L'année était terminée et l'école laissait les élèves souffler et s'amuser en organisant un bal, pour le grand bonheur de certains. Pour d'autres, c'était l'occasion de manger ou d'inviter l'élu.e de son cœur afin de passer un bon moment tout en espérant glaner un baiser à la fin. Rien de tout cela pour Willow qui avait traversé la foule avec sa jolie robe pour aller se cacher près du buffet. Personne ne l'avait invité mais elle appréciait les bals pour en avoir fait souvent avec ses parents. Elle savait plutôt bien danser, du moins les valses et autres danses désuètes mais aucun camarade ne semblait vouloir l'approcher tant son aura était sombre. Sauf un, toujours le même, évidemment. La jeune fille souffla en se demandant pourquoi elle alors que celle-ci n'avait toujours pas montré d'intérêt pour le né-moldu. Et si d'autres Sang-Purs les voyaient ensemble ? Elle serait couverte de honte. Elle regarda donc autour d'elle, cherchant rapidement un échappatoire mais rien, Maxens lui offrit un verre.

"Je préfère les fruits rouges mais m..." Il avait du mal à sortir celui-ci. "Merci, tu n'étais pas obligé." Vraiment pas mais elle le prit quand même. "Je constate que tu viens me servir sans que j'ai à le demander, tu as donc changé d'avis quant à mon offre de devenir mon serviteur ?" Répondit-elle l'air taquin. Si avec ça il restait encore là...

Maintenant que le jeune homme était tout près, Willow put remarquer l'état de son costume. Rien d'étonnant et elle leva les yeux au plafond même si cette tenue lui allait bien. Il était même séduisant dedans mais elle étouffa très vite cette pensée. Elle reporta ensuite son attention sur lui et but une gorgée de sa boisson.

"J'avoue que je suis surprise que tu viennes à ma rencontre, j'imagine que tu n'as personne non plus sinon tu ne serais pas là." Réaliste, comme toujours. On ne pouvait pas dire que le Gryffondor venait la voir pour son sourire ni pour sa gentillesse.

EPSILON

Maxens avait la fâcheuse tendance d'aligner des mots pour former des phrases sans aucun sens pour la Sang-Pure, à croire qu'il sortait du monde merveilleux des bisounours où les gens étaient beaux et gentils. En réalité, c'était plutôt la norme chez la plupart des humains mais pas pour elle qui au contraire fuyait les opportunités de se sociabiliser. Elle ne pouvait donc pas se rendre compte que d'être simplement gentil permettait de se faire des amis ou alors d'ouvrir la conversation. A vrai dire, elle était bien plus motivée de le faire quand il y avait un intérêt derrière.

"Pas vraiment, non, j'ai plutôt l'habitude que l'on soit aimable avec moi simplement parce que je suis une Rosier."

Son petit geste était tout de même appréciable et Willow l'avait d'ailleurs remercié pour cela. Le jeune homme lui expliqua ensuite le programme de sa soirée, à savoir... Manger. Soit, il faisait ce qu'il voulait. Pour la Serpentard ce n'était qu'un buffet de plus et elle n'avait d'ailleurs encore rien touché.

"Tu travailles, c'est vrai... Je me souviens que tu étais inquiet par rapport à ton poste lors cette horrible nuit où j'ai dû dormir à même le sol." Il faut croire qu'en dehors des cris et des agressions, c'était ce qui l'avait plus marqué.

La sorcière comptait lui demander s'il n'avait pas eu de problème mais Maxens la laissa silencieuse un instant, son aplomb l'étonnait toujours. Son visage s'assombrit et elle répondit sèchement.

"Je ne prétend pas que les Nés-Moldus doivent servir les Sang-Purs, tu as affirmé avoir besoin d'argent pour financer t'es études et je t'ai proposé une solution, voilà tout. Est-ce que j'aurais fait de même si tu étais un Sang-Mêlé, oui. J'ai pu remarquer que tu étais plutôt..."Ses yeux descendirent sur ses bras cachés par son costume. "Robuste, c'est assez pratique pour porter des choses."

Bon ses justifications n'allaient rien arranger mais elle ne savait pas comment se comporter puisqu'elle sortait déjà de sa zone de confort en ayant parlé avec un Né-Moldu. C'était difficile de ne pas le rabaisser, même quand la jeune femme ne le souhaitait pas puisque cette dernière n'était pas douée pour être simplement sympa. Elle se rappela alors qu'il était venu lui offrir un verre malgré le fait qu'elle avait mal agi avec lui lors de leur rencontre et il était peut-être temps de le lâcher avec cette histoire de serviteur. Elle qui ne voulait pas que l'on voit ses faiblesses les montrait justement en étant pas à l'aise alors elle avait tout intérêt à renverser la vapeur. Des excuses n'auraient-elles pas été appropriées pour repartir à zéro ? Il ne fallait pas lui demander la lune non plus.

