Révélations
If you reveal your secrets to the wind, you should not blame the wind for revealing them to the trees...
Julia & Erin Wheeler
Fin septembre… Si les jours se suivaient sans se ressemblaient habituellement, il aurait été faux de dire que cette année n’était pas spéciale pour moi. A vrai dire, beaucoup de choses avaient bougé dans ma vie personnelle et l’année 2022 ne cessait de me faire aller de surprises en découvertes. Pour le mieux ! Evidemment. Mais malgré tout… C’était là tout un bouleversement.
Et le plus gros de tous les bouleversements avait, finalement, été l’aboutissement de quatorze ans de « fantasme » sur mon ancien professeur de potion. Un aboutissement bien loin d’avoir été « logique » ou même prémédité. Non. Et pourtant, il avait suffi d’une pizza pour que nous passions une étape que jamais je n’aurais imaginé franchir avec lui. Une étape qui nous avait suffisamment rapproché – et à raison – pour que l’idée de le fuir me vienne en tête. Et c’était cette fuite qui avait signé notre arrêt mutuel, nous faisant chacun replongé dans les bras de l’autre de la manière la plus abrutie qu’il soit, j’en convenais. Mais Andrew m’apprenait à avoir confiance en lui autant qu’en moi pendant que je m’astreignais patiemment à lui rendre confiance en l’amour. Naïve ? Je l’étais. A croire au grand amour et au prince charmant. Mais après tout… Qui donc pouvait me certifier qu’Andrew n’était pas
mon prince charmant ?
Pour autant, notre relation n’était pas réellement toute blanche. Du moins… Pas extérieurement. Si la chasteté ne faisait certainement pas partie de notre vocabulaire, nous étions pour autant tout deux dans une démarche bien plus saine que je ne l’aurais prédit à l’origine. Une démarche qui m’avait alors poussé à faire la plus grossière des erreurs, consultant l’ex-femme d’Andrew – dont j’ignorais l’identité – afin de me guérir d’un mal qui m’empêchait simplement de profiter davantage de la présence du professeur. Et c’était parce que Veronica avait cru que j’entretenais une relation avec un élève et qui plus est mineur que j’avais tout révélé. Mal m’en avait pris… La révélation acquise sur le statut d’ex-femme de la psychomage, je m’étais empressée d’appeler Andrew à l’aide… Et ce fut ainsi la fin. La fin du secret et de la dissimulation.
Là-bas, aux Trois Balais, quelques heures seulement avant le couvre-feu, Andrew avait pris la décision, soutenue évidemment, de ne plus nous cacher. Et c’est devant des étudiants de Poufsouffle que je n’avais malheureusement – ou heureusement – pas vu que nous nous étions, pour la première fois, embrassé en public.
Si cela ne devait normalement pas poser problèmes outre mesure, il était vrai que ma relation avec ma sœur, elle, m’inquiétait. J’en avais d’ailleurs fait part à celui qui était désormais plus que mon amant aux yeux du château et sa réponse… Ne m’avait pas aidé. Certes ! Andrew avait raison : je ne devais rien à ma sœur et à moins de quitter mon poste de professeur, jamais je ne pourrais réellement la contenter. Et pourtant… J’avais malgré tout pris la décision de lui parler moi-même. Mieux valait cela, après tout, que de la laisser entendre je ne savais quels bruits déformés…
Le temps m’avait néanmoins pris de vitesse et j’avais été dans l’incapacité de voir ma sœur le soir même, profitant plutôt de la chaleur de l’appartement du professeur de potion. Ainsi m’étais éclipsé dès le matin, priant tous les saints pour que Julia n’ait encore rien entendu, pour me rendre directement dans la Grande Salle afin de la retrouver. Oui ! Elle était là ! Me dépêchant de manière la plus naturelle possible jusqu’à elle, je toussotai pour attirer son attention.
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Il faut que je te parle. Lui soufflai-je alors non sans attraper une tasse propre que je remplis de café presque jusqu’à ras-bord.
Maintenant.Mon ton était clair, net et précis : elle devait me suivre. Et ainsi l’escortai-je jusqu’à une salle de classe vide pour venir m’asseoir sur le bureau, silencieusement, presque, même, de manière inquiétante.
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Assied toi. Lui dis-je alors gravement.
A croire que j’allais lui annoncer la mort de notre frère ou de l’un de mes parents tant ma mine était basse. Mais non. Ce n’était pas le cas. Je cherchais juste comment lui dire qu’elle allait me détester encore plus… Le nez dans le café, je soupirai alors avant de relever les yeux vers Julia.
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Alors quoi que tu aies entendu, sache que c’est faux. Commençai-je sans même savoir si c’était le cas.
Enfin… Pas forcément mais… Je grimaçai.
J’ai un truc à te dire et je sais que ça va pas te plaire alors… Promet moi de ne pas t’énerver, de m’écouter et de comprendre ce que je vais te dire. Je te demande de garder l’esprit ouvert et de ne pas me voir comme une professeur mais comme ta sœur qui n’attendait que ça depuis longtemps.Bon… Ce n’était peut-être pas l’entrée en la matière la plus sympa et j’étais peut être même déjà entrain de m’auto-enfoncer. Mais au moins… J’avais fait une entrée en la matière. Il n’y avait plus qu’à espérer que Julia soit réceptive au fait que je sois heureuse.