♱ Come back home ♱

Personne à qui dire je t’aime, mais tout le monde sur qui cracher ma haine… - Shae Warrens

         N’était-ce pas hilarant à quel point l’esprit humain était fragile ? Il suffisait d’un rien pour ébranler les fondations de la psyché humaine, pouvant difficilement éviter le doux traumatisme mental. Elle revoit sa mère faire usage d’un sortilège interdit sur une femme enceinte, protégé de justesse par l’homme qui se révélait être son père. Mort désormais et emportant avec lui toute raison qui avait pu retenir la main d’une mère, déjà portée par la furie, de détruire plus tôt l’objet de sa rage infini. Mais cette colère soudaine, intense, avait poussé son enfant disparu à être témoin d’une mort qu’elle aura provoqué par vengeance et engeance de la haine. Cette fille, pauvre petite victime des circonstances étrange de la vie, qui n'aurait jamais du assister à cette exécution, n’était autre que moi. En seulement une journée, j’avais tout perdu. J’en étais venue à me demander si les choses n’auraient pas été différentes, si je m’étais retenue de confronter ma mère. Si je ne lui avais pas dit toutes ces choses qui l’avaient poussé à prendre la décision stupide de fuir à l’autre bout du monde, poussant les Nott à cette traque insensée.
          Et j’en étais-là aujourd’hui, incapable de trouver le sommeil. Condamnée à revoir le corps de Maud tomber froid entre mes bras, après avoir été frappé par ce flash vert. Hantée par son regard vide, sans vie. Et je me voyais de nouveau hurler sous cette douleur implacable qui me rongeait les entrailles, et ce, à en perdre ma voix. Revoyant ces flammes pourtant si rouge se changer, sous cette expression de furie amputée par une peine incommensurable, en des flammes d’un bleu glaçant. Dont la chaleur drainait tout oxygène dès leur apparition… Dormir, c’était accepté de replonger dans cet enfer, comment alors pouvais-je encore réussir à fermer l’œil ? Pourquoi devais-je me rappeler encore et encore le fait que si Maud n’avait pas cherché la confrontation, on aurait pu à nouveau s’enfuir à travers ce portoloin ? Pourquoi devais-je me rappeler l’avoir justement pris seul, abandonnant derrière moi le corps de ma pauvre mère, dévorée par ces flammes bleues ? Mes propres flammes...

          « Hey… J’ai pas toute la journée. » Annonça-t-il, me forçant à lui prêter, de nouveau, attention. « Tu la veux cette merde ou pas ? » Je levais ma main pour attraper le sachet de Shit que je prenais habituellement, mais je m’arrêtais en observant celui contenant de la poudre blanche. Hésitante. « Je veux ça. Finalement. » L’homme m’observa, levant un sourcil. Il regarda mes narines, ou encore mes bras qui n’avait aucune trace de seringue. « Écoute gamine… Je te déconseille d’aller sur cette voie. » Le dealer qui faisait soudainement preuve de bonne conscience, venait-il de recevoir une illumination du seigneur ? « Je veux ça. » Répétais-je en lui balançant mon fric à la figure, le ton noir et froid. Si j’avais besoin de conseil, j’irais voir un évêque pour lui confesser mes problèmes. J’en profiterais certainement pour lui dire Ô combien j’avais craché sur son Dieu le jour même où il avait fait de moi la petite orpheline du quartier.
           Il me tend silencieusement le sachet contenant la poudre interdit, son regard me jugeait par pitié, plaignant sans doute mon pauvre choix de vie, celui que je m’apprêtais à arpenter. Mais je n’en avais rien à foutre de ce qu’il pensait, tout comme j’en avais rien à cirer de me démolir la santé. Quitter la rue, n’était qu’un moyen de rassurer ma mère. Devenir une élève avec de bonnes notes, fut simplement pour faire plaisir à ma mère. Créer un petit réseau d’échange commercial, uniquement dans le but de payer les soins dont ma mère avait besoin. Je n’avais plus de mère et par conséquent, je n’avais plus aucun but, aucune motivation ou ambition. Je n’avais rien à gagner, rien à perdre. C’était sans doute pour cette raison que depuis deux semaines, je n’étais pas retournée à Poudlard. Pourquoi Diable, retournerais-je là où deux Nott espéraient me retrouver ? C’était la question que je m’étais posée, pourtant ironiquement j’étais revenue à Pré-Au-Lard, comme si une partie de moi avait espoir que je trouve la force de guérir psychologiquement et de retourner sous la protection de l’école.  

            Je m’étais installée depuis quelques jours dans un cabanon abandonné qui avait du servir de boutique à une époque révolue. Pas de chauffage, pas de moyen de fermer correctement les portes ou les fenêtres qui se trouvaient dans un piteux état. N’importe qui pouvait rentrer et squatter les lieux. J’étais d’ailleurs actuellement n’importe qui en sein. Assise sur ce qui avait été autrefois un canapé, aujourd’hui rongé par les termites et autres nuisances. J’en étais à ne même plus me questionner sur mon hygiène, deux semaines sans me laver, sans porter de nouveaux vêtements. La rue et était rude. Je fixais cette poudre blanche dans son sachet, me demandant à quel point cette chose allait me faire planer et à quel moment, elle allait m’envoyer six pieds sous terre, rejoindre Maud sans doute en enfer. Elle, brûlant pour avoir arraché une enfant à sa mère véritable et moi, pour avoir provoqué ma propre déchéance. Je rangeais précieusement la substance à l’abri des regards, je ne pouvais pas encore l’utiliser. Il me fallait faire les choses bien. Hors de question que je sniffe, tout devait directement passer dans mon sang. Il me fallait donc me procurer une seringue.
            Devais-je contacter Malachi ? Nah… Il me forcerait à retourner à Poudlard, pire. Il m’empêcherait de prendre cette seringue s’il savait ce que cela m’infligerait. Je devais me débrouiller seule comme d’habitude. Je sortis mon morceau de pain déjà rassis, soufflant sur les quelques cafards encore dessus pour les dégager de mon dîner du soir. Maud me jugerait sûrement d’avoir osé dépenser mes ressources dans la drogue, plutôt que ma nourriture. Et Dieu sait que j’avais envie en cet instant de l’entendre me hurler dessus. Cela ne faisait que deux semaines et pourtant, j’avais déjà l’impression qu’une éternité s’était écoulée depuis la dernière fois que j’avais entendu sa voix. Le pain était dur, et j’avais l’impression de mâcher une espèce de grosse biscotte sans goût, couché sur ce canapé qui grinçait à la moindre de mes mouvements. Saloperie. Au moins, je ne sentais pas les insectes grouiller dedans. Un son étrange d’un pas sur le parquet, indiquant la présence d’un intrus, me fit me redresser pour observer autour de moi.
 
