Cinq mois. Cinq mois s’étaient écoulés depuis que Thomas Gaunt avait passé la bague familiale des Gaunt autour de l’annulaire d’Adria Carrow. Si initialement, la jeune Croate n’avait absolument pas aspiré à des fiançailles, elle ne s’était pas opposée à la volonté de son “père”. Elle qui avait toujours vu l’union maritale comme une prison qui mettrait fin à sa liberté, s’était vue lourdement détrompée. Non seulement Thomas Gaunt ne lui couperait pas les ailes, mais en plus… il acceptait ses désirs, ses ambitions et ses objectifs. Au fil du temps, Adria en était même venue à apprécier le Gaunt. A l’apprécier sincèrement.  La mission commune confiée par Abadone avait été un véritable travail d’équipe qui les avait forcés à passer énormément de temps ensemble, certes, mais aussi à communiquer, collaborer, et surtout se faire confiance. Adria avait ainsi découvert un homme talentueux, intelligent et disposant d’une facette toute aussi calculatrice et sombre qui ne manquait pas d'intérêt aux yeux de la blonde. Elle pouvait se voir évoluer avec Thomas. Il la comprenait. Elle le comprenait. Ils avaient cette manière de pouvoir comprendre l’autre sans avoir à entrer dans de longs monologues explicatifs et sans encore moins se juger. Adia avait-elle posé la moindre question sur la mort de Bill Gaunt ? Non, mais il ne lui avait pas fallu bien longtemps pour comprendre qu’il avait orchestré la mort de son géniteur. En dépit des rumeurs du léger harcèlement qu’Adria avait reçu à Poudlard de la part d’une soit disant petite princesse avait-il finalement demandé ouvertement si elle était une bâtarde reniée ? Aucunement. Bien au contraire, il avait même assuré protection à Adria.

Pourtant, entre machinations et complots, ils n’avaient jamais vraiment eu beaucoup de temps pour eux-mêmes. Du moins… jusqu’à ce que Thomas propose à Adria de se joindre à lui pour une semaine à Bali, où il devait se rendre pour quelques affaires, mais qu’ils pourraient utiliser pour des vacances bien méritées. La jeune Carrow avait accepté, tant parce que soutenir son fiancée dans le monde des affaires était son devoir que parce qu’au fond, elle appréciait passer du temps seule avec Thomas. Elle n’avait pas à se cacher en sa présence et il était l’unique être avec lequel elle pouvait se montrer entièrement et pleinement elle-même. Cela avait pris du temps pour qu’elle s’y autorise, mais… Thomas lui offrait de véritables bouffées d’oxygène et, aussi amusant soit cela, le Gaunt semblait apprécier cette nouvelle Adria libérée qu’il était le seul à entrevoir. La vrai Adria.

L’arrivée avait été assez simple et rythmée par le gala d’affaire de Thomas le jour même. Et comme être un joli ficus demandait du temps, Adria avait principalement passé son temps à se pomponner et mémoriser les axes principaux de business de son partenaire. Mais que c’était enfin termin et que le jeune couple avait pu regagner leur suite, réservée par Thomas. Enfin seuls, derrière les portes closes, s’en était fini des sourires polis, des rires forcés à chaque plaisanterie, des hochements de tête sans comprendre de quoi il s’agit. Elle se pencha en avant et ôta ses escarpins avant de laisser échapper un soupir de soulagement. Laissant alors enfin reposer ses pieds à plat sur le sol. AAAAAH fini ces souliers du diable.

- Si tu ne récupérais pas autant de ces vermines de moldus, je t’aurais fortement conseillé de tous les brûler. Ce serait bien plus divertissant qu’écouter Monsieur Johnson parler de sa dernière mise à jour aïphone qui et de son aïcloud encore saturé, lança-t-elle avec un rire moqueur.

Elle se dirigea vers la salle de bain pour se changer et laissa la porte entre-ouverte sans le moindre complexe, de manière à poursuivre la conversation et… honnêtement, parce qu’elle se fichait bien que Thomas la surprenne. Elle glissa la fermeture éclair de sa robe pour laisser tomber cette dernière sur le sol. Se dévêtissant, elle continua alors la conversation :

- Cela dit, j’ai bien regardé le conseil d’administration. La cinquantenaire te tenait toujours du coin de l'œil et j’ai senti un certain dépit dans sa voix lorsque je me suis présentée comme ta fiancée. Profites en si tu as envie de tenter quelque chose, je crois qu’elle a un léger faible pour ton charme, mais il vaudra mieux que je sois absente. En revanche… l’homme qui était à sa droite… je l’ai vu faire quelques messes basses après chacune de tes conversations en sa compagnie. Probablement une certaine méfiance à ton encontre.

