Le mois d’avril touchait à sa fin. La météo irrégulière de ces dernières semaines rendait pas mal de gens malades et grippés. J’avais dû soigner beaucoup d’élèves enrhumés, fiévreux, atteints de toux ou de maux de gorge. Quelques collègues également. Pour le moment, je n’avais rien attrapé parce que je me protégeais correctement. Pourvu que cela dure… En tout cas, je fus bien occupé et, par conséquent, me sentais épuisé. J’avais besoin d’une bonne pause, et de sortir un peu du château.

Et justement, j’avais une excellente raison de me rendre à Pré-au-Lard aujourd’hui. Dans une ruelle un peu éloignée de la rue principale se trouvait le cabinet du médicomage généraliste. Je connaissais bien ce dernier pour avoir travaillé avec lui à Ste Mangouste, et il avait eu la décence de ne rien demander à propos de mon départ soudain de l’hôpital lorsque je vins lui rendre visite durant l’année scolaire. Il se trouvait que mon cher collègue prenait sa retraite cette année. Il était temps, le pauvre commençait à perdre la tête et accumulait les dossiers des patients au point qu’il avait un jour glissé le rapport de soins d’une dame dans celui d’un monsieur décédé depuis cinquante ans… Son départ était presque un soulagement pour ses patients qui étaient souvent repartis avec un diagnostic bancal et les mauvaises potions. Presque parce que sans lui à Pré-au-Lard, il fallait directement se rendre à Ste Mangouste et tout le monde ne pouvait pas se le permettre, surtout la petite mamie du coin qui peinait à marcher.

Mais je ne venais pas pour lui, aujourd’hui. Nous nous étions déjà dit au revoir quelques jours auparavant, et j’appris alors qui allait le remplacer. Ce n’était autre que Merindah Kareela, la jeune australienne qui avait terminé ses études l’année dernière, et qui s’était envolée vers son pays natal afin de poursuivre la médicomagie ancestrale de sa famille. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque l’ancien généraliste prononça son nom ! J’étais très content, et je n’attendais qu’une chose : pouvoir revoir l’ancienne élève de Poudlard pour qui j’avais une grande estime.

Il était quasiment dix-huit heures quand j’arrivai devant la porte du cabinet. J’espérais que Merindah y était, peut-être pour s’installer, car elle ne commençait qu’au début du mois de mai. Je poussai le panneau, il s’ouvrit sur la salle d’attente. Bon, si c’était ouvert, quelqu’un s’y trouvait forcément ! Rabattant mes cheveux ébouriffés par le vent vers l’arrière de ma tête, j’entendis alors des pas provenir de la pièce en face, avant que la porte s’ouvre sur une demoiselle au teint hâlé.

- Infirmier Meyer ?

Un immense sourire se dessina sur le visage de Merindah. Elle était rayonnante, cela faisait plaisir à voir. Je vins à sa rencontre, la main tendue.

- Je pense que vous pouvez m’appeler par mon prénom, à présent, très chère collègue, répondis-je en lui rendant son sourire. Comment allez-vous ?

Elle pouffa de rire.

- Si vous insistez, dit-elle avant de venir serrer ma main avec joie et vigueur. Je vais bien. Très bien même. Il y a beaucoup à faire ici, surtout vu le peu de temps restant, mais… c’est bon d’avoir un nouveau départ. Et vous ?

Si elle savait à quel point elle avait raison. J’allais répondre mais elle eut l’air soudain très gêné.

- Oh, j’suis navrée, c’est vraiment beaucoup le bazar ici. J’essaie de… m’approprier les lieux, ricana-t-elle. Mon prédécesseur n’a jamais fait le moindre tri dans les dossiers… ou probablement n’a jamais fait le moindre tri tout court. Mais… entrez entrez ! dit-elle en me désignant le bureau d’où elle était venue.

Je la suivis.

- J’ai quand même un peu honte de vous montrer les lieux dans cet état !

Ce fut à mon tour de rire.

- Ne vous en faites pas, je connais très bien l’endroit, répondis-je, rassurant. Et vu le phénomène qui travaillait ici avant, je ne vais sûrement pas juger !

Mon regard parcourut la pièce jonchée de dossiers que Merindah avait effectivement commencé à trier. Et, au milieu de tous ces papiers, se trouvait un chiot qui, dès qu’il me vit, trottina vers moi pour chercher les caresses.

- Hallo toi, fis-je, charmé en m’accroupissant pour le grattouiller derrière les oreilles.

Je ne m’y connaissais pas tellement en race de chiens. Celui-ci était marron et blanc, les oreilles tombantes et le museau plutôt long. Très mignon, soit dit en passant. Et très câlin. Il me poussait tellement pour avoir de l’attention qu’il faillit me faire tomber en arrière. Je me rattrapai juste à temps et me remis debout, époussetant mon pantalon qui avait recueilli quelques poils.

- Vous êtes en bonne compagnie, constatai-je.

