quelque chose vu comme contre nature par pas mal de famille traditionnelle ? Mmh… Lui qui avait tout expérimenté, je craignais, j’admettais, de le froisser un peu, ainsi secouai-je la tête en reprenant sur une autre histoire.

- Sinon donc oui. Alix s’est mariée. Son frère l’a donné à Samael Rosier. Pour Yaxley… C’est un peu plus compliqué. Isabella est avec le deuxième Rowle, impossible de l’avoir loupé celle-là. Mais je suppose sans l’accord de son père. Corban et mon père sont… Amis. Très amis. Je ne vais pas te faire de dessin sur la personnalité et la façon de faire de Corban Yaxley donc. Alors quand il saura… Enfin… Tu as vu ce que ça pouvait donner et mon père a été… Je soupirai. Assez doux à vrai dire comparé à ce qu’il aurait pu faire. Alors laisser Bella sortir sans être fiancée ou mariée avec un homme… Je doute qu’il soit ravi. Enfin. De toutes façons, Corban Yaxley est encore à Azkaban. Je crois qu’il a fait une demande pour sortir. On verra la suite pour ça. Sinon… Mmh… Chez les Nott, rien à signaler pour le moment. Blake est toujours mère célibataire ce qui fait beaucoup jaser, et Christopher toujours aussi peu apprécié de tout le monde. Les Selwyn n’en peuvent plus de Nicholas, mais c’est habituel. Tu ne verras certainement pas Abadone Greengrass. Elle est toujours par maux et par vaux mais ils disent qu’elle fait pas mal de conférence sur je ne sais même pas quoi. Ils semblent souvent intéressés quand ils en parlent. Pour les Avery… Pas de nouvelles. Je demanderais à Alix si son frère s’est trouvé une femme. Etonnant qu’à son âge ça ne soit pas le cas vu qu’il est héritier. On a aussi les Carrow… Mmh… Sebastian il me semble qu’il est toujours célibataire ce qui est tout aussi étonnant que Marcus et sa sœur… Je n’ai rien entendu pour le moment. Ensuite… Les Flint… Je n’ai pas non plus grand-chose à dire là-dessus à vrai dire… Enfin… Les Gaunt. La plus jeune est encore protégée, l’aînée s’est fiancée avec le meilleur parti du monde sorcier, plaisantai-je en venant quémander un baiser. Et… Enfin j’ai eu quelques vents sur des négociations pour Thomas. Je n’en sais pas plus, mais je suppose qu’il a une idée en tête. J’espère juste… Enfin… Que c’est pas pour Emily mais bien pour lui, quoique je ne suis pas convaincue qu’il trouve une femme pour le supporter.

Me stoppant, je me mis soudain à rire, secouant la tête. Ça faisait peut-être un peu trop d’informations d’un coup, je l’admettais. Et j’étais certainement trop à l’aise sur ce sujet pour faire comme si je ne m’y intéressais pas. Il fallait admettre que savoir toutes ces choses permettaient d’être une parfaite petite femme, sans nul doute : je pouvais ainsi discuter avec les femmes et échanger avec les hommes ; les premières sur notre rôle à toute, les seconds sur les alliances à venir.
Le pire dans tout ça ? Je connaissais leur nom, leurs liens, mais certains visages ne me disaient rien, comme celui du propre mari de ma meilleure amie. Un grand brun, donc… Pas vieux ? Ho. Marcus n’avait donc pas été aussi horrible que ça.

Dans tous les cas, Matthew ne serait pas seul. Amara nous aiderait, j’en étais convaincue, Alix serait là aussi, son frère tout autant même si les contacts que je pouvais avoir avec était limités et même mon propre frère pourrait servir, un tant soit peu, de support. Arquant un sourcil, j’esquissai un léger sourire en soupirant.

- Tu as le temps. Lui intimai-je. Tout ton temps. Et je doute qu’on échappe au repas de famille toute notre vie de toutes les façons. Tu auras l’occasion de le voir bien trop souvent pour trouver un moment pour briser la glace.

Ne serait-ce que lorsque Thomas prendrait véritablement la tête de notre famille. Enfin. Nous n’en étions pas encore là. Heureusement. Ou… Malheureusement ? Je ne savais même plus quoi penser. Mon frère m’avait dit de ne pas m’inquiéter pour lui. Certes. Mais malgré tout… Je n’étais pas assez innocente ou naïve pour ne pas me poser des questions, pour ne pas craindre pour sa vie et sa liberté. Mais tant qu’il était là… Au moins pourrions-nous « compter » sur lui dans certains moments, cela ne changeait pas la donne.

Et je serais là, moi aussi. Je le soutiendrais, je l’aiderais par ce don que j’avais travaillé toutes ces années afin de lui faciliter la tâche, de l’intégrer bien plus facilement au sein des Sangs Purs. J’étais convaincue qu’il saurait s’y faire une place, sa place, même hypocrite. Il en était capable.

- Admet que c’est uniquement pour ça que tu as accepté de signer le contrat de fiançailles et que j’ai eu le droit à la meilleure demande en mariage que j’aurais pu imaginer. Plaisantai-je dans un sourire du coin des lèvres.

J’aimais être avec lui. J’arrivais à plaisanter, à me détendre, à être celle que je n’avais jamais vraiment été jusque-là, libre et libérée, indépendante autant dans ses gestes que dans sa façon de penser et n’ayant pas peur de devoir rendre le moindre compte. Pas entièrement tout du moins. Pour autant, si Matthew m’apportait cela, je n’en oublierais jamais le rôle de sang pur. Et ainsi lui demandai-je ce qu’il désirait. Je serais ce qu’il voudrait. Mais seulement en public. D’ailleurs gratifiai-je sa demande d’un hochement de tête.

- Comme si je pouvais être obéissante au lit. Soufflai-je contre ses lèvres avant de me redresser. Je te promets de ne le faire qu’en façade. Et ce même si je sais que je t’agace sûrement souvent à ne pas être comme toutes les femmes que tu as côtoyées.

J’avais encore et sûrement aurais-je toujours des relans d’éducation stricte et peu glorieuse pour la femme. Je craignais certaine chose. Je n’avais pas confiance en d’autres. J’hésitais encore sur la place à prendre, sur les conversations à tenir en compagnie de sa famille, sur mon rôle et sur l’avenir que je pouvais lui offrir de moi-même. Mais malgré tout cela, j’avais changé. J’avais évolué grâce à lui. Peut être pas réellement dans ma façon de penser, certes, mais dans ma vie, dans mon comportement, j’avais appris à me faire confiance. J’avais appris que j’avais droit d’avoir de la valeur et pas seulement à ses yeux, mais aussi aux miens. Je n’étais pas qu’un nom. J’étais moi. Heather Gaunt. Sorcière et fiancée de celui qui m’avait apporté sûrement bien plus qu’il ne l’imaginait.

- Oh… Alors je vais devoir apprendre à me retenir de rire sous tes insultes. Soufflai-je en souriant, sereinement. Mais soit. Je sais m’adapter. J’ai toujours eu une très bonne façon de converser avec ces messieurs. Les alliances ne m’échappent jamais, ni leur but d’ailleurs.

