♱ The immaculate misunderstanding ♱

Mon corps est le berceau de ma conscience, Le temple de mon esprit, Le tombeau de mon âme... - G.G

         Pourdlard… C’était le deuxième château d’une école magique dans lequel je posais les pieds et c’était tout aussi dépaysant que le premier, voire davantage. Le premier étant la très jolie école de Beauxbâtons… Et non, Castelobruxo n’avait rien d’un château tant dans sa structure externe qu’interne. L’école où j’avais grandi et passé mes études était un immense temple pyramidal Inca qui n’avait de moderne que les innovations sorcières occidentales. Pourtant, j’arrivais difficilement à me retrouver ici… Mon année sabbatique en Guadeloupe avait amplement suffi à me faire perdre mes repères, je ne voyais pas d’autres explications. Le premier jour, j’ai eu de grande difficulté à trouver ma salle de classe, me retrouvant honteusement à être celle qui devait justifier son retard de quelques minutes. Je ne l'avais pas fait évidemment. Enfin bon, j’avais décidé de rapidement prendre mes marques au sein de ses murs.
       Explorant un peu l’école durant mon temps libre, juste histoire de me familiariser ne serait-ce qu’avec les nombreux visages que je croisais, dont certains pouvaient être des élèves de l’option que j’enseignais à Poudlard. Je terminais ma course dans la salle de professeurs presque soulagée au vu du nombre de marche que j’ai dû faire. Et le plus étonnant, c’est que même en faisant un peu près deux heures de marche, soit presque dix mille pas, je n’étais pas certaine d’avoir exploré tout ce que ces murs gardaient jalousement secret. Je m’installais sans remarquer au début cette silhouette discrète et immobile. Une présence toutefois pas si effacer que ça dont le léger mouvement suscita très vite ma curiosité, attirant mon regard. Il y eut un léger sursaut de ma part, forte heureusement pas assez flagrant pour trahir la surprise qui me traversa en découvrant que je n’étais pas seule. J’étais sur le point de le saluer, mais je me tue rapidement l’observant quelques instants à la place. Curieuse de savoir pourquoi il ne m'avait pas salué.

         Maintenant, que j’étais proche de lui, j’en étais un peu plus certaine. Sa posture, elle avait l’air d’être celle d’une personne sur la défensive et ce n’était pas tellement la première fois que je le voyais ainsi en présence d'autre personne, même si je n’avais pas tellement eu d’occasion de le rencontrer de la sorte comme aujourd’hui. C’était une posture qui me rappelait celle d’un de mes anciens camarades de classe qui était autiste, il avait de grandes difficultés au niveau de communication. Je me rappelais d’ailleurs qu’il fallait éviter tout contact physique qui entraînait chez lui des réactions semblables à des crises. Mais qu’en était-il de lui ? Malgré tout, je n’avais pas tellement d’expérience avec ces gens-là, ni vraiment de moyen de les reconnaître… Devais-je le laisser tranquille ? Cela me paraissait être une situation assez délicate, étant donné que nous étions tout de même collègue et que nous n'avions toujours pas fait l'effort de la présentation. Je me levais pour me rapprocher et m’asseoir afin d'être à son niveau et un peu plus proche de lui... Cependant, sans vraiment entrer, je l’espérais, dans sa zone d’intimité.
        Notant sur un bout de papier… ‘‘Puis-je m’adresser à vous oralement ?’’ avant de le faire glisser magiquement sur la table jusqu’à son niveau. Question sans doute exagérée, mais l’expérience, même minime, m’avait enseigné qu’il valait toujours mieux attendre qu’ils soient mentalement disponibles avant de leur parler. Ou bien, ils se contentaient de vous ignorer. Et pour sûr, il ne m’avait pas adressé la parole quand j’étais entrée, donc il ne devait sans doute pas être très à l’aise avec ma présence. Toutefois, il se pouvait aussi que ce soient mes choix de vie qui le rendait ainsi… Je n’en savais rien, je devais au moins observer sa réaction avec ce petit mot.