Je désignai les dossiers d’un signe de menton.

- Je peux vous aider, si vous voulez, proposai-je, motivé. Je suis venu quelques fois ici pour aider votre prédécesseur à s’y retrouver. Une rude affaire, commentai-je en riant de nouveau. Et après cela, que diriez-vous d’un dîner pour fêter votre arrivée ? C’est moi qui offre, bien évidemment.

Elle fut quelque peu rassurée par le fait que le désordre ne me dérangeait pas. Puis elle me parla de son chien, Rainbow, qui était très joueur et pot de colle. Je préférais cela à un animal agressif ou, au contraire, peu joyeux.

- Si ça ne vous ennuie pas… ce serait vraiment avec plaisir, dit-elle ensuite, en réponse à ma proposition. Parce que sinon, je ne sais pas comment je vais faire pour finir avant la réouverture et il est hors de question d’accueillir des patients dans un tel bazar.

Elle avait raison.

- En revanche, hors de question que vous m’invitiez si vous m’aidez. C’est moi qui vous invite et on descend quelque part dans Londres manger un vrai bon repas. C’est non négociable, fit-elle alors que j’ouvrais la bouche pour protester. En plus, je ne vous ai jamais vraiment assez remercié de m’avoir aidé sur ma thèse de doctorat.

Je secouai la main comme si je chassais un insecte.

- Je l’ai fait avec plaisir, répondis-je, sincère. Et je suis très heureux de ce que vous avez réussi à accomplir. Vous n’avez pas à rougir de votre parcours.

Sur ce, je m’assis à même le sol au milieu des dossiers.

- Allez, mettons-nous au travail. Plus vite ce sera fait, plus vite nous pourrons manger !

Et il nous fallut près d’une heure et demi avant de pouvoir remplir la large commode dont les placards avaient heureusement subi un sortilège d’extension. Sans cela, nous n’aurions jamais pu faire tenir tous les dossiers. Ces derniers étaient désormais correctement étiquetés et rangés dans l’ordre alphabétique. Entre deux anecdotes plus ou moins croustillantes, je conseillai à Merindah de garder les dossiers les plus anciens, même si les patients étaient décédés. Ils demeuraient toujours utiles pour analyser ceux des descendants en cas de difficulté à diagnostiquer le mal qui les rongeait. Pendant ce temps, Rainbow semblait faire sa meilleure sieste, non loin de sa maîtresse.

- Tenez, c’est à vous de le mettre à sa place, dis-je en donnant à la demoiselle le dernier dossier de la pile que nous terminions de ranger.

Je me mis debout et lui tendis ma main pour l’aider à se lever.

- Vous êtes officiellement installée ! annonçai-je avec un grand sourire. Glückwunsch, Merindah. Félicitations, répétai-je.

Elle déclara que malgré son succès, la fin de ses études n’avait pas été une période simple et que mon soutien ne fut pas de trop pour l’aider à réussir. J’étais content d’avoir pu contribuer à son évolution, et surtout qu’elle n’ait pas abandonné le projet de devenir guérisseuse, elle qui avait eu l’air si découragé avant d’obtenir son diplôme. J’étais très fier d’elle, elle le savait bien assez pour le lui avoir répété des tas de fois.

Puis elle demanda comment j’allais. C’est vrai, je ne lui avais pas répondu. Alors je l’informai simplement que je me portais bien et que je parvenais à faire face aux malheurs qui s’abattaient sur l’école. On avait besoin de moi, je devais être toujours disponible et en forme pour soigner quiconque en avait besoin.

Après avoir refermé le dernier tiroir de la commode, Merindah prit ma main et se mit debout, avant de m’adresser un immense sourire.

- Merci ! Vraiment, merci beaucoup, fit-elle, heureuse. Il y a encore un peu de travail, vu l’état des dossiers, j’aimerais vérifier les stocks et la réserve. Mais ça… ce sera pour demain ! J’ai assez abusé de vous.

- C’était très volontiers, assurai-je.

Je préférai passer sous silence l’état de la réserve, histoire de ne pas gâcher sa soirée. Mais s’il fallait venir également pour arranger cela, j’étais prêt à lui offrir encore mon aide. Je lui en parlerais après le repas…

- Bon, après l’effort, le réconfort, dit-elle. Laissez-moi mettre Rainbow dans mon appartement et on peut partir.

- Je vous attends, répondis-je.

Elle appela le chien mais celui-ci eut beaucoup de mal à sortir de sa torpeur, et elle dût s’y reprendre à plusieurs fois avait qu’il ne daignât se lever. Je les regardai disparaître derrière la porte marquée d’un écriteau « Privé », un sourire amusé accroché aux lèvres. Difficile de ne pas montrer mon ravissement. Le retour de Merindah était vraiment une très bonne nouvelle. J’espérais que la vie à Pré-au-Lard lui plairait, et que son nouveau travail lui conviendrait. La demoiselle revint bientôt, un manteau sur les épaules.