Plus qu’une plaisanterie, c’était une absolue vérité. Une habitude, même, devrais-je dire. Je n’avais pas été élevée à faire prospérer un nom de famille, certes, mais l’on m’avait donné bien assez de base pour être cultivée et donc appréciée… Au sens Pur du terme. Evidemment.

Arquant un sourcil à la mention de son plus jeune frère, je fronçai doucement ces derniers en réfléchissant.

- Il a déjà participé à ce genre de soirée ? M’enquis-je alors. Si… Enfin… Je ne sais pas si c’est une bonne idée… Je sais que tes parents n’ont jamais voulu vous mettre dans ces histoires mais… J’hésitais sérieusement mais… Enfin… Pourquoi pas après tout. S’ils sont d’accord… Et si on briefe ton frère avant pour être sûrs que tout se passe bien… On pourrait peut-être l’emmener avec nous ? Au moins chez Amara du moins. Ça sera peut être l’endroit le plus « facile ». Et tu aurais au moins une personne de totale confiance avec toi.

Il avait baillé ? J’étais si ennuyeuse que ça ? Bon… J’admettais que cela pouvait paraître rébarbatif et particulièrement pénible. Il s’agissait là réellement d’histoires sans réelles fins, sans but précis, des on dits, des racontars, des cancans sans grand intérêt pour quiconque n’en percevait pas l’objectif. D’ailleurs sa réaction me fit esquisser un sourire… Et même rire, soudainement.

- Oh Merlin… Je ne vais plus réussir à regarder Marcus sans penser à ça ! M’exclamai-je entre deux éclats de rire.

Cela pouvait paraître insultant pour toute personne homosexuelle, certes, mais Marcus et Sebastian gay et ensemble… Non. Improbable. Impossible. Mais tellement drôle à imaginer. Tout le monde se retournerait dans sa tombe !
Pour autant, ce n’était pas le tout que de rire, je me devais de lui expliquer certaines choses…

- Tu sais… Si on ne laisse pas les gens tranquilles, c’est pour une bonne raison. Soufflai-je doucement en me calmant, essuyant une larme de rire qui s’était échappée de mon œil. Enfin… je suppose qu’elle ne va pas être réellement suffisante pour toi mais tu vas comprendre… Regarde… Alix a été donnée à Samael. Cela créé une alliance Rosier – Avery. De mémoire, les Rosier sont riches, très riches. On peut donc supposés que l’un apporte une aide financière et l’autre apporte un ventre et donc des héritiers et un nom perpétué. Dans mon cas… J’ai été vendu aux Selwyn car ils n’ont qu’un fils, ils ont besoin d’héritiers et d’argent. Mon père, lui, avait besoin de réputation… Pour ce qui est de Bella… Deux solutions sont possibles, il la mariera à Rowle, mais dans ce cas il s’assoit sur sa réputation, ou… En fait je ne vois que cette possibilité qui ne va pas lui plaire… Secouant la tête, je repris sur ma lancée. Enfin tu comprends ? Il ne s’agit pas uniquement de liens sans fondement, sans queue ni tête. Si… Si Marcus et Sebastian finissaient ensemble, cela créerait un gros problème dans les familles puisqu’elles n'auraient pas d’héritiers. C’est le même problème avec Keith Rowle en quelque sorte.

Ça, et le fait que de toutes les manières ce n’était pas admis mais… Nous allions passer sur ce sujet-là, n’est-ce pas ?

- Maîtriser les liens permet de maîtriser le rôle de chaque famille et leur position tout autant que leur faiblesse.

Cela pouvait paraître stratégique et même calculé mais… Si ma mère m’avait appris une chose, c’était bien cela : savoir où était ma place par rapport à celle des autres. Cela permettait de ne jamais dire ce qu’il ne fallait pas, d’adapter son discours et son comportement et surtout de connaître les possibilités de mariage qui nous serait, en tant que femme, imposés. Or, si j’étais désormais protéger de ce dernier fait, l’adaptation allait rester notre principale force. Mieux valait, donc, en user.

- Je sais que ça demande pas mal de connaissance des membres des familles, mais ça vient assez vite. Ou alors l’habitude parle… Enfin… De toutes façons je serais là et je les connais pratiquement tous. Soufflai-je comme pour le rassurer.

Et nous aurions des alliés, mon frère compris. Frère avec qui Matt désirait briser la glace. Pourquoi pas. Mais il avait le temps et nous aurions certainement à partager bien des tablées avec lui pour ce faire. Hochant la tête à sa remarque, je baissai un instant les yeux.

- Oui… Murmurai-je. Tu… Tu te souviens quand on a échangé en fourchelangue lui et moi ? M’enquis-je rhétoriquement. Ce n’était pas pour rien. Enfin… Si, à cet instant, ça l’était mais… Difficile d’admettre que je m’étais inquiétée pour celui qui le forçait à m’épouser… Pourtant, l’honnêteté devait être de mise entre nous alors… J’ai eu peur pour Thomas. Finis-je par souffler. Enfin… Si mon père venait à se relever, tu n’imagines pas ce qu’il ferait à Thomas en apprenant nos fiançailles et la fin du contrat avec les Selwyn. Relavant les yeux vers lui, je fronçai les sourcils pour être au clair sur ce point. Ne pense pas qu’il se retiendrait d’utiliser le sortilège Doloris sur mon frère. C’est presqu’une habitude… Alors… Je lui ai demandé de faire attention à lui. Que père serait furieux. Et il m’a répondu que… Que je n’avais pas à m’inquiéter, qu’il savait ce qu’il faisait et surtout que… Père ne s’en prendrait plus jamais à nous.

Inutile d’aller plus loin. Il était évident que cela voulait dire ce que nous pensions tous les deux. Et si Matt et moi nous doutions déjà de la finalité, c’était ains particulièrement clair désormais. Mon Père ne participerait jamais à ces repas familiaux et Thomas serait libre. Aussi libre qu’il avait pu créer ce contrat de toute pièce avec le père de Matthew.
Au moins pus-je de nouveau plaisanter à ce sujet, allégeant l’ambiance et piquant le sorcier sur la raison de ces fiançailles : mon don. Il avait trouvé la bonne personne à enlever, pour sûr. Enfin… Etais-je réellement la « bonne » personne ? Très différente de lui, je ressentais encore trop souvent ce que je voyais comme de l’agacement face à mes difficultés à m’adapter à sa liberté. Un agacement qui n’en était, d’après lui, pas.

- Alors quoi ? Soufflai-je doucement. Parce que je comprendrais que ce soit pénible de devoir te répéter ou même devoir me pousser à faire les choses pour la simple raison que je n’en ai pas l’habitude. Voulus-je le rassurer.

Mais il était vrai que dans mon milieu, il allait être celui dont le masque allait être le plus gros. C’était une seconde nature, chez moi, mais chez lui… Le changement allait devoir être marqué… Ou presque. Plissant les yeux alors qu’il me menaçait de blagues, je pris un air suspicieux.

- Tu n’oserais pas… Le mis-je presqu’au défi.

A vrai dire, pour dire toute la vérité, cela me serait utile. Ses insultes autant que ses blagues me rappelleraient ce qu’était désormais ma réalité, sa réalité. Elles m’empêcheraient de m’y perdre, de me noyer dans ce qui avait été ma vie jusque-là alors… Qu’il fasse ! Surtout si sa confiance était telle qu’il me l’indiquait.

