Est-ce que je m’attendais à ça ? Pas vraiment. Enfin… J’avais bien vu que quelque chose n’allait pas, qu’il était plus tendu qu’habituellement, qu’il peinait à me rassurer alors que j’en avais besoin, réellement besoin. Et puis d’un coup, tout s’était terminé. Il avait craqué. Il avait lâché. Un burn-out disait-on. Un relâchement que je n’avais pas supporté. Pourquoi maintenant ? Pourquoi comme ça ? Je m’étais retrouvée seule. Trop vite. Au moment où j’avais le plus besoin de lui.

Recroquevillée sur mon lit à Poudlard que j’avais rejoins le matin même, mon visage caché sur mes genoux, je tentais d’arrêter de sangloter. Voilà bien des semaines, de très longues semaines, que je ne m’étais pas retrouvée ici seule, dormant habituellement avec lui dans ses appartements. Alors maintenant… Qu’est-ce que je devais faire ?

A vrai dire, il n’y avait rien à faire. C’était terminé et ça s’arrêtait là. J’étais de nouveau seule et mon idole de jeunesse était partie. Je me sentais… Dépourvue. Oui. Voilà. C’était le mot. J’étais dépourvue. Je ne savais pas quoi faire ni quoi dire ou à qui me confier. Je n’avais personne. Du moins était-ce l’impression. Une impression que je tentais malgré tout de faire taire. Non… Non, je n’étais pas toute seule ici, chez moi. J’avais Elora, Amos, et puis j’étais sûre qu’avec un peu de temps Marcus finirait par m’apprécier. En attendant… Soufflant, je me laissai tomber sur le dos, fixant le plafond. Je n’avais rien envie de faire. Rien. Du tout. Mais la rentrée était dans quelques jours alors… Couinant un coup en attrapant mon oreiller pour le serrer contre moi, je ravalai de nouvelles larmes pour me redresser, essuyant mes yeux du revers de ma main pour quitter soudainement mon lit et même mes appartements, claquant la porte de ma salle de classe derrière moi.

Où allais-je ? J’avais une très bonne idée de là où je vous aller. Le comment, par contre… Je ne voulais juste pas croiser d’élèves restés à Poudlard. C’était tout. Et c’est pour cela que mon trajet fut doublé. Je ne voulais croiser personne sauf…

- Amos…

Arrivée devant le professeur, devant son bureau, les yeux pleins de larmes, je baissai la tête. Qu’est-ce que je faisais ici ? Pourquoi étais-je venu le déranger ? Je commençais déjà à le regretter… Le pauvre qui devait supporter cette vision affreuse…

- Il m’a quitté… Et…

Et j’avais peur. Je me sentais seule. Triste. Malheureuse plutôt. Epuisée. J’avais comme mal à mes blessures pourtant guéries, à ce bras qui avait porté cette phrase immonde. Et je n’arrivais pas à le lui dire parce que j’avais honte de moi, de ce que j’étais actuellement, à savoir presque plus rien d’autre qu’une loque.
Un câlin… C’était ce dont j’avais envie et ce que je n’aurais plus jamais. Du moins était-ce ce que je pensais, ce que j’imaginais : j’étais une sale hybride, ils me l’avaient inscrit jusque dans la chair. Qui pouvait aimer une sale hybride quand même celui qui devait me protéger n’y était pas arrivé ?

Pourquoi étais-je venue le voir ? A cet instant, je me fustigeai intérieurement d’avoir osé le déranger. Nouille que j’étais… J’aurais dû rester dans mes appartements. Le Professeur McGonagall m’avait, de toutes les manières, autorisée à ne pas reprendre immédiatement les cours… Enfin… Que pourrais-je dire à mes étudiants si ces derniers venaient à me croiser au château sans que je ne leur fasse cours ? Non… C’était hors de propos. Et c’était idiot d’être venu. Je n’avais même pas réussi à terminer une phrase que… Les bras d’Amos se refermèrent sur moi. Me mettant à sangloter, je me blottis l’espace de quelques instants contre mon collègue, mon ami avant que sa voix ne me sorte de mes insultes internes.