- Prêt ?

Je revêtis celui que j’avais laissé sur le dossier d’une chaise durant le tri des dossiers.

- Jawohl*.

Je la suivis à l’extérieur du cabinet. Les journées s’allongeaient de plus en plus, il ne faisait pas encore nuit. Je ne savais pas si Merindah avait en tête un endroit où manger. Mais si nous voulions aller jusqu’à Londres, il nous fallait transplaner d’ici. Levant les yeux vers les fenêtres qui donnaient sur son appartement, j’imaginai Rainbow profitant de l’absence de sa maîtresse pour squatter le canapé… ou pleurnicher en attendant son retour.

- Votre petit compagnon est-il du genre à rester sage quand vous n’êtes pas là ? demandai-je, curieux. Ou ferez-vous face au chaos absolu à votre retour ?

Elle menaça gentiment de me réembaucher ce week-end si je montrais trop de motivation à vouloir l’aider. Nous en rîmes, puis elle répondit que son chien s’habituait de mieux en mieux à rester seul. C’était une bonne chose. La jeune médicomage leva son bras dans ma direction, m’invitant à transplaner avec elle pour aller jusqu’à Londres. Je l’attrapai fermement, sans lui faire mal, et nous disparûmes de Pré-au-Lard. Nous atterrîmes dans une ruelle sombre, à l’abri du regard des moldus. Je lâchai son bras et ajustai le col de ma veste.

- Vous avez une adresse particulière à recommander ? s’enquit Merindah. Parce que sinon, il y a un bistro sympathique dans le coin où j’allais de temps en temps, ils doivent toujours être ouverts.

J’acquiesçai.

- Je n’avais pas vraiment d’idée, avouai-je. Alors je vous suis.

Nous quittâmes la ruelle et nous mêlâmes à la foule. Il y avait pas mal de monde malgré l’heure tardive. Les températures douces donnaient davantage envie de sortir, les gens en profitaient.

La rue que nous remontâmes ne m’était pas inconnue. Et mes jambes stoppèrent net quand nous passâmes devant la vitrine d’une librairie ancienne. J’y avais retrouvé Elizabeth tant de fois après le travail… C’était son endroit favori pour m’attendre. Le regard rivé vers l’intérieur de la boutique, j’eus la vision de mon épouse assise dans un fauteuil confortable, plongée dans un livre avec tant de concentration qu’elle en oubliait tout ce qu’il se passait autour d’elle. Son souvenir me parut tellement réel que les sons alentours se firent lointains. Jusqu’à ce que je revinsse à la réalité en secouant la tête.

- Désolé, fis-je devant une Merindah qui devait se demander ce qui me prenait. Je… j’ai cru voir quelqu’un… Mais j’ai dû me tromper.

Je lui souris, repérai un bistrot à quelques mètres, de l’autre côté de la rue.

- C’est ici ? C’est marrant, je suis souvent passé devant sans jamais y entrer.

Ce qui demeurait vrai, soit dit en passant. Seul ou en compagnie d’Elizabeth, je n’avais pas pris le temps de découvrir l’endroit, même pour un simple café. Aujourd’hui serait l’occasion.

Sur le ton de la plaisanterie, elle fit remarquer qu’en lui laissant l’opportunité de choisir le lieu où manger, je mettais mon sort entre ses mains. Je soufflai par le nez avec un sourire en coin, bien conscient que je n’avais absolument aucun souci à me faire avec elle. Heureusement pour moi, elle ne fit aucun commentaire ni ne demanda rien concernant ma légère absence devant la librairie. Puis elle regarda le fameux bistrot.

- Exactement, oui ! confirma-t-elle. Je vous promets que votre estomac sera ravi !

- Je n’en doute pas une seconde, répondis-je avant de la suivre.

Nous traversâmes donc la rue et entrâmes dans le restaurant. C’était un endroit simple, pas surpeuplé, et calme. Nous y serions bien. Une bonne odeur de nourriture planait dans l’air et mon ventre cria automatiquement famine. Un serveur vint à notre rencontre. Comme Merindah connaissait mieux les lieux, je la laissai réserver notre table. Le serveur nous emmena près d’une fenêtre qui donnait sur la rue principale. Nous nous installâmes tranquillement, laissant nos manteaux sur le dossier de nos fauteuils.

- Alors, dites-moi, qu’est-ce qu’un médicomage infirmier boit sur son temps libre ? s’enquit ma collègue tandis que je croisais les bras sur la table.

Je haussai les épaules.

- Oh, je dirais que je reste fidèle à mes origines et qu’une bonne bière fera l’affaire, dis-je.

Nous échangeâmes un sourire.

- Je ne sais pas vous, je meurs de faim…

Et moi donc.

- Honnêtement, tout est bon ici. Surtout leur steak, il est à tomber si vous aimez la viande. Et… l’ail. Y a beaucoup d’ail dans la sauce. Mais franchement… elle se mangerait à la cuillère.