Pour autant, ma proposition hésitante, elle, se vit être refusée. Et je le comprenais. Zackary était bien différent de ses frères et sœur. Je n’avais eu que trop peu de difficulté à remarquer que sa façon de penser se confondait facilement avec la mienne. Ainsi hochai-je la tête, peu désireuse de voir Madame Gimhae tuer son fils ou m’en vouloir plus qu’elle ne devait déjà le faire pour avoir forcer Matt à se fiancer si jeune et à un monde qu’elle leur avait évité jusque-là…

- Je comprends. C’était une idée idiote. Admis-je en secouant la tête. Et ta mère me fait déjà bien assez « peur » comme ça.

Plaisanterie ? Mmh… Peut-être… Ou peut-être pas…

- Tu es dur avec ton frère. Soufflai-je dans un rire tout en comprenant la raison de ce qualificatif, connaissant bien trop les rumeurs et les réputations de Poudlard pour cela.

Il n’avait néanmoins pas tort. Marcus était particulièrement appréciable à l’œil. Et si je ne l’admettais que pour taquiner Alix sur son frère, je ne pouvais ainsi que lui donner raison. Et cela même si je ne pourrais désormais plus le regarder sans l’imaginer embrasser Sebastian Carrow… Merlin… Que cela allait être difficile désormais. Une chance que je n’aie plus de cours avec lui. Je n’aurais jamais pu garder mon sérieux aussi longtemps.
Pour autant, cette idée affreusement drôle en avait soulevé d’autres. Devait-on laisser les gens tranquilles ? Oui. La réponse pouvait paraître évidente. Mais pas réellement. Pas dans le monde sang-pur. Et si mon explication ne convainquit pas Matt, je secouai doucement la tête de gauche à droite.

- Dans les faits, je suis d’accord. Enfin… Je serais même d’accord pour que tout le monde fasse ce qu’il désire, à vrai dire. Soufflai-je, trop consciente d’avoir souffert de ce carquois dans lequel j’étais restée enfermée. Mais dans ce monde-là… Deux hommes ne peuvent pas avoir d’enfant, il faut une mère porteuse. Il faudra donc un ovule annexe. Mais lequel ? L’enfant sera de l’un ou de l’autre. Même reconnu par les deux, dans les faits, ça ne sera pas le cas car seul l’un sera biologiquement le père. Et tu n'imagines pas combien les bâtards peuvent poser des problèmes…

Nous l’avions vu plus souvent qu’à notre tour, des enfants nés hors mariages, des garçons héritiers par leur nom mais reniés dès que l’infidélité de la mère était dévoilée, brisant une lignée entière.

- Je sais que ça doit te sembler particulièrement… Dépassé.

Pire, il pensait que les sang purs étaient voués à disparaître par l’insoumission des nouvelles générations. Mais… Etions-nous réellement aussi insoumis que cela ? J’en douterais presque, à vrai dire…

- Outre le fait que nous ne sommes qu’une poignée sur toutes les familles… Regarde dans notre cas… Nous avons malgré tout fait ce qu’on attendait de nous.

Preuve en était, nous étions fiancés après seulement un peu plus de deux mois de relation stable. Alors… Était-ce une façon de se rebeller ? Pas réellement. Pas à mon sens.

- Pour ce qui est de Rowle… Il risque d’être renié, de tout perdre. Soufflai-je. C’est une façon de se débarrasser des éléments perturbateurs. Alors si certaines familles risquent de s’éteindre… Trop de gens suivent encore la route. Tu n’as qu’à observer mon frère pour le voir. Ou même ma sœur quand le moment sera venu.

Car même si cela me faisait mal de l’admettre, je ne pourrais rien pour elle, rien que je ne puisse imaginer à cet instant. Elle était aux mains de Thomas… Il en ferait ce qu’il désirait, pour le bien des Gaunt, évidemment.
Ainsi, si Matthew concédait à participer à ce monde, à y faire ses « premiers » pas, en ma compagnie, ce dernier refusait de rentrer dans le jeu du harcèlement et du dénigrement.

- Personne ne te le demandera. Ils auront beau avoir des sourires de façades, tous savent d’où tu viens. Lui répondis-je alors. Le but sera alors de t’amener à penser comme eux un jour. Pas de te braquer.

C’était un jeu évident, un chat-souris auquel Matt s’exposait en rentrant dans ce monde. Un jeu dont il sortirait vainqueur, je n’avais pas le moindre doute à ce sujet. Il s’adapterait, comme il s’adaptait à ce qui composait ma famille et notamment mon frère avec qui il voulait briser la glace, faire des efforts. Et des efforts… Je devais en faire aussi, notamment dans un souci d’honnêteté claire. Ainsi lui avouai-je les raisons du fourchelangue lors des négociations, mon inquiétude, pourtant mal placée au vu de notre position, envers mon frère. Et… Il n’en fut pas surpris. Moi, par contre, je le fus, c’était un fait.

- Tu n’es même pas étonné. Soufflai-je. C’était si prévisible que ça ?

Mon père mourrait. Nous en serions débarrassé définitivement et… j’admettais attendre ce moment avec hâte. Bien sûr nous faudrait-il jouer l’affliction, la tristesse infinie de la perte de cet « être cher ». Mais cela ne m’empêcherait certainement pas de proposer à mon frère d’ouvrir le champagne pour le remercier. Car tout était de son fait.

Tout, sauf mon éducation qui revint alors sur la table, cet agacement que je pensais lui faire vivre alors qu’il la transformait en frustration. Esquissant un léger sourire, je baissai la tête, secouant cette dernière alors qu’un sourire tendre se dessinait sur mes lèvres.

- Tu n’imagines pas tout ce que tu as réussi à m’apprendre en aussi peu de temps. Lui avouai-je à mi-voix. Tout ce qui te paraît évident de l’est pas forcément pour moi. Même… Même parler à ton meilleur ami n’était pas une évidence.

C’était le fils d’un loup garou… Autant dire que cela n’était pas naturel, bien loin de là, pour moi. Mais cela viendrait. Je finirais par avoir confiance en moi, en l’avenir. Je n’avais pas vraiment de doutes là-dessus. Je me connaissais, je connaissais mes capacités d’adaptation. Et même si certaines choses m’étaient encore trop difficile, trop différentes pour que je les embrasse avec naturel, cela finirait par venir. D’autant plus parce qu’il était là, avec moi, dans toutes les occasions, même celles de me déstabiliser lors de ces soirées si sérieuses comme il pu répondre à mon « défi ».

- J’espérais que mon futur mari veuille préserver l’esprit malmené de sa femme mais soit. Plaisantai-je. Je ne rirais pas. Ou… Tout bas.

Autant ne pas prévaloir de mes forces. S’il me donnait une nouvelle image comme celle de Marcus et Sebastian… Je ne donnais que trop peu cher de mes pauvres nerfs.

Pourtant, là où la conversation avait pris un aspect plus léger, cette dernière redevint sérieuse alors que la question Zackary était approchée. Il ne viendrait pas. Soit. Je m’en doutais. Et je me doutais que leur mère ne serait pas en accord avec cette idée. Or, je désirais tout sauf la mettre en colère, admettant même qu’elle avait un petit côté… Effrayant. Un côté que semblait ne pas « comprendre » son fils, me faisant alors rire.