               Mon cœur manqua de rater un battement quand mon regard se posa sur celui si singulier et reconnaissable de la femme qui se dressait devant moi. Même en étant à la rue, elle avait réussi malgré tout à me retrouver. Ne pouvais-je donc pas échappé à l’obsession qui l’avait poussé à nous traquer la première fois ? Sa voix s’éleva, brisant le silence. Un frisson me traverse alors qu’elle me nomma par le nom que Maud m’avait tenu secret… Rayne. M’annonçant qu’elle ne pouvait qu’imaginer la haine que je lui portais. Mais même l’imaginer, elle ne le pouvait guère. Dire que j’avais eu de la compassion pour elle et de la colère envers Maud pour m’avoir arraché à elle. Mais son geste a fait d’elle le monstre qui hante mes nuits désormais. Ce que je ressentais pour elle, n’était pas suffisant pour être nommé simplement ‘‘haine’’. Elle me fit par de ses regrets par la suite, avant d’oser me demander de rentrer à la maison comme si j’étais cette gosse attrapée dans sa petite fugue du dimanche.
               C’était étrange… Mes lèvres étaient entrouvertes, mais aucun son ne voulait en sortir. Mes oreilles étaient attentives et pourtant, je n’entendais désormais plus rien d’autre que les battements de mon propre cœur, comme un bourdonnement d’acouphène. La colère était si intense que je me croyais sur le point d’imploser sur place, pourtant, ce fut des larmes qui coulaient le long de mes joues. « R… Rayne est… Morte. » Crachais-je simplement, la voix étouffée, brisée, comme si ma gorge recevait une terrible étreinte. Oui. Rayne était morte, tout comme allait bientôt l’être Shae. Et j’espérais même que l’on retrouverait mon corps inerte avec une seringue toujours planté dans le bras.  

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Personne à qui dire je t’aime, mais tout le monde sur qui cracher ma haine… - Shae Warrens

         Il y avait quelque chose de bien terrible dans cette rencontre et que je me refusais à accepter, si bien que le simple fait de m’en rendre compte là, à présent, me poussait aussi au dégoût envers ma propre personne. Oui, car je me sentais rassurée qu’il y ait encore une personne cherchant véritablement à savoir ce qu’il en était de moi. Je pouvais imaginer Malachi me forcer à retourner à Poudlard, ce n’était rien de plus qu’une création fantaisiste de mon esprit, pas la réalité. J’avais beau avoir choisi la rue comme dernière échappatoire, le fait que je m’étais rapprochée à nouveau d’un lieu familier comme si j’espère y croiser des connaissances même sans être vue, ne pouvait que me rappeler cette peur de la solitude qui continuait à m’accabler et quelque part, me pourrir un peu plus de l’intérieur. Oui. J’avais toujours ressenti une angoisse terrible quant à me retrouver seule et abandonné des autres. Était-ce pour cela que je ne tenais plus à être de ce monde à mon tour, après la mort de Maud ?
        Je ne voulais pas y penser, car je ne voulais pas ressentir un potentiel doute qui me pousserait à renoncer comme une lâche à ce que je m'apprêtais à me faire… Et elle, cette sorcière, n’avait pas le droit de jouer avec mes émotions de la sorte et de me faire espérer l’idée que je n’étais pas seule. Ce n’était qu’une vile illusion qui me susurrait simplement ses séduisants mensonges. J’étais un élément qui souillait le paysage qu’elle avait appris à connaître, elle avait déjà fait son deuil de cette enfant qui lui avait été arrachée. Comme elle le disait si bien, elle n’avait jamais été là pour moi ou moi pour elle. Je n’avais jamais appris à l’aimer elle, comme pourrait-elle ressentir quoi que ce soit pour moi ? Via cet amour inconditionnel d'une mère ? Pfff, ne me faites pas rire, ça n'existait pas, je ne croyais pas. Avait-elle oublié ce qu’elle m’avait dit lors de notre dernière rencontre ? Combien enchanté, elle était concernant l’impacte qu’avait eu son journal sur ceux qui m’avaient harcelé pendant six ans en pensant, comme elle, que j’étais une née-moldu ? Cela prouvait tout le mépris qu’elle ressentait pour moi à cause de ce qu’elle pensait de moi à ce moment-là... C'est-à-dire : une sale sang-de-bourbe qui n'avait eu que ce qu'elle méritait.

         Me faire croire que tout ceci n’était que du passé, n’était d’une hypocrisie sans fond. Elle aurait dû, elle aussi, resté terré dans le trou béant où elle était auparavant, à continuer de pleurer la mort de cet homme. Chacune son malheur, chacune sa souffrance. Elle tenta de m’appeler par le nom que m’avait offert celle qu’elle avait si froidement exécuté par vengeance, j’eus presque envie d’en rire. Alors elle était prête à se traîner vers une telle humiliation, pour que je rentre vers une demeure que je n’ai jamais connue. Et ce sera quoi la suite ? Me forcer à me plier à leur tradition de dégénérée, me forcer à rejoindre l’idéologie de ceux qui m’avaient traité comme une merde pendant six longues années. Me marier à je-ne-sais-quel consanguin décérébré ? À cette pensée, j’eus soudainement un rappel, par réflexe, je caressais, l’alliance à mon doigt. Avec tout ça, j’avais complètement oublié ce que Malachi et moi avions fait quelques jours avant que je ne confronte Maud pour qu'elle me dise la vérité sur mes origines.
         L’idée était de créer une situation qui pousserait sa famille à le rejeter, à le libérer de son héritage, à l’effacer de l’arbre généalogique comme s’il n’avait jamais existé. L’idée était qu’en tant que sang-de-bourbe, je répugne sa famille et j’avais trouvé le fait de foutre le bordel dans une famille de sang-pur si attrayante que j’en avais accepté la bêtise quelques années plus tôt. Voilà qu’il m’avait fait officiellement sa demande avant ma fuite avec Maud, un jeu qui n’aurait été que temporaire, si bien mené. Mais… Je n’étais même pas une Warrens, je n’étais même pas une née-moldu. Pire encore, cela ne pourrait que condamner Malachi aux griffes de sa famille si cette dernière connaissait la femme qui se tenait devant moi. C’était d’autant plus de raisons que de rester à la rue, ne jamais retourner auprès de lui à Poudlard, pas vrai ? Il devait annuler nos fiançailles et il se devait de trouver une autre née-moldu pour ce plan. Main dans la poche de mon jean troué au niveau des genoux, je retirais l’anneau. Je devais lui rendre, je n’en avais plus utilité. J’espère qu’il n’avait encore rien dit à sa famille, tout l’intérêt de provoquer de la colère chez eux, c’était d’annoncer ce projet publiquement.

        Ainsi, sa famille ne pourrait pas chercher à force ce projet à disparaître sous une trappe, si l’information s’était déjà propagée parmi les nobles. Cette femme ne semblait rien savoir, il y avait sans doute encore espoir que Malachi n'ait rien dit publiquement pour l'instant. Bof… Au fond, quelle importance ? L’idée en achetant cette merde Moldu, c’était que je sois à un moment ou un autre, emportée par une overdose sans me soucier des conséquents après ça. Les paroles de cette femme me forcèrent à revenir dans cet instant présent aussi pénible qu’une cage dans laquelle j’aurais été piégée. Quand elle m’annonça qu’elle était ma mère et bien d'autres conneries du même genre par la suite, je sentis mon sang ne faire qu’un tour dans mes veines. « Oh, tu veux jouer les mères ? Eh ben, Ok maman… Tu tiens à savoir comme je me porte, hein ? » Je levais ma main pour l’inviter faussement à me suivre. « Mais regarde donc autour de toi, tout va bien pour moi, non ? Mon palace, ne te plaît-il donc pas ? Je n'ai pas encore installé mon jacuzzi, certes, mais la vue sur Pré-Au-Lard est top ! » Je lui lance mon fameux bout de pain de sorte à ce qu’elle l’attrape sans aucun souci. « Tiens, goûte moi ça, il n'y a pas mieux dans le coin. Un vrai dîner de Prince. »
         Ma respiration était rapide, animée par la rage, c’était à peine si j’avais la force de contenir un hurlement qui aurait été tant libérateur. Mais je n’avais pas envie que le voisinage sache que je squattais illégalement les lieux. Je fus alors prise d’un épuisement soudain, j’étais devenue plus fragile, plus maigre qu’avant, et ce, à cause de la faim. « Arrêtons cette mascarade… Continue juste à me voir comme celle qui te crachait presque au visage dans cette boutique de chocolat, il y a plus d’un mois, tu veux ? Je te promets de ne pas souiller ta lignée, ton nom… Personne saura qui j’étais vraiment à Poudlard. Et si tu me laisses juste quelques jours, je ne serai plus un problème, si ce n'est qu'un mauvais souvenir… Tout sera pour toi presque comme avant, comme si ce bébé disparu n’était jamais réapparu dans ta vie. » Ma voix était redevenue plus calme sous ce ton résigné… Assurément, elle comprendrait ce que je voulais dire par là. « Tu sais où se trouve la sortie, je ne te raccompagne pas... Et tu peux garder ce pain. » Dis-je me laissant tomber de nouveau sur le canapé. Je chuchota alors prise d'une vague de nostalgie sans pourtant que le sentiment soit lié à un souvenir. « Il n'y a pas de plus beau cadeau qu'un rêve dont on ne revient pas. »

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Personne à qui dire je t’aime, mais tout le monde sur qui cracher ma haine… - Shae Warrens

         Pour être honnête, je n’avais même plus la force de m’énerver. J’étais pathétique, terriblement pathétique. La simple montée d’adrénaline d’il y a quelques instants, me donnait à présent des vertiges, avec la sensation non-agréable que ma tête était lourde, qu'elle tournait. J’avais à ce moment-là juste envie de me coucher sans rien faire d’autres que laisser ce mal de crâne passer. Mais aussi fort que je l’espérais, je ne pouvais remodeler la réalité à ma convenance et faire en sorte que cette femme disparaisse d'un simple battement de paupière. Cette dernière reprit la parole, en commençant par cracher ce qui pour moi était une évidence, le fait qu’elle était une lâche. Toutefois, elle se considérait de la sorte pour des raisons bien différente des miennes. Soi-disant, parce qu’elle n’avait pas su affronté son chagrin, qu’elle n’avait pas su prendre soin de moi quand j'en avais besoin ces dernières semaines. Non. Je m’en foutais pas mal de ce qu’elle pouvait bien ressentir vis-à-vis de son petit cœur meurtri.
           À mes yeux, elle avait été lâche, car elle n’avait pas su trouver la force d’épargner Maud. Elle avait été lâche, parce qu’elle n’avait pas eu le courage de voir vers qui je me serais tournée si ma mère était encore en vie. Elle me laissait aucun choix que d’avoir pour figure maternelle nul autre personne qu’elle. Mais je pus retenir ce ricanement nerveux lorsque employa le mot « départ » concernant son meurtre. Avait-elle peur d’être entendu d’un potentiel témoin ? Ma foi, les murs dans ce monde merdique et magique avaient effectivement de terribles oreilles, à l’affût de la moindre rumeur. J’aurais sans doute rétorqué en crachant mon venin de plus belle si j’avais eu plus d’énergie à revendre. Mais je ne pus que me contenter du silence, je sentais ma gorge toutefois se nouer sous la frustration. En me demandant pourquoi diable, elle insistait ? N’était-ce pas plus simple de me voir comme une étrangère ? Je n’arrivais pas à comprendre ou à saisir son cœur ou ses intentions, car je n’y trouvais aucun sens particulier ou familier.

             Ironiquement, je repensais à cette conversation que j’avais eue avec le professeur Nott, qui avait compris sans doute qui j’étais sans me le révéler ouvertement. Je comprenais pourquoi il avait insisté sur l’importance de la famille quand je disais de mon côté que sa valeur n’était qu’éphémère, qu'elle ne signifiait rien. Voulait-il me préparer subtilement à accepter cette situation présente, accepter le fait d’être une Nott ? Je relevais mon regard vers la sorcière, quand elle poursuivit en annonçant que ce n’était aucunement une mascarade, qu’elle avait véritablement pour désir mon bien-être. Mais c’était ici que divergeait nos pensées… Je n’avais aucune envie d’être sauvée. Au final, j’étais bien sa fille… Moi aussi, j’étais une lâche, je n’avais pas envie de confronter cet ‘‘amour’’ qu’elle me portait ou portait au sang dans mes veines. Je n’avais pas envie de savoir s’il était sincère ou non. Je n’avais pas envie de la comparer à Maud. En somme, comme elle, je fuyais en redoutant la réaction de ce cœur qui était le mien.
              Je n’arrivais plus à réfléchir, je n’avais pas la force de le faire. Mes paupières étaient lourdes, j’étais si épuiser et pourtant, ce n'était pas dû au sommeil qui manquait… Quand elle me baragouina qu’elle n’allait pas partir, qu’elle voulait m’emmener avec elle. La colère fit à nouveau surface comme la dernière pisse qui tardait à sortie après une longue urine salvatrice. « Je t’ai dit te barrer... Putain... Je... » Je me relevais, prête à la pousser de force vers la sortie… Mais… Ce fut moi qui fendis finalement vers l’entrée pour y vomir mes triples. Je n’avais rien dans l’estomac, alors c’était pratiquement que de l’eau que je régurgitais douloureusement. Cela durant quelques minutes qui me semblait une éternité. Je posais ma tête contre le mur, sous la chaleur qui semblait insoutenable et pourtant, il faisait si froid. À chaque fois que je tentais de bouger pour ne serait-ce que me relever, l’envie de vomir me saisissait de nouveau pour régurgiter du liquide de plus en plus transparent et clair.      

               Tout ceci me forçant au calme… « Je lui avais demandé de se rendre, d’arrêter de fuir… Et de dire ce qu’elle t’avait fait au Ministère. » Les paupières fermées, les mots sortirent de ma bouche comme un besoin remonter à la surface. Me noyant dans la douleur de ce malaise qui m’avait saisi. « Si elle n’avait pas choisi la confrontation, tout aurait été différent. Tout. » Ma voix était basse, l’épuisement accentuer par mes vomissements, me poussait vers les bras de Morphée. Si bien que mes mots en devenaient des chuchotements. « Elle a été lâche, elle aussi... » Lâche, car elle n’a pas osé assumer ses péchés, assumer la colère que je lui portais de m’avoir arrachée à ma véritable mère. Elle a choisi la mort pour que je la pleure à jamais et que je haïsse celle que j’aurais dû aimer. Au fond, j’en voulais terriblement à Maud de me maudire de la sorte. Elle aura échoué en tant que mère dans ses derniers instants et jamais je ne pourrais lui pardonner ça.
          J’ignorais combien de temps s’était écoulé après ma dernière phrase, ni même si cette femme avait dénié me répondre… J’avais déjà sombré sans m’en rendre compte à travers les rives onirique agitées par cette colère plus handicapante que bénéfique. J’aurais dû manger ce bout de pain, ça m’aurait évité de perdre connaissance à cause d’une simple montée d’adrénaline.


           C’est une lumière agaçante, mais pas désagréable qui me forçait à ouvrir les yeux à nouveau. Je me sentais légèrement plus revigorée que ces derniers jours, comme si j’avais enfin pu avoir une véritablement nuit de sommeil. Je ne ressentais pas les ressorts du canapé, ni même les démangeaisons provoquées par les puces en son sein. Non. Je ressentais le confort et la chaleur d’un bon lit. Dès que je le réalisais, je me redressais dubitative. Où est-ce que j'étais ? Silencieuse, je n’osais pas bouger, me contentant d’observer autour de moi. Qu’est-ce que c’était que cet endroit ? Un salon ? Mais avec un lit dedans ? D’ailleurs, la dimension de ce lit, était-ce vraiment un lit ? Est-ce que j’avais atterri dans la chambre d’un géant ? Mais un géant au goût extravagant et probablement un qui était fortuné ? L’appartement où je vivais avec Maud rentrerait dans cette pièce. J’entendais le son distinct d’un balai que l’on passait sur le sol.
             Le balai en question semblait enchanté pour se mouvoir seul. Qu’était-ce donc cette situation ? Plus important, qu’est-ce que je faisais avant de me réveiller ici ? Ah oui… J’avais acheté cette poudre et… Elle m’avait retrouvé, encore une fois, cette femme. Je pâlis quand je me souvins alors de la situation avant que je ne perde connaissance. Décalant le drap soyeux avant de me lever, et ce, pour aller observer le paysage par la fenêtre. Je ne reconnaissais absolument pas l’endroit. Mon regard se perdit toutefois sur le diaporama qui s’étendait devant la fenêtre de cette pièce, que j’avais du mal à associer à une simple chambre. Il faisait ni beau, ni mauvais. Une légère brume envahissait ce qui semblait être le domaine, mais je pouvais reconnaître une résidence avec une verdure bien taillée en de parfaites symétries, au loin, l’ombre de ce qui semblait être la lisière d’une forêt. Mais assurément, je n’étais plus à Pré-Au-Lard.

          Je réalisais alors après un petit moment autre chose… J’étais propre, pas de démangeaison. J’étais dans une tenue de chambre, pas le genre que je porterais en temps normal. Je ressentis un frisson… Si on avait pris mes affaires, qu’était advenu de ma cocaïne ?

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Personne à qui dire je t’aime, mais tout le monde sur qui cracher ma haine… - Shae Warrens

         J’avais été kidnappée par cette femme. Je n’en étais même plus étonnée avec tout ce que j’avais vécu en si peu de temps. Pourtant, j’étais étrangement calme, envahie par un sentiment paisible qui empêchait toute réaction de panique qui aurait été très légitime. Je ne savais pas où j’étais, alors même qu’on m’avait emmené ici contre mon gré. Et de toute évidence, je ne pouvais guère m’enfuir… Pas dans ce pyjama de luxe, pas sans mes affaires. Comment allais-je même pouvoir traverser cette brume ou cette forêt sans ma baguette ? S’il n’était que question de me perdre et de me laisser mourir de froid ou de faim dans une forêt dont je ne savais rien, alors je n’aurais pas hésité. Mais je ne me voyais aucunement réussir à distancer ces gens sans baguette, encore moins à leur échapper. Surtout à échapper à celle qui avait su si bien me traquer par deux fois. J’avais beau être têtue, je n’étais pas stupide.
         C’était une perte de temps que d’imaginer ne serait-ce qu’un plan, plus épuisant à mettre en place qu’à le réaliser. Lutter… Seuls les imbéciles en avaient le courage absurde. Non, j’avais tort, je ne pouvais point appeler cela du courage, mais de l’imbécilité aberrante. Sans être pessimiste, je voyais les choses avec un grand pragmatisme. Si je pouvais réellement réussir à disparaître, j’aurais dû réussir cette étape au côté de Maud. Nous avions échoué et retenter le coup, sachant le résultat à l’avance, était loin d’être une décision sage. Vivre la même chose, encore et encore, en boucle et sans fin, c’était cela pour moi la définition de l’enfer. Je n’avais aucune envie de lutter de la sorte, que mes décisions puissent être les raisons de ma propre potentielle folie. J’avais perdu… C’était ma défaite. Plus tôt, je l’acceptais, plus vite je pouvais émotionnellement passé à l’étape suivante. C’était comme ça dans la rue aussi, je n’avais pas ce que je voulais. Jamais.

         Je devais racler le sol et baisser le regard quand il le fallait, pour mieux bondir au moment opportun. Si je ne pouvais pas mourir, alors je pouvais toujours attendre que l’on cherche. Mon existence ne pouvait éternellement rester cachée. Sans doute, il était même préférable pour cette femme, comme pour moi, qu’elle me renvoie à Poudlard afin de ne pas attirer la suspicion sur elle et ses proches. Mais peut-être me trompais-je ? Je réfléchissais sans doute trop, est-ce que c’était-là le paysage devant moi qui me rendais si pensive dans sa monotone contemplation ? Ou bien était-ce plutôt là ce calme intérieur presque dérangeant qui m’offrait cette lucidité poignante ? Je n’avais pas de réponse, mais je réfléchissais plus vite que je le faisais en temps normal… Bien trop vite. J’avais envie de calmer ce cerveau avec une substance douteuse et ainsi, enfumer mes neurones dans un bain de narcotique. Réfléchir était aussi une prise de tête, parfois, il était plus simple de ne penser à rien.
           Il paraît que c’était ici le secret d’une bonne longévité que d’éviter la situation de stress. Et qu’il était stressant de gérer les pièges de l’intelligence. L’on frappa à la porte comme si j’étais l’hôte de cette chambre, comme si l’on attendait de moi que j’offre une pseudo-autorisation à entrer. Voulait-on encore me donner l'illusion du choix ? Quelle blague. Je restais sobrement silencieuse, le regard toujours perdu sur le paysage alors même qu’elle entra. Quand je daignais la fixer, aucun mot ne me venait à l’esprit. Je ne ressentais aucune colère, aucune peine, aucune souffrance. Mais une indifférence qui en était presque plus effrayante que le reste. Peut-être bien que ce fût une excellente idée qu’à cet instant, elle n’avait pas laissé ma baguette en ma possession. Je me sentais bizarrement capable du pire en cet instant. Le genre d’action que je n’aurais pourtant jamais osé même dans la plus folle des situations. Mais une action non-consciencieuse, guidée justement par la simple folie de l’indifférence face aux conséquences. Je n'étais pas moi-même.