"Je n'ai encore rien mangé." Dit-elle en s'approchant du buffet. "Tu as goûté ? Qu'est-ce que tu me conseillerais ?"

EPSILON

Il était difficile pour Willow de comprendre qu'il était possible de fédérer le monde autour d'elle sans passer par le pouvoir puisque c'était ce qu'on lui avait appris. Il lui fallait encore rencontrer des personnes comme Maxens pour réaliser les avantages que les amitiés sincères pouvaient offrir. Pour l'heure, il n'était qu'un extraterrestre dans sa petite vie de Sang-Pure toute tracée. En effet, il y avait clairement un décalage entre les deux étudiants. La jeune femme lui adressa un sourire amusé et lui répondit calmement.

"Plus forte je ne sais pas, c'est juste une autre manière de faire." En attendant, elle fanfaronnait mais elle ne savait pas comment s'y prendre. Néanmoins, il y avait de l'idée dans les paroles du Né-moldu.

Ce dernier démontait souvent ses paroles, même ce qui lui semblait banal et pour cause, Willow était déconnectée de la réalité. Elle réalisa à cet instant que Maxens ayant eu une vie plus difficile que la sienne, il savait relativiser. Il travaillait dur pour payer ses études après tout et il avait sûrement connu d'autres désagréments. Devrait-elle s'en excuser ? Ce n'était pas son impression, elle devait simplement apprendre qu'il y avait pire que de dormir par terre et elle comprenait mieux ses réactions.

Cependant, la Serpentard avait été piquée au vif par le jeune homme qui pensait qu'elle lui proposait d'être son serviteur à cause de son rang. Elle avait tenté de se justifier mais... Mal. La question que lui rétorqua son interlocuteur était donc pertinente et elle comprit finalement pourquoi il avait été vexé alors que sa proposition était honnête selon elle.

"Les Sang-Purs ne manquent pas d'argent." Logique implacable... Pour autant, elle n'aurait jamais demandé à un Sang-Pur la même chose car cela aurait été un manque de respect envers un égal, ce qu'elle se garda de d'affirmer.

En effet les Nés-Moldus et Sang-Mêlés étaient inférieurs mais jusque là, rien ne prouvait que Maxens l'était. Lui avait-on menti ? Non ses croyances ne pouvaient pas s'effondrer aussi facilement. Willow avait quand même décidé de mettre de l'eau dans son vin et s'exprima normalement cette fois, demandant ce qu'il y avait de bon à manger. Peu rancunier, le jeune homme lui répondit sans sourciller et lui proposa même des fruits rouges, il avait donc été attentif à ce qu'elle aimait. Ne pouvait-il pas être méchant pour lui prouver qu'elle avait raison de ne pas aimer les Nés-Moldus ?! Il ne lui facilitait vraiment pas la tâche. A vrai dire, il avait même tout pour plaire puisqu'il était simplement lui-même, ce qui était difficile à assimiler pour son esprit étriqué.

La sorcière resta silencieuse et prit dans son assiette ce que l'asiatique avait suggéré. Elle goûta et c'était en effet plutôt bon. Pas aussi raffiné que ce qu'elle avait pu connaître mais elle savait d'avance que sa remarque n'allait pas plaire à l'étudiant.

"J'aime bien, le melon est frais." Enfin quelque chose de positif. Elle reporta ensuite son attention sur lui et reprit l'air de rien.

"Je ne t'ai pas demandé comment tu en est arrivé à devoir payer tes études, tes parents ne peuvent pas t'aider ? Excuse moi si la question paraît idiote mais étant donné que même les Weasley ont réussi à envoyer leurs enfants à Poudlard, je m'interroge."

Apparemment il était possible d'être plus pauvres qu'eux. Willow pensait naïvement que tous les élèves avaient les moyens d'être ici et que chaque parent devait subvenir aux dépenses de leur enfant. Elle n'en avait plus mais ses parents lui avaient laissé une belle somme d'argent qu'elle allait bientôt recevoir. En attendant, c'était son tuteur Samaël Rosier qui avait aligné les galions.

Ce n'était tout de même pas forcément une bonne façon de sympathiser avec quelqu'un, sa question était même déplacée mais ce curieux personnage l'intriguait et il allait bien lui montrer à un moment qu'elle avait raison de rester qu'avec des Sang-Purs. Fierté mal placée ? Oui mais elle tentait de rester polie, selon sa vision du moins.