- Naine ? Je suis sûre qu’elle serait ravie de savoir que tu la décris comme ça. Plaisantai-je. Mais tu sais très bien ce que je veux dire. Je te détourne déjà de ton éducation en te forçant à entrer dans mon monde… J’aimerais au moins que mes beaux-parents m’apprécient un minimum. Soufflai-je.

Je ne savais pas réellement comment m’y prendre, ayant toujours cette impression que je n’en ferais jamais assez. Pas parce qu’ils étaient mauvais, bien loin de là, mais je n’étais pas dans mon éléments et, perdue, je ne savais trop quoi faire pour « gagner des points ».

- Ta famille, repris-je, est vraiment comme une sorte d’idéal pour moi. Admis-je. Je n’ai jamais connu un fonctionnement comme ça, même chez mes amies. Vous avez un fonctionnement que j’admire et je ne veux pas tout briser en arrivant. Je veux essayer de m’intégrer, comme si c’était normal. Je veux juste être la belle-fille parfaite, celle qu’il te fallait.

Ce n’était pas le cas. Il aurait certainement pu trouver plus facile, plus simple mais… Maintenant que le « mal » était fait, aussi doux puisse-t-il être, c’était à moi de faire les efforts pour que le reste soit plus simple, comme ce qu’il aurait dû être, à vrai dire.

Il était hors de question que nos enfants soient obligés de se marier. Bien évidemment. Nous avions souffert de cette obligation, obligé de nous unir trop tôt et par un contrat. Alors réitérer la chose avec nos propres enfants ? L’idée me paraissait grotesque. Mais sûrement serais-je une résistante parmi tant d’autres familles, du moins était-ce là ma pensée. Une pensée que ne partageait pas Matt, évidemment.

- Je suppose que ça dépendra du degré d’hypocrisie des parents mais crois-moi que les miens n’auraient jamais renié leurs « valeurs ». Admis-je comme pour donner l’exemple d’une famille trop ancrée dans ses croyances.

Pour autant, il n’avait pas tort. Les Yaxley n’avaient pas de garçons, le nom finirait par s’éteigne inéluctablement si Amara ne donnait pas de fils à Corban, et il était inutile d’être devin pour savoir que l’homme devait l’espérer malgré son incarcération.

- Aucune famille n’acceptera ça. Soufflai-je. Les Gimhae sont une lourde exception, crois-moi. Vous êtes des sortes d’extraterrestres pour la plupart des familles de Sang Pur.

Ne pas avoir de garçon, néanmoins, me semblait sonner comme un échec à celle que je devais être. Pour autant… Je savais qu’il n’en était rien, je savais que je devais me détacher de cette pensée exclusivement patriarcale dans lequel un garçon était tout et une fille rien. Ce n’était pas celle que nous aurions, ni lui ni moi. Mais… Sans que je ne veuille l’admettre à voix haute, il me fallait m’avouer que je désirais un garçon. C’était comme inscrit dans mes gênes et surtout dans l’éducation qui m’avait été donnée. Cela devait être et cela serait. Du moins je l’espérais.

Dans tous les cas, tous les sangs purs que nous pourrions croiser à chaque soirée savait d’où Matthew venait, de quelle famille il était issu et il me semblait évident qu’aucun d’entre eux n’oserait s’attaquer frontalement à lui. Mais sûrement essaieraient-ils de le faire pencher d’un côté ou de l’autre de la balance et de préférence de leur côté. J’avais pour autant toute confiance en mon fiancé pour éviter les pièges et pour savoir où placer ses pions. Esquissant un sourire amusé à sa question, je me mis à réfléchir.

- Je suppose que les familles en question tueraient leurs enfants responsables et qu’ils te haïraient tous pour les mettre devant ce qu’ils considèrent être comme des « ratés » ? Soufflai-je avec amusement.

Mais mieux valait ne pas jouer à ce jeu. Pas maintenant. Peut être plus tard, certes. Mais nous devions encore nous faire une place en tant que mari et femme, futur tout du moins. Cela n’allait pas être évident, mais c’était bien là notre première étape.

Une étape qui suivrait certainement l’enterrement de mon père dont je semblais être la seule surprise. L’écoutant alors énoncer les indices qu’avaient laissé mon frère, je soufflai doucement.

- Je suis visiblement trop naïve. Admis-je. Au moins, nous serons tous libérés de ce poids-là...

Ma famille, bien sûr, mais aussi nous, Matthew et moi, car il était évident que Bill Gaunt n’aurait jamais laissé tout cela en suspens, surtout lorsqu’il s’agissait d’une décision contraire à sa volonté et Thomas s’étant, effectivement, assuré que rien ne pourrait casser ce contrat… Merlin seul aurait pu imaginer ce qu’il lui aurait fait subir pour cela.

Pour le contrat, oui, mais aussi parce que je changeais, que je m’éloignais de l’archétype féminin de la gentille petite Sang Pur que je pouvais être. Je n’étais plus une plante verte aux côtés de Matt. J’existais. Je vivais entièrement. Et si cela prenait du temps, si je reculais encore de temps en temps pour mieux avancer par la suite, mon père ne l’aurait pas, ou difficilement, accepté et le temps, sûrement, de changement se serait allongé. Pourtant, Matt ne portait aucune considération à cette lenteur d’adaptation. Au contraire, il m’y encourageait, malgré mes surplaces, malgré mes doutes et mes peurs. Et cela avait conduit à me permettre de discuter avec son meilleur ami. Une chose qui, sans doute, n’aurait pas été possible quelques mois auparavant.

- Mmh… Grimaçai-je malgré tout, étant plutôt au fait de ce qu’il risquait de se passer avec ladite vélane. Je suppose qu’il vaut mieux que je la laisse aller vers moi… Soufflai-je à mi-voix. Dans tous les cas…

Dans tous les cas, cela risquait de « mal » se passer. Oh. Je ferais des efforts, c’était un fait certain, et cela malgré son hybridation qui me semblait contre nature. Mais elle était une amie de Matt et le bonheur de cet homme était plus important que mes jugements propres. Alors effort je ferais. Mais elle, le ferait-elle comme Ted avait pu le faire ? J’en doutais. Fortement. Et dans ce cas… Il était tout à fait hors de question, malgré tout, que je me laisse faire.

Le sorcier réussit malgré tout à me faire oublier mes doutes quant à cette rencontre qui allait forcément venir bien trop rapidement à mon goût en me faisant rire. Il tenterait donc de me déstabiliser lors de ces soirées ô combien ennuyante ? Soit. Je lui prouverais qu’une Gaunt est maîtresse dans l’art du self control.

- Fais attention à ce que je ne me venge pas. Tu ne sais pas de quoi je suis capable.

Moi non plus, à vrai dire. Et je n’avais encore rien en tête, d’ailleurs, mais cela ne saurait tarder, j’allais trouver quelque chose, je me faisais confiance pour cela.
Pour autant, malgré cette apparence d’amusement lorsque nous parlions de ces soirées, Matt refusa la présence de son frère. Je pouvais le comprendre, bien évidemment. D’autant que je n’avais aucunement envie de me mettre sa mère à dos, bien au contraire, déjà que je lui avais pris un fils, le détournant de ce qu’elle avait voulu pour lui. Un détournement que n’imaginait pourtant pas l’intéressé qui vint me faire sourire alors, légèrement plus tendrement.