          Et puis j’aurais réalisé ma bêtise après coup, j'aurais pris conscience de mon péché et je n’aurais jamais pu me regarder dans une glace. Je n’aurais jamais pu accepter de regarder mes propres mains qui m’auraient paru souillées à jamais. Elle était impressionnante la maman qui m'avait pris mon autre maman. Être capable de m’adresser la parole en faisant fi de la situation, comme si un kidnapping était normal, après... Une Meurtre. Mais que pouvais-je dire ? Au final, elle n’était finalement pas mieux que Maud, deux foutues kidnappeuses et moi, l’objet d’obsession de ces deux-là, incapable de faire preuve d’humanité envers l’objet en question. Je quittais la fenêtre pour retourner dans le conforme de ce lit. Puisque je n’avais plus le choix, autant accepter cette prison dorée et profiter du confort à laquelle je n’avais jamais eu le droit. Toujours silencieuse, je pris ce qui m’était donné… Cuisiner, ne semblait pas être le talent premier de celui ou celle qui avait préparé ce truc. Pour avoir très tôt appris à faire la cuisine, à cause de l’état de santé de Maud qui se détériorait, j’étais devenue habile du four.
          Je pouvais sentir qu’il manque des épices, si j’avais préparé ça moi-même, j’aurais sans doute assaisonné ça de sorte à relever à la fois le goût du poulet de son bouillant et de ses potentiels légumes. En soit… C’était une victoire. La victoire de la cuisine des pauvres, de la cuisine de quartier sur le je-ne-sais-quel recette aristocrate qu’on me faisait avaler. Et puis, je fixais le chocolat chaud, un instant, puis un autre. Et ce, peut-être durant un moment sans doute un peu trop long. Et je me souvins d’une chose que j’avais finie par oublier ces derniers jours, comme occultée par la furie qui m’avait saisi à cause de la mort de Maud. Le fait que j’avais goûté à du chocolat chaud, après avoir bousculé une femme enceinte. Oui. Enceinte. Mon regard se posa sur son ventre… Ce n’était pas le ventre d’une femme enceinte ça. « Le... » Pourquoi avais-je soudainement peur de poser la question ? Avais-je inconsciemment déjà compris ce qu’il en était. Pourquoi une femme qui aurait mis au monde un bébé, partirait-elle tout de suite après, à la recherche d’une renégate ?

            « Le bébé ? » Pourquoi avais-je demandé ? Qu’est-ce que ça changerait au fond ? Plus d’empathie pour elle. Pitié, Shae, soit forte bon sang, ne cherche pas de raison de culpabiliser de son sort… Ne cherche pas de raison de lui pardonner… Juste continue à la haïr, à la faire souffrir par ton rejet. Ne lui offre pas l’opportunité ou l’espoir d’être ta mère. Ce serait injuste pour toi, comme pour Maud. Simplement injuste.

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Personne à qui dire je t’aime, mais tout le monde sur qui cracher ma haine… - Shae Warrens

         Il fallait être aveugle et complètement inapte à comprendre les émotions, pour ne pas voir que la question venait de l’affecter d’une quelconque manière. Mais elle semblait habile pour garder une certaine contenance, comme si elle avait déjà fait ce genre de chose toute sa vie, celui de mettre un masque de façade sur son visage, devant les autres. Et ça ne devait pas être qu’elle, sinon comme des sorciers ayant participé à une telle traque pouvaient enseigner à Poudlard comme s’ils étaient des individus normaux. Comment le Ministère aurait pu laisser passer une telle chose si derrière, ces gens n’était guère de grands manipulateurs ? Et cette femme devant moi serait normalement à Azkaban si une justice existait véritablement en ce monde. Mais la souffrance dans son regard, ce n’était pas quelque chose que l’on pouvait facilement feindre. Le sien était terrifiant à observer, pas tant par son aspect, mais pour ce qu’il signifiait.
      Et puis elle l’annonça et ce fut comme si l’épée de Damoclès, attendant son heure au-dessus de ma tête, avait choisi ce moment pour s’abattre et brisé le peu de foi qu’il me restait. Je n’osais maintenant plus regarder ce ventre ou même ce visage. Elle avait fait une fausse-couche à cause de la confrontation avec Maud. Mon Dieu. Plus je digérais l’information, plus je me sentais fébrile sous le poids de la culpabilité. Elle en était à combien de mois ? De mémoire, son ventre me semblait déjà bien arrondi. Ce n’était pas un simple fœtus dont il était question, mais un bébé qui commençait sans doute à arriver à son terme. Comment pouvait-elle me demander de ne pas m’en faire ? Je la haïssais elle, mais pas ce bébé qui n’avait pas encore vécu pour ne serait qu’être jugé ou catalogué. Ce ne fut qu'une simple vie innocente qui avait été perdue, parce que j’avais fait le choix de quitter Poudlard et de confronter Maud.  

        Oui. Si j’étais restée à Poudlard, si je n’avais pas cherché à savoir ce que Maud me cachait, l’histoire aurait été différente. Elle ne m’aurait pas forcé à fuir avec elle, à pousser les Nott à nous poursuivre. Elle n’aurait pas cherché à tuer ma véritable mère sous cette rivalité absurde. C’était de ma faute, tout était parti d’une simple décision que j'avais prise. J’avais tué cet enfant… Comment faisait-elle pour être aussi forte actuellement ? Comment faisait-elle pour supporter mon regard empli de haine, alors qu’elle avait déjà tant perdu ? Rien que la mort de Maud, me poussait à abandonner la vie elle-même. Comment faisait-elle pour se relever avec le poids de cette souffrance ? C’était inutile de rajouter quoi que ce soit d’autre… Elle ne me convaincra pas du fait que je n’avais aucune responsabilité dans sa fausse-couche, malgré sa bonne fois pour tenter de me préserver d’une telle pensée, j'étais...  Trop têtu pour mon propre bien. Elle n’y arriverait tout simplement pas. En silence, je continuais à manger cette soupe…
         Elle était à présent bizarre salée, voilà qui était étonnant… Quelle étrange soupe sans goût qui devenait à présent succulente. Une goutte, puis une autre s’écrasèrent dans le bouillon… Ah. Je comprenais à présent ce goût particulier et soudain. Sans m’en rendre compte, ce corps criait la détresse que je n’exprimais pourtant pas, un corps qui avait aussi besoin de pleurer l’innocence perdue. Celle du bébé, ainsi que la mienne. Je frottais mes yeux pour en effacer les traces honteuses, mais elles revinrent à la charge dès lors que la pensée d’avoir causé la mort du bébé, me hanter à nouveau. La Nott Avery semblait avoir repris la parole à nouveau, mais ses mots semblaient aussi flous que ma vue brouillée par les larmes.

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         C’était dur, c’était plus fort que moi. Je ne pouvais m’empêcher de revoir toutes mes décisions et toutes les conséquences qui en avaient découlé. Comment pourrais-je encore fermer les yeux quand mon entêtement avait provoqué une série d’innombrables précipitations funestes ? Ma pauvre humanité me condamnait à cette sensibilité sur laquelle je n’avais aucun contrôle. C’était bien pour cela que je fumais et que j’avais l’intention de me droguer jusqu’à overdose. J’étais incapable de gérer mes colères, mes peines et mes douleurs. Si je jouais les dures, c’était bien parce que je me savais faible. Utiliser la violence comme un moyen de prouver que je n’étais pas de ceux que l’on traitait de lâche, mais au fond, je l’étais. La violence étant la fuite que j’avais choisi de parcourir pour occulter mes faiblesses. Pour autant, elles étaient toujours tassées au fond de ce cœur qui battait avec un acharnement inutile.
          Oui… La violence n’était en réalité rien de plus qu’une façade qui s’écroulait aussitôt que l’on en touchait la surface. Et suffisait qu’il en soit ébranlé pour que la mascarade cesse et que mon expression ou mes agissements trahissent et révèlent la laideur de ma fragilité. Et j’en étais arrivée à ce point, parce qu’au final quoi qu’on puisse me dire, ce bébé serait certainement dans son berceau si j’avais simplement été une élève plus modèle, moins enclin à enfreindre les règles… Et nul besoin de le répéter, inutile de m’infliger davantage de poids sur une conscience déjà oppressée par la culpabilité. Au final, je n’arrivais même plus à toucher à cette soupe, perdu simplement dans le reflet de mon visage apparaissant dans le liquide du récipient, reflet déformé par de multiples ondulations. J’étais hideuse, une hypocrite petite chose hideuse. Cette souffrance que je ressentais, c’était ce que je cherchais à fuir… Et cette sobriété et cette lucidité me forçaient à embrasser pleinement la douleur.