Il était légilimens et je l’avais oublié… Je n’étais qu’une idiote ! Je ne voulais pas qu’il sache ce genre de choses. Et quoiqu’il dise… Non… Andrew savait, il prenait une potion tous les jours pour me prouver qu’il tenait à moi. Et… Et peut être qu’il avait fini par en avoir marre de faire tout ces efforts parce que je n’étais même pas assez humaine pour être normale et… Et il fallait que j’arrête de penser ! Il lisait dans mes pensées et je ne voulais certainement pas paraître plus pitoyable que je ne l’étais déjà… Ainsi, alors que mes sanglots cessaient légèrement à son contact, j’hochai doucement la tête. J’aurais certainement plus eu besoin d’un whisky pur feu en triple que d’un chocolat chaud mais le chocolat m’allait malgré tout.

Le laissant essuyer mes larmes doucement, je le suivis jusqu’au divan dans lequel je m’installai en tailleur, toujours aussi à l’aise malgré les situations, lorsque j’étais avec lui – notre dernière sortie gueule de bois (pour ma part) ayant très certainement aidé dans ce sens.
La tête basse alors que ma main libre venait prendre ce chocolat chaud censé être réconfortant… je me mis davantage à sangloter, reposant la tasse à son emplacement initial.

- On buvait un chocolat chaud quand il m’a demandé de vivre avec lui…

Et un mois et demi plus tard, tout s’était terminé… Me recroquevillant légèrement sur moi-même, je mis quelques longs instants à me calmer, à respirer avant de reprendre parole.

- J’en sais rien… Tout allait bien, enfin je crois… On vivait bien ensemble, et puis il m’appelait « Madame Mackelled » aussi… Et il a tout lâché… ça allait plus d’un coup et… Et j’ai pas insisté… C’est ma faute… Sanglotai-je entre chaque phrase. J’aurais dû insister… Il va pas bien et moi… Moi je l’ai abandonné…

En un sens, il m’avait aussi demandé de partir. Alors j’étais partie. Parce que je n’avais pas la force de me battre. Parce que j’avais peur. Que je ne dormais pas ou peu. Que les cauchemars qu’il avait fait cesser avaient repris de plus belle. Que j’avais mal et que je craignais de nouvelles agressions sans que je n’aie rien demandé ni fait à personne. Et lui aussi avait eu à subir cette agression. S’il ne m’avait pas montré son inquiétude, s’il était resté presque stoïque… Il avait dû en avoir marre… La potion, les agressions, mes inquiétudes qui ne partait pas concernant ma race même pas humaine… Trop de choses… C’est moi qui l’avais poussé à tout arrêter et… Et je m’en voulais parce que je l’aimais. Plus que tout. Et que je n’imaginais même pas l’avenir possible sans lui. Je n’étais qu’un monstre qui allait finir seule avec des chats… Si je ne me faisais pas tuer avant. De toutes façons j’allais démissionner et allez me jeter du haut d’un clocher d’un couvent que j’aurais rejoint. Oui. Voilà. C’était un bon plan de vie ça.

Je n'étais pas quelqu'un de foncièrement tactile. Je dirais même que j'étais l'inverse. Echaudée par bien trop d'hommes dont le seul désir était de se « taper » une hybride ou seulement attirée par ce que je montrais sans le désirer, je n’avais jamais cherché le contact. Hormis cette fois en Grèce et puis… Et puis avec Andy. Sauf que je n’avais plus Andy. Je n’avais plus personne. Pas dans ce sens là du terme et soudain… J’avais envie de contact. Paradoxal, c’est certain. Mais Amos était un ami sincère et ses bras qui se refermaient sur moi eurent au moins le mérite, à défaut de m’apaiser, de combler cet espèce de vide qui se créait sur ma peau et dont je n’arrivais pas à me défaire depuis que j’étais revenue à Poudlard et que j’avais quitté notre… sa maison.

Mais l’apaisement, lui, ne venait pas, toujours pas. Tourmentée, je ne voyais désormais plus que mon incapacité à l’aider. Je l’avais abandonné. Il n’allait pas bien et je l’avais abandonné. Amos, lui, n’était pas d’accord. Il n’était pas stable ? Comment pouvait-il ne pas être stable, c’était une personne intelligente, gentille, attentionnée, tendre quand il voulait et moi… J’avais tout foutu en l’air par ma faute. Ce que j’avais fait ? Je m’étais laissée agressée, je lui avais parlé de famille et… Et c’était sûrement trop. Merlin que je m’en voulais… Et ce même si d’après mon collègue je n’avais pas à me sentir coupable. Je n’arrivais pas à faire autrement…

- Stronzo ? Finis-je par demander, ne connaissant pas ce terme-là. Je sais pas… S’empoisonner juste pour pas que j’attire sans fondement c’est trop demandé… Soufflai-je à mi-voix en me laissant aller contre cet ami qui, malgré des mots qui n’arrivaient que peu à me convaincre, réussissait au moins à calmer mes tremblements et mes sanglots par ses lentes caresses.