- Certes. Soufflai-je. Mais une main forcée ne vaut pas ta présence chez les Sangs-Purs. Et ça, c’est un détournement pur et dur. Même si je sais que tu ne te laisseras pas embobiner.

A nouveau, j’avais confiance en lui, indéniablement. Une confiance que je plaçais aussi en sa famille qui me semblait être un idéal que je n’avais, jusque-là, jamais connu. J’aimais leur fonctionnement, j’aimais ces liens qui existaient entre eux et qui semblaient indestructibles là où une poussière pouvait briser le moindre lien familial que j’avais personnellement.

Esquissant un léger sourire au fait que je ne devais pas être parfaite pour m’intégrer, je soufflai doucement.

- Alors je serais imparfaitement parfaite. M’amusai-je.

Le problème restait entier : comment faire pour me faire réellement apprécier et intégrer à sa famille ? Le pouvais-je au moins ? En avais-je le droit ? Ou devais-je rester à l’écart comme une pièce rapportée sans autre valeur que l’amour de leur fils ? Je ne savais pas réellement comment poser ces questions sans passer pour une idiote. Mais il allait bien falloir un jour… En attendant, Matt me proposa de demander à sa mère de passer un peu de temps avec elle… Où ? Comment ? Quand ? Merlin… Cela faisait beaucoup.

- Et… Tu pourrais peut-être m’aider. Demandai-je. Me dire… Je ne sais pas. Ce qu’elle aime ? Où elle aime se promener ? Ou être invitée ? En salon de thé ? En pub peut être ? Dans un jardin public où nous pourrons discuter ? Elle aime discuter d’ailleurs ? Et est-ce que chez vous cela se fait d’apporter un cadeau de remerciement ?

Ouch… Cela faisait peut être beaucoup d’un coup… Mais au moins tout était posé.

- Les Sangs purs sont cohérents malgré tous leurs défauts. Soufflai-je dans une semi plaisanterie.

Une cohérence mal trouvée au vu du déchirement que cela pouvait créer au sein même des familles, mais une cohérence malgré tout qui les pousserait à haïr toute personne voulant mettre à mal leur fonctionnement, que cette personne soit étrangère ou leur propre enfant. Evidemment.

- Tu auras toute les occasion de les mettre devant leurs paradoxes quand tu te sentiras « intégré ». Lui soufflai-je dans un léger sourire.

Je ne doutais pas de la capacité de Matt à dire ce qu’il pensait à ce monde qui lui était si désagréable. Et s’il allait nous falloir un temps d’adaptation, je savais que nous trouverions notre place. J’avais confiance en lui, en nous. Comme j’avais confiance en Thomas pour faire ce qu’il avait dit et nous « protéger » de notre père. Une chose que je n’avais pas réellement compris lorsque les premières allusions avaient été prononcées. Une chose qui me sautait désormais aux yeux.

- Je suis potionniste. Je pense toujours à comment se produisent les choses. Soulignai-je dans une fausse vérité.

Je craignais plutôt la vérité et surtout ses possibles conséquences. Mais il m’était impossible d’aller à l’encontre de ce qui serait. Je n’en avais, d’ailleurs, aucune envie. Cela serait comme un retour en arrière, comme risquer de me renchainer à ce dont je me détachais. J’avais encore beaucoup de choses à apprendre, à comprendre te à admettre. Sûrement certaines me seraient impossibles, ne pouvant ni de désirant changer ce qui faisait de moi ce que j’étais. Mais déjà avais-je fait des pas solides en direction d’une pensée plus élargies, plus… Tolérante. Au moins en surface. Preuve en était, j’allais finir par me frotter à « l’épreuve de la vélane » plus connue sous le nom de Victoire Weasley, une femme que j’avais dénigré, bien plus que Ted Lupin ne l’avait été, à vrai dire. Et c’était bien pour cela que je craignais quelque peu cette rencontre, n’ayant que peu d’espoir quant à sa finalité, d’autant plus lorsque Matt appuya sur ce que je l’avais obligé à faire. Grimaçant, je fronçai les sourcils.

- Désolée… Soufflai-je.

J’avais été égoïste, bien sûr, en lui demandant de ne rien dire, de se cacher. Evidemment, cela n’était pas pour rien ni même un réel caprice puisque nous avions finalement subi les conséquences de notre relations. Mais cela n’excusait en rien ce qu’il avait été obligé à faire pour moi, pour nous. Au contraire. Et il était ainsi d’autant plus évident que Victoire ne me le pardonnerait pas aisément si l’on y ajoutait nos fiançailles forcées par ma famille.

Enfin… Il en serait ce qu’il devrait être. Mieux valait ne pas y réfléchir maintenant. Le temps viendrait où je devrais m’y confronter. Aujourd’hui, c’était sur nous que nous devions nous concentrer, et cela passait par l’équipe que nous allions constituer dans le monde des Sangs Purs. Une équipe soudée malgré toutes les tentatives qu’il pourrait avoir pour me déstabiliser. Lui rappelant mes « capacités » de vengeance, je pris un air faussement outré avant de rire à mon tour.

- Comment oses-tu parler de mes petits poings de la sorte ? Le fustigeai-je. Je ne suis peut-être pas la plus forte, mais je soulève assez de chaudron pour pouvoir m’en servir !

Le savoir était néanmoins une chose, m’en servir réellement en était une toute autre qui n’aurait jamais lieu, bien sûr. Jamais je ne me battrais contre Matthew. Nous étions une équipe et je ne ferais que supporter ses blagues lors de ces soirées qui, sûrement, en mériterait bien, tout comme je supporterais chacune de ses décisions comme celle de ne pas faire venir son frère.
Ce n’était pas de mon ressort, au contraire, il s’agissait là d’une simple idée visiblement mauvaise. Je pouvais le contraire. Zachary était encore influençable là où son aîné ne l’était plus et j’avais bien assez fait de dégât au sein d’une famille libérée du carquois de la pureté du sang pour aggraver de nouveau mon cas, quand bien même Matt venait à réfuter l’idée que je l’avais détourné de l’éducation de ses parents. Quand bien même cela n’était pas le cas, je ne voulais pas m’imposer, pas davantage. Je voulais m’intégrer, me fondre dans ce qu’était sa famille et non pas les changer et si je ne devais pas être parfaite pour cela, alors je ne le serais pas, ou « parfaitement imparfaite ». Souriant à son baiser, je soufflai doucement.

- Et c’est réciproque. Soulignai-je prenant possession de ses lèvres dans une tendresse qu’il était le seul à me faire connaître.

Mais pour être tout à fait sereine au sein de cette famille, c’est de sa mère dont j’allais devoir me rapprocher. Comment ? Là était toute la question. Une question qui se divisa en mille autres que je lui déroulais alors dans l’espoir d’avoir un peu d’aide qu’il vint alors m’accorder.
Esquissant un sourire, je fermai les yeux quelques instants au contact de sa main sur ma joue. Il était évident que je l’aimais, que si nos fiançailles avaient été poussées par le devoir et surtout pour pouvoir rester ensemble, elles ne seraient pas seulement une apparence.

