Cela faisait plus de deux mois que j’avais fait la connaissance de ce Serpentard. Désagréable de prime abord, je devais admettre qu’il avait eu le mérite, en une simple discussion, d’attirer mon attention et dans le bon sens du terme, soyons honnête. Ainsi, j’avais découvert une personne imbue de sa personne jusqu’à l’ironie et surtout intéressé dans un domaine qui me plaisait particulièrement : les sortilèges et maléfices.
C’est ainsi qu’en une simple conversation, nous avions décidé de faire « équipe » pour le meilleur et surtout pour le pire de la recherche, les expérimentations. Cela faisait donc maintenant plus de deux mois que nous nous retrouvions assez régulièrement afin de discuter des avancées de nos recherches respectives, trouvant toujours plus de cobayes à tester dans une recherche active d’avancée magique. Pour le moment ? Rien n’avait réellement été concluant. Le défi lancé sur le sortilège Protego Diabolica était particulièrement difficile à relever. Outre le fait que nos flammes ne devaient tuer personne, pour des questions d'éthique, évidemment, convaincre des groupes de personnes s’avérait être particulièrement compliqué. La conviction était difficile à faire naître, c’était définitif… Je devais m’entraîner, comprendre comment captiver les gens suffