Il y avait des jours où il valait mieux rester loin de tout. Et ce jour n’avait pourtant pas été l’un de ces jours. Il avait, finalement, bien commencé, au creux des bras de Mika, j’avais pu me réveiller bienheureux avant de prendre le chemin des cours pour attendre avec impatience le repas, pour le retrouver, comme toujours.
Nous avions repris nos habitudes, notre vie ici, à Poudlard, et c’était pour le mieux. J’étais heureux. Au point que cette année, j’avais réussi à parler davantage avec d’autres, à me lier à d’autres Poufsouffle que nous avions ainsi rejoint pour manger aujourd’hui. Un pas gigantesque lorsque l’on savait où était mon point de départ.

Mais peut-être, finalement, aurions-nous dû rester dans notre chambre.

Le repas n’avait pas commencé depuis longtemps. J’écoutais plus que parlais, chacun de nos camarades nous entourant, souriant, relançant même parfois la conversation, ma main discrètement posée sur la cuisse de Mika, lorsque leur regard m’arrêta. Figé, j’observai mon cousin, mon chef de famille, s’avancer vers nous. Je n’avais pu m’empêcher de me tendre alors que ma main se retirait rapidement. Que voulait-il ? Me parler ?

J’avais hoché la tête, lentement, jetant un coup d’œil à Mika, décomposé. Que voulait-il ?... Me levant alors, je m’étais excusé auprès de tous pour suivre Hyun-Su en silence, obéissant. Que. Voulait. Il ?...

Nous marchâmes bien trop longtemps pour mes nerfs mis à vifs, pour mon inquiétude, mon angoisse montant à mesure que nos pas foulaient le sol. Je ne savais pas ce qu’il pouvait vouloir. Tout avait été fait selon ses désirs et… La seule chose qui avait changé, la seule chose qu’il savait été pour Mika. Était-ce de cela dont il voulait parler ? Était-ce ce que j’avais dévoilé cet été alors que nous n’avions pu nous voir avant ? Pourquoi maintenant malgré tout ? Et pour me dire quoi ?

Enfin arrêtés, je l’avais enfin observé, l’inquiétude me nouant l’estomac. Savais-je pourquoi il désirait me voir ? Non. Evidemment que non. Enfin… Baissant la tête, je tentai une réponse :

- De… Mika ? Je… Je suis désolé de ne pas te l’avoir dit. J’ai… Il… Ne dis rien à mes parents, s’il te plait. Soufflai-je plus bas en m’inclinant face à lui. S’il te plait, Jeon Hyun-Su-ssi…

Entre autres ? Ce n’était donc pas uniquement de cela dont il voulait me parler mais cela en faisait partie. De quoi redoubler mon angoisse, finalement, alors que je n’avais définitivement pas tous les éléments en main.
Me redressant comme demandé, j’avais pourtant peiné à lever les yeux sur lui alors que mon regard le fuyait par peur de la conclusion plus que du déroulé de ce qui allait suivre, à vrai dire. Mais je l’avais fait. Je l’avais regardé, difficilement. Mais je l’avais regardé, l’angoisse m’étouffant. Pourquoi ne pas lui en avoir parlé…

- Je… C’est… Je sais que… Que c’est déshonorable et mal… Murmurai-je, revenant à la réalité que Mika m'avait fait oublié, en fuyant de nouveau son regard pour y revenir, d’autant plus difficilement. J’aurais fait ce que vous m’auriez demandé… Même avec lui… Alors… Je ne voulais pas être... Renié… Car c’était là la principale raison de mon silence. La peur.

Mais il n’y avait pas que cela. Et il avait… Mes yeux s’écarquillèrent, cette fois bien posés sur lui alors que je l’observai, surpris autant que terrifié à l’idée ce qu’il avait pu dire à Mika. Je n’aimais pas que Mika se frotte à ma famille de près ou de loin. Pas lorsqu’il était un Kim. Pas lorsqu’il était mon fiancé. Mais ils avaient eu une discussion édifiante et… Je n’avais pas pu détourner les yeux, cette fois, alors que m’étais renvoyé au visage ce que j’avais pu raconter à Mika. Tout, à vrai dire, ou presque.

- Ce n’est pas un étranger. Avais-je cette fois rétorqué avec plus de fermeté. Au contraire. Il était une personne presque moins étrangère à ma vie que ma propre famille. Je… J’avais besoin de lui en parler. J’ai confiance en lui, il comprend ce que je lui dis… Mais je sentais sa colère, celle qui me fit alors trembler, mon regard se baissant de nouveau vers le sol, comme apeuré par ce qui pourrait être retenu contre moi.

J’étais indigne. J’avais trahi sa confiance, celle de mes parents, de ma famille entière mais… Mais c’était Mika. Et avec lui… Toute la donne changeait mais…

- Je n’ai rien dit ! Me défendis-je soudainement avant de me calmer presqu’immédiatement. Je n’ai rien dit sur toi, Jeon Hyun-Su-ssi. Je n’ai rien dit qui pouvait concerner une seule et unique personne… Je… Je n’ai fait que dire ce que j’avais fait et pourquoi. Que sur ce qui m’entoure… Il ne sait pour Min-Ho aussi que parce que Min-Ho le lui a montré quand il nous a…. Quand il nous a vu. Admis-je finalement. Je te promets que je n’ai rien trahi.

Pas à mon sens, en tout cas, alors que je n’avais fait que répondre à la confiance que j’avais en Mika, à celle qu’il m’apportait et à ce besoin de ne plus être seul, encore moins face à toute cette histoire.

- Mais il n’y est pour rien, il n’a rien fait… Ne… Ne t’en prends pas à lui s’il te plait. Je ferais ce que tu voudras mais ne lui en veut pas ou… Il n’y est pour rien. Il est juste là pour moi… Il ne trahira jamais rien… Je te le jure. Tentai-je alors plus désireux de protéger Mika que moi-même.

Mika n’avait rien fait pour essuyer la moindre colère de qui que ce soit. Au contraire. Il était là, toujours, il était présent, il soutenait et… Non. Il ne mériterait jamais la moindre colère. Pas lui.

L'aurais-je réellement quitté ? Aurais-je pu le faire ?... Je ne pouvais pas répondre, pas quand le quitter n'aurait fait que m'enfoncer davantage. Mais le dire, le lui avouer ? Difficile. Alors j'avais baissé la tête, serrant les dents. J'étais lâche, oui. Je ne pouvais dire le contraire. Je ne pouvais rétorquer quelque chose alors...

- Oui.

Car s'il le disait, c'est que cela devait être vrai. Mon père l'avait, un jour, finalement dit. Celui qui suivrait ma voie serait un lâche. Je l'avais fait. J'en étais un. Et si Hyun-Su l'affirmait alors... Soit.

- Mais je ne veux pas l'être... Avais-je alors affirmé en relevant la tête, son ton méprisant m'ayant fait tremblé. Je suis désolé...

Pourquoi, alors que j'avais appris à vivre, alors que j'avais appris à me défendre, je n'y arrivais pas face à eux, face à ceux qui étaient ma famille ? Je ne faisais qu'être désolé de mon existence même, de ce que j'étais, de ce que je continuerais à être tant cela me dépassait. Je n'y arrivais que lorsque cela finissait par toucher Mika, de près ou de loin. Il me donnait cette force que je n'avais pas pour moi même et... Non. Il n'était pas un étranger. Il était tout ce dont j'avais besoin mais non. Evidemment. Je n'avais rien dit quant à sa personne, rien sur sa malédiction. Je ne l'avais pas trahi et... Que valait ma parole ?

Figé, je l'avais regardé. Je n'étais rien. Je n'étais définitivement rien et je l'avais presqu'oublié un instant. Il doutait de moi. Il avait toutes les raisons du monde de le faire et... Je... J'avais baissé la tête.

- Je suis désolé... Jeon Hyun-Su-ssi... Je... Je ne t'ai pas trahi... Il est digne de confiance... Répétai-je malgré tout.

Mais Mika n'y était pour rien et je refusais que l'on puisse s'en prendre à lui. Il n'avait rien à faire dans cette histoire et le fait de savoir que mon cousin l'avait vu je... Mika ne m'en avait même pas parlé... Pourquoi ? Que s'était-il passé ? Et surtout... Comment faire pour qu'il ne l'approche plus ? Mika n'avait rien à voir avec notre famille. Rien.

- Ce n'est pas ça... Avais-je même rétorqué. Non. Je ne voulais pas qu'il puisse imaginer que Mika était responsable de mon homosexualité. Je ne voulais pas qu'il puisse penser que Mika était responsable de ce que j'étais.

Mika m'avait sauvé. Mika n'avait fait que me rendre une envie de vivre que j'avais perdu et... Il savait ? Doucement, j'avais levé les yeux sur lui, presqu'apeuré de l'entendre prononcer cela. Il... Comment avait-il... Personne ne savait. Personne à part... Mika le lui avait dit ? Pou... Pourquoi ? C'était... C'était déshonorable. Je n'avais pas le droit... C'était...

- Je... J'avais fait un pas de recul, l'observant sans savoir comment ou quoi répondre. Il t'a... Pourquoi lui avait-il dit ? Pourquoi avait-il pensé cela... Bien ?... Je... Ne leur dis rien... Avais-je murmuré en m'inclinant, soudain, conscient que si mes parents l'apprenaient... Ce n'était pas du mépris que je devrais supporter, pas même de la déception. A vrai dire... Je ne savais pas ce que serait leur réaction. Je n'avais pas envie de le savoir tant je craignais d'y faire face. S'il te plait... Ne... Ne leur dis pas... Je... Je ne veux plus... Il...

Les mots ne sortaient plus alors que mon estomac se tordait, que je tremblai encore davantage. J'avais envie de disparaître. Loin de lui. Loin de tout le monde.

J’avais comme l’impression d’être piégé. Il… Mika avait parlé. Pourquoi ? Sûrement avait-il ses raisons et… Je… J’avais peur. J’avais définitivement peur. Autant de ce qu’il pouvait penser que de ce qu’il pourrait faire de cette information, que de ce que mes parents pourraient faire s’ils l’apprenaient. A vrai dire, je ne savais pas réellement ce qui pouvait être le pire. Cette lâcheté dont j’avais voulu faire preuve en voulant arrêter de vivre, de souffrir, ou mon homosexualité… Les deux se vaudraient, sûrement, dans leur esprit. Mais… J’avais confiance en Mika.

Hyun-Su avait raison. Quand bien même sa voix m’indiquait que ma réaction n’était certainement pas en adéquation avec la confiance que je disais mettre en l’australien. Pourtant c’était le cas. J’avais confiance en Mika et si je ne comprenais pas les raisons qui l’avaient poussé à parler de cela à mon cousin… Je… Il fallait que je lui fasse confiance, que je ne présume de rien et surtout que je ne lui en veuille pas.

- Oui… Avais-je alors admis en baissant la tête.

Il savait ce qu’il faisait. Il devait savoir ce qu’il faisait mais… A cet instant… Plus rien n’avait d’importance qu’une seule chose.

Mes parents ne devaient rien savoir.

Hyun-Su ne devait rien dire, à personne et certainement pas à eux. Et… J’avais peur. Vraiment peur de voir la vie que je m’étais reconstruite s’écroulait à cause de ma lâcheté d’avant. Tellement peur que c’était suppliant que j’avais réussi à articuler cette demande. Il ne devait rien dire.
J’en tremblais.
La nausée me prenait.
Incapable de respirer à plein poumon, je m’étais alors incliné avec cette envie bien distincte de disparaître de la vue de tous, de ne pas subir les conséquences de ce qui avait faillit être, de ce qui n’avait pas été.

Et puis… Ce fut le silence. Il avait parlé mais surtout j’avais senti sa main sur mon épaule. Une main bien plus douce que j’aurais pu l’imaginer alors que je me figeai net. Si me ressaisir était à prévoir… Le reste… Au moins… Au moins n’allait-il rien leur dire mais…

Lentement, je m’étais redressé pour lever les yeux sur lui. Que devais-je répondre ? Je… Il… Il savait ? Comment ? Mika ? Pourquoi Mika aurait… C’était…

- Il…

Mais… Je comprenais parfaitement ce que Hyun-Su voulait savoir. Et si Mika lui avait parlé de… De ce que j’avais voulu faire… Je ne doutais presque pas qu’il ait pu lui parler de ce qu’il savait, de ce qu'il estimait injuste, violent dans ce que mon père était ou faisait...

- Abeoji… Avais-je commencé.

L’on me demandait donc de trahir mon père alors que les sentiments contradictoires me revenaient violemment. Le trahir en acceptant ce que disait Mika ou les assumer en acceptant ce que mon père disait. Deux sentiments bien distincts qui m'obligeraient à trahir, au moins pour une partie de mon esprit, mon père à qui je devais obéissance. Mais si je ne le faisais pas... C'était alors Hyun-Su que je ne respecterais pas.
Il m’avait ainsi fallu un instant, un long moment de silence à observer mon cousin pour reprendre parole.

- Je ne sais pas ce que tu veux entendre. Avais-je fini par prononcer sans le quitter des yeux, plus incapable de choisir que ne sachant pas ce que l'on voulait de moi. Je ne sais pas quoi te dire.

Trahir mon père, même pour une simple petite partie de mon esprit, était… C’était difficile alors que je savais que mon allégeance devait d’abord aller à l’homme qui me faisait face. Mais… Il s’agissait de mon père, de ma mère et… Déglutissant, j’avais baissé la tête, honteux de ce que l’on me demandait, de devoir admettre que je n’avais jamais été le fils que mon père aurait voulu avoir.

- Il ne fait que son devoir envers vous. Avais-je alors soufflé, prenant soudain le partie de mon père, mon esprit semblant avoir décidé de le protéger, de ne pas écouter ce que Mika me répétait pourtant bien trop souvent. Il… Il essaie de me remettre dans le droit chemin… Il… Il sait ce qui est bien. Je ne suis pas assez… Que n’étais-je finalement pas assez à part « tout » ? Je suis lâche et… Je ne suis pas assez respectueux envers vous. Admis-je difficilement, prenant la position de mon père, acceptant les mots de mon géniteur, les assumant même face à Hyun-Su puisque c’est cela qu’il voulait entendre. Ce que mon père disait de moi, avait compris de moi. Je suis indigne d’être un Jeon… Prononçai-je finalement, la mort dans l’âme.

C’était après tout la conclusion que j’avais toujours entendu. Pas assez intelligent. Pas assez fort. Pas assez leader. Pas assez charmant avec les femmes. Pas assez courageux. Cela ne se résumait qu’en un mot. J’étais indigne. Indigne, même, de l’attention de Hyun-Su. Et si Mika savait faire passer ce sentiment, s’il me le faisait lentement oublier, s'il me donnait une force que je n'aurais jamais imaginé avoir… Tout venait de me revenir en plein visage alors qu’une larme échappait à mon contrôle pour s’écraser au sol.

- Je suis désolé. Avais-je alors prononcé en conséquence, m’inclinant de nouveau. Il avait raison sur tout.

Il désirait la vérité… Evidemment. Mais quelle vérité pouvais-je réellement lui apporter ? Lui parler serait trahir mon père. Ne pas lui parler serait le trahir lui. J’étais… J’étais coincé. Tentant de réfléchir convenablement, rapidement, mes pensées avaient pourtant été stoppées par le prénom de Mika alors que je relevai la tête. Je ne pouvais pas tout nier. Je ne le pouvais pas sans mettre à mal ce que Mika avait dit, la vérité qui semblait lui avoir été déjà annoncée alors… Alors pourquoi me demander ? Pourquoi m’obliger à parler quand cela m’obligeait à trahir mon père ?...

J’avais pourtant essayé, tentant désespérément de faire preuve de tact, de diplomatie. J’avais choisi mes mots, me rangeant du côté de mon père pour ne pas le critiquer, quand bien même ces mots m’heurtaient.
Mais cela n’avait pas suffi. Hyun-Su insistait. Il voulait savoir plus, il voulait une précision que je n’arrivais pas à lui apporter de peur que tout se retourne contre moi. J’étais déjà sur une corde bien trop fine pour ma sécurité. Trahir mon père… Même pour lui… S’il l’apprenait je… Il ne fallait pas et… Et j’avais fini par ne pas retenir une larme. Une seule. M’inclinant, m’excusant pour la honte que je devais être.

Obligé à me redresser, je l’avais observé, je l’avais écouté, presqu’hébété, tentant de réfléchir, de remettre mes idées en ordre. Je devais lui parler. Mais… Je… Oui. J’avais voulu et… Et ses mots me firent de nouveau baisser la tête. J’avais voulu alors qu’Ho-Seok aurait voulu vivre. La culpabilité me revenait violemment au visage alors que je serrai les poings. J’avais été égoïste, je l’étais souvent encore mais… Mais l’entendre… Le goût était bien amer.

Et à nouveau, je devais choisir. Il… Il voulait que je parle. Mais si lui parlait alors… Mika s’inquiétait… C’était… Evident. Vraiment évident. Était-ce pour autant une raison pour parler à Hyun-Su ?... Non. Je ne devais pas… Il ne fallait pas que je remette les choix de Mika en question. J’avais confiance en lui et… Et c’était justement cette confiance qui me manquait en cet instant. Je n’avais pas confiance en Hyun-Su.

Relevant les yeux, je l’avais pourtant observé. Il n’était ni mon père ni le sien. Cela voulait-il dire que je n’aurais pas à craindre la moindre conséquence ? Mais surtout… Il ne voulait pas que j’obéisse par peur. C’était pourtant la peur qui me tenait. La peur de finir seul, d’être abandonné. Celle de voir encore la déception dans les yeux de ma mère. Celle de voir ce que je résumais être du mépris dans ceux de mon père.

- Je…

J’avais peur.
Serrant les dents, il m’avait fallut quelques instants, qui me parurent être des heures, de silence.
Il ne voulait pas de peur.

- Je… Déglutissant difficilement, je sentais le poids dans mon estomac se faire plus lourd. Je ne suis pas comme toi. Avais-je fini par commencer. Je ne suis pas… Assez intelligent. Pas assez… fier… Et… Je ne me mêle pas assez avec les familles de Sang Pur. Je… Ils m’ont présenté beaucoup de fem… jeunes filles et… Je n’étais jamais à la hauteur. Trop réservé. Trop inintéressant. Trop silencieux. Trop amical. Trop niais. Trop maniéré. Mon père avait toujours eu un commentaire à faire sans même se rendre compte que leur insistance avait fini par me dégouter de tout cela, de celles qu’ils me présentaient, de leur façon de faire. Mais Hyun-Su avait, semblait-il, ouvert une trappe qui, soudainement, venait de faire lâcher le moindre de mes liens alors que je l’observai cette fois presque froidement. Il voulait la vérité. J’étais en train de la lui donner. Je n’ai pas le droit de faire ce que j’aime car cela pourrait être mal vu ou… ou je pourrais justement aimer cela. Ils m’ont retiré la musique. Ils m’ont retiré tout ce que j’aimais pour que je me concentre sur l’administration et maintenant le droit. Abeoji… J’ai voulu lui parler… J’ai voulu essayer de lui dire ce qui n’allait pas. Jusqu’à ce que lui et Eomeoni me disent que si je ne suivais pas leurs directives, je serais indigne. Je serais… Je ne vous respecterais pas. Je ne serais pas digne de toi. Je ne l’étais déjà pas. Je ne l’ai jamais été. Je ne travaille pas assez. Je ne salue même pas bien. Je ne te témoigne pas assez de respect – et je n’avais même jamais compris pourquoi, je m’étais simplement contenté de m’écraser davantage devant mes cousins pour prouver le contraire à mes parents – ni à tes parents. Je… J’avais beau t’admirer et vouloir faire comme toi, essayer de t'imiter, je n’ai… Il me rappelait tous les jours que je ne serais jamais à la hauteur. Que je ne l’avais jamais été. Que je suis une déception. Je ne suis pas le fils qu’il aurait voulu. Je… Je fais pourtant tout ce qu’il veut ! Avais-je fini par exploser. J’ai toujours tout fait ! Je me marierais avec celle qu’il aura choisi ! Je… Je me suis toujours écrasé ! Je n’ai jamais rien dit ! Et… ça ne sera jamais assez ! Je suis inutile ! Je suis… Je n’aurais jamais du exister à ses yeux puisque je ne suis qu’un bon à rien ! Je peux être le meilleur ça ne change rien ! Je ne suis pas toi et il m’en veut ! Il s’agissait là d’interprétation, pour la plupart, mais c’était ce qui m’avait poussé à aujourd’hui, à fuir pour me sauver moi. Est-ce que tu sais ce que c’est de vivre sous le même toit que des gens qui ne font que te descendre parce que tu n’es pas quelqu’un d’autre alors même que tu fais tout pour eux ?! M’en étais-je même pris à mon cousin. Je ne suis même pas un pion pour eux ! Si ma mère pouvait avoir un autre enfant, un autre fils, ils l’auraient fait ! Je ne suis là que parce qu’elle ne peut pas ! Je suis un bon à rien ! Avais-je répété presque convaincu tant mon père me l’avait répété. Je suis inutile ! Je suis inutile à tout le monde ! Je ne voulais plus vivre ça ! Je voulais plus entendre ça ! Après la colère, la peine était en train de revenir alors que je m’étais dégagée, que je m’étais reculé pour me laisser tomber au sol, épuisé par un trop plein d’émotion de choses dont je n'avais jamais parlé, que je n’avais jamais réellement exprimé, même envers Mika, pas de la sorte, en tout cas. Je ne voulais plus être… Rien. Je voulais juste… Je n’y arrivais plus… Je ne supportais plus le voir me détester parce que je ne suis pas comme toi… Pas aussi… Pas comme il voudrait. Et à vrai dire, je ne savais même plus ce que mon père désirait. Je n’y arrivais plus…

Alors… Oui. J’avais fui. Pour ne pas disparaître. Car mon père me faisait disparaître, me faisait me haïr. Et si à cet instant, les larmes dévalaient mes joues, épuisé, dans une douleur que je n’avais pas ressentie depuis que j’avais rencontré Mika, je ne regrettai rien. Il m’avait sauvé. Alors… Quoiqu’il puisse se passer aujourd’hui… Je n’étais plus seul.

J'avais eu du mal à parler, du mal à m'exprimer sur ce que me demandait Hyun-Su et pourtant... Il avait fallut d'un quart de seconde pour que mes barrières cèdent, qu'un flot de paroles se déversent sur mon cousin sans que je n'arrive plus à m'arrêter. Comme une rivière qui avait besoin de s'assécher, j'avais parlé, j'avais tout exprimé jusqu'à m'écrouler au sol, les larmes dévalant mes joues sans que je ne le veuille réellement mais sans que je puisse, malgré tout, les arrêter.
Oui. J'avais voulu mourir. J'avais voulu que tout s'arrête. Je voulais juste ne plus ressentir combien j'étais inutile, combien je ne servais à rien là où je devais servir ma famille. Et si mort j'aurais effectivement été un moins que rien...

- Mais je ne l'aurais plus entendu... Avais-je répondu alors qu'il s'accroupissait près de moi et...

Hyun-Su avait parlé. Plus qu'il ne m'avait jamais parlé. Sûrement fut-ce cela qui m'obligea à être d'autant plus attentif presque figé, les yeux fixés au sol. Il... Il admettait ignorer ce que j'avais pu, ce que je pouvais ressentir. Cela ne m'étonnait pas. Tout cela était simplement une preuve supplémentaire que je n'étais pas comme lui, pas aussi fort que lui alors que je n'avais pas su garder la tête froide, m'écroulant, désirant le pire lorsque cela avait été trop. Mais en même temps... Cela semblait être une possible force lorsque mon émotion m'avait permis de trouver Mika et...

- Je l'ai trouvé... Avais-je murmuré.

J'en étais sûr. Plus que sûr lorsqu'il m'avait sauvé de moi-même, lorsqu'il m'aidait chaque jour, chaque nuit que je passais avec lui. J'en étais sûr... Et plus que cela, j'avais davantage baissé la tête. Il espérait. Il... Ce n'était pas accepter, bien sûr mais... Mais il pouvait tolérer. Il... Il n'allait rien dire. Je lui faisais confiance...
Mais Hyun-Su n'avait pas terminé et... J'avais fini par lever la tête vers lui, surpris. Pensait-il réellement que le problème ne venait pas de moi ? Pensait-il vraiment que... Qu'il était seulement... Jaloux ? Car c'était là ce que je traduisais de ses mots.

- Je te protégerais à tout prix... Répondis-je alors à ses espérances, dans un murmure qui témoignait de l'importance qu'avait mon cousin, mon modèle pour moi.

Mais parce que je n'y étais pour rien, je devrais donc... Je ne savais pas comment lui prouver qu'il pouvait avoir tort. Je ne savais plus ne pas m'écraser mais... Un marché ? Il...
J'avais mis quelques instants à réagir, baissant de nouveau la tête alors que ses mots me parvenaient. Il... Il désirait me... J'avais soudain l'impression qu'il désirait comme me protéger, comme... J'avais l'impression de ne plus être seul dans une famille dont l'hostilité n'était pas générale quand bien même j'avais toujours eu l'impression du contraire.