           Et je la désirais plus que jamais cette drogue, car elle m’aurait longtemps épargné tous ses tourments… La peine était telle que je ne prête guère plus attention à ce qui se passait autour de moi et devant mes propres yeux. Comme si je me trouvais au centre d’un océan calme, m’entraînant lentement vers ses fonds paisibles, mais mortels. Et je fus extirpée de justesse par cette étreinte, le genre de contact que je ne recevais normalement que d’une seule personne… Et combien de temps d’ailleurs ne l’avait-elle pas ressenti de la sorte ? La dernière fois, c’était à la rentrée de l’année 2022, Maud m’encourageant comme elle l’avait toujours fait et moi qui me montrais pessimiste comme à mon habitude. J’entendais, j’écoutais ses paroles… Mais ce n’est pas la voix de Maud, mais celle de cette femme qui lui aura pris la vie. Elle n’avait aucunement le droit de me prendre de la sorte et pourtant… Elle était la plus légitime à le faire.
          C’étaient les bras d’une tueuse, mais c’étaient aussi les bras de celle qui m’avait véritablement mis au monde. Le destin était cruel… L’enfant qu’elle avait perdu jadis était aujourd’hui en partie responsable de la mort de celui qu’elle portait encore en son ventre quelques semaines plus tôt. Elle avait raison, aucun mot ne pourra effacer ce que je ressentais. Et même si elle disait vrai quant au fait qu’elle n’avait pas eu à être sur le terrain, à traquer comme prédateur Maud et révéler ainsi Ô combien vil personnage elle était... Elle était alors certes, pas sans responsabilité et sa folie était en lui-même un crime. Mais cette lucidité nouvelle me forçait à cette empathie, j’étais la raison pour laquelle elle avait poursuivi Maud, j’avais été son obsession nouvelle. Ma présence avait influencé ses actes même déraisonnables. Alors, oui, elle avait beau tenté de prendre toute la responsabilité, mon cœur ne serait pas soulagé pour autant.

          Un frisson traversa l’ensemble de mon corps, ce n’était pas associé au dégoût et pourtant, c’était normalement ce que provoquait ce genre d’étreinte quand une autre personne que Maud cherchait à me prendre d'une façon si intime. Et lorsqu’elle prononça son rôle de mère, je me surpris à relâcher mes dernières tensions, me rendant compte que je subissais une étrange pression, certainement due à un stress quelconque. Et quand je réalisais le calme qui me gagnait, je ressentis l’envie de la repousser fortement, avec la même violence qui l’avait poussé à arracher la vie de sa rivale, justement parce que je ne voulais accepter qu'elle me procure un tel effet. Je devrais être furieuse qu'elle ait osé ce geste. Mais… Tout ce qui remontait en moi était beaucoup plus de larmes encore, alors que je me laissais engloutir davantage sous cette étreinte maternelle, mes mains l’agrippant avec rage et confusion. « Je te hais ! » Crachais-je alors que ma voix n’était plus qu’un gémissement. « Je me hais. » Rajoutais-je par la suite avant de finir avec cette dernière phrase. « Je la hais. »
         Le poids de la fatigue, cette soudaine remonter d’adrénaline et ce corps toujours affaibli me poussèrent de nouveau vers les bras de Morphée, alors même que je m'agrippais encore fortement à cette meurtrière. Comme le geste inconscient du nourrisson incapable de se séparer de sa plus grande protection... Sa mère. 

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         Si ces dernières semaines avaient été physiquement éprouvantes, à cause de la qualité de vie de la vie sans domicile fixe, elles l’avaient été davantage psychologiquement parlant. Que soit du au fait que mon esprit puisse avoir été rongé par l’idée que j’étais désormais seule, livrée à moi-même, où parce qu'il fut encore marqué par la mort de Maud, traumatisme indélébile. Indubitablement. Et j’en avais fait des cauchemars où je me revoyais vivre à nouveau ses derniers instant, la scène qui me hantait à chaque fois que je m’endormais. Si bien que mes réveils brutaux sous ces crises de paniques, me fussent paradoxalement salvatrices. La solitude n’aidant pas à rendre mes nuits plus paisibles, n’étant pas à l’abri d’un homme aux intentions peu vertueuses, remarquant que j'étais seul et vulnérable. Mais là… Ma sieste malgré le jour, avait été silencieuse, paisible, sans cadavre de Maud… Ce fut-là un véritable sommeil réparateur comme je n’en avais plus eu depuis un bon moment.  
         Et je ressentis comme un moment de regret lorsque j’ouvris les paupières, émergeant progressivement, confuse. Me retrouvant alors entre ce moment où le rêve s’arrêtait et celui où la réalité s’imposait. Au début, mon corps avait simplement réagi à ce confort, une sensation de chaleur qui remontait à ma plus tendre enfance quand je dormais encore dans le lit de Maud parce que… J’avais peu du noir. Je me redressais subitement en réalisant que cela ne pouvait pas être possible désormais. Je n’étais plus une gamine avec ce genre de phobie et Maud ne pouvait plus être là. Sur qui étais-je alors ? Je sentis mon corps se raidir et mon cœur battre plus vite dans ma poitrine en me rappelant ma perte de connaissance. J’étais si faible que le moindre fardeau émotionnel suffisait à me faire tomber. Et j’étais tombée si bas, au point de m'être agrippé à la seule femme que j'aurais pourtant repoussée. Je la fixais un instant, légèrement surprise que mon mouvement brusque ne l’avait pas réveillée à son tour.