EPSILON

Botter en touche était parfois plus facile que d'argumenter et Willow perdait étrangement souvent ses mots avec le Né-Moldu. Ce dernier était loin d'être idiot contrairement à ce qu'on avait pu lui dire et même quand il ne la comprenait pas, il trouvait un moyen de répliquer.

"Je ne connais pas de Sang-Purs pauvres, voilà tout."

Ah le doux agacement, plus il osait lui répondre et plus elle s'énervait toute seule. Cela pouvait aller loin comme ça. Pourtant, contre toute attente, elle s'était presque radoucie pour plusieurs raisons et elle avait finalement réussie à s'exprimer de manière plus agréable.

"Oui ma mère était malienne et... Elle demandait parfois aux elfes de maison de préparer des plats originaires de son pays et certains étaient sucrés salés." Néanmoins, évoquer ce souvenir était douloureux pour elle et on put lire de la tristesse sur son visage. Elle n'avait d'ailleurs plus mangé de la nourriture africaine depuis la mort de ses parents.

La Serpentard s'étonnait elle-même de se livrer cette façon, la fatigue peut-être mais cela n'allait pas intéresser Maxens selon elle. Le fait de lui demander pourquoi il devait payer ses études lui avait permis de penser à autre chose mais ce que dit son camarade ne l'aida pas vraiment à se sentir mieux. Elle resta silencieuse quelques secondes, presque hébétée. Le jeune homme rebondit sur les Weasley mais Willow était encore bloquée sur la bombe qu'il avait lâché.

"Je suppose oui... Hum..." La question fatidique lui brûlait les lèvres : pourquoi son père avait voulu le tuer ? Pouvait-elle lui demander ? A vrai dire, elle pensait avoir compris mais il fallait que la réponse vienne de l'intéressé pour le croire. "Pourquoi ton p..."

Quelqu'un passa par là à ce moment-là et la bouscula sans le faire exprès et sous la surprise elle lâcha son verre qui se brisa au contact du sol. Décidément, on aimait bien la pousser...

EPSILON

Est-ce que la Sang-Pure s’attendait à ce que Maxens nettoie ses vêtements ? Non. Est-ce qu’il se devait de la faire ? En temps normal elle aurait dit oui mais… Battu à mort… Non, cette information était beaucoup trop violente pour qu’elle en reste là. Il n’était pas question de jouer avec le Né-Moldu cette fois et le fait qu’il avait failli mourir parce qu’il pratiquait la magie était pire que tout pour un sorcier. Jamais elle n’aurait pensé qu’effectivement certains parents non magiques pouvaient mal réagir. Dans un sens, la sorcière s’en prenait à quelqu’un pour ne pas être assez magique là où son père avait trouvé qu’il l’était beaucoup trop, un comble. Cela signifiait que le jeune homme n’avait finalement sa place nulle part, ni chez lui ni ici. Du moins, à cause de personnes comme elle qui prenaient ces “demis” sorciers de haut.

“Je t’en remercie.”

Pas de pique, pas de dédain cette fois, juste de l’incompréhension. Le Gryffondor lui avait donc expliqué pourquoi il travaillait et il était en effet préférable qu’il ne dépende pas de sa famille. C’était… Triste. Il avait encore ses parents mais il ne pouvait pas aller les voir. Etait-ce pire que la mort elle-même ? Willow n’était pas un monstre, juste une enfant instrumentalisée mais elle ressentait toujours des émotions, une lueur de lucidité cachée au fond de son être et elle n’avait pas d’autre réponse à donner que le silence. La Serpentard prit le verre qu’il lui tendait, il restait aimable avec elle alors que cette dernière ne le méritait pas, ce qui déclencha de la culpabilité. Il avait le don pour la faire passer par plusieurs états mais d’un autre côté, sa fierté était toujours présente et culpabiliser c’était s’avouer qu’elle devait le traiter en égal. Elle aurait pu lui partager quelques mots réconfortants mais elle n’en était pas capable, ce qui rendit la situation inconfortable. Elle était désolée pour lui mais elle ne pouvait pas lui avouer, pas après toutes les méchancetés qu’elle avait pu lui balancer.

“Je suis un peu fatiguée, je vais retourner dans ma chambre mais… Nous nous recroiserons sûrement.”

La fuite était de mise mais en réalité, elle ne savait plus quoi lui dire à cet instant ni trop quoi en penser. Est-ce qu’elle devait l’ignorer ou essayer de le comprendre ? Elle avait voulu savoir s’il était bel et bien inférieur mais à la place, elle s’était prise une claque. Cela lui donnait envie d’en savoir plus sur lui, étrangement. Seul l’avenir allait lui donner des réponses.

EPSILON