- Je doute qu’on puisse faire plus responsable que toi. Murmurai-je alors en rouvrant les yeux.

Il pensait à tout, à l’avenir, au sien comme au mien ou au notre, lié. Il semblait savoir quoi faire, comment le faire et pour cela je l’admirais. Mais cela ne me suffirait pas. Je voulais faire plaisir à Mme Gimhae. Je voulais lui prouver que je pouvais être une femme digne de son fils. Ainsi notai-je les idées de Matthew fronçant quelques peu les sourcils.

- Il me faudra des adresses. Admis-je en grimaçant. J’admet que je ne suis pas réellement une habituée des voyages. Je ne connais strictement rien à l’Asie alors n’imagine même pas que je puisse connaître le moindre temple.

Mon père ne m’avait jamais permis de voyager hormis lors de quelques très rares occasions en compagnie d’Alix dans des endroits bien spécifiques. Ma première venue en Asie avait donc été le jour du Nouvel An…. Une méconnaissance qui allait me porter préjudice si je désirais donc faire plaisir à celle qui allait devenir ma belle-mère.
Secouant négativement la tête, je lui indiquais muettement qu’effectivement, je savais ce que je n’avais pas à dire. Je savais que certaines de mes convictions profondes ne pourraient jamais passer dans sa famille et qu’il était certainement le seul à pouvoir les accepter sans chercher à en débattre ou me juger. C’était, d’ailleurs, bien cela qui m’avait poussé jusqu’à lui à force de discussion.

- J’ai été élevée à savoir quoi dire et quand le dire. Il n’y a pas trop de risque à ça.

Je savais aussi bien faire la discussion qu’être aussi utile qu’une plante verte en pot. C’était, au moins, un avantage pour plaire même s’il était évident que l’authenticité devrait être de rigueur avec la mère de famille. C’était, d’ailleurs paradoxalement, cela qui m’effrayait le plus. J’arrivais, aujourd’hui, à être authentique et sincère avec Matt, il me poussait à l’être et je n’avais même jamais eu de problèmes pour cela tant il était… Lui. Mais avec les autres ? Cela restait compliqué. Indéniablement.

- Et est-ce que son fils est heureux, alors ? Demandai-je dans un léger sourire.

C’était, après tout, ce qui m’importait le plus. Je pourrais vouloir plaire à la terre entière, je pourrais vouloir m’intégrer dans tous les cercles du monde, rien ne vaudrait jamais son bonheur. Ce n’était pas par devoir que j’avais accepté de l’épouser aujourd’hui, mais bien parce que je l’aimais et que je le désirais. Rien d’autre.

- Je note donc… L’inviter à visiter une exposition ou un temple en Asie, puis à manger japonais et savoir me taire quand il le faut. Bien… ça ne me semble pas si difficile après tout, ironisai-je alors que j’admettais être plus anxieuse qu’habituellement à cette idée. Merlin… Soufflai-je ainsi. Je ne pensais pas être aussi stressée de devoir faire ça.

Il faut dire que ce n’était pas une chose à laquelle j’avais été préparée. En temps normal, ma belle-mère aurait dû m’apprendre les habitudes de la famille de mon mari, elle m’aurait donné les clés pour faire de moi la parfaite hôtesse de maison et je n’aurais eu qu’à plaire en apparence. Ici, il s’agissait d’une famille plus profonde, plus sincère où les apparences ne me serviraient que trop peu.

Il n’avait effectivement pas tort. Je pouvais être beaucoup de choses dès lors que je le voulais. Une plante verte, une passionnée, une femme, une garce et même une amie lorsque j’étais en bonne compagnie… Je savais m’adapter, c’était là ce qui faisait ma principale force quand bien même le risque de se perdre dans chacun de mes personnage existe. Une chance que Matthew existe, à vrai dire. Il était un roc, une ancre sur laquelle je pouvais me raccrocher. C’était à travers ses yeux j’avais pu découvrir qui j’étais et qui je désirais être, que j’avais pu imaginer une vie pour moi, paradoxalement. C’était d’ailleurs bien pour cela que les efforts que je pouvais faire me semblaient bien peu importants face à ce qu’il avait fait pour moi jusque-là. Bien sûr, j’étais désolée de l’avoir fait mentir, de lui avoir fait cacher notre relation à la grande majorité de ses proches et cela quand bien même les autres n’avaient pas grande importance dans ses relations amoureuses. Ils restaient ses proches et le mensonge était tout sauf ce que je désirais pour lui surtout au vu de ce que cela avait conduit.

- Je suppose que je la diabolise… Soufflai-je alors pour toute réponse.

J’admettais que sa race n’aidait pas. J’avais ces abominations en horreur, je ne comprenais pas le fondement même de leur existence. Mais il me fallait mettre de l’eau dans mon vin, réfléchir comme une sang-mêlé ou, tout du moins, à défaut, comme une femme tolérante que je n’étais pas réellement. Je doutais de notre compréhension mutuelle, à elle comme à moi. Je doutais de notre capacité à nous entendre mais malgré cela, il y avait une chose dont je ne doutais certainement pas : Matthew n’aurait ni à se passer d’elle, ni à se passait de moi, tout du moins pour ce qui était de ma part. Que cela mène à une relation purement hypocrite avec la vélane ou une froideur mutuelle qui nous permettait simplement de nous supporter l’une et l’autre dans la même pièce, Matt nous garderait. Toutes les deux. C’était une évidence sur laquelle je ne revins, d’ailleurs, même pas. Il le savait déjà.

A la place, d’ailleurs, le sorcier préféra insulter mes pauvres petits poings, m’obligeant à une défense bien peu crédible je l’admettais alors que son ton se faisait plus doux, me mettant à frissonner à son contact alors qu’un sourire amusé étirait mes lèvres.

- C’est de la triche. Murmurai-je à sa suite en approchant mes lèvres des siennes. On parle de poings, pas de doigts. Parce que dans ce cas, je t’entraînerais dans ces autres réalités avec moi…

L’ambiance se refroidit néanmoins plus rapidement que prévu alors que le sujet Zack et sang-pur venait s’immiscer entre nous. Un sujet rapide sur lequel je n’insistai évidemment pas. Cela n’était pas de mon ressort, de mon avis. Je ne me battrais certainement pas pour une chose dont lui ou ses parents ne voulaient pas. Bien au contraire, je me rangerais à leur avis. Je n’étais pas là pour m’imposer, pas là pour les faire changer. C’était à moi de m’adapter et de comprendre leur fonctionnement et cela passait par me faire accepter, apprécier par celle qui deviendrait ma belle-mère. Demandant conseil à celui qui était le mieux placé pour répondre à mes questions, je pris note de tout ce qu’il pu me dire non sans lui faire remarquer que je ne l’imaginais que très difficilement irresponsable.

- Ca, pour vivre comme tu l’entends… M’amusai-je.

Pour en arriver où nous en étions, c’était un fait certain. Il se moquait des apparences, des on dit, des rumeurs et de toute autre chose gravitant autour de lui. Seuls les faits et la réalité sincère l’intéressait. Cela faisait de lui une personne intègre, véritable. La seule qui avait su apprendre à mon cœur à tenter de le devenir, au moins un minimum.