          Mais… Maintenant, qu’elle dormait, elle n’avait plus l’air si effrayante, si hautaine ou sûr d’elle. Elle donnait même l’impression d’être inoffensive, sans défense, humaine… Ah ! Est-ce que je la voyais véritablement comme un monstre depuis le début ? Sans doute, mon esprit revoyait son visage déformé par la furie dans mes rêves, le visage qu'elle avait en tuant Maud. Un visage qui m’effrayait. Mais cette fois… Je ne voyais pas la déformation de ses traits, en fait... Je la trouvais même belle. Je remontais une mèche de ses cheveux qui cachaient une partie de son visage, curieuse de contempler un peu plus les traits dont… J’avais hérité. Et ce, avant de me rendre compte de mon geste. « Sérieux, qu’est-ce qui me prend ? » Chuchotais-je à moi-même, avant de simplement sortir du lit, honteuse. « C’est… C’est un monstre, pas ta mère, reprends-toi Shae. » Rajoutais-je en faisant le cent pas, me giflant la joue comme pour me punir d'avoir baissé ma garde même par curiosité, avançant par la suite jusqu’à la fenêtre donnant sur le domaine. J’étais pathétique, car rassurée.
           Pourquoi fallait-il que ma plus grande peur soit celui de l’abandon, celui d’être seule ? J’étais persuadée que c’était bien à cause de l’idée d’avoir encore une personne derrière moi, que je me sentais déjà mentalement mieux. Mais… Cela me faisait que m'enrager davantage que ce sentiment vienne du monstre de mes cauchemars. Je me retournais vers la Nott Avery en réalisant que si elle dormait, je pouvais peut-être en profiter pour fuir ? Theodore et Christopher Nott restaient des professeurs de Poudlard et l'année n'était pas terminée, alors peut-être qu’ils n’étaient pas présents. Je ne pouvais pas sortir du manoir dans ce pyjama, mais je pouvais trouver d’autres vêtements dans ce manoir. Je quittais alors la chambre le plus silencieusement possible en prenant soit de regarder si au moment de refermer la porte derrière moi, elle dormait toujours. Me retournant par la suite, je sursautais alors… Mais c’était immense, bordel. « Putain, mais par où je vais. » Après une quinzaine de minutes à ouvrir les portes, je me rendis compte que je tournais sans doute en rond. Où se trouvait leur putain de garde de robe !? 

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         Mon corps se raidit dans un sursaut quand j’entendis sa voix derrière moi, me retournant vers elle quelque peu perplexe. Je me demandais si c’était mon absence dans le lit qui avait fini par la réveiller, ou bien le son des portes que j’ouvrais et refermais à répétition. J’avais beau prendre les précautions nécessaires pour être discrète, le moindre petit choc ici résonnait d’un écho incontrôlable. À quoi s’attendre d’un lieu aussi grand et aussi spacieux. Preuve étant que j’avais beau être pieds nus, j’entendais mes pas sur le plancher brillant. Réveillée, cette femme avait cette expression qui me laissait à nouveau méfiante… Elle n’était pas différente en soit, mais bizarrement, je la préférais quelques minutes plutôt quand elle était endormie, ces traits adoucis l'humanisaient davantage à mes yeux. Là, j’avais l’étrange sentiment qu’elle avait toujours un truc derrière la tête et qu’elle n’était pas digne de confiance… Je l’écoutais me dire un truc qui passa bizarrement en travers de la gorge. Des fringues sur mesure ? Est-ce que cela voulait dire qu’elle avait vraiment pris mes mesures comme elle le prétendait ?

Je restais un moment silencieuse depuis l’endroit où j’étais, en temps normal, je n’avais pas grand mal à faire le pour et le contre. Mais là… J’hésitais à prendre une décision. Est-ce que si je la suivais, elle allait prendre ça comme une sorte d’acceptation à ce que je la laisse entrer dans ma vie, dans mon cœur et mon esprit ? Je ne voulais pas. Mais d’un autre côté, cette petite course m’avait fait comprendre que j’avais grand besoin de connaître les lieux. Sinon même pour aller aux chiottes, j’allais mettre dix putain de jours. Ce n’était pas possible que je puisse être aussi perdue dans un lieu. La dernière fois que j’étais aussi larguée, c’était durant ma première année à Poudlard. Trouver le premier cours sans l’aide de personne, la grande erreur de ma vie. Le cours était déjà terminé avant même que je ne réussisse à en trouver la salle, me retrouvant en heure de colle dès mes débuts à Poudlard.

Finalement, je m’approchais d’elle silencieusement… Arrivant à son niveau sans la lâcher des yeux. Ne voulant pas dire les mots qui confirmaient ma décision de la suivre, têtue comme j’étais. J’espérais presque qu’elle comprenne sans que je n'aie à le dire, que j’allais la suivre là où elle voudrait m’emmener. « De toute façon… Ce n’est pas comme si j’avais autre chose à faire ici. » Crachais-je finalement, incapable de tenir ma langue malgré mes efforts. Pathétique. 

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         Elle rajouta quelque chose sous un ton taquin, je sentis mon visage rougir… En me demandait évidemment, ce que cela pouvait bien signifie. Était-il possible qu’elle était réveillée quand je l’avais traité de monstre ? Est-ce que cela voulait dire qu’elle l’était aussi quand je l’ai touché ? Non ! C’était horrible, cela ne pouvait pas être vrai… Peut-être, qu’elle disait juste ça parce qu’elle-même avait conscience qu’elle n’était pas normale aux yeux des autres ? C’était peut-être aussi la façon dont je la regardais qui lui faisait penser que je la percevais comme un monstre. Oui. Il fallait que ce soit ça… Qui sait ce qu’elle pourrait comprendre si elle était réveillée à ce moment-là ? À quel point j’étais mentalement fragile et potentiellement influençable. Je m’étais endormie sur elle, c’était déjà un horrible signe quant à ce besoin ignoble que j’avais de vouloir garder une figure maternelle à portée de main et de cœur. J’étais la première à me rendre compte à quel point j’étais pathétique.
       J’espérais que cela puisse rester quelque chose que je serais la seule à savoir… Je n’avais pas besoin que mon cœur soit aussi facile à lire qu’un vulgaire livre, mais si moi et la subtilité, on n’était pas vraiment de bonnes amies. Je suivais alors cette femme en silence, elle me montra l’une des toilettes du domaine. Je me demandais combien il y avait dans un tel endroit au vu de sa taille. L’on poursuivit jusqu’à arrivée dans le salon, trop grand, trop spacieux, design trop ancien. J’avais l’impression d’être dans la demeure de la famille royale ou un genre de vieux musée de collection. Je m’arrêtais toutefois sur cette espèce de cheminée, mon attention portée vers les flammes. J’entends la voix de la Nott Avery s’élever de nouveau, m’expliquant que c’était le lieu des activités, étant apparemment l’endroit le plus animé du Manoir. C’était par conséquent l’endroit où je la trouverais elle et sa fille. Aucun doute pour moi, quant au fait que ça allait être l’endroit à éviter à l’avenir.

         Elle leva par la suite la voix, prononçant un nom bien étrange. Mais les sorciers avaient des idées de noms parfois bien farfelues donc je ne m'en étonnais point. Il y eut un craquement avant qu’une créature de très petite taille manifesta sa présence juste à côté de moi, donc ce n'était pas une sorcière. Non. Un elfe de maison, c’était, je crois la première fois que j’en voyais un de si près. Que j’en voyais un tout court, en fait. Je savais qu’il y en avait à Poudlard, mais ces derniers faisaient toujours en sorte de ne jamais apparaître devant un élève. J’observais la pauvre bête dans son espèce de torchon. Il fallait croire que Hermione Granger n’avait pas totalement réussi à abolir l’esclavage au vu de ce que je voyais. J’écoutais cet échange sans y prendre part, mais je n’aimais pas ce que je voyais par la suite. Elle voulait que je porte ses putains de fringues d’aristocrate ? Il en était hors de question… Enfin… C’était ce que je pensais avant qu’elle ne rajoute que cette Rhubarbe irait en récupérer d’autres tissus sous un ton qui ne plaisait pas vraiment.
        « Non, non ! J’aime beaucoup ! » J’avais réagi d’instinct et précipitamment, dans un mensonge des plus ridicules. Si je me foutais bien de ce qui pouvait m’arriver, l’idée qu’on puisse brutaliser une âme innocente par ma faute, c’était une autre histoire. Et cette Rhubarbe, je ne savais pas quel âge cet ou cette elfe avait, mais elle me semblait plutôt jeune. Cependant… « Je porterais tout ce que tu veux ici… Mais à Poudlard, je ne mettrais sur moi que les vêtements que Maud m’a acheté. »