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         Autiste ou pas autiste ? Ou bien, était-il dérangé ou pas dérangé par la présence qui était la mienne ? Quelle vérité ici était la bonne ? Je n’en savais rien… J’ai déjà eu mon lot de rencontre désastreuse où lorsqu’on savait mon sexe biologique, ce genre de discussion était parfois impossible. Je comprenais toutefois, du moins, je faisais l’effort sans doute pas forcément nécessaire de me mettre à la place de ces personnes qui n’avaient jamais croisé de transgenre. Tous n’étaient pas forcément fermés, pour autant peu comprenait mes choix malgré tout et pouvaient se montrer parfois difficile dans leur propos ou dans leur simple interaction. La plupart préféraient très largement éviter à même le contact visuel sans l'ombre d'une subtilité comme si je portais un genre de masque qui horripilait à sa simple vision. Mais pour le coup, j’étais quelque peu embarrassée de ne pas savoir ce qui en était avec ce collègue qui, d'ailleurs, semblait assez jeune.

Oh, cela dit, j’avais rencontré assez de personnes aux origines asiatiques pour savoir qu’il était assez difficile de déterminer leur âge juste à leur apparence. Je le fixais sans trop paraître impolie quand il annonça un ‘‘Oui’’ très certainement en réponse à ma question. Dans sa voix, il n’y avait pas cette intonation particulière qui reflétait du dégoût ou de la légère hostilité propre à ceux qui n’avaient pas à cœur de me faire une place à leur table. Toutefois, il y a de la confusion et beaucoup de nervosité qui s’entendait dans la question qui suivit sa réponse. Je songeais que cela avait été finalement une bonne idée de ne pas trop l’approcher, je le sentais déjà sur le point de se braquer. Ce n’était peut-être que mon interprétation de la situation. Mais tout en moi m’intimait de jouer la carte de la prudence et de ne pas me montrer trop audacieuse dans ma manière de m’adresser à lui. Je ne savais pas si j’avais le droit de parler d’intuition féminine, mais je me plaisais à penser que c’était ce qui m’influençait en cet instant.

Pas de mouvement, restant immobile et assise à cette place en face de lui. Nous n’étions séparés que par cette table à la décoration humble. « Aucun, mais comme je suis nouvelle ici et que je ne connais encore personne, je souhaitais vous saluer... » Dis-je avant de rajouter immédiatement. « Mais je craignais, je l’avoue, de vous déranger plus encore que de me présenter. »

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         Je ne saurais dire si son comportement était identique à mon ancien camarade de classe… Zackarya avait tendance à parler sans vraiment paniquer, mais avec une sorte d’indifférence étrange comme s’il n’était aucunement animé d’une quelconque émotion. Le tout était accompagné du fait qu’il ne regardait jamais les gens à qui il parlait, ce qui était étonnant puisque paradoxalement, il arrivait à se rappeler du moindre détail de l’apparence de la personne à qui il parlait. Un jour, je m'étais surprise à penser qu’il devait posséder une mémoire eidétique. Mais ce jeune homme en face de moi avait l'air de passer, très à l’inverse, par toute sorte de tourment émotionnel dont je semblais être la source. Assurément, cela n’avait aucunement à voir avec ce que j’étais et pour sûr, j’avais de plus en plus le sentiment qu’il n’était pas très à l’aise dans le fait de simplement échanger. Mais est-ce que je pouvais encore me tromper quant au fait qu'il puisse ou non être autiste ? Je n’aurais jamais cru devoir prendre autant de pincettes avec un potentiel collègue.

Ce n’était pas une chose négative, cela prouvait que cette école était une bonne école, tant pour sa diversité ethnique que celle des particularités des professeurs qu’elle recrutait : un autiste et une transgenre la même année. La directrice McGonagall était une sorcière qui avait et aurait tout mon respect aussi longtemps que je respirais. Je l’écoutais silencieusement, il s’excusa au début avant de m’annoncer qu'il ne me serait d’aucune aide. Je l’écoutais m’expliquer qu’il était alors en tutorat pour ensuite m’annoncer un nom que je pris soin de noter immédiatement. Puis dans une dernière intervention, il veilla à ajouter que ce n’était point de son attention de me faire mauvaise impression. « Oh… Vous ne m’avez fait aucune mauvaise impression, je vous l’assure. » Dis-je d’un ton simple, calme et posé. Je sortis quelques parchemins dédiés aux Runes afin de commencer à mettre en place mon cours de demain. Du moins tout était déjà prêt, mais pas très ordonné.

Je repris la parole en plaçant soigneusement mes affaires devant moi sans que cela prenne de la place… « Généralement, je suis celle qui inspire chez les autres une mauvaise impression, j’ai donc certaine difficulté à trouver des approches plus ou moins naturelles. Vous n’y êtes donc pour rien, il n’était pas nécessaire pour vous de vous excusez. » Je relevais de nouveau mon regard vers lui, laissant un moment de côté mes notes. « Mais je vous remercie de m’avoir donné le nom de ce professeur… je veillerai à la rencontrée. » Non sans plonger tout de suite mon attention dans mes travaux, je rajoutais. « J’ai failli manquer de courtoisie, veuillez m’en excuser... Gladys Greaux, nouveau professeur titulaire des études de Runes. »

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         Quand il s’excusa, bizarrement, je sentis qu’il y avait comme de l’empathie... Ce qui, vraiment, ne semblait pas très autiste comme attitude. Mais je savais aussi que Zackarya n'était pas le seul exemple autistique qui existait, qu’il y en avait d’autres et à des degrés différents du spectre de l’autisme. Toutefois, je me contentais simplement de le remercier, il n’était pas évident de parler de ces choses-là. Et je n’avais aucun doute quant au fait, que s’il excusait par rapport à ça, c’était que d’une certaine manière, il s’était mis à ma place. Il avait donc du vivre quelque chose d’éprouvant de son côté, il n’était pas de mon droit toutefois d’en connaître l'histoire. Je trouvais déjà très bien le fait que nous puissions ici échanger malgré le fait qu’il semblait montrer les signes d’une difficulté à s’ouvrir aux autres. Peut-être, devais-je m’estimer heureuse de ne pas encore l’avoir poussé à fuir cette discussion.

Il se présenta comme étant Park Min-Hwan, assurément, je risquais d’écorcher son prénom si je venais un jour à le prononcer. Aussi, il me serait bien plus facile de l’appeler par son nom de famille, si c’est bien ce dernier qu’il a présenté en premier. Je n’étais pas très sûr, mais j’avais appris qu’il y avait beaucoup de Park en nom de famille, plus qu’en prénom, mais au vu de ma source, ce n’était pas non plus très probant comme information sur les coréens. Je pris toutefois le risque. « Enchantée, Professeur Park. » Répondis-je sans relever sa courbure, me doutant que c’était un signe de respect propre aux pays d'Asie et je considérais qu’il serait davantage irrespectueux de ma part de l’empêcher de faire par gêne ou autre attitude politiquement occidentale. En-tout-cas, j’avais encore un doute quant à son âge, mais il était assurément plus jeune que moi pour être en tutorat. Toutefois, j’étais grandement surprise qu’à un si jeune âge, il puisse déjà exercer dans une matière qui n’était pas des plus simples.

J’étais très disciplinée dans mes affaires, il se dégageait une étrange symétrie entre les objets que j'avais disposée dans un ordre spécifique. Je ne tenais absolument pas à prendre trop de place sur la table et à laisser mes affaires encombrées l’espace des autres. Ce qui n’empêcha pas ce nouvel ami de m’assurer une certaine place malgré tout, notant alors cette gentillesse. Chacun d’entre nous, se concentrait dans sa besogne. Je tentais d’être la plus soignée possible pour ne pas que le son des parchemins que je réorganisais devienne une nuisance sonore. Je relevais la tête vers le professeur Park quand il se redressa. « Un thé pour moi, je vous remercie. Oh et avec trois sucres. » Rajoutais-je, un peu gênée par mon goût pour tout ce qui était sucrée. J'avais toujours sur moi un paquet de bonbons, c'est vous dire. Il ne me regarda pas directement quand il s'adressa à moi, mais je comprenais toutefois qu’il faisait un effort certain pour se sociabiliser ici. En cela, il était comme mon ancien camarade de classe. Le mieux que je pouvais faire, c’était de continuer à m’adresser à lui normalement.

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         Ma foi, j’aurais dû m'y attendre quant au fait qu'il n’y ait ici pas qu’un type de thé. Nous étions entourées de sorciers qui vivaient de cette culture du thé après tout, ce n’était pas comme chez moi ou à Castelobruxo. Cela dit, je partais au début, du principe que je prendrais ce qu’il y a sans me plaindre d’une quelconque forme de manière. Mais, si j’avais du choix, il n’y avait pas non plus de raison pour moi de faire la fine bouche. J’observais ce qu’il me proposait, très rapidement, mon regard fut attiré par une douceur que j’aimais éventuellement boire. « Je prendrais ce citron-fraise, s’il vous plaît. » Dis-je en désignant du doigt ce paquet tout à sa gauche, légèrement caché entre plusieurs autres. Oui, c’était ce que je prenais quand je pouvais en prendre, sinon je me contentais du parfum citron seul ou fruit rouge seul. En le voyant retourner vers la cuisine, je fixais mon programme, rajoutait quelques mots en première page, histoire de me faire un sommaire personnel.
         « Merci. » M’étais-je exprimée sans trop insistée en recevant mon thé. Je rajoutais cette fois des notes chiffrées de bas de page, afin de créer une continuité logique et un ordre. Dans la précipitation, l’envie de bien faire et surtout l’angoisse de ne pas être à la hauteur, j’avais tout écrit, tout préparé, mais tout cela dans un brouillon absurde. Au moins, je commençais à y voir plus clair sur ce que j’avais fait. Je pris le thé et le ramenais à mes lèvres. Oh oui, c’était chaud, mais c’était meilleur ainsi. Je buvais toutefois à petites gorgées pour ne pas non plus me brûler l'ensemble de ma bouche et de ma gorge. Et une fois les parchemins placés dans un ordre certain, j’ai pu commencer à revoir ce que j’avais pu écrire, corrigeant certains paragraphes en reformulant certains passages, en effaçant d’autres ou bien en rajoutant quelque précision sur certains termes que pourraient potentiellement demander les élèves. Du temps était alors passé et finalement, je trouvais ce moment assez agréable à sa manière.

       À ma grande surprise, ce fut de nouveau le professeur Park qui initia la parole, ce qui était pour moi une excellente nouvelle. Pour sûr, ce qui repoussait chez moi les autres sorciers ne semblait pas le gêner, ou alors il n’était tout simplement pas au courant. J’avais fait le choix d’avouer à la directrice mon sexe de naissance, considérant que même s'il s'agissait de ma vie privée, je devais ne pas jouer la carte de la dissimulation. Quitte à être mal vue, je voulais assumer très ouvertement mes choix et ne pas avoir à vivre dans la honte. Cela dit, j'ignorais si c’était le genre d’information qu’elle avait partagé avec mes futurs collègues. De mon côté, je n’osais pas trop briser sa concentration du jeune homme, ni même créer une forme de gêne en étant celle qui initierait la conversation. C’était donc bien mieux qu’il en soit l’instigateur. « Oui ? Je vous écoute. » Et là, il m’annonça sa question... Pas des plus simples, puisqu’il s’agissait de pédagogie.
         Et cette dernière n’était pas forcément à la portée même d'un professeur qui avait bon nombre d'années d'expériences. « Je vois... Je peux comprendre pourquoi votre tuteur ne souhaite pas vous aider là-dessus... Puisqu’être en mesure de trouver une solution par vous-même, c'est leur prouver que vous êtes en mesure d’être pédagogue. Une chose essentielle pour devenir professeur. » Beaucoup n’ont pas cette qualité et font de piètres professeurs, ne s’occupant que des élèves brillants, délaissant ceux qui ont réellement besoin d'aide, les considérant comme irrécupérable, un comportant que je trouvais intolérable. « Je ne suis pas certaine que j’ai le droit de trop vous aider là-dessus, mais je peux au moins vous donner ce conseil : “Les élèves ne sont pas égaux que ce soit au niveau de l’intellect, leurs connaissances ou de leur concentration. Souvent, c’est une question d’éducation, parfois d’un don inné que certains ont que d’autre n’ont pas... Pour autant, chacun d’entre eux possède des qualités qui leur sont propres. Une manière de comprendre différente des autres, parfois plus lente ou plus rapide. Souvent, le seul moyen de pouvoir communiquer avec eux, c’est de les laisser s’exprimer et de comprendre ce qui les motive.” »

              Je fixais ce dernier un instant avant de rajouter. « Et même pour les perturbateurs, ce besoin d’attention qu’ils ont, est très souvent de nature psychologique, c’est pourquoi je ne suis pas partisane de la punition si je peux être en mesure de comprendre la raison de leur comportement. C’est aussi notre rôle de tenter de comprendre les processus mentaux de nos élèves. Mais bien sûr chaque professeur est différent, c’est pourquoi il est en réalité important pour vous de trouver cette solution par vous-même. »

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         Ce que je lui disais, ne devait sans doute pas être la réponse qu’il espérait entendre. Malheureusement, dans un métier comme celui-ci, une simplement erreur de notre part pouvait changer dramatiquement le cours d’une vie de ces adolescents. Il n’y avait donc pas de facilité quand il s’agissait de comprendre ces enfants. Oui, j’aurais pu lui dire la manière dont je m’y serais moi-même prise pour gérer cette situation, mais alors qu’adviendra-t-il lorsqu’il sera confronté à un autre genre de problème en classe, différent du précédent ? Apprendre à gérer les difficultés, c’était aussi nous permettre en tant que professeur, de grandir et d’évoluer, afin de savoir mieux faire face à d'autres complications. Quoi que certains en disent, nous n’avions jamais fini d’apprendre de nos erreurs. Et ce jeune homme, surtout au vu de sa condition sociale particulière, devait apprendre à tomber pour mieux se relever. Et en cela, pour sa propre éducation professorale, je ne pouvais pas simplement lui donner la réponse qui ne serait de toute façon pas forcément la bonne pour lui.

Je relevais vers lui un regard soucieux, lorsqu’il annonça qu’il allait être un piètre professeur. Comment trouver les mots juste, ceux apportant une réponse non vide de sens et pas simplement là pour le réconforter ? Car assurément, il ne me semblait guère du genre à se contenter d’un réconfort, mais plutôt d’un appui logique. Son autre demande, fit toutefois naître sur mon visage un sourire radieux. « Le simple fait que vous en posiez la question, fait de vous un professeur loin d’être piètre. » Dis-je cette fois en déposant ma plume dans son encrier, rejoignant mes mains par la suite comme une méthode sûre pour rassembler mes pensées. « Il suffit souvent de se mettre à la place de l’élève et d’imaginer comment l’on voudrait soi-même qu’un professeur se conduise avec nous... Par exemple : dans votre cas, vous avez des difficultés à maintenir le regard... Pour autant, préfériez-vous qu’un prof vous juge à votre attitude ou bien qu’il cherche à comprendre la raison de cette dernière ? »

Je pris un moment, avant d’ajouter... « Montrer de l’intérêt pédagogique pour ses élèves, n'est jamais un mal. Donc, oui, si pour vous leur demander et leur poser des questions, est la méthode la plus simple à prendre... Faites-le et essayez au moins pour voir où cela vous mène, quitte à mettre un instant en pause l'ensemble du cours. »

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         Oh... Ce fut l’onomatopée qui m’échappa, fort heureusement, dans un recoin de mes pensées... Oui, quand ce dernier se laissa finalement aller à des révélations des plus personnelles. Je réalisais alors que je m’étais trompée sur toute la ligne à son sujet. Je le pensais autiste, alors qu’en réalité, il faisait simplement face à des traumas passés qui continuaient à le hanter. Ce qui en soit, n'était pas plus simple que de faire face à un autiste, mais je m’étais probablement prise avec lui de la mauvaise des manières dès le début. Il se pouvait du coup, qu’il est pris ma toute première approche de manière très étrange, là où pour un autiste il n’y avait qu’une prise d’information ‘’logique’’. Mais du coup, le problème était différent bien que toujours en lien avec un aspect relationnel. Plus qu’une difficulté, c’était avant tout de la peur qui rendait son évolution difficile. Mais du coup, est-ce que cela changeait ce que j’ai pu dire pour le conseiller ? Non...

Mais je comprenais qu’en réalité, le professeur Park devait trouver le moyen d’affronter ses peurs. Je pouvais aussi lui préciser que j’avais été harcelée à cause de ma féminité, par ma propre famille avant même que mes camarades ne s'y mettent plus tard. Je pouvais lui dire toute sorte de chose par laquelle j’étais passée et le courage qui m’avait fallu pour ne pas me laisser engloutir par mes angoisses. Mais cela ne lui apporterait rien, puisque lui et moi étions différents, notre sensibilité et notre perception du monde n’étaient pas la même. Ce n’était pas parce que j’avais réussi à affronter mes propos peurs facilement qui en serait capable, il devait trouver ici aussi, une méthode pour se surpasser dans les moments difficiles. Tout ce que je pouvais faire, c'était de lui ouvrir une porte. « Je ne vais pas vous dire qu’être faible est une bonne chose, il faut parfois être fort pour surmonter les moments difficiles. » Commençais-je, mon regard se perdait dans le vide alors que je me remémorais toute cette hostilité à laquelle j’ai dû faire face en assument ma transidentité.  

« Mais on ne peut guère devenir fort sans accepter quelquefois de faire preuve de faiblesse. Regardez ces gens qui pratiquent ces nombreux sports de combat, beaucoup subissent l’humiliation de la défaite et pourtant, bien qu’ils tombent encore et encore, ils décident de se relever jusqu’à avoir leur victoire. Être faible, veut dire que vous avez aussi le potentiel de devenir fort avec de la détermination et de l'effort et c'est en échouant que nous apprenons de nos erreurs. » Je n’avais pas pour habitude de parler autant, mais le harcèlement me touchait directement et je ressentais le besoin, sans doute très personnel, de le soutenir. « Connaissez-vous l'histoire de “la corde et de l’éléphant” ? » Lui demandais-je au cas, si je devais ou non en raconter le petit récit afin de poursuivre mon argumentation.

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         Oui, c’était une histoire très popularisée de par la leçon qu’on devait en tirer, comprendre et retenir. Le fait qu’une situation parfois anodine, pouvait suffire à conditionner l’esprit des plus jeune et à faire d’eux les personnes qu’ils deviendront en grandissant. J’ai un temps cru que ma vision du monde, celle de mon propre corps était d’origine démoniaque. Venant d’une famille religieuse, ils m’ont rabâché dès lors qu’ils sont sus mes orientations, j’étais devenue le problème pour mes cousins, oncles, tantes et grands-parents. Pour eux, j’avais besoin de Dieu pour être purifié de mes pensées souillées et corrompues par le diable. Je les ai cru un temps, me disant que j’étais dans le péché, que j’étais forcément dans le mal à vouloir aller à l’encontre de ce que Dieu avait décidé pour moi à la naissance. Et puis ma mère m’a ouvert une porte, juste à me disant d’être moi-même sans avoir à écouter les paroles des autres qui n’avaient aucun droit d’impacter ma vie de la sorte.

Min-Hwan et moi-même avions indubitablement subi des choses qui avaient conditionné nos comportements : l’éducation familiale, scolaire et pour finir, l’expérience de la vie elle-même. On ne pouvait se forger un caractère sans passer par des épreuves, mais il ne tenait qu’à nous de les affronter ou d’en être simplement la cible sans réagir à l’image de cet éléphant attaché à cette corde. Je comprenais les paroles de ce jeune professeur et des problèmes par laquelle il devait passer pour résoudre ses problèmes. Je trouvais très profond que l’une de ces peurs puisse de ne pas être en mesure d’aider un élève ayant affronté la même situation que lui. Je baissais mon regard, observant mon reflet dans ce thé qui était le mien un instant. À nouveau, je repensais alors à Zackarya et les difficultés que lui-même avait dû affronter pour évoluer dans ce monde malgré son autisme.

« Oui, l’Asie, j’imagine que c’est un endroit qui n’est pas si simple... Pas si simple...  » Je portais mon thé à ma bouche pour y prendre une gorgée brûlante, me faisant tousser quelque peu. « Aujourd’hui, j’ai plusieurs fois utilisé, même intérieurement, la phrase : ‘’ce n’est pas si simple’’... Mais quand je me rappelle d’un de mes camarades Autiste, je réalise en pensant à lui que c’était sans doute le plus gros mensonge auquel je m’étais conditionnée à croire.  » Je déposais la tasse chaude, non sans lâcher son contenu du regard, rajoutant. « J’ai tendance à dire ce mot pour tout et pour rien dès lors que j’ai affaire à une situation qui me semble compliquer... Mais au final... Il est simple d’essayer si on arrête d'écouter nos tourments. On fait et puis on observe le résultat. On peut abandonner ou insister, mais continuer à faire un pas en avant, ne dépend que de nous. Vous n'êtes pas obligé cela dit de faire un grand pas, essayez de commencer petit au début. »  

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         De toute évidence, nos visions divergeaient quant à la question de l’Asie, très légitiment, je pensais l’Asie plus difficile, plus stricte dans ses méthodologies éducatives qui créaient éventuellement, une certaine pression à leur jeune génération. Et je ne parlais ici que des chanceux qui appartenait au monde moldu, les sorciers étaient davantage pires, en plus de leurs mœurs plus archaïques et traditionnelles... Ce n’était sans doute que des rumeurs, mais j’avais cru comprendre qu’il n’était pas bon d’être né-moldu là-bas, l’enseignement semblant destinée qu’à ceux dans la pureté du sang était assurée et claire. Un idéal éducatif que semblait justement viser le fondateur de la maison des vert et argent de l’école Poudlard. Je n’aurais jamais été accepté dans une telle école, j’en étais persuadée. Mais je comprenais toutefois que nos visions divergeaient quant à ce sujet, puisque ce n’était qu’une question de différences culturelles.  

Ici aussi, bien des manières semblaient me faire défaut, ayant dû rapidement comprendre les termes soutenus et les comportements distingués à adopter dans cette société, différents de ceux en France, aux Antilles ou encore au Brésil. Je ne manquais pas forcément de courtoisie, mais je n’avais pas encore intégré les us et coutumes des Anglais. Sa seconde phrase fait naître à nouveau un sourire rayonnant sur mon visage qui disparut bien rapidement dans le fond de ma tasse, en échange d’une nouvelle gorgée de mon thé bien salvatrice. « Oui. » Dis-je simple, rajoutant... « Et je dirais même que dans ton cas, c'est quand même un pas particulièrement précieux. » Il n’était pas énorme certes, mais il était important. Il avait dû affronter sa propre personnalité pour ainsi se livrer envers une inconnue. J’étais ravie d’avoir pu lui être d'une quelconque aide, même minime. Je pensais qu’en arrivant dans ce pays, j’aurais eu un grand mal à m’intégrer. Oui.

Pourtant, le plus en difficulté socialement parlant, m’avait offert une première et belle expérience au sein de ses murs millénaires. « Le plaisir est pour moi. » Je l’observais s’incliner avant de me lever par politesse à l’arrivée d’un vieil homme annonçant ainsi la fin de notre conversation. Je me rasseyais à ma place qu’une fois seul dans la pièce où je continuais alors à réorganiser mon programme tout en profitant du thé que l’on m’avait offert.