- En tout cas, je n’ai vu de toi que la partie responsable.

Il fallait dire qu’il avait été poussé à cela sans avoir d’autre choix que de s’adapter à un monde qui voulait de ses enfants des responsabilités souvent bien trop importante en comparaison de leur âge. Et il l’avait fait avec brio.

Pour autant, cela n’avait pas tout à fait répondu à ma question : comment faire plaisir à sa mère. Les temples, soit, mais où ? Je n’avais jamais réellement voyagé. Je ne connaissais pas le monde ou seulement ce que l’on pouvait en apprendre dans les manuels, il me faudrait plus que des lieux vagues, ce qu’accepta Matthew pour mon plus grand soulagement.

- Je ne veux pas m’imposer. Avais-je néanmoins précisé.

Bien sûr allais-je intégrer sa famille, devenir son épouse, porter son nom, mais était-ce une raison pour avoir des droits de transplanage ? Aussi ridicule que cela puisse paraître de l’extérieur, je craignais que cela ne fasse « trop », comme une goutte d’eau qui ferait déborder un vase déjà plein à raz-bord.
Mais au moins… Malgré tout cela, malgré mes craintes, mes doutes, ma réalité et mes valeurs ô combien différentes… Il était heureux. Et à vrai dire, c’était là ce qui comptait le plus pour moi. Tant que Matthew était heureux, tant que je l’étais tout autant, tout ne pourrait qu’aller bien. Nous y arriverions. Souriant à son contact, tendrement, je fis une tentative de récapitulatif, un « top trois » pour plaire à sa mère, somme toute, qui le fit rire. Evidemment.

- Ne plaisante pas, elle est plus grande que moi, ça serait tout à fait possible. Indiquai-je, appuyant volontairement sur ce non-sens.

Bien sûr ne me mangerait-elle pas. Elle n’avait d’ailleurs même pas émis, à ma connaissance, d’avis contre moi mais… Il n’y avait évidemment pas que ça. Comme toujours, nos deux mondes se confrontaient et je peinais à comprendre le sien à défaut de pouvoir suivre le mien.

- C’est juste que je ne sais pas comment agir. Admis-je finalement. Les belles mères ont pour habitude de donner les clés de la maison de leur fils à leur belle-fille, de leur expliquer les us et coutumes de leur famille, de s’assurer que la belle-fille sache être une bonne hôtesse et de rectifier le tir si ça n’est pas le cas. Là, je n’ai aucun « examen » à passer.

Et même si c’était complètement idiot, cela m’inquiétait. Pas de faux semblant. Pas d’apparence. Rien de justement inquiétant ou stressant. Juste… Deux personnes. Et, à vrai dire, à le dire à voix haute, cela me semblait encore plus invraisemblable que dans mes pensées, m’arrachant un rire presque désolé.

- Je te jure que je ne fais pas exprès de paraître étrange. Soufflai-je alors, malgré tout amusée par ce qui pouvait paraître pour une bêtise. N'imagine même pas dans quel état je serais le jour où nous devrons organiser une crémaillère ou je ne sais quoi.

Là encore, il n'y aurait ni compétition, ni besoin d'être parfaite en tout point et il était ainsi inutile de dire que cela allait me paniquer. Encore.

Nous nous diabolisions pour ce que nous étions donc fondamentalement, sans que l’une ou l’autre ne puissions lutter contre cela. Au moins m’avait-il appris que j’étais tout aussi diabolisée par son amie que je ne la diabolisais moi-même. Soit. La « rencontre » serait donc d’autant plus haute en couleur car si bien des qualificatifs pouvaient m’aller, je n’imaginais pas ce que cela pourrait donner en y ajoutant une pincée d’exagération seulement. Enfin… Nous verrions. Nous n’en étions pas encore là et cela ne saurait que trop peu tarder. D’autant que Matt préféra détourner toute mon attention, captant cette dernière par un geste qui me fit rire.

- Je joue sur les mots ? Soufflai-je en pinçant doucement sa taille. Et c’est toi qui dit ça ?

C’était Sainte Mangouste qui se moquait de la charité à ce niveau, mais je ne pouvais pas lui en vouloir… Il savait au moins comment me faire rire et me détendre quelque soit le sujet et même si notre conversation se ternit de nouveau lorsque nous en vînmes à son frère. Une discussion fugace, malgré tout, qui laissa place à ce qu’il était : un homme sérieux et ô combien indépendant.

- Alors je te remercie de l’avoir fait.

Pour dire toute la vérité, sûrement n’aurais-je pas moi-même creusé si je n’avais pas eu le répondant qui le caractérisait face à moi. Trop éloigné de mes valeurs, de mon éducation, je ne me serais jamais attardé sur son cas. C’était évident. Malheureux, peut-être, et pourtant, cela aurait pu être une réalité s’il n’avait pas été la personne que j’aimais. Une logique absolue, en un sens.
Arquant un sourcil à la mention de son premier cycle, je penchai la tête, curieuse. Il était vrai que nous avions chacun évolué, comme tout le monde, selon les années, selon nos expériences et notre entourage alors… Lui, d’où était-il parti ?

- Je serais curieuse de savoir comment tu étais en premier cycle. Lui soufflai-je. Pas un intello, ça j’en suis sûre, mais alors comment…

Il ne tenait qu’à lui de se décrire ou non. Je ne le forcerais pas à me dire ce qu’il n’avait pas envie de me dire. Quand bien même avait-il touché le point sensible de ma curiosité, je restais respectueuse de ses choix, autant que de son environnement et de son entourage alors que notre conversation se portait sur la possibilité d’avoir l’autorisation de transplaner dans sa maison familiale. Soit. Il proposerait donc. Je ne me battrais pas pour cela, à nouveau. Tant que j’avais la certitude que cela ne dérangerait personne, et même si je n’en abuserais jamais, bien évidemment.

- Ca fait bizarre de te l’entendre dire. Notai-je à son nom de famille.

Mais il avait raison. Dès lors que notre mariage serait prononcé, son nom se verrait accolé au sien. Il faudrait que je m’y fasse et je m’y ferais, bien sûr. Tout comme je me ferais à sa famille et notamment à sa mère qui, je l’avais avoué, m’effrayait un peu. Riant à sa remarque, je secouai la tête.

- Mes talons sont trompeurs. Fis-je remarquer. Mais mon mètre soixante n’est pas franchement en ma faveur face à ta famille de géants.

Il fallait dire ce qu’il en était : je me sentais particulièrement petite dans sa famille. Seuls mes talons me sauvaient de cette impression de nanisme et c’était bien, d’ailleurs, pour cela qu’ils ne me quittaient jamais ou presque. Pour autant, ces talons ne m’étaient pas d’une réelle utilité face à sa mère. Une mère trop vraie pour ne pas m’inquiéter moi qui n’avais que trop l’habitude des apparences. Qu’allais-je pouvoir lui dire ou faire pour me faire apprécier ? Elle n’aurait pas de « conseils » à me donner, de cours à me faire apprendre, de jugement face à ce que je représentais alors comment devais-je me comporter ?