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         Je détestais, ça ne correspondait aucunement à mon style, à ma personnalité et à ce que je représentais en mon for intérieur. C’était sans doute ce qui m’attendait si je restais ici, prétendre être ou devenir ce que je n’étais pas, me bercer dans une illusion pour le plaisir des autres. Cette femme ne faisait que se voiler la face si elle espérait un jour que je la vois comme une mère, c’était grotesque, c’était son illusion à elle. Mais les autres n’avaient pas à souffrir de sa folie parce que je refusais de prendre part à ses rêveries. Non merci, j’avais déjà assez sur la conscience pour m’ajouter d’autre forme de poids. Du moins, jusqu’à ce qu’un jour ou l’autre, je récupère ma poudre blanche. Elle répéta sa question, j’en haussais les épaules. « Il y a beaucoup de choses qui m’incommodent dans la vie, comme respirer le même air que le vôtre par exemple. Je ne vais pas m’en plaindre. » Oui, je voulais juste être blessante, je ne pouvais pas tellement m’en empêcher, c’était dans ma personnalité.

Celle qui me poussait à être si acide dans ma manière d'être, comme si c’était là mon unique moyen de me préserver de l’inconnu ou de ce qui me faisait simple peur. La blesser avant qu’elle ne le fasse pour moi, être provoquante pour la pousser à me haïr. Oui, comme s’il serait plus naturel de la voir adopter avec moi un comportement plus hostile. Sans doute que parce que je n’aimais pas l’idée que malgré ma haine, elle prétendait ou voulait pour sa part m’apporter de l’amour ou je-ne-sais-quel bêtise de la sorte. Quand elle m’annonça que je n’étais pas prisonnière, je levais un sourcil me gardant de rire ouvertement. « Je suis ici parce que tu voulais que je sois ici, si ma santé était ton souci majeur, je serais simplement à St-Mangouste. Je suis persuadée qu’il n’y a pas plus sécuritaire là-bas au vu des patients qu’ils ont par moment. » C’était inutile d’insulter mon intelligence, elle voulait m’avoir ici depuis le début. Et malgré mon refus, elle a simplement profité de mon malaise pour me conduire en ses lieux.  

Elle me parlait du fait que j’étais libre, pas retenue captive. Mais au final, elle retenait entre ces murs les seules choses qui m’empêchaient de réellement partir. Je la suivais pour continuer cette visite, jusqu’à arriver dans une pièce contenant un grand lit, elle semblait plus grande encore que l’espèce de chambre dans laquelle je m’étais réveillée la première fois. « Qu... Quoi ? » M'étonnais-je légitimement face à ses propos. Donc, elle avait décidé que je vivrais ici au final ! Elle était donc si sûre que ça que je resterais ? Ah... Ah. Bien sûr qu'elle était sûre que je resterais, elle s’était après tout assurée que je n’ai plus de toit où vivre avec la mort de sa rivale. Je ne répondis rien... Baissant les yeux. « Comment fais-tu pour réussir à supporter mon regard, mes critiques, mes provocations ? Pourquoi n’abandonnes-tu pas ? Je suis sûre que tu sais que je vais tout faire pour te faire mal, psychologiquement... Pourquoi tu me veux malgré tout ici !? Abandonne-moi et haïs-moi, putain ! Tu te sentiras mieux si tu ne me cherches pas à me porter dans ton cœur ! »

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         Quand elle annonça que j’étais aussi incendiaire qu’elle pouvait apparemment l’être à une époque et que c'était probablement un trait de famille, je ressentis comme un frisson. Se pouvait-il que j’aie pu prendre d’elle au niveau de mon tempérament, bien que je n’eusse reçu aucune éducation de sa part qui aurait pu forger potentiellement un caractère similaire au sien. Comme si ce que j’étais, ce que je devais devenir, était déjà programmé à travers mes gènes. L’idée en était effrayante, angoissante. Je ne pouvais que me demander alors si j’allais finir par devenir comme elle, aussi froide que meurtrière. Si c’était le cas, c’était une condamnation, une malédiction. Et je ne tenais absolument pas à devenir ce genre de monstre capable d’arracher la vie comme s’il ne s’agissait que d’une simple bougie sur laquelle on soufflait. Ma gorge se noua face à l’idée terrible que ma vie elle-même pouvait être consumée par ma propre haine.
           Puis, enfin, elle se montra davantage plus honnête. J’aurais dû me sentir victorieuse de l’avoir forcé à avouer son vice, mais les mots me dérangent. Ce n’était pas ce que je voulais finalement pleinement entendre. Je voulais révéler son égoïsme et au final, je lui avais encore donné l’opportunité de montrer que tout cela était soi-disant pour moi, pour ma sécurité. Me faisant hésiter à ajouter quoi que ce soit d’autre, elle avait assez de talent pour jouer de ses mots et tourner tout argument à son avantage. Je ne voulais pas laisser son venin m’atteindre, elle était à la tête d'un journal, elle était donc douée pour tromper et manipuler les gens à l’aide de mots habiles. Mais peut-être qu’elle m’avait déjà un peu contaminé, puisque que je n’avais pas pu m’empêcher de lui poser ces dernières questions. Comme si au fond de moi, j’avais ressenti malgré tout le besoin de mettre des formes à ses agissements, comme si j’avais besoin de l’entendre dire ses mots.

           Et elle les prononça, parlant d’une chose que je ne comprenais pas et sans doute, que je ne comprendrais jamais. Je n’avais pas l’envie et l’intention de devenir mère... Pitié. Je détestais les gosses. Je plissais les yeux quand elle annonça que tout ce que je pouvais faire ou dire pour la blesser, n’était rien comparé à ce qui s’était passé le jour de ma naissance. Que pouvais-je dire quant à ce que je venais d’entendre ? Les bras croisés, je cachais les soudains tremblements, ces derniers plus dus à un conflit émotion qu'une soudaine chute de tension. Un conflit qui opposait ma haine pour ce que cette femme avait fait à Maud et la compassion que j’avais pour elle pour ce que Maud lui avait fait bien avant. Quand elle annonça qu’elle attendrait le temps qu’il faudra, cette compassion prit exceptionnellement le dessus sur ma haine, laissant ce mot m’échapper en une réponse bref. « D’accord. » Je ne relevais pas mon regard vers elle, de peur qu’elle y lise quelque chose que je ne voulais pas qu’elle s’aperçoive... Moment de faiblesse qui ne devait rester que le mien.  
           Passant devant elle pour sortir de la chambre, je rajoutais. « Je... Je retourne me coucher, maintenant. » Mots qui manquaient de conviction, mais j’étais en cet instant plus d’humeur à être avec cette femme dans la confrontation. Sentant que si je m’évertuais à rester auprès d’elle, j’allais céder à quelque chose qui trahirait mon amour pour Maud. Fuir était donc en cet instant la seule solution qui m’apparaissait sage.