Le serveur nous apporta la carte. Nous commandâmes nos boissons.

- J’aime la viande, effectivement, fis-je en parcourant le menu. Et avec une bonne sauce, c’est encore mieux.

Je levai les yeux sur mon interlocutrice et ricanai.

- Je me tiendrai loin pour vous parler. Blague à part, vous m’avez bien vendu le plat, je vais donc essayer.

Une salade en entrée ferait du bien, et je n’oublierai certainement pas le dessert. Quand le serveur refit son apparition avec ma bière et celle de la jeune médicomage, nous lui dictâmes chacun nos plats. Il repartit.

- Comment s’est passé votre séjour sur vos terres natales ? demandai-je alors après avoir goûté à ma bière.

Elle commenta le fait qu’elle avait choisi la bière pour faire elle aussi honneur à ses origines. Elle ne connaissait pas beaucoup l’Allemagne, s’était centrée sur la France, l’Italie et l’Espagne lors des voyages scolaires.

- J’espère ne pas vous offenser !

- Bien sûr que non ! ris-je. J’ai des origines françaises du côté de ma mère, vous vous en sortez bien, ajoutai-je, faussement menaçant.

Elle opta elle aussi pour le fameux steak avec la sauce à l’ail, déclara que nous empesterions ensemble. Ma dernière question sembla un peu la perturber. Je m’y attendais mais je voulais savoir comment elle vivait sa nouvelle situation par rapport à son éloignement. Je m’étais toujours soucié d’elle, surtout après avoir entendu toutes ces rumeurs parmi le personnel de Poudlard qui ne jouaient pas en la faveur de la médicomage. Je n’y avais jamais participé, ne croyant pas un seul instant que Merindah pût être une criminelle. Alors même si nous n’avions pas communiqué depuis son départ, je la tenais toujours en estime et j’aimais savoir qu’elle se portait bien malgré tout.

- Il était nécessaire, répondit-elle. Difficile au début, mais… nécessaire.

J’imaginais que ce séjour avait été sa seule issue.

- La suite s’est un peu mieux déroulée. J’ai travaillé comme guérisseuse de campagne un moment, c’était le travail que ma mère faisait. Ça n’est pas un poste d’infirmière à Poudlard, mais… ça m’a fait du bien. Retrouver mes racines, mon père, la nature, notre médicomagie traditionnelle… J’avais presque oublié combien les maladies et les soins sont différents. Ici, rares sont les blessures par créatures magiques, comparées à là-bas. J’ai parfois dû intervenir directement avec les rangers pour me rendre sur place. Ça permet de prendre l’air, disons.

Je me contentai d’un hochement de tête. Elle haussa les épaules comme pour signifier que tout cela était derrière elle à présent.

- Vous ne m’en voulez pas trop de vous avoir laissé tomber ? s’enquit-elle. Je sais que vous étiez heureux que je sois embauchée à vos côtés… j’ai entendu dire que le poste n’avait toujours pas été promu.

Je souris tristement.

- Ҫa m’a fait quelque chose, je ne vais pas vous le cacher, avouai-je. Mais je ne vous en voudrai jamais de préférer votre bien-être au travail. L’essentiel est que cela ait servi à vous sentir en paix aujourd’hui, et à l’aise dans votre cabinet bien rangé, fis-je avec un clin d’œil.

J’attrapai ma chope de bière bien fraîche.

- Et vous avez raison, le deuxième poste d’infirmier à Poudlard est toujours vacant, soupirai-je. Je me débrouille mais un peu d’aide ne serait pas de refus.

Surtout dans les périodes de drame comme l’effondrement de l’école…

- J’ai la chance d’avoir parfois la présence d’élèves orientés vers les études de médicomagie. Ils sont motivés, c’est une bonne chose. Certains plus que d’autres mais je ne m’en plains pas. Cela me donne le temps de souffler un peu et, en retour, ils se forment au métier. Vous êtes bien placée pour le savoir.

Durant ses études, Merindah avait été d’un soutien sans faille. Je ne l’oublierai jamais, même si, pour moi, cela n’avait duré que deux mois. Je savais que son professionnalisme né avait été utile à l’école bien avant mon arrivée. Elle pouvait en être fière. Le serveur approcha avec un plateau sur lequel reposait nos salades. Nous le remerciâmes et il repartit vaquer à ses occupations. Nous trinquâmes d’abord, puis je me saisis de mes couverts.

- Bon appétit, Merindah.

Elle fut soulagée et, de façon théâtrale, posa sa main sur sa poitrine.

- Par le caleçon de Merlin ! Nous avons frôlé la catastrophe ! lâcha-t-elle avant de rire.

Je ris aussi. Difficile de garder mon sérieux ce soir. Revoir Merindah mettait du baume au cœur. Je n’aurais jamais imaginé que son retour pût me faire autant de bien. Sa bonne humeur était communicative, et j’en avais besoin.