Certes, elle n’était pas connaisseuse de la technologie moldue, mais le langage corporel n’était pas quelque chose qui lui échappait et quand on se présentait comme un simple fiancée sans grand intérêt, on avait toujours tendance à ne plus se méfier d’elle. Détachant la pince d’or qui nouait ses cheveux blonds, ses mèches tombèrent alors en cascade sur ses épaules. Elle ôta ses bijoux, avant de passer une petite robe très légère et bieeeeeeen moins formels que cette tenue de soirée émeraude qui certes, lui allait à ravir, mais était terriblement inconfortable. Sortant ainsi de la salle de bain, elle vint s’installer sur la terrasse extérieure qui offrait une vue panoramique sur la plage et un magnifique couché de soleil.

- Demain apprécierons nous un peu plus le charme de Bali ou as-tu besoin d’un ficus souriant pour quelques transactions ? demanda-t-elle avec amusement, ayant il y a bien longtemps appris à rire de son statut de potiche.

Alors oui, elle aurait préféré partir à l’aventure dans la nature pour découvrir les anciens temples abandonnés et magies antiques, ou même lézarder sur la plage toute la journée, mais elle serait présente pour Thomas. En attendant, pour l’heure, la soirée était jeune et elle avait bien envie de profiter de cette pause dans cette apparence de petite héritière parfaite.

Les connaissances de Thomas en matière de moldus allaient de toute évidence au-delà de celles d’Adria qui n’avait jamais vraiment eu recours à eux hors de sa mère en cavale. Thomas les trouvait utiles, insipides, mais doués pour contourner leur manque de magie. Elle ne comprenait pas vraiment grand-chose à ces histoires de type Internette et pétrole, mais heureusement, l’industrie des bonbons était un peu plus compréhensible. Un peu. Mais elle croyait surtout Thomas quand il disait que cela rapportait.

- Mh. Ta patience est remarquable. Heureuse néanmoins que ton portefeuille d’actions se porte sur une industrie moins… opaque à notre monde. Quand bien même crois avoir largement été perdue lorsqu’ils ont parlé de “machinerie opérée par l’IA”,fit-elle remarquer en affichant un air quelque peu amusé. Cela dit… l’ingénieur qui m’en a parlé semblait avoir si rarement vu de femme qu’il a placé plus d’attention à mes formes qu’à ma possible perplexté. A tout réfléchir, poser ma main sur son avant bras était probablement trop…

C’est sans la moindre once de timidité qu’Adria avait alors entrepris de se débarrasser de sa robe de gala. Elle n’avait jamais été dotée d’une grande pudeur. Un corps restait un corps. D’autant plus que Thomas était son fiancé, et, certes, leur relation n’avait jamais été charnelle, il aurait bien fini par la découvrir sans vêtement un jour. Ils ne se mentaient pas, respectaient l’autre, alors pourquoi prétendrait-elle être gênée de son regard ? Justement, alors qu’elle ôtait ses bijoux, elle croisa le reflet de Thomas dans le miroir et remarqua son sourire alors qu’il s’amusait de son sens de l’observation. Un fait qu’elle avait mentionné dès leur première rencontre et qu’elle n’avait de toute évidence pas exagéré.

- Les gens sont des livres ouverts. Il suffit de savoir où regarder, répondit-elle avec un même amusement. C’est d’ailleurs particulièrement aisé quand on me croit dénuée d’une intelligence particulière.