- C’est plus difficile. Admis-je en réponse à sa question alors que je venais mêler mes doigts aux siens, tendrement. Être aimé pour ce qu’on est demande de la sincérité et d’être, en fin de compte, jugé sur notre réalité… Être apprécié pour ce qu’on doit être nous oblige simplement à porter un masque modelable en fonction d’avec qui nous sommes. C’est plus simple de mentir et d’arranger la vérité que de faire face.

Portant sa main à mes lèvres, je ne pus que répondre à son sourire. Je comprenais où il désirait en venir, ce qu’il voulait me faire comprendre et je le comprenais, en un sens. Avec lui, je savais qui j’étais et surtout ce que je ne devais pas être : un pantin, un masque. J’étais vraie, aussi vraie que je ne pourrais jamais l’être avec quelqu’un d’autre. Mais cela ne voulait pas dire que, sortie de notre couple, tout cela était une chose facile. Bien au contraire. Il n’était que l’exception qui confirmait cette règle pourtant changeante.

Plissant les yeux alors qu’il affirmait vouloir s’occuper des fêtes, je secouai la tête négativement, rejoignant son rire.

- Et tu m’enlèverais l’essence même du pourquoi j’ai été élevée ? Monstre ! Plaisantai-je.

Après tout les femmes sangs-purs devaient elles tout connaître de l’art des fêtes… Quoique nous ne parlions peut-être pas du même type de fête à bien y penser… Quand bien même !

- Tu verras, je te promets que je t’organiserais la fête la plus impure que tu puisses connaître ! Plaisantai-je sans même me rendre compte du côté insultant que pouvait avoir cette affirmation. Même tes amis en seront bouche bée.

Je pouvais m’adapter, je m’adapterais. Cela viendrait, évidemment, il semblait en être sûr et… Je l’étais, dans une moindre mesure aussi. J’avais besoin de temps, d’explications, de confiance mais je pourrais y arriver. Ne pas devenir parfaite et seulement la femme que je devais être à l’endroit qui m’était offert : près de lui.
A bien y penser… J’avais une chance inouïe. Outre le fait d’épouser l’homme que j’aimais, ce dernier m’offrait une liberté, une sincérité et même, en quelque sorte, une famille, choses qu’aucun autre homme n’aurait pu m’offrir, j’en étais certaine.

Arrivai-je à imaginer Matthew de la sorte ? En un sens… Oui. Car il était toujours empli de surprises, cela n’en devenait donc pas une. Mais de là à l’ancrer dans une réalité même passée… J’admettais que c’était assez difficile.

- Comme si ta capacité à n’en faire qu’à ta tête avait changé. Soufflai-je, amusée.

Sans cette capacité, nous n’en serions certainement pas là. C’était un fait qu’il ne nous fallait pas oublier… Que nous n’oublierions certainement jamais, d’ailleurs. Après tout, c’était bien grâce à cela, à son impulsivité, que je serais effectivement bientôt appelée Heather Gimhae. Autant dire que… Cela sonnait particulièrement étrange à mes oreilles. Il faudrait, bien sûr, que je m’y fasse. Cet événement arriverait bien trop vite. Mais tout de même… Heather Gimhae… Les changements que ce nom annonçait étaient si impressionnant que j’en aurais eu le vertige. Enfin. Au moins Matt me fit-il de nouveau rire, embrassant mon front.

- J’espère bien qu’il te va. Tu vas devoir le supporter tous les jours. Plaisantai-je face à une réalité qui ne saurait tarder.

Il m’acceptait telle que j’étais, telle que j’avais toujours été et cela me faisait un bien fou. Mais le faire avec d’autres ?... La réponse à sa question était évidente : ce n’était pas réellement difficile. Mais avec lui… Son non jugement, son intelligence, tout en lui m’avait permis d’avoir confiance. Pire, à vrai dire, je ne m’en étais pas réellement rendue compte, vivant naturellement avec lui comme si cela était une normalité dont je n’avais pas à douter.

- C’est que tu es un être exceptionnel. Avais-je fini par répondre dans un léger rire.

Exceptionnel, il l’était, sous bien des formes. A vrai dire, Matthew m’impressionnait, autant par son flegme que par la passion qu’il pouvait paradoxalement démontrer. Ces sentiments pourtant si éloignés avaient un effet particulièrement apaisant pour moi, c’était un fait…

Le temps ferait certainement son effet. Il avait raison. Nul ne servait de courir, n’est-ce pas ? Ce n’était, de toutes les manières, pas mon genre. Nous avions déjà bien assez brûlé les étapes comme ça. Il nous fallait désormais nous adapter, apprendre à nous connaître, réellement, quelles que soient les épreuves et bien que nous en ayons déjà remporté haut la main. Sa famille était mon épreuve, quand bien même le terme ne soit pas le mieux choisi. Ce serait donc mon prochain but, ma prochaine victoire, l’espérai-je.

Dans tous les cas, j’allais changer. Je changeais déjà, sans pour autant me détacher entièrement de l’éducation qui avait été la mienne… Et notamment des connaissances que j’avais en « soirée ». Lui qui voulait me les retirer… Oh non ! Il en était bien hors de question ! Je lui prouverais, même, en organisant la plus grande fête impure qu’il soit !
Evidemment, l’impureté de l’idée le fit tiquer. Me mettant à rire sous les chatouilles, gesticulant pour tenter de m’en défaire, j’hochai malgré tout la tête.

- Oh oui ! Tu es l’impureté même ! Ris-je. C’est toi qui m’as détourné !

Je n’avais plus de raison de ne pas plaisanter à ce sujet. Rien n’était derrière nous, bien sûr, mais nous apprenions à construire avec, à nous épanouir avec la situation dont j’étais tout autant la coupable qu’il ne l’était.
Il n’avait cependant pas tort. J’aurais besoin d’aide pour les fêtes moludes mais… Pensait-il que je ne pouvais pas le faire seule ? Non ! Je lui prouverais même cela !

- Je saurais faire mes recherches, tu verras, tu auras la plus belle fête moldue du moment ! J’achèterais même des « stylos » !

Pourquoi des stylos ? Hé bien… Je n’en avais pas franchement idée, c’était le premier objet moldu qui m’était venu en tête et vu que je ne savais plus ce qu’ils faisaient… Ce serait ainsi !
Je n’aurais pour autant pas le temps d’aller chercher ces stylos. Matt semblait bien décidé à me faire « payer » l’impur. Une chance, je n’allais pas me laisser faire. Il en était bien hors de question. Ainsi tentai-je de me défendre. Riant sans aucune contenue à ses chamailleries, je ne pouvais qu’admettre que Matthew m’offrait ce que je n’avais jamais eu : la simplicité. Je n’avais pas besoin de porter un masque, pas besoin de réfléchir, pas besoin de me tenir outre mesure à ses côtés. Je vivais. Je profitais. J’aimais sans que rien ne puisse me retenir. Je me sentais bien. Heureuse. Tout simplement.

C’était peut-être ça, en fin de compte, le secret de la vie, ce qui faisait que nous étions sur terre. Il ne s’agissait pas réellement de faire plaisir à nos parents, de nous adapter à ce que l’on attendait de nous mais bien de vivre, pour nous, pour ce que nous étions. Matthew me le prouvait à chaque instant passé avec lui. Je ne comprenais peut-être pas toujours tout. J’hésitais encore, beaucoup. Mais j’avançais et c’était là le plus important.