Appréciais-je les soirées ? Mmh. La question pouvait se poser et, à vrai dire, j’étais presqu’incapable d’y répondre réellement. Je m’y ennuyais bien trop fréquemment pour admettre que je pouvais les apprécier, certes, mais elles pouvaient aussi m’apporter bon nombre de contact et de liens importants alors… Mmh. Question impossible. Nous nous arrêterions là.
Ce soir, c’était notre « victoire » contre Barty Croupton Jr que le département fêtait. Soit. Comme si c’était là une surprise, j’avais visiblement été assez convaincant pour laisser cet homme enfermé au fond de sa cellule. Le Ministère était heureux et moi… J’avais eu ce que je désirais. Cela me servirait, c’était un fait. Je prouvais seulement une nouvelle fois que j’étais capable de miracles. Surtout au regard du dossier affreusement vide de sens de ce condamné. Merlin… Il y avait eu tant de trous à combler pour être prêt à toutes les attaques de l’avocat adverse. Enfin. C’était donc désormais fini. Parfait.

Laissant le directeur du département porter son toast, j’hochai respectueusement la tête, toujours aussi sérieux, pour remercier l’assemblée de leur remerciement. La justice est toujours triomphante… Ah. Quelle douce plaisanterie lorsque lui comme moi savions pertinemment que l’un comme l’autre des partis aurait pu gagner. Il suffisait de trouver l’angle d’attaque. Une chance pour eux, donc, que j’aie trouvé le bon. C’était aussi simple que cela. Et certainement pas une question de « justice toujours triomphante ».

Passant aux remerciements individuels, je fis preuve de ma politesse froide habituelle. Pas un sourire. Pas un mot de plus que le nécessaire. Nul besoin de me confondre avec cette foule incapable d’attention. Ce n’était pas eux que je désirais voir. D’ailleurs, dans cette salle, peu de personne me semblait digne d’intérêt. J’avais, bien sûr, repéré la petite « princesse turque », mais grand bien lui en fasse. Je m’en moquais allègrement. Enfin…
Ce fut sans compter l’arrivée de Miss Bulstrode. Oh par tous les mages… Une sangsue accrochée à ma chaussure. Voilà ce qu’elle était. Sans arriver à pomper mon sang, cette jeune femme s’imaginait sûrement faire alliance avec une famille puissante. Soit. Quelle gentillesse, quel « honneur » que d’imaginer cela. Un honneur bien sûr loin d’être réciproque alors que je la repoussai poliment par trois fois sans que cela n’est d’effet. Evidemment. Et comme d’habitude, pensai-je même. Cette femme n’était-elle donc pas capable de comprendre ce qu’un simple « non » signifiait ? Les Bulstrode étaient-ils aussi vifs d’esprit et peu appréciables que des strangulot ? Possiblement. Dans tous les cas, tout aurait pu se dérouler sans heurt si, alors que je désirais quitter cet endroit, la jeune Bulstrode n’avait pas renversé sa coupe sur moi. Evidemment. En fin de compte, pas tant que ça… Une chose ne m’avait pas échappé alors que la scène se déroulait. Une chose bien particulière que je n’avais entendu qu’une seule fois il y a quelques semaines. Une chose qui mettait un fin mot à cette histoire sans même que je n’ai à investiguer.

- Je pense que vous m’avez bien assez « aidé » pour ce soir, Miss Bulstrode. Prononçai-je froidement en attrapant malgré tout délicatement son poignet pour l’éloigner de moi avant de reprendre, sans aucunement perdre de mon flegme habituel. Rassurez-vous, plaisantai-je, parfaitement à l’aise dans ce rôle, ce n’est que du champagne, malheureux, certes, pour nos papilles, mais seulement détestable pour mon costume.

Les rires fusèrent. Mon sourire s’étiola alors, inutile de jouer davantage la comédie. Je devais d’ailleurs la transformer en drame alors que du regard je cherchais quelque chose de bien particulier. Une chose qui était en train de s’échapper. Soit.

Sans plus attendre, m’excusant auprès des messieurs venus discuter, je pris la suite de la jeune femme avant de transplaner juste devant elle, la stoppant net dans sa marche, sourcil arqué.

- Je ne vous ferais pas l’affront de vous demander si vous êtes fière de votre coup. Prononçai-je calmement. Je me demande néanmoins pourquoi tant d’attention pour un pauvre homme « inférieur » à vous.

Une pique directe à ce qu’elle avait insinué à notre première rencontre. Oh. Je me moquais bien de ce qu’elle pensait, je voulais seulement la mettre face à quelques contradictions bien trouvées.

- Je suis néanmoins déçu, « Princesse », raillai-je toujours aussi sérieusement. Venant de vous, j’aurais pu m’attendre à plus d’originalité. Une coupe de champagne sur un costume… Et trahie par vos bracelets. Vous faites une piètre agresseuse.

- Que de grâce votre « Majesté ». Ironisai-je froidement. Vous voir vous intéresser à la plèbe, c’est une preuve de bonté d’âme, n’est-ce pas ?

Enfin. Ce n’était pas là le problème. Y en avait-il, d’ailleurs, un ? Outre son manque d’originalité autant que sa « blague » puérile et bien peu adaptée au monde du travail et des relations sociales… Vraiment. Dépitant. Une chance que j’aie du temps à perdre avec telle foutaise. Dans le cas contraire, je n’aurais même pas pris cette peine que de mettre quelques points sur des i oubliés de la jeune femme.