C’était un peu triste… soyons honnêtes. Être considérée comme une véritable sotte n’ayant que pour ambition son apparence. Pour autant… Adria s’en amusait d’autant plus maintenant qu’elle trouvait sa place en ce monde et plus particulièrement aux côtés du Gaunt avec qui elle pouvait entièrement laisser de côté chaque mensonge sans crainte. Il en semblait d’ailleurs similaire, avouant sans le moindre mal les défauts de ses collègues moldus, dont plus particulièrement une femme, Wilemmina, qui semblait avoir jeté son dévolu sur le charme de l’Anglais. Adria ne put s’empêcher de laisser éclater un rire franc bien moins travaillé que ce pathétique rire mélodieux et constipé qu’elle servait constamment. Celui la avait au moins le mérite d’être, certes moins beau, mais chargé d’un amusement réel et plein. Thomas vint alors déposer un baiser sur son épaule nue, faisant frissonner la jeune Carrow, appréciant ce côté un brin plus délicat et tactile, mais qui demeurait toujours aussi respectueux que d'accoutumée.

- Thomas je t’en prie, au moment où tu t’es tourné pour récupérer deux flûtes de Champagne, son regard a dévié louuuuurdement sur ton fessier. Enfin, je ne vais pas l’en blâmer, dit-elle sans pouvoir retenir un nouveau rire. Quand tu en viens à négocier le contrat, je te suggère “d’accidentellement” laisser tomber ton crayon et de te pencher en avant pour le ramasser. Je te montrerai si tu veux.

Pauvre Thomas. Ou plutôt, pauvre Wilemmina. C’était un fait d’être reluqué par une vieille cougar et de voir sa fiancée s’en amuser, s’en était un autre d’avoir jeté son dévolu sur un homme tel que Thomas. Elle n’avait vraiment pas la moindre idée dans quoi elle avait égaré son intérêt. Mais au diable, ce n’en serait que d’autant plus grisant de voir le Gaunt planter ses crocs acérés dans cette femme qui n’avait pour aventage que sa richesse et son influence.

Une fois changée, Adria était passée sur la terrasse pour profiter de cette agréable vue et de ce soleil couchant. Une vue désormais agrémentée par un Thomas portant deux verres, dont l’un, lui étant destiné et correspondant à ses goûts réels. Elle le prit, avec un sourire amusé, bien que sincèrement touchée de voir que son fiancé apportait un réel intérêt aux détails et discernait sans grand mal le vrai du faux chez elle.

- Un whisky… Mh, Monsieur Gaunt, un geste de plus et je pourrai bien imiter Wilemmina dans ses fantasmes, taquina-t-elle sans retenir sa moquerie à l’encontre de la moldue.

Pour autant, elle n’en perdit pas de vue l’important. Oui, il s’agissait d’un moment de répit à l’étranger, mais Thomas avait aussi quelques affaires à régler, ce pour lesquelles elle n’aurait aucun mal à intervenir s’il avait besoin d’un joli rosier souriant. Mais le Gaunt déclina, affirmant désirer s’accorder un peu de temps, puisqu’il avait testé ses runes d’espionnage sur certains membres du gala. Adria ouvrit de grands yeux, surprise mais remplie d'intérêt, avant de pouffer de rire.

- Oh eh bien, nous nous ferons donc un plaisir d’entendre leurs murmures. Cela dit, je suis impressionnée par cette manigance, admit-elle, appréciant ce côté calculateur parfaitement assumé et son ingéniosité.

Merlin qu’elle se serait ennuyé avec un homme stupide et dénué d’une quelconque ambition. Thomas était loin de cela et avait le mérite de ne pas se cacher d’être calculateur et d’en vouloir toujours plus. A l’instant T, ça n’était pas le cas pourtant, puisqu’il demanda ce qu’elle voudrait voir. Le regard d’Adria se mit alors à pétiller telles deux émeraudes. Oubliez le faux intérêt qu’elle déployait. Non, ce regard était véritablement tout ce qu’il y avait de plus passionné et heureux.

- Tu viendrais, avec moi, en pleine jungle à la découverte des runes Kawi ? demanda-t-elle avec de grands yeux presque suppliants. Y a pas mal de grottes cachées des moldues car trop dangereuses. On les considère maudites, même les sorciers n’osent s’y rendre.

Son regard s’était transformé en air bien plus appuyé, presque provocateur. Après tout, Thomas et elle avaient suivi les mêmes études. Même si ce dernier était diplômé, il en gardait un attrait pour les maléfices et particulièrement les malédictions en vu de ses projets post-études. Alors, quoi de mieux que tenter le Gaunt par quelques sombres expéditions ?