- J’aurais vraiment aimé travailler avec vous, comme du temps de Ste Mangouste, reprit-elle avec nostalgie. Ça aurait été absolument génial.

Je hochai la tête avec un sourire.

- Et cela aurait été avec plaisir, répondis-je, sincère.

Elle était d’une très agréable compagnie, professionnelle comme en dehors du travail. Le simple fait de la voir si rayonnante et toujours prête à donner le meilleur d’elle-même pour aider autrui suffisait à l’apprécier.

- Ils doivent en être heureux, dit-elle au sujet des élèves qui venaient parfois travailler à l’infirmerie. Vous avez toujours été un excellent mentor.

- C’est gentil, fis-je à la fois heureux et gêné par ce compliment.

- Cela dit, vous savez que je suis à côté, maintenant, fit-elle remarquer. Si un jour vous manquez sincèrement de mains, n’hésitez pas. Il y a peut-être moyen de demander la permission à McGonagall quand c’est nécessaire.

J’acquiesçai.

- Vous avez raison. Et l’inverse est aussi possible, ajoutai-je. Faites-moi signe en cas de besoin.

Nous prîmes le temps de manger notre entrée. Puis la demoiselle brisa le silence.

- Si vous me permettez de demander, comment un allemand aux origines françaises se retrouve donc en Écosse ? demanda-t-elle avec curiosité.

Je ricanai.

- Ce n’est pas une si longue histoire, déclarai-je en haussant les épaules. A l’âge de onze ans, j’ai eu le choix entre Poudlard et Beauxbâtons. Comme mes parents ont étudié à Beauxbâtons, j’ai simplement suivi le mouvement. Bon, j’ai aussi voulu faire plaisir à ma mère, avouai-je avec un petit rire. J’ai pu parfaire mon français, même si ça n’a pas été super évident, au début.

J’avais un accent ignoble. Il s’entendait également en anglais mais pas de manière aussi désagréable que lorsque j’utilisais la langue française.

- Je suis revenu en Allemagne quand j’ai eu mon diplôme, et j’ai commencé en tant qu’infirmier à l’hôpital pour sorciers de Berlin, là où mes parents ont toujours travaillé, poursuivis-je. J’ai étudié plusieurs domaines, notamment la poisonologie. Et je suis officiellement devenu médicomage à trente ans.

J’avais pris mon temps, mais je voulais tant toucher à tout que les années avaient filé à une vitesse folle.

- C’est là que j’ai eu envie de changer d’environnement. Ste Mangouste est l’hôpital le plus réputé d’Europe, je devais essayer de l’intégrer. Y entrer m’a permis d’approfondir mes connaissances, et j’ai pu devenir, entre autres, spécialiste en maléfices. Le parcours y est plus court qu’en Allemagne, ne me demandez pas pourquoi…

Il y eut quelques secondes de silence durant lesquelles je ne sus vraiment comment lui expliquer la raison pour laquelle je travaillais désormais à Poudlard. Je n’avais pas envie d’en parler. Un jour, peut-être, mais pas maintenant.

- Et puis… fis-je, hésitant en tripotant une feuille de salade avec le bout de ma fourchette. Tout est devenu pesant, je crois que je me suis surmené.

Un beau mensonge.

- Alors quand j’ai su qu’il y avait un poste à pourvoir ici, j’ai sauté sur l’occasion. Au final, c’est plutôt l’arnaque, vu les drames qui tombent dans cette école ! repris-je avec humour. Je ne m’ennuie clairement pas. Mais c’est quand même plus tranquille.

Et j’avais un endroit où dormir…

- Ceci dit, vous venez d’encore plus loin, remarquai-je en la pointant avec ma fourchette. Qu’est-ce qui vous a amenée jusqu’ici ?

Elle confirma les chances de m’appeler en cas de doute, avec un bon restaurant en guise de récompense. Décidément, ma réputation de bon mangeur allait plus loin que je le croyais ! Lorsque j’évoquai l’apprentissage de la langue française, elle me rejoignit sur le fait que ce n’était pas si simple à intégrer. Puis elle déclara que le surmenage pouvait toujours arriver. Si j’avais pu éviter le drame qui cachait ce faux surmenage… Je serais toujours en train de travailler à Ste Mangouste. Et surtout, Elizabeth serait en vie. Et je serais père… Je chassai ces songes de mon esprit et me concentrai sur Merindah qui disait être contente de mon entrée à Poudlard. Elle entama alors le récit de son voyage jusqu’en Écosse.

- Ma mère était guérisseuse Ngangkari, ce qui veut dire qu’elle allait à la rencontre de ses patients, soignait par les méthodes traditionnelles. C’est un peu plus… sportif qu’ici. Imaginez-vous devoir transplanter en flanc de montagne parce qu’une femme s’est faite gober par une planque magique ? Mais elle m’emmenait toujours avec elle, j’étais sa petite assistante et j’ai toujours su que je voulais faire comme elle, plus tard.

Nous avions tous les deux eu cette envie de suivre les traces de nos géniteurs.

- Elle est décédée avec ma sœur aînée quand j’avais onze ans, le soir de Noël.

En la voyant toujours si pétillante, je n’aurais jamais deviné qu’un tel drame s’était abattu sur sa famille… Elle était si jeune à ce moment-là…

- Je me suis toujours promis que je continuerai, au début pour ne pas la décevoir et puis… ensuite parce que j’avais l’impression d’être proche d’elle. Notre magie traditionnelle puise dans l’âme et les énergies de la Terre. Donc… j’ai toujours eu la sensation qu’elle m’aidait.

Je hochai la tête, attentif et compréhensif, tandis qu’elle prenait une gorgée de sa bière. Elle ajouta qu’en parallèle, quelques années après la mort de sa mère, son père devint le chef du gouvernement magique. Par conséquent, sa famille fut vite médiatisée et elle eut du mal à le supporter. Quand je pensais à ma réputation de guérisseur, à mon nom connu à Berlin à travers les exploits audacieux de mon père, et à Londres de par mon parcours et mon côté à peine moins entreprenant, et aux conséquences que cela avait eu sur ma vie de famille, je pouvais tout à fait rejoindre Merindah sur l’envie de rester discrets aux yeux du monde.

- J’ai toujours eu du mal avec ça, mais j’ai continué de faire mes études au mieux, même si c’était étouffant, dit-elle. Encore pire quand je me suis mise en couple avec une star nationale du Quidditch.

Effectivement, difficile d’éviter les feux des projecteurs… Et cela dura même après leur rupture

- Imaginez vous faire plaquer et qu’on vous le rappelle dans tous les magazines ?

Je fis une petite grimace de compassion.

- M’enfin… j’ai décidé de faire une année à l’étranger comme ça. Ma thèse manquait un peu de profondeur, donc j’ai décidé d’y ajouter un parallèle pratique et non plus uniquement théorique avec les remèdes de medicomagie de l’Ouest. Et vous l’avez dit vous-même, quoi de mieux que le meilleur hôpital d’Europe ? Voilà comment je suis arrivée jusqu’à Poudlard. La suite, vous la connaissez. Enfin… j’imagine que vous la connaissez. Difficile d’imaginer que tout le personnel n’est pas au courant.

Je posai ma fourchette sur le bord de mon assiette en soupirant.

- J’ai entendu des choses vraiment déplaisantes à votre sujet, dis-je d’un ton qui dénotait ma contrariété. Je ne vous embêterai à aucun moment pour savoir si ces rumeurs sont vraies ou non. D’un, nous ne sommes pas là pour ça, de deux, je n’ai aucun droit de vous juger et, pour finir, personnellement, je n’y crois absolument pas. De mon point de vue, et celui de beaucoup de gens, vous avez toujours été une personne droite et honnête. Et je pense que la victime dans toute cette histoire, c’est vous. Et j’en suis sincèrement désolé.

Je laissai mon dos reposer contre le dossier de mon fauteuil et croisai les bras.

- Cela étant dit, si je suis venu à votre rencontre aujourd’hui, c’est pour m’assurer que tout va bien pour vous à présent, pas pour vous ramener dans un sombre passé. Alors, à moins que vous en ressentiez le besoin, arrêtons d’en parler, d’accord ?

Je m’avançai à nouveau et me penchai vers elle en croisant les bras sur la table, cette fois, juste devant mon assiette.

- Je me demandais… La magie Ngangkari ne se transmet-elle que dans votre famille, ou pensez-vous que je pourrais en apprendre quelques subtilités ? m’enquis-je. Loin de moi l’idée de vous voler vos méthodes ! ajoutai-je aussitôt. Je trouve simplement cette magie remarquable, j’aimerais en savoir plus. Si la pratique n’est pas possible, le simple fait d’en discuter serait déjà très intéressant.

Elle approuva le changement de sujet tandis qu’un sourire venait de nouveau éclairer son visage. Ma demande la fit même rire. Nous attendîmes que le serveur récupère nos assiettes vides et, quand il se fut éloigné, Merindah prit la parole.

- Aaaah, j’ai donc votre curiosité ! fit-elle d’un ton taquin, les coudes posés sur la table, son regard réjoui droit dans le mien. Que puis-je bien marchander en échange de ces précieuses informations ?

Je ris à mon tour, amusé par les plaisanteries d’une personne que je n’aurais jamais vu demander quoi que ce soit pour partager son savoir, ou autre chose, d’ailleurs. Nous étions similaires sur ce point. Donner, aider, soigner pour un sourire ou un remerciement, ressentir la reconnaissance d’autrui. Œuvrer pour le bien avait été, pour Merindah comme pour moi, l’évidence même dès notre enfance.

- C’est à vrai dire très différent, commença-t-elle à expliquer.