- Et vous avez, somme toute, de la chance. Vous êtes dans un lieu de travail, Miss. Pas une foire. Gardez vos plaisanteries pour Poudlard et pour les plus jeunes. Ils seront, sans doute, bien plus réceptifs que moi. Je note néanmoins que vous n’avez joué ce tour que par pure bonté. Merlin, désirez-vous donc que je vous encense ? Entre votre désir de m’aider à fuir et le fait que vous me parliez ? Je risque bientôt de défaillir.

Evidemment hormis mon premier recadrage, chaque mot que je prononçai était sarcastique. Prononcé dans un ton plus glacial que les nuits d’hiver dans les Highlands, je faisais preuve d’une fermeté claire à son égard. Je n’appréciais pas cette façon de faire, puérile. Elle qui se prenait pour une princesse n’en avait que l’attitude désagréable, pour sûr.

- Ajoutons à cela que vous vous souciez maintenant des partis qui me seraient acceptables. Vraiment. Je suis honoré. Soufflai-je, cette fois presque dépité. Mais laissez-moi reprendre plus sérieusement. Vous n’êtes rien ni personne ici. Ce qui vous semble un bon ou un mauvais parti ne regarde que vous et je vous prierais donc de garder vos commentaires pour vous et vous seule car je n’en ai aucunement besoin. Pour ce qui est de l’idée de mariage, là encore. Cela ne regarde que ma famille et moi. Participez aux rumeurs et aux racontars si cela vous chante mais permettez-moi de vous rappeler que le silence est bien plus appréciable que bien des paroles déplacées du genre.

Ou comment dire d’une manière polie et agréable que le son de sa voix commençait fermement à m’agacer. Je n’appréciais pas les petites filles à papa hautaine et se croyant tout permis. Son père, sa famille aurait pu être le roi du monde que cela n’aurait rien changé. Qui plus est. Sa famille n’était rien. Puissante, peut-être. Mais pas ici. Et elle avait tout intérêt à prendre le pli avant de s’attirer quelques ennuis.

- Bien. Je suppose que je dois donc vous souhaiter un bon retour là où les enfants de votre âge peuvent jouer en paix. Repris-je tout aussi froidement. Oh. Et avant que vous ne vous défendiez à coup de « vous n’avez pas d’humour ». Précisons que mon humour est certainement seulement plus mature que le vôtre, tout simplement. Sur ce, Miss Suleiman-i. Je vous souhaite un bon retour.

Et à jamais, devrais-je presque espérer.

- Parler de la vie privée d’autrui est déplacée, Miss. Rétorquai-je toujours aussi froidement. Tout comme ma réputation ne regarde que moi. A moins que vous ne désiriez vous unir à ma personne, ce que je n’espère pas car quoique vous pensiez de moi et malgré tout le respect que je vous dois, cela serait refusé, ces sujets sont de l’ordre du privé.

Bien sûr, dans notre monde existait un deuxième type de communication. Celui des rumeurs, des racontars. Ces cancans que je préférais prendre le parti d’ignorer faisaient partie de notre vie. Mais jamais il ne fallait montrer ces cancans de mariage ou de réputation sur le devant de la scène. C’était là une grave erreur de conduite. Erreur dont ne se rendait visiblement pas compte la jeune femme. Erreur de jeunesse, de culture ou d’intelligence ? Qui pouvait le savoir ? Elle, néanmoins, sembla penché pour la différence culturelle. Soit. Cela n’excusait rien puisqu’elle avança sur la table une vérité qu’elle aurait dû, depuis bien longtemps, mettre en œuvre.

- Effectivement. C’est à vous de vous adapter. Que les sujets abordés avec des inconnus soient triviaux chez vous ne m’intéresse pas. Cessez d’être une « Princesse » et devenez une femme. Cela vaudra mieux. Tant pour vous que pour votre avenir ici.

Je n’étais pour autant ni choqué ni peiné d’un tel traitement à vrai dire. J’étais seulement… Disons… Blasé. Oui, c’était certainement le terme le plus approprié.

- N’imaginez pas m’avoir causé le moindre tourment, rassurez-vous. Ironisai-je ainsi. Je serais piètre avocat si je prenais en considération ce genre de choses et si je me mettais en colère pour telles discussions.

Le fait était que je n’étais pas en colère, loin de là. Mon ton pouvait être bien trompeur, c’était un fait que je ne réfutais pas.
Enfin. Ainsi avais-je parlé. Que dire de plus ? Rien. Je n’avais pas réellement de temps à perdre. Cette soirée, de toutes les manières, m’ennuyait et tant de travail m’attendait en rentrant que je préférais encore quitter le Ministère pour rentrer. Ainsi m’avançai-je pour dépasser la jeune femme. Je n’étais qu’à quelques pas d’elle lorsque sa voix me figea sur place de surprise.

Sourcil arqué, je me tournai de nouveau vers elle, l’observant de haut en bas.

- Vous connaissez donc ma sœur ? Pauvre d’elle. Répondis-je, sarcastique comme à mon habitude. Je doute néanmoins que ce genre de chose ne l’amuse. A moins que vous ne désiriez prendre des leçons de bonne conduite. Elle excelle dans ce domaine. Commentai-je, presqu’acerbe.

Je me moquais bien qu’elle puisse connaître Adria. Qui était-elle ? Une élève de Poudlard, et alors ? La Carrow avait le droit d’avoir des amies, fort heureusement, même si j’admettais que son goût en la matière semblait être bien mauvais.

- Avez-vous donc d’autres choses à m’annoncer, Miss Suleiman-i ? D’autres anecdotes amusantes sur vos connaissances, d’autres idées absurdes à me faire part ? Allez-y, après tout vous semblez vouloir discuter.

Sinon, pourquoi m’avoir « retenu » par le nom de ma sœur ?