- Ce n’est pas raisonnable, Monsieur…

Levant les yeux au ciel, j’avais secoué la tête. Qu’importe. Nous avions bien assez travaillé pour aujourd’hui et nul n’avait le droit de nous interdire une pause. Nous, oui, car j’avais invité mes hommes à s’installer à table. Une demande qui passa visiblement dans l’oreille de sourds puisqu’aucun ne bougea sous mon regard dépité.

- Un muffin ne vous tuera pas. Rappelai-je.
- Un sort le pourrait…

Ils n’avaient pas foncièrement tort, mais dans ce cas… Nous ne vivrions plus réellement. Et je n’en avais pas envie. Nous étions pour la plupart trop jeune pour craindre le moindre recoin de rue. Alors, à nouveau, mes yeux avaient roulé.

- Faites comme vous voulez. J’ai envie d’un café et d’un gâteau. Et une chance, car je n’eus pas longtemps à attendre. Vous êtes tous certains de ne rien vouloir ? Avais-je même insisté dans ma plus pure générosité, celle que bien peu d’étrangers pouvaient connaître.

Mais non. Personne n’avait voulu m’accompagner. Et je me retrouvai alors seul à commander. Un gâteau d’abord. Le café viendrait plus tard puisque nous n’allions donc pas rester longtemps ici.

Ainsi installé à la table, entouré de mes hommes de main qui semblaient bien plus stressés que je ne l’étais, j’avais attendu ma pâtisserie qui ne tarda pas. Hé bien. Moi qui lui avais dit que je désirais la plus goûteuse… Au moins les couleurs étaient-elles appréciables. Cela donnait envie. Restait à en connaître le goût… Que je ne connaitrais jamais.

J’avais voulu en manger un bout dans un geste simple. Ma main se dirigeant vers ma bouche, j’aurais dû avoir ce pourquoi j’avais payé mais rien. A la place, un gamin, devant moi, affalé sur la table et mon gâteau roulant sur le pavé un peu plus loin. Il me fallut quelques secondes avant de réaliser, à l’instar de mes hommes qui attrapèrent rapidement le jeune garçon qui se redressait en tentant de s’expliquer.

- Lâchez le. Ordonnai-je en fronçant les sourcils. Êtes-vous en train de nous dire que ce gâteau n’était pas bon à la consommation ? Avais-je alors soufflé, tentant la sérénité malgré l’agacement qu’il avait provoqué en ruinant cet instant se voulant calme.

J’espérais que cela ne soit qu’une question d’acidité ou d’amertume, à vrai dire. Dans le cas contraire… Mes hommes risquaient de devenir d’autant plus suspicieux. Par tous les mages, non…

- Soit… Avais-je fini par soupirer. Ce serait donc plutôt à moi de vous remercier…

Croire un gamin ? Peut-être. Mais ce n’était pas réellement pour cela que je jouais cette carte de la gratitude. Non. C’était surtout car le visage de ce jeune sorcier me parlait sans que j’arrive à mettre le doigt dessus.

- Asseyez-vous. Je vais vous payer un gâteau, plutôt. En signe de ma gratitude pour m’avoir… Disons sauvé d’un gâteau étrange ? Avais-je alors ajouté.
- คุณพีท...
-  ทำตามที่ฉันบอก ไปเอาเค้กมาให้เรา. Avais-je coupé tandis que l’un de mes hommes le forçait plus ou moins à s’asseoir et que le premier allait directement en chercher au comptoir, un café en supplément pour chacun d’entre nous. Vous avez bien quelques instants, Monsieur Wilde ?

Ça y est. Son visage m’était revenu. Et le nom était visiblement revenu à l’un de mes hommes qui s’était soudain retourné vers le sorcier.

- Tu es le gamin qui fait des sauts de l’ange ? Le jeune attrapeur ?! S’était-il exclamé en tirant un carnet de sa poche alors que ma main se posait sur mon visage. Je peux avoir un autographe ?!

Le sérieux se perdait, parfois…

Cela n’arrivait pas en temps normal alors… Comment et pourquoi ?... Jetant un coup d’œil à mon homme le plus proche, ce dernier observait autour de nous. En vain au vu de son inaction. Evidemment. Soit. Nous allions devoir être plus attentif. Et sûrement allais-je en entendre parler lorsque nous rentrerions. A croire que certains se croiraient permis de me faire quelques remarques sur la façon de gérer ma propre sécurité. Un comble. Enfin. Avant cela… J’avais une autre énigme à résoudre : qui était cet adolescent dont le visage me parlait ?

Il me fallut l’inviter et envoyer l’un de mes hommes nous chercher de quoi boire et manger pour enfin le reconnaître. Mika Wilde. Un attrapeur junior de l’équipe de Quidditch de ce pays. Soit. Il était de toutes les manières toujours de bon ton d’être vu en compagnie de personnalités sportives et… Mes pensées avaient été interrompues par mon homme de main visiblement surexcité à l’idée d’être en présence d’un joueur de Quidditch. Et cela au point de lui demander un autographe ? Mais… Je ne pus faire autrement qu’avoir l’air désespéré tant je ne m’attendais pas à cela. Vraiment. D’ailleurs l’un de ses collègues lui donna-t-il un coup de coude dans les côtes alors que l’homme se retournait vers moi.

- Heu… Désolé… Monsieur Pete… Mais c’est Mika Wilde alors…
- Arrête… Tais-toi… Lui souffla un autre alors que j’arquai un sourcil.
- Oui mais…
- Ce n’est rien. Soufflai-je dans un sourire. Disons que la vue d’une célébrité en devenir t’a chamboulé.
- Ce n’est pas une célébrité en devenir ! Il est déjà… Mon regard et mon sourcil haussé suffirent au moins à le faire taire alors qu’il se retournait vers Mika Wilde. Désolé. Je suis un peu trop fan et envahissant parfois. S’expliqua-t-il en reculant, tiré par l’un de ses collègues qui le houspilla rapidement dès lors.

L’événement terminé, nos gâteaux arrivèrent alors accompagné des boissons. Un gâteau de la bonne couleur, visiblement. Tant mieux. Esquissant un nouveau sourire, j’avais hoché la tête.

- Ravi de savoir que nous ne finirons pas empoisonné, alors. Avais-je soufflé en buvant une gorgée de café. Mais dîtes moi. Vous avez l’œil, Monsieur Wilde, pour voir ce qui ne va pas dans votre environnement. Est-ce un don personnel ou le métier d’attrapeur vous a-t-il aiguisé la vue ? Soufflai-je alors que je devais admettre être surpris, malgré tout, d’avoir été arrêté pour un simple petit morceau de gâteau alors même que j’étais entouré de mes hommes.

Celui qui semblait être son plus grand fan désirait visiblement répondre. Je l'avais senti, observé, alors qu'il était tiré un peu plus loin pour être disputé. Les bons éléments étaient souvent les plus difficiles à gérer... J'avais néanmoins esquissé un sourire envers le jeune homme, rassurant, alors qu'il semblait presque s'inquiéter pour mon homme de main.

Notre commande apportée et ma plaisanterie dite, je m'étais intéressé à une chose particulière, au comment. Comment avait-il fait pour me rejoindre malgré mes hommes, comment s'était-il aperçu de ce mauvais gateau ? Et évidemment, la passion pour le sucre n'allait pas me convenir. Je ne répondis d'ailleurs même pas à cela, me contentant de sourire et d'hocher la tête.
Mais il avait expliqué. Arquant un sourcil, j'avais paru amusé.

- L'on me remarque ? Avais-je soufflé avec amusement. Mais vous avez véritablement l'oeil, Monsieur Wilde. Je serais presque tenté de vous embaucher pour remarquer les embûches que mes hommes ne voient pas. Plaisantai-je même sous le regard presqu'outré de certains de mes hommes qui jetaient un regard noir à Mika qui me fit arquer un sourcil. Laissez donc cet adolescent tranquille. M'amusai-je. Si vous avez peur pour votre poste, demandez-lui des conseils.
- Comment est-ce que tu fais ?!

Hé bien. Ce n'était pas tombé dans l'oreille d'un sourd au point que j'en sursaute, observant l'homme sans la moindre colère tant son envie d'apprendre me surprenait.

- Pardon, Monsieur, mais pour votre sécurité, il faut que l'on demande... Oui soit... Mais tout de même... Alors gamin, comment tu fais ? Explique nous... On a le temps, Monsieur Pete voulait boire de toutes façons.

Ah bah ça... C'était la meilleure... Clignant des yeux, je ne savais même pas quoi répondre. Mais si cela pouvait leur permettre de s'améliorer... Pourquoi pas... Quoique le pauvre gamin se retrouvait entouré de trois hommes bien plus grands et musclés que lui. Il fallait espérer que cela ne l'effraie pas. J'aurais presque pitié de lui.

Mh ? Là où mon regard s'était fait presque amusé, finalement, de la situation, mon visage s'était soudain légèrement figé. Il parlait thaï ? Comment ? Depuis mon arrivée en Angleterre, je n'avais rencontré que très peu de personnes le parlant. Et bien moins de cet âge là. Plus. Il n'avait certainement pas l'air d'un thaï et... Australien. Il était australien, je me souvenais de ce que l'on m'avait dit. Alors... Comment ?
Resté silencieux, j'avais ainsi observé la scène.

Le gamin semblait effrayé, en un sens, ce n'était pas réellement étonnant. Mes hommes n'étaient pas les personnes les plus agréables à regarder d'aussi près. Mais ce n'était pas réellement cela qui avait attiré mon attention.
Pour percer, pour se maintenir dans le domaine de la pègre, il y avait des qualités à avoir. La persévérance, bien sûr, l'arrogance, certainement, mais aussi une façon d'observer son entourage, une attention à toute épreuve qui était désormais fixée sur le jeune homme.

- On sait aussi se faufiler ! Avait rétorqué un des hommes, plus petit que les autres, visiblement peu en accord avec le jeune sorcier.