Arquant un sourcil néanmoins, je tournai légèrement la tête pour l’entrapercevoir alors, qu’une fois n’étant pas coutume, Amos commençait à raconter une anecdote personnelle. Clignant des yeux, je baissai de nouveau la tête lorsqu’il eut terminé.

- Tu as pas intérêt à changer… Répondis-je alors.

Après tout… S’il avait changé ou s’il changeait… Il ne serait plus l’ami qui tentait de me soulager, quand bien même ses efforts ne payaient pas le prix qu’il méritait. Une moue malheureuse au visage, je me recroquevillai alors de nouveau contre lui, mon dos pressé contre son torse alors que mes genoux étaient définitivement ramenés sous mon menton.

- Il a pas dit que je n’étais pas bien… Juste…

Juste c’était moi qui faisais cette conclusion. Parce que si j’avais été vraiment bien, ça ne se serait pas fini, et il n’aurait pas tout abandonné et… Et comment allais-je faire cours à ses filles sans penser à lui ? Comment pourrais-je passer dans les sous-sols sans penser à lui ? Comment est-ce que je n’allais pas finir seule et désespérée… J’allais avoir 30 ans dans moins d’un mois et j’étais seule… Et cette réalité me frappait violemment alors que l’envie de pleurer reprenait. Foutues relations… Pourquoi ça faisait si mal ? Pour un amour de jeunesse qui aurait même pas du se faire… Foutu cœur !

- Je suis désolée… Murmurai-je malgré tout. Je voulais pas te déranger… Mais…

Mais aller boire toute seule – ce qui avouons le m’aurait fait autant de bien que de mal – m’était impossible. Aller demander de l’aide à ma sœur me paraissait trop compliquer et sortir me faisant peur… Je ne savais plus quoi faire… Mon bras blessés par deux fois vint se serrer contre moi, instinctivement.

- Pourquoi est-ce que tu as personne, toi ? Demandai-je alors en soupirant, passant à un tout autre sujet pour ne pas m'attarder sur cette peur que je ne voulais pas avouer de vive voix. Tu es gentil, tu as les mains douces et tu es patient…

Même dans les moments où l’envie de me terrer était là, j’arrivais à faire des compliments. C’était là ma façon de faire, comme pour oublier un instant mon chagrin, je tentais d’illuminer quelqu’un d’autres par des mots gentils. C’était mieux que de s’enfermer dans une boucle sans fin après tout…

- C’est pas un connard… Soufflai-je à mi-voix lorsque l’insulte me fut expliquée.

Quant au fait qu’il n’y ait rien de néfaste… Si ça changeait la façon de voir les choses, n’était-ce pas, après tout, contre nature et néfaste, donc, pour la santé ? Et puis, toutes les potions avaient quelque chose de néfaste, non ? A vrai dire, je n’en savais rien, mais je finissais par le croire et d’ailleurs… Si c’était ça qui l’avait fait changer d’avis et tout abandonner ? Si c’était ça qui l’avait poussé à arrêter ce qui lui tenait le plus à cœur : Poudlard ?
A vrai dire, je n’avais aucune idée de la réalité, de ce qui pouvait être vrai ou totalement inventé par mon esprit douloureusement blessé par la rupture autant que par la perte de confiance que je ressentais alors en moi et en les autres.

Soufflant à Amos de ne jamais changer, j’haussai doucement les épaules. J’étais d’accord avec lui en un sens, mais… Ca ne fonctionnait pas dans ce cas-ci et ça ne m’aidait en rien à relativiser. Rien du tout. Mais qu’est-ce qui pourrait m’aider, ça, je ne le savais pas…

Secouant négativement je soufflai à sa remarque.

- Je veux pas te déranger comme ça…

Je l’aurais fait avec mon petit ami. Pas avec un ami. C’était ainsi. Jamais je ne le dérangerais en plein milieu de la nuit. C’en était hors de question. Il avait pas besoin d’un boulet à ses pieds de toutes les manières.
Mais Amos était gentil. Définitivement gentil. Et d’ailleurs lui en fis-je la remarque, notant même son célibat devenu incompréhensible pour ma part. L’observant par-dessus mon épaule, concentré cette fois sur lui plutôt que sur moi, mes sanglots cessèrent doucement avant qu’un très léger sourire se dessine sur mes lèvres.

- C’est pour ça qu’on s’entend bien… Soufflai-je.

Rapport à ce côté fleur bleue que j’avais tout autant que lui quoique ce dernier ne me l’avait jamais montré. Normal, en tant que tel. Ce n’était pas une chose que l’on pouvait dévoiler en amitié, en un sens. Alors… Oui. Normal.
Une chose, néanmoins, vint troubler mes pensées. Une période de coucherie… L’espace d’un instant, l’idée de partager le lit d’un homme au hasard me vint à l’esprit. Juste une seconde à peine avant que je ne secoue la tête distraitement pour me ramener à la réalité, me concentrant sur Amos sans avoir écouté la fin de sa tirade. Bon… Tant pis.

- Comment est-ce qu’on peut penser que tu es un « faux gentil », m’étonnais-je alors ? Cette fois entièrement concentrée sur lui. Tu es la personne la plus sincère, la plus respectueuse et la plus douce que je connaisse. Même ton visage donne envie de te papouiller les joues. Admis-je dans une moue d’incompréhension. A leur place, j’aurais tout faire pour que tu gardes ce visage là et que tu restes toi-même. Tu es quelqu’un de beaucoup trop bien pour que ça change.

Me retournant cette fois physiquement pour lui faire face afin de ne plus empiéter sur sa bulle personnelle, je soufflai alors de nouveau.

- En fait, toi, tu es l’homme parfait. Plaisantai-je doucement avant de baisser les yeux. Merci... En tout cas. Et désolée...

Haussant les épaules, je n’étais pas sûre d’avoir réellement vécu des déceptions. Enfin… Jusqu’à maintenant. Il fallait dire que j’avais, jusque-là, évité ce genre de situation. Je n’aimais pas hommes. Enfin bien sûr que si. J’aimais les hommes mais… Disons… Que je n’avais pas confiance. Oui. Voilà. Et je n’aurais certainement plus jamais confiance de toutes les façons. Alors ça n’allait pas changer. Enfin presque. Amos, lui, je lui faisais confiance. C’était quelqu’un de bien, de très bien même et il méritait de le savoir.

Je n’étais pas une personne exempte de compliments. J’aimais faire plaisir aux autres, à mes proches notamment. J’aimais voir un sourire chez eux, quel que soit mon état. Et le sourire, même faible, que mon collègue eut, eut au moins le mérite d’apaiser un tant soit peu mon cœur.

- C’est pas la peine de me remercier. Soufflai-je à mi-voix.

Pourquoi remercier pour un compliment mérité après tout ? Ce n’était pas comme si cela me demandait un effort ou même un mensonge, loin de là.

- Oh je n’ai pas dit que tu étais parfait. Tu es secret, renfermé sur toi et trop sérieux. Notai-je à voix haute. Mais ça n’empêche pas tout ce que j’ai dit.

Quant au fait de m’excuser…

- Désolée…

Oui. Ça allait être beaucoup plus compliqué. La peur de déranger, quand j’étais malheureuse, était ce qui me prenait le plus à la gorge. J’avais cette impression d’être de trop, de ne pas être à place, cette dernière se trouvant certainement au fond d’un trou, de ne pas avoir le droit de me plaindre de choses ma foi nulle face au malheur d’autres personnes… Alors je m’excusais. Encore et toujours.

- L’humain est étrange s’il pense ça. Répondis-je en haussant les épaules, en écho avec ma propre race de demi-humaine. Le gris a toujours été ce qui faisait la beauté du monde, non ? Et si tes ex petites amies pensaient ça… Alors… Elles étaient idiotes. Et tu as bien fait de ne plus être avec elles. Tu mérites mieux que ça. Soufflai-je en baissant la tête.

Moi par contre… Qu’est-ce que je méritais ? Une rupture rapide et sans logique pour moi ? Peut-être. Je n’avais peut-être pas assez fait le bien autour de moi pour mériter mieux… Ou alors c’était une ancienne vie… Même si je n’y croyais pas vraiment, peut être que mon ancien moi était une personne horrible… A moins que ça ne soit qu’une question de timing… Si j’avais connu Amos plus tôt peut être que c’était de lui dont je serais tombée amoureuse… Et je vivrais alors une vie heureuse… Me rappelant de sa légilimancie, mes joues se teintèrent de rouges alors que j’attrapai rapidement le chocolat devenu bien tiède… Et peut être même trop rapidement. Sous mes gestes brusques, j’en renversai soudain la moitié sur le canapé, Amos et moi.

- OH PAR MERLIN ! M’exclamai-je. Je suis désolée Amos ! Vraiment désolée !

Que j’étais maladroite ! A chaque fois ça finissait pareil… Et ce n’était pas faute de tenter de me concentrer sur ce que je faisais. Je n’y arrivais pas. D’autant plus que je m’étais à nouveau excusé. Et pas seulement pour le chocolat, je l’admettais. Foutue légilimancie !

- Je ne m’excusais pas pour tes défauts… Soulignai-je en toussotant. Juste pour le fait de m’excuser. Mais tu as ces défauts ça c’est certain.

Ce que je disais était affreusement paradoxal, je l’entendais. Mais c’était vrai. Je m’excuser de m’excuser. Et s’il n’était pas contente et bien grand bien lui fasse puisque c’était trop tard, je m’étais déjà excusée. Ce qui faisait beaucoup d’excuses, je l’entendais.

- Et je ne suis pas trop bonne. J’ai toujours été seulement… Juste. Et observatrice. Et un peu gentille, des fois trop d’ailleurs. Admis-je malgré tout, bien consciente que beaucoup pouvaient me prendre pour une femme « gentille », benête, et naïve. Or, si je n’étais ni benête ni bête, je ne pouvais qu’approuver le dernier adjectif utilisé. Ça… Je l’étais. Et je l’avais été bien trop récemment pour pouvoir alors le nier.

Et peut être aurais-je du directement rajouter « maladroite » et « complètement débile » à mes adjectifs car la suite leur aurait donné raison. Des pensées intrusives avaient eu raison de mon cerveau et alors que je tentai de les camoufler par le chocolat, quoique ce soit une drôle d’idée, j’en vins à renverser une bonne partie sur nous… Evidemment… Pourquoi fallait-il toujours que je gâche tout ?

- Désolée…

Oui. Je me réexcusais de m’être excusée ! Il allait certainement finir par me baillo… Pas besoin. Clignant des yeux, j’observai Amos se dégager de sa chemise, les joues devenues rouges presqu’instantannéement.

- Heu… Je… Tu… Tergeo… Hein… Et… Heu…

Et ça ne voulait plus rien dire. Mes yeux fixés sur son torse, je détournai mon regard pour me concentrer sur ma tasse désormais à moitié vide. Mais Amos reprit. Et il reprit avec des mots qui me firent oublier l’espace d’un instant qu’il se trouvait torse nu près de moi et que ma main était malgré tout proche de son torse puisqu’entre les siennes.

- Si je ne l’avais pas fait… Je serais sûrement mieux et ça serait resté un fantasme d’adolescente… Soufflai-je doucement en baissant la tête.

J’avais admiré Andrew, plus que tout. Il avait été comme un héros. Le premier qui avait su voir au-delà de mon charme. Et ça… ça m’avait fait un bien fou. Alors j’étais tombée amoureuse de lui. Enfin je le croyais puisque jamais son « bravo Miss Wheeler » n’avait quitté mes pensées. Ça pouvait paraître bien peu pour parler d’amour, certes, mais… Il avait été là. Et ça avait compté. Enfin… je le croyais.
Mon regard se tournant vers Amos, mes joues reprirent une teinte rouge, m’obligeant à le replacer sur… Oh ! Là ! Ce meuble face à moi. Il était beau. Très beau.

- Dis… Est-ce que tu penses que je peux rester à Poudlard ? Soufflai-je. Enfin… Pas que je veux pas mais… A chaque fois que je passe devant la porte des cachots, j’ai envie de pleurer et… Et devant le bureau de sous-directeur aussi. Et quand je suis toute seule dans ma chambre aussi… Et je n’arrive même plus à y dormir…

A mesure que mes mots passaient la barrière de mes lèvres, mon visage, lentement, se baissait jusqu’à ce que mon menton touche le haut de mon buste, les yeux humides de larmes qui refusaient de perler sur mes joues toujours rouges. Mais doucement, ma tête se pencha, lentement, vers son épaule et se posa dessus. Amos avait toujours été amical envers moi, j’avais confiance en lui. Et là. Je n’avais besoin que d’une chose : qu’on me dise que je ne valais pas rien, que j’avais ma place ici et qu’on me fasse le câlin du siècle. Ce qui était excessivement puéril à mon sens. Mais tant pis. J’avais envie d’être puérile ce soir…

- Est-ce que tu voudras bien m’accompagner à Pré-Au-Lard ? Demandai-je alors finalement. Je voudrais…

Je voudrais réussir à aller au pub et au village sans trembler. Cela m’était essentiel pour quitter Poudlard et impossible actuellement. Pour preuve, le concierge était venu me chercher à la gare, à ma demande à la Directrice, pour que je puisse réussir à atteindre le Collège sans paniquer au rappel de mon agression… Alors si lui, en qui j’avais confiance, pouvait m’accompagner et ne pas me lâcher pour que je puisse réussir à remettre les pieds là bas… Ce serait toujours ça de pris… Et ça me permettrait de me concentrer sur autre chose qu’Andrew…

Oh, je savais que je ne pouvais pas revenir en arrière. J’aurais beau tenté de toutes mes forces de remonter le temps, je n’avais aucun remonteur de temps ou n’importe quelle autre capacité me le permettant. Ce qui était fait… Était malheureusement fait et irrattrapable. Pourtant, même si je connaissais cette donnée, même si j’étais entièrement conscience de cette dernière… Je n’arrivais pas à outrepasser ce qui était arrivé. Comme si mon côté rationnel – déjà très peu existant admettons-le – n’arrivait même plus à me murmurer le moindre mot. Est-ce que c’était alors si insurmontable que ça ? J’avais l’impression de ne plus arriver à rien au point que je me mettais à douter de ma place à Poudlard. Pourtant… Enseigner avait toujours été une passion, l’Histoire encore plus alors allier les deux étaient… Toute ma vie, à vrai dire. Etais-je si atteinte que je me mettais à douter du fondement même de ma vie ? … Visiblement.

- Tu vas devenir le sous-directeur… Répétai-je un peu absente alors que les caresses qu’il me prodiguait dans les cheveux étaient absolument apaisantes. Oh…

J’étais évidemment heureuse pour lui, Amos le méritait et j’en étais convaincue, il ferait un excellent directeur adjoint mais… Il allait LE remplacer… Et le remplacer… C’était signer qu’il était définitivement parti, comme si on m’obligeait, alors, à passer à autre chose alors que j’étais encore à serrer l’oreiller portant son odeur contre moi…
Je me rendais néanmoins compte de mon manque d’enthousiasme bien trop criant et, après avoir grimacé contre mon incapacité à êter une bonne amie, je levai les yeux vers Amos, souriante, quoique forcée.

- Le Professeur McGonagall a raison. Tu mérites ce poste. Tu es compétent, tu es patient, dévoué et attentif, et tu fais peur aux élèves quand tu t’énerves, j’en ai entendu deux ou trois le dire. Soufflai-je alors. Félicitation, Monsieur le Sous-Directeur…

Et ça me faisait mal de le dire. Bien plus que je ne l’aurais imaginé… Il fallait que je pense à autre chose. Définitivement… Et c’est ainsi que l’idée de Pré-Au-Lard me vint… La question y attenant lui étant alors posée sans même que je ne me recule de son épaule et de ses caresses. Et il accepta… Esquissant un faible sourire, je finis, enfin, par quitter son épaule en soupirant. Autant y aller tout de suite, non ?

- Juste un aller-retour… Précisai-je. Je veux juste… Entrer dedans… Et rentrer ensuite.

Et ça… C’était déjà particulièrement compliqué et il allait vite s’en rendre compte… Nous ne mîmes pas longtemps à nous retrouver devant le pub au Sanglier et déjà je reculai d’un pas dès qu’il fallut entrer à l’intérieur. Tremblante, j’observai mon ami à mes côtés, serrant la main que j’avais pris dans la mienne. J’avais peur. Et… Et si quelque chose se passait quand j’entrerais à l’intérieur ? Et si… Si quelqu’un m’attendait encore ? Si je mourrais en passant le pas de cette porte ?

Il me fallut de très longues minutes pour réussir à contrôler ses pensées. Collées contre le pauvre professeur de sortilèges qui devait sentir mes ongles s’enfoncer dans sa peau de manière incontrôlée, je finis alors par agir de manière la plus inconséquente possible : sans aucune réflexion. Tirant Amos à l’intérieur, sans même crier gare, je m’arrêtai alors net, dans l’entrée. J’avais réussi… j’étais à l’intérieur mais…

- Je veux rentrer… Murmurai-je tout bas.