- Hyun-Su-ssi... J'avais eu du mal à reprendre alors que mes larmes s'étaient estompées au fur et à mesure de ses paroles. Tu es mon chef...

Lui, plus que son père alors qu'il venait de... J'étais un Jeon. Il l'avait dit. Ces mots... Sans doute n'avait-il pas idée de l'impact que cela avait pu avoir sur moi. J'étais un Jeon. Il acceptait de m'avoir à ses côtés, il acceptait de me laisser une place et...

- Je veux t'obéir. Avais-je affirmé. Je... Mais ce n'était pas vraiment ce que je voulais lui dire car il y avait plus important encore. Merci... Car il venait de m'apporter plus que ce que mes parents m'avaient offerts durant des années, un espoir de place, un but réel, une reconnaissance. Je t'obéirais...

Être seulement loyal… Je l’avais toujours été. J’avais toujours fait en sorte de l’être, même en étant ce que j’étais, je restais loyal envers ma famille. Envers lui. Mais ce qu’il désirait vraiment était plus difficile, plus… Compliqué à mettre en œuvre alors qu’il s’agissait d’avoir confiance. C’était là, que le bât blessait. La confiance. Pouvais-je encore faire confiance ? Il me fallut une seconde pour hocher la tête. Il… Il avait été le premier à m’écouter, sans accepter Mika, il ne l’avait pas rejeté à mes côtés et… Mon regard sur Hyun-Su, j’avais esquissé un léger sourire. Il voulait que je sois fier d’être un Jeon. Il avait fait confiance en Mika, un étranger qui… Baissant la tête un instant, je m’étais relevé. Oui. Mika me connaissait bien mieux que ma propre famille. C’était un fait que je ne pouvais nier.

Mais Hyun-Su… Il semblait avoir… Confiance en moi ? Je n’en étais pas sûr alors qu’il voulait que je lui montre de quoi ‘j’étais capable.

- Je ferais ce qu’il faut… Avais-je répondu à mi-voix.

Je le ferais. Parce que… Était-ce parce qu’il était le premier membre de ma famille à faire réellement attention à ce que j’avais dit, à ce que je venais de confier ? Était-ce parce qu’il était mon modèle depuis notre enfance ou qu’il était celui qui gèrerait notre famille ? Sûrement était-ce un mélange de tout cela mais… Oui. J’allais faire ce qu’il faudrait. Pour ne pas le décevoir, pour être digne de lui, de la confiance qu’il avait semblé avoir mis en moi alors même que son secret aurait pu l’obliger à m’oublietter.

- Mika t’a vraiment tout dit… Soufflai-je finalement, secouant doucement la tête. Je… Je ne dirais pas que je suis un prodige. J’aime… J’aime juste cela. Et Mika a tendance à me surestimer… Mais… Je… Je pourrais te faire écouter quelque chose. Un jour. Si tu veux.

Il m’avait été difficile d’articuler cela. J’avais peur. Peur que l’on m’empêche de faire ce qui m’animait toujours, ce qui me plaisait le plus. Mais s’il le demandait… Je devais le faire et… Et j’allais le faire. S’il le voulait.

- Mika… Il doit être mort d’inquiétude… Avais-je alors murmuré, baissant la tête. Il était… Particulièrement pâle quand j’ai quitté la table alors… J’avais à nouveau hésité. Est-ce que… Est-ce que je peux aller le rejoindre ? S’il te plait…

Car sans même vouloir lui parler de ce qu’il venait de se passer… J’avais besoin de lui, besoin de me rassurer près de mon fiancé et…

- Je… Il faut que je te dise les choses. Avais-je alors murmuré avant même qu’il ne réponde, tentant de garder mes yeux dans les siens. Et… Je… Je ferais ce que tu… Je ferais mon devoir. Mais… Je… Mika… Mika est mon fiancé. Je suis fiancé avec lui. On… Ce n’est rien… Enfin… Je me marierais avec la femme que vous aurez choisie si vous en choisissez une un jour mais… Mais tu sais tout. Comme ça… Avais-je finalement réussi à lâcher. Alors… est-ce que… Puis-je aller le rejoindre ? S’il te plait. Demandai-je à nouveau.