Quand bien même ils n'en étaient pas capables, je n'en avais plus que faire alors que mes yeux étaient fixés sur Mika Wilde et notamment sur ses propres yeux. Étais-je réellement en train de voir ce que je voyais ? Me levant calmement sans même détourner le regard, je laissais mes hommes l'effrayer encore davantage, n'écoutant même pas la moindre de ses explications. Ce n'était plus le plus important. Vraiment pas.

- Reculez. Avais-je soudainement ordonné, figeant mes hommes qui m'obéirent, repassant derrière moi alors que j'observai le jeune homme avec une attention bien nouvelle. คุณคือใคร ? Murmurai-je, attentif, me penchant légèrement en avant de me redresser. Mes hommes ne vous ferons rien, Monsieur Wilde. Repris-je alors. Mais je rencontre bien peu de personne parlant ma langue. Où l'avez-vous apprise ?

Avais-je rêvé ? Je l'avais vu. Ses yeux avaient changé. Sans que je ne puisse en voir la couleur, je l'avais vu, je l'avais vraiment vu. Quelque chose avait changé dans son regard. Et si j'étais au fait de bien des malédictions pour en avoir une, pour les avoir étudié, pour en utiliser... Ce regard... Je ne l'avais jamais vu autre part que dans des livres. Je l'avais pourtant cherché, j'avais tué plus d'un sorcier que l'on m'avait présenté maudit en vain. Mais ce regard... Personne ne l'avait eu.

- คุณไม่ธรรมดา Avais-je repris en esquissant un léger sourire. ใครคือเจ้านายของคุณ?

Je n'en étais pas sûr, mais je voulais y croire. Je voulais vraiment y croire.

En regardant des BL ? Je n'y croyais pas. Pas sans que cela soit difficile à prononcer. Pas sans que le vocabulaire soit mal utilisé. Non. Il y avait autre chose. Mais... Essayai-je de m'en convaincre ou était-ce la vérité ? J'étais presque certain de ce que j'avais vu. Mais avais-je réellement analysé cela ? Ma vision ne m'avait-elle pas trompé ?...

- Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire et tu le sais, n'est-ce pas ? Avais-je ajouté à son encontre dans un sourire de plus en plus ravi.

Je sentais pourtant mes hommes se tendre derrière moi. Ils comprenaient que quelque chose n'allait pas et le thaïlandais du jeune homme ne semblait pas vouloir aider à leur calme. Evidemment. Surtout lorsque je réagissais, lorsque je semblais de plus en plus intéressé, lorsque certains comprenais eux même le thaï.

- ท่าน...
- คิวบิ... Avais-je murmuré alors que l'homme se tendait davantage à ce mot, sa main sur la poche de sa baguette. Il avait compris, lui aussi.

Et le jeune Wilde sembla à son tour réellement comprendre les enjeux qu'il avait lui même créé. Arquant un sourcil, mon sourire étirant le coin droit de mes lèvres, je l'avais observé. Il menaçait.

- Mika Wilde. Commençai-je alors en avançant d'un pas avant de me stopper. 당신은 큐비입니다. 당신의 주인은 한국인입니다. Je savais parler coréen. Mon accent n'était certainement pas parfait, mais je savais le faire. Et je savais ce que je désirais maintenant. 당신은 곧 내 것이 될 것이라고 당신의 주인에게 말하십시오.

J'allais le trouver. Je trouverais cet homme qui se cachait derrière ce jeune garçon et je le tuerais. Un sourire aux lèvres, j'avais levé la main alors que chaque homme autour de moi sortait sa baguette pour viser Mika, provoquant l'arrêt net de chaque personne autour de nous.

- ฉันคงไม่มีปัญหาในการฆ่าเด็ก คิวบิ อย่าขู่ฉันนะ อย่าแม้แต่จะพยายามกบฏ Soufflai-je doucement, cette fois bien plus menaçant que je ne l'avais jamais été. ไม่ใช่วันนี้. สร้างความไว้วางใจในตัวเองและเจ้านายของคุณ ฉันต้องการไก่ของคุณทั้งหมด

Reculant enfin d'un pas j'avais baissé la main, laissant à mes hommes le soin de ranger leur baguette alors que mon visage ravi se posait sur le jeune homme.

- Dix jours. C'était le temps que je me laissais pour trouver son maître. Prend soin de toi, キュウビ。 Car j'avais besoin qu'il soit entier pour me servir.

Depuis tout ce temps, depuis le temps que je cherchais... Il avait fallu que je le trouve dans un petit village... Page et Hensley avaient, finalement, servi en m'attirant ici. Peut-être même leur ferais-je grâce d'un mois de paiement pour cette découverte... C'était une chose à laquelle je réfléchirais. Mais loin car sous le regard des passants, mon visage quelque peu dissimulé par la présence de mes hommes près de moi, nous avions rapidement transplanés jusque nos bureaux. Ravi. J'étais absolument ravi. Je l'avais enfin trouvé. Enfin...