Je lui accordai toute mon attention.

- Nous possédons des baguettes aussi, petite touche apportée par la colonisation et que nous utilisons parfois, mais pas toujours de la même manière que vous. A vrai dire, pour nous, tout commence de la Terre, des astres, de l’âme et de l’énergie. Tout est question d’énergie, tout a une énergie. C’est une magie pure, presque intime puisqu’elle appelle à nos âmes, comme si nous étions un… un intermédiaire entre les énergies. A vrai dire, la plus grande partie de nos traditions découlent de nos ancêtres aborigènes sorciers, ce qui fait que, en fonction d’où vous allez en Australie, tout le monde n’a pas exactement les mêmes méthodes.

Je hochai la tête, impressionné par le côté fusionnel de cette magie entre le corps, l’âme et la nature. Il fallait sûrement être doté d’une extrême concentration et d’une grande ouverture d’esprit pour parvenir à produire une magie de soin de qualité. J’avais très envie de m’y essayer, si cela demeurait possible.

Notre plat arriva. Le serveur nous souhaita un bon appétit et s’éloigna.

- Oooh… voilà bien plus intéressant que la salade ! dit Merindah en lorgnant son assiette.

- Ҫa sent ultra bon, commentai-je en humant la mienne.

J’attrapai mon couteau et ma fourchette. La viande m’avait l’air parfaitement cuite, et je le constatai en coupant un petit morceau. Saignante juste comme j’aimais.

- A partir de maintenant, le premier qui s’évanouit à cause de l’haleine de l’autre a perdu, plaisantai-je avant de manger.

C’était tout simplement divin ! Merindah avait eu une très bonne idée de nous emmener ici. A l’avenir, j’y reviendrai.

- Et… votre magie est-elle plus complexe à assimiler que le soin… disons plus classique ? demandai-je pour en revenir à notre conversation. Ou est-ce à la portée de n’importe quel médicomage, si j’ose dire ? Pensez-vous que je peux l’apprendre ? A moins que vous n’ayez pas envie de me montrer… narguai-je avec un sourire en coin.

Je la taquinais gentiment car je ne savais pas si elle avait vraiment envie de transmettre un savoir ancestral au premier venu. Et je comprenais si elle refusait. J’étais déjà bien content de pouvoir en apprendre un peu sur le sujet.

Merindah éclata de rire, déclara qu’en cas de malaise dû à notre future forte haleine, l’un de nous deux pourrait utiliser ses compétences de médicomage pour s’occuper de l’autre. Puis elle répondit que, pour moi qui avais appris le soin ordinaire, la magie Ngangkari était un tout autre apprentissage car cela revenait à « soigner à l’envers ». Elle avoua avoir eu beaucoup de difficultés lors de son arrivée à l’hôpital de Londres dans le cadre de ses études.

- Ste Mangouste demande un détachement parfait pour l’objectivité et la clarté d’esprit. Oui, vous vous souciez de vos patients, évidemment, mais vous gardez une distance émotionnelle généralement.

J’acquiesçai d’un signe de tête. Oui, c’était ce qu’il fallait faire pour être un guérisseur efficace. Mais j’avais moi-même du mal à respecter cette méthode. J’attachais beaucoup d’importance au contact humain et aux relations sociales. J’aimais connaître mes patients, dialoguer avec eux, établir un lien un peu plus chaleureux que ce que le règlement imposait. Tout en restant respectueux et dans les limites de l’intimité des gens que je soignais, j’estimais plus plaisant pour eux comme pour moi de franchir cette barrière émotionnelle.

- Chez nous, c’est l’opposé, poursuivit la demoiselle. Vous ne pouvez pas soigner quelqu’un via les énergies et l’âme sans vous connecter de manière bien plus profonde. Dans ce sens, ce qu’on fait, c’est tout ce qu’on vous apprend à ne pas faire. Ça m’a pris beaucoup de temps pour arriver à mettre ça de côté.

- J’imagine oui, fis-je, compréhensif.

En tout cas, c’était faisable dans ce sens puisque Merindah y était parvenue.

- Je pourrais vous montrer quelques soins, bien sûr !

- C’est gentil, répondis-je, content.

Nous appréciâmes notre plat.

- J’ai à vrai dire amené avec moi un certain stock, dit-elle après un moment de silence. Mais ce stock va diminuer d’ici les prochains mois, c’est certain. Il me faudra faire un voyage en juillet pour me réapprovisionner et je refuse de commander par hiboux de livraison. Alors… Ben, si ça pouvait vous tenter, vous pourriez m’accompagner, proposa-t-elle. J’imagine que ce sera les vacances scolaires. Donc, si vous avez le temps et surtout, l’envie, vous seriez le bienvenu.

Je haussai les sourcils et ouvris à demi la bouche sans sortir aucun son au début, beaucoup trop surpris.

- Euh… eh bien… Je ne m’y attendais pas, finis-je par dire avant de rire. Je n’en demandais pas tant ! Mais ce serait avec plaisir !

M’éloigner d’ici et ne penser à rien d’autre qu’à ce voyage me soulagerait peut-être un peu le cœur et l’esprit.

- Je vous avouerais que l’été précédent a été un peu long, repris-je.

Je regrettai ma phrase et ravalai ce que j’allais dire ensuite, à savoir que j’étais resté cloîtré au château pendant deux mois sans voir personne d’autre que les rares professeurs qui y résidaient comme moi de manière permanente, les elfes de maison et les fantômes. Cela aurait été le meilleur moyen d’attiser sa curiosité sur ma situation actuelle et ce n’était vraiment pas une bonne idée.

- Et je n’ai pas quitté l’Écosse depuis bien longtemps… à part pour retourner voir mes parents à Berlin, mais ça reste dans le secteur. Découvrir de nouvelles terres va être très intéressant ! Je vous remercie pour la proposition.

Et… j’avais répondu bien trop vite. Logiquement, je devais y réfléchir et prendre en compte le fait que j’étais marié, et que je ne devais pas accepter aussi facilement de partir en voyage avec une autre femme. Mais bon sang, je n’étais plus marié ! Je me réfugiai dans la dégustation de mon plat.

- Mais si vous me dites que je pourrais me faire gober par un scorpion géant au détour d’un chemin, je ne suis pas sûr d’accepter ! plaisantai-je pour oublier la bêtise que j’avais failli faire.

Et malheureusement, elle la remarqua en me demandant si j’avais eu des vacances. Je répondis simplement que je n’avais pas fait grand-chose à part m’organiser pour la rentrée de septembre, ce qui avait été un peu ennuyant, au final. Mon commentaire sur les scorpions géants la fit bien rire.

-  Alors, déjà, il va falloir éclaircir une chose. Je pense que si on s’appelle par nos prénoms, que je vais vous donner à mon tour un petit entraînement, et qu’en plus vous allez rencontrer des scorpions géants, on pourrait se tutoyer, non ? proposa-t-elle avec un grand sourire chaleureux et railleur.

Elle n’avait pas tort.

- C’est vrai, admis-je. Je vais essayer.

Elle rit de nouveau.

-  Néanmoins, même si l’Australie dispose de scorpions géants dont certains cracheurs de feu, nous ne devrions pas faire ce genre de rencontre où nous allons, assura-t-elle. Je ne vais pas nous emmener en terrain trop dangereux, non non. Je tiens aussi à ma vie, tout de même !

J’eus un sourire.

- Mais… j’ai des producteurs et des coins où trouver les produits. Donc… on ne va pas y laisser quelques os. De plus… il y a des guérisseurs Ngangkari, de vrais qui ne font que ça, qui n’ont pas appris leur savoir via l’université. De vrais, vrais, guérisseurs traditionnels, insista-t-elle. Bien plus que moi. Mon grand-père, à vrai dire, est le guérisseur de notre communauté. C’est… c’est quelque chose ! Il a énormément de talents et de savoir que je n’aurai jamais.

Elle en parlait avec une réelle émotion, ce qui me donnait très envie de rencontrer cette personne. Le voyage promettait d’être passionnant.

Tout en échangeant gaiement sur l’Australie, les diverses plantes qui poussaient là-bas, les guérisseurs Ngangkari et leur soin traditionnel que j’avais grande hâte de découvrir, nous terminâmes tranquillement notre plat. Maintenant, je rêvais de goûter au dessert. J’avais demandé un fondant au chocolat, avec un supplément de chantilly, bien évidemment. Je raffolais de cette crème. C’était peut-être ma grande faiblesse culinaire… Quand mon assiette arriva sous mes yeux, j’aurais presque pu baver tellement cela avait l’air délicieux. Je n’attendis pas plus longtemps et plongeai ma cuillère dans le gâteau, avant de lâcher un « Mmmhhh » très expressif en le savourant.

- La viande en sauce était une tuerie, déclarai-je. Et ça, ma chère, c’est ce qui va finir de m’achever.

Elizabeth m’avait toujours dit que mon niveau de gourmandise dépassait l’entendement. Et elle avait raison. Je m’effrayais moi-même… « Tu es pire qu’un enfant ! m’avait-elle dit un jour. Ou… qu’une femme enceinte ! » avait-elle ajouté en caressant son ventre rond de sept mois. Je chassai ce douloureux souvenir de mon esprit et souris à Merindah.

- Je suis trop faible, repris-je avec un ricanement. Certains élèves ont déjà compris comment m’amadouer…

Si mon interlocutrice avait bonne mémoire, elle pouvait se rappeler qu’à Ste Mangouste, quand je ne parlais pas de médicomagie, ma principale occupation était de discuter cuisine, et de me promener dans les couloirs en mangeant des biscuits, notamment aux alentours des seize heures. Le goûter, c’est sacré !