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Les rois du monde vivent au sommet
Maïwenn Zaig & Jean-Michel Moreau


~

Ils sont partis en été 2020 au Mont Blanc en débutant l'ascension par la voie classique soit le refuge du Nid d'Aigle, les voilà de nouveau en France, décembre 2022, visant le même sommet à atteindre, mais par une voie différente cette fois. La voie des Trois Monts. De toute façon, comme tous les chemins mènent à Rome, toutes les voies mènent au Mont Blanc.

À présent à l'abri du refuge des Cosmiques où ils ont passé la nuit, les deux adultes peuvent observer de bon matin au dessus de leur tête un vaste ciel bleu tout ce qu'il y a de plus dégagé ; un temps idéal pour le trajet qu'ils visent, donc.

« En espérant que ca se maintienne, ne peut s'empêcher Jean-Michel, dans sa langue maternelle, plus pour lui donc que pour Maïwenn qui l'accompagne. Il a la main en visière, les sourcils froncés et fait une légère moue... la deuxième fois qu'ils ont 'conquis' le Mont Blanc peu de temps après la naissance des jumeaux, la météo était à ce point redoutable qu'ils avaient dû faire demi tour sous risque d'être ensevelis sous une avalanche ou d'être pris dans une tempête de neige mortelle. Ils étaient alors rentrés en ruminant et Audrey, alors présente, avait fait raclette et vin chaud pour contenter les estomacs à défaut de leur quête des sommets. Cette fois, Audrey n'étant pas de l'aventure, ce serait à eux de s'y coller pour trouver remède à leur grincement de dents si l'ascension finissait par faire choumont blanc (elle est nulle, je sais). »

« J'ai préparé le vin chaud, des tasses, sans oublier... des coupes et une bouteille de champagne (il est fier et a le regard qui pétille pour le coup en disant ça), et toi, Maï ? Finit par demander Jean-Michel après un regard dans son sac à dos, un sac à dos beaucoup plus en profondeur qu'un sac moldu normal. De quoi y glisser une tente maxi confort, mais qu'il n'a pas apporté because aucune utilité for now à ses yeux. Il pose ensuite son regard interrogateur sur sa comparse de voyage tout en mettant bonnet et gants. Tout comme la rouquine à ses côtés, il est équipé comme le roi de l'ascension et a donc suffisamment de couches pour affronter le froid polaire. »


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Les rois du monde vivent au sommet



Une des passions de Maï est l’escalade ou plutôt grimper des sommets. Elle a besoin de se lancer des défis, de réaliser des escapades sportives où elle doit se dépasser. Surtout quand elle vit des moments difficiles de vie ou qu’elle doit surmonter des obstacles. Rien de mieux que de se retrouver en haut d’une montagne pour réfléchir et prendre des décisions. Elle a un parfait comparse pour cela : Jean Michel. Elle le connaît depuis plusieurs années grâce à sa femme : Audrey. Elles ont fait leurs études ensemble alors que lui étudiait en France mais ils se sont rencontrés dans la demeure des Moreaux et se sont découverts une passion commune pour la grimpe. C’est ainsi qu’ils ont décidés de grimper une première fois le Mont Blanc et depuis ils grimpent régulièrement ensemble à l’initiative de l’un ou de l’autre. Ils ont notamment à leur palmarès : une excursion réussie et c’est à la deuxième où ils ont dû arrêtés avant d’attendre le sommet. Maïwenn lui a écrit en novembre pour lui proposer de réessayer à nouveau durant les prochaines vacances. Il la connaît suffisamment pour savoir qu’il a dû se passer quelque chose dans sa vie pour qu’elle ait cette envie subitement. Il a accepté sans lui poser la moindre question. C’est ce qu’elle aime dans sa compagnie. Ils n’ont pas besoin de se parler pour se comprendre. Il sait comment elle est et elle le connaît aussi. Ils savent repérer mutuellement quand ils rencontrent des soucis. Le sujet viendra peut-être sur la table durant l’expédition ou non mais il sait que son besoin est avant tout de se dépasser physiquement. Cela lui est nécessaire pour pouvoir affronter la rentrée et les changements qu’elle va devoir apporter. Elle va devoir avoir de grandes discussions mais il n’est pas temps d’y penser.

Les voilà donc au refuge des cosmiques. Ils sont prêts au départ après une nuit reposante. Elle est souriante et impatiente de prendre le départ. Le temps s’annonce plutôt clément pour leur périple. Meilleur que lors de leur précédente tentative. Elle comprend un peu de français en tout cas assez pour comprendre ce qu’il baragouine. « Soyons optimiste, cela va se maintenir même si nous surveillerons au fur et à mesure ». Elle lui répond dans sa langue maternelle à elle. Car autant, elle arrive à comprendre autant elle est bien incapable de parler au-delà des salutations d’usage. Elle a un petit rire quand il évoque le vin chaud et la bouteille de champagne. C’est une grande tradition avec Jean Michel. Il a toujours une bouteille de champagne avec lui. Elle trouvait cela très bizarre au départ mais avec le temps elle s’y est habituée et éprouve même du plaisir à ce petit rituel. Elle rit à la vision de son sac. Il reste toujours le même mais c’est ainsi qu’elle l’apprécie. « Tu as pris l’essentiel comme toujours. Moi j’ai le strict nécessaire comme toujours. J’aime grimper légère ». Elle a tout ce qu’il faut évidemment mais rien de superflu. Elle ouvre la porte du refuge et le regarde. « Tu es prêt ? » Elle attend son accord puis s’engage dans la montagne. Ils ont étudié le trajet en amont et savent très bien par où ils doivent passer. Elle sent le froid sur son visage et elle se sent revigorée. Elle adore cette sensation et commence ainsi à marcher. « Comment vas-tu ? ». Ils parlent toujours en marchant.

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#4361 -




Les rois du monde vivent au sommet
Maïwenn Zaig & Jean-Michel Moreau


~

Pas besoin de demander quoique ce soit à la rouquine, il sait que cela ne servirait à rien de tenter de lui arracher les vers du nez – comme avec ses enfants – néanmoins, contrairement à sa chair et son sang, il sait aussi que lorsqu'elle le souhaitera, elle s'épanchera auprès de lui sans hésitation ni crainte de paraitre faible. Après tout, Jean-Michel en fait tout autant en lui parlant de ses problèmes comme de ses craintes et autant vous dire que sachant que Maïwenn est professeur à Poudlard, il l'aura pas mal fait tourner en bourrique concernant ses enfants... peut-être bien la raison d'un silence d'un mois une fois la rentrée passée, possible, Jean-Michel n'est pas genre à  calculer quand il s'agit de sa comparse de grimpe. Il lui jette un coup d'œil tout en esquissant un sourire en coin quand elle commente l'aspect météo ; à force de le côtoyer, aura-t-elle percé les mystères de la langue de Molière ? C'est en tout cas dans la langue de Shakespeare qu'ils poursuivront leur discussion durant cette semaine à défier les monts. Une semaine ! Ils prendront le temps qu'il faut et sans prendre de raccourcis façon sorcières ; ils ont en effet conclu une sorte de pacte, celui de se passer de baguette magique lorsqu'ils montent remontent et montent encore et toujours. Y compris lorsqu'ils descendent. Le pacte des fous, c'est comme ça qu'Audrey l'appelle après avoir tenté de les dissuader un nombre incalculable de fois par le passé.

J'aime grimper légère.

« Ha ! Attend que ta compagne se mette véritablement sur ton dos, LÀ, ce sera tout sauf léger, se moque t-il en vérifiant ses chaussures de marche tout en étant on ne peut plus sérieux à la fois. Le sac dans le quel il peut plonger son bras en entier, enchanté par magie, recèle de ressources en tout genre tant alimentaires qu'outillages car BON il a bien réussi à faire passer la pilule de la baguette absente à force, mais faut pas non plus pousser Audrey dans les orties, le sac est obligatoire et minutieusement rempli par cette dernière. »

Sac paré, équipements vérifiés, si ce n'est la première enjambée, il ne leur manque rien pour s'élancer vers l'aventure. Et c'est Maïwenn qui pousse la porte la première et prend les devants, Jean-Michel sur ses pas après qu'il lui ait simplement répondu « Toujours. ».

Voilà ainsi que le duo débute sa traversée non du désert mais des montagnes. Ils ont choisi la voie des Trois Monts et c'est donc en direction du Mont Blanc du Tacul, première étape, qu'ils avancent fermement et plein d'énergie dans les tripes. L'air frais les réveille sans soucis et Jean-Michel ressent déjà ses muscles de jambes se raffermir et chauffer pour la marche à suivre. « Comme un baudet enchanté, mais en plus beau et plus vigoureux surtout, répond t-il en riant, oui il est chargé comme cet animal, mais non il ne le ressent pas ainsi fort heureusement et grâce au sortilège utilisé sur le sac. Audrey par contre... comment l'a pris Nathanaelle ? Dis-moi que tu as eu une conversation de type scout et survie, Maï. Parce que lui n'y a pas échappé, il n'y échappe jamais malgré les années et les ascensions déjà passés. »


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Les rois du monde vivent au sommet



Il réagit en me voyant comprendre ses propos en français. A force de le fréquenter, j’ai fini par saisir quelques brides même si je serais bien incapable de parler. J’ai un petit sourire quand il évoque ma compagne. Il est vrai que pour l’instant, elle me laisse plutôt tranquille sur mon équipement. Sa seule exigence est ma présence pendant les fêtes. « Sa seule consigne impérieuse est notre présence obligatoire au nouvel an. Si nous nous ne sommes pas là à temps, nous allons en entendre parler ». elle tient à ce que je sois là et lui aussi d’ailleurs. Et il était hors de question que nous soyons absent pour Noël. En dehors de cela, elle respecte mon besoin de grimper et ne se mêle pas de mon sac. Je ris franchement à sa comparaison avec le baudet. Il ne change décidément pas avec le temps. Sa compagnie est toujours très agréable, toujours ponctué d’un humour rafraichissant. « Pas de discussion sur le côté scout et survie. Elle a tout de même tiqué pour le pacte sans baguette. Elle m’a traité de folle en me demandant comment on ferait en cas de pépin. J’ai réussi à la rassurer ou en tout cas à ce qu’elle accepte l’idée ». En même temps, il n’y a que nous deux pour décider de partir sans baguette alors que nous sommes des sorciers. Il n’y a que lui pour me suivre dans ce genre de défi et c’est bien pour cela que c’est un ami très proche de moi.

Nous voilà près à commencer notre marche. Le début d’une ascension de plusieurs jours où nous ne serons plus que tous les deux. Nous nous mettons en route profitant d’un beau soleil pour débuter cette ascension. La neige crisse sous nos pas alors que nous empruntons la voie des trois monts. Je prends la tête comme souvent. Notre rythme de marche est assez similaire et les débuts se sont en silence. Je profite de la vue et de me ressourcer. C’est reposant d’être avec lui malgré mon don. Ses pensées sont simples et il n’est pas en proie à de multiples tourments. Je n’ai pas besoin de me couper, de faire cet effort et je peux rester moi-même. C’est la seule personne avec qui je peux grimper sans que cela ne soit un effort mental important. Il sait que j’ai toujours besoin au début d’un moment calme sans parler pour pouvoir récupérer. Ce temps de silence est essentiel pour moi. Juste profiter de la beauté des paysages et du calme environnant. Le cadre est juste sublime avec les paysages enneigés tout autour d’eux. Un des rares que je peux avoir. Il sait quand il peut me reparler. Cela nous donne l’impression d’être seul au monde. Il n’y a pas grand monde en cette période : l’ascension est plus difficile en période hivernale alors il n’y a pas les cohortes de touriste de l’été. Les premiers pas sont toujours difficiles. Le temps de reprendre le rythme, que nos muscles se réhabituent à l’effort. Je sens qu’ils se chauffent au fur et à mesure.

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Les rois du monde vivent au sommet
Maïwenn Zaig & Jean-Michel Moreau


~

Pareil, pourrait répondre Jean-Michel quand Maïwenn l'informe de la teneur des propos de sa compagne, mais il ne le fait pas car il se doute que la rouquine est toute aussi consciente qu'il a lui-même dû faire pareille promesse. Être là pour le nouvel an, qu'importe l'heure, être présent c'est tout ce qui compte. Il n'a pas l'intention, de toute façon, de manquer pareil évènement en famille, d'autant que cette fois-ci il y aura les proches de Maïwenn pour se mêler aux fêtes des Moreau. Bref, s'il faut qu'ils trichent sur le compte à rebours en transplanant pour arriver à temps, ils le feront. Sans quoi on leur volera dans les plumes... et leurs oreilles bourdonneront pour mille ans.

Pas de plan sur la comète. Pas de leçon de survie sorti d'un livre pour enfants. Ou adulte. Pas de discussions autour des scouts. Jean-Michel pince les lèvres partagé entre jalousie et bonheur. Entre espièglerie et sérieux, il répond. « Rien de rien donc... bah, j'aurai toute l'ascension pour te bassiner au sujet de la nature, du flair à avoir, des outillages pour tout type de situation... tu vas adorer, Maï. » Jean-Michel lui lance un clin d'œil. Il n'en fera rien. Elle le sait. Ou alors il attendra le temps qu'il faut. Parce qu'il sait. Il sait que Maïwenn apprécie le calme autant que lui. Il sait qu'elle en a besoin d'une façon essentielle aussi.

Et c'est donc dans un silence d'église qu'ils entament d'un pas plus soutenu la montée enneigée. De part et d'autres des paysages enchanteurs, de ceux qu'on croirait emprisonné dans une boule à neige. Nul frisson ne parcourt son corps, seul la chaleur rayonne dans ses muscles sollicités pour ce type de marche. Ses pensées sont simples lors de leur ascension, elles tournent principalement autour des montagnes, du temps, de la projection de lui-même et Maïwenn déjà au sommet. A quelle heure arriveront ils ? Là, il pense à la bouteille de champagne et aux coupes qui s'entrechoquent. Puis de nouveau ses pensées dérivent sur les monts. Peut-être plus tard se mettra t-il à penser à ses enfants... c'est si Maïwenn dirige la conversation dans ce sens ou que quelque chose le pousse à s'en préoccuper. « Je me demande déjà quand est-ce que nous arriverons en haut et pourtant je sais, Maï, je sais, chaque chose en son temps. Il se parle à lui-même avant de véritablement attendre une réponse de la rouquine en posant la question suivante : Des idées pour la prochaine destination ? Une montagne que tu as toujours voulu faire et voir, peut-être ? » Il s'est écoulé au moins une heure déjà avant qu'il ne prenne la parole. Une heure de bonheur. Une heure qu'ils renouvèleront au fur et à mesure car ca leur fait du bien à tous les deux.


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#5161 -



Les rois du monde vivent au sommet



Marcher ainsi en silence, avec la seule compagnie de mon ami. Un des rares qui comprennent mon besoin de silence. Nous pouvons rester ainsi côte à côte sans que cela ne devienne gênant. J’entends que pour lui ça ne l’est pas. Le nombre de personnes qui prétendent que cela ne les gêne pas alors que j’entends bien dans leurs pensées que c’est le cas. Mais lui, il est entier. S’il a quelque chose à dire, il le dit et ses pensées correspondent à ses paroles. C’est bien pour cela que c’est reposant de marcher à ses côtés, de partager cette passion avec lui. Nous en sommes encore à la partie facile, quand nous pouvons marcher sans être encordé, sans avoir besoin de sortir les piolets. Mais cela va venir. La partie sûrement la plus excitante va bientôt arriver. J’aime quand cela devient exigeant, quand il faut être concentré. Je ne réponds rien à sa taquinerie. Je sais qu’il saura parfaitement quand il pourra évoquer le sujet. Tout est simple entre nous. Il n’y a jamais rien eu d’équivoque alors autant Nathanaëlle qu’Audrey nous laisse partir sans craindre qu’il ne se passe quoi que ce soit. Pendant une heure, ils marchent ainsi dans le plus complet silence. Elle se laisse porter par la beauté du paysage, trouvant une certaine osmose avec ses pensées à lui. Elle sourit en l’entendant penser au champagne mais rien qui ne trouble le plaisir de grimper ainsi en silence. Elle récupère ainsi un peu alors qu’il réfléchit à haute voix. Parfois, il a besoin de laisser échapper ses pensées ainsi. Une source de taquinerie. « Encore en train de te parler tout seul. A force d’être aussi obsédé par le champagne, je vais te croire accroc ». Une taquinerie envers lui. Il le sait et je la répète quasiment à chaque grimpe. Il me connaît et sait mon sens de l’humour en tout temps.

Il enchaîne en me demandant si j’ai une idée pour la prochaine destination. Mon regard s’illumine. Bien sûr que j’ai une idée. Je voulais lui en parler. Un gros défi, bien plus important que le Mont Blanc. J’espère qu’il aura envie de me suivre. « J’aimerais bien grimper en haut du K2. C’est un gros défi mais je suis sûre que nous pourrions y arriver avec l’entraînement nécessaire ». Je le regarde avec un grand sourire, les yeux brillants de désirs. Nous n’avons encore jamais fait de pareil sommet mais c’est mon rêve depuis toujours. Le Mont Blanc n’est qu’une des étapes nécessaires avant de pouvoir aboutir à ce rêve. Je l’ai déjà évoqué alors il ne devrait pas être surpris. Mes yeux brillent de détermination. Je crois que même s’il me dit non, j’irais le faire seule. Cela serait bien plus dangereux en solo mais j’en rêve tellement. Je suis donc dans l’expectative de sa réponse. Prête à insister, à déballer tous les arguments en faveur d’un oui si sa première impulsion est de dire non. Je souris quand je vois ou nous arrivons à la partie où nous devons nous encorder. C’est là où cela va devenir intéressant. Je prends le temps de m’équiper et de vérifier que nous sommes bien en sécurité. Désormais nous sommes liés l’un à l’autre par cette corde.
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#5207 -
Jean-Michel Moreau a écrit:



Les rois du monde vivent au sommet
Maïwenn Zaig & Jean-Michel Moreau


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'Bonjour, je m'appelle Jean-Mi et j'aime le champagne. Bonjouuuuur Jean-Mi,' fredonne les pensées du dénommé Jean-Michel quand sa partenaire de grimpe parle d'être accroc aux bulles. D'être en manque. Il sourit et dans sa tête cela rigole, cela projette une fausse situation, de fausses voix, de celle de réunions des alcooliques anonymes. Il ne dit rien. Ses pensées parlent pour lui. Parlent pour Maï. Elles la vannent légèrement avant de retomber dans la plénitude la plus parfaite des montagnes. Avant sa réelle question. Celle qui attend une réponse. Encore qu'il se sait impatient. Il sait pourtant que tout vient à point à qui sait attendre. Qu'il faut profiter du moment présent. Mais la question coule de sa bouche comme le sable des mains. De toute façon, pourquoi la retenir ? Maïwenn l'aurait entendu. Il le sait très bien aussi. La question ne fait de mal à personne et bientôt elle sera mise de côté, troquée par un bain de sérénité né du silence. En attendant, elle fait mouche. Les étoiles brillent et se mettent à danser dans les yeux de la rouquine. Et Jean-Michel ne peut s'empêcher de sourire. Evidemment. Cet videment compte aussi bien pour un 'quelle question, elle en a déjà parlé' que pour une affirmation un 'oui, j'irais'. Ce sera difficile, mais pas impossible. « Seulement lorsque nous serons prêts (il doit reprendre un rythme de croisière, cette ascension répondra pour partie à la question)... et si TU l'annonces à ma femme.  Elle va nous tuer. Te tuer. Et j'ai hâte d'entendre la réponse de ta compagne, Maï. » Réponse toute en harmonie entre paroles et pensées, mais jamais en contradiction. Et il sourit autant par l'impatience de monter de nouveau que par le défi que représentera l'annonce aux compagnes. Un supplice qu'il laisse volontiers à sa comparse même s'il aura son lot de remarques, de menaces et de gros yeux de la part d'Audrey dans leur intimité. Le courroux des dames, qu'il voit déjà de loin. Thriller psychologique. La mort dans les yeux.

La corde roule entre eux et se fixent à leur baudrier. Ils sont prêt à entamer une autre partie, un cran au dessus côté effort physique et, naturellement, avec son risque de danger. Jean-Michel vérifie une nouvelle fois l'état de ses crampons de chaussures. Remonte ses gants et tiens fermement ses piolets prêt à écorcher les flancs de la montagne, les pénétrer avec force pour se soutenir, lui, mais aussi Maï qui en fera de même. « Tu peux te permettre de glisser, je nous soutiendrais... sauf si tu as pris du poids. Tu as pris du poids Maï ? » Ils rigolent, il n'est pas sérieux à ce niveau, mais il l'est mortellement pour la première partie. Maï fait partie de sa famille. Elle est comme une sœur pour lui. Elle ne remplace pas Marie-Christine, loin de là, c'est un autre membre, vivante et qui ne les menacera jamais, il le sait. Il a toute confiance en elle. Il pourrait lui confier sa vie. D'ailleurs, pour la grimpe, le doute n'est pas permis. Maï est la pour lui comme il est là pour elle.

« Les dames d'abord, dit-il en souriant et dans sa langue natale, le français. »


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Les rois du monde vivent au sommet



Je le taquine et j’entends ses pensées en réponse. Cela me fait sourire. J’aime son humour qu’il n’a même pas besoin de prononcer. Il sait que j’entends et c’est reposant pour tout les deux. Il prend ma taquinerie avec légèreté. Rien de bien sérieux. Puis l’ascension se poursuit dans le calme. Le bonheur absolu. Pas besoin de mots pour combler le silence. Juste être ensemble et avancer dans cette montagne. Il pose la question qui me met des étoiles dans les yeux. Nous irons grimper le k2. J’entends dans son esprit qu’il n’est pas contre. Le plus dur va être de l’annoncer à nos compagnes. Il se défile en me laissant cette tâche. Je le regarde d’un air très taquin. « Aucun souci pour lui annoncer, c’est toi qui te devras subir les reproches une fois que vous serez de nouveau seul. J’aurais juste à affronter les yeux revolvers d’Audrey qui va encore nous traiter de fou ». J’ai un sourire en disant cela. Elle nous a toujours trouvé fou avec nos projets de grimpe mais elle finit toujours par accepter. Ce sont nos projets communs, nos challenges depuis qu’elle nous a fait nous rencontrer. Je sais que ma compagne va énormément s’inquiéter. Elle aussi va nous traiter de fou. « Elle va s’inquiéter c’est certain. Je l’entends déjà ». Le plus dur ne sera pas de grimper mais de faire face à nos compagnes respectives. Tout en continuant de discuter, nous nous équipons. Les choses sérieuses vont commencer. La corde nous unit. Cette corde qui est notre lien de sécurité. J’ai confiance en lui et je sais que c’est réciproque. Je ris franchement à sa remarque. « J’ai pris au moins cent kilo avec les fêtes. J’espère que tu as pris du muscle depuis la dernière fois ». Les taquineries continuent comme toujours. Il est très important pour moi, il fait parti de ma famille de cœur depuis tant d’années.

Nous sommes prêts alors nous commençons. Grimper, s’appuyer sur nos piolets. Nous grimpons pendant plusieurs heures, nous sommes presque à la verticale quand le temps se couvre soudainement. Du bleu clair au gris sombre. C’est ainsi en montagne, en quelques instants le temps peut radicalement changer. J’ai un air soucieux. « Cela ne présage rien de bon ». Nous saurons affronter, nous l’avons toujours su mais si cela s’aggrave trop, il est possible que nous devions renoncer à notre objectif. Nous n’en sommes pas encore là mais je garde encore plus le ciel à l’œil. Nous poursuivons notre grimpette ainsi. A la verticale, le vide juste en dessous de nous. Cela est impressionnant et tellement beau. Le vent commence à souffler, à venir balayer tout autour de nous. Heureusement nous sommes bien accrochés. Je jette un œil à mon ami et inconsciemment j’accélère le rythme de grimpe. Légèrement car c’est exigeant physiquement et qu’il ne faut pas trop pousser. Mais j’espère vraiment que nous arriverons au sommet. C’est ce qui est si grisant avec ce genre de sommet. L’incertitude de pouvoir y arriver malgré tous les entraînements. Car nous ne maitrisons pas tous les paramètres et il faut l’accepter.
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Les rois du monde vivent au sommet
Maïwenn Zaig & Jean-Michel Moreau


~

Il rigole doucement mais n'en rajoute pas, il se pâme et c'est tout. Il glousse à imaginer la réaction d'Audrey autant qu'il la craint d'avance. Si il doit vraiment faire l'ascension du diable, sa femme finira par l'accepter – non sans mots d'oiseaux à son encontre – mais elle sera surtout derrière lui avant le jour J pour s'assurer qu'il soit en forme... Maïwenn devra vivre la même expérience. Quelle idée aussi de se mettre en relation avec des medecins ! En attendant les voici tous les deux, les montagnards de la huppe et de la sorcellerie à se préparer pour une étape plus ardue et pour laquelle Jean-Michel relance une douce pique à la suite d'une note sincère et sérieux ; celle du poids. Et la rouquine qui saute dessus les pieds joints. « Du muscles, non. Du gras... ma foi... et encore, on a pas passé la nouvelle année ! Nos cordes nous auraient lâchés à la première tension sinon. » Toujours dans la légèreté, ce duo, alors qu'il propose à sa partenaire de grimpe de passer la première.

Toujours dans la légèreté, oui, mais dans le plus grand sérieux et la plus grande concentration lorsqu'il est question de monter encore et encore. Une heure de calme entre eux. Une heure de précision dans les gestes. Une heure de souffle mêlant froid et chaud. Une heure de poitrine chauffée et de mains gelées malgré les protections. Encore un effort. Toujours des efforts, résonnent les pensées de l'homme de temps en temps pour se donner la pulsion d'aller toujours plus haut, toujours plus loin. Et le temps qui s'assombrit soudain. Jean-Michel se concentre sur l'exercice et l'adrénaline de la grimpe, la joie qu'il éprouve malgré l'inconfort provoqué par ce changement de temps. Maïwenn sembla avoir dit quelque chose, il a entendu l'écho de sa voix, mais n'a pas su en déterminé le message délivré et envolé dans les montagnes. Sans doute le temps. Il ne voit que ça. Ils continuent et bientôt la corde qui les relie se tend, la rouquine ayant semble t-il une plus longue avance que prévue sur lui.

Le vent s'intensifie et Jean-Michel pousse un juron aussitôt étouffé par la bourrasque. Un pan de neige se décroche sur la droite, plus loin, à trois mètres de lui seulement, et l'homme s'arrête instantanément. Maïween sentira qu'il n'avance plus et suivra son regard tout en écoutant ses pensées. 'On attend... si risque d'avalanche, défi ou non, on transplane illico.' Il est soucieux. Sérieux. Il a promis a Audrey d'être prudent. Alors certes, il ne se balade pas avec sa baguette, apprécie la difficulté, mais s'il fait face à la mort, il n'hésitera pas à transplaner... il a encore beaucoup de chose à faire... et il doit s'occuper de ses enfants et de sa femme. Maïwenn partagera certainement son avis maintenant qu'elle a une femme et une enfant à charge. Lorsqu'après une minute voir deux, la neige semble t-il a cessé de vouloir se jouer d'eux, Jean-Michel reprend l'escalade en silence. Pour l'instant tout allait plutôt bien. Un coup de frayeur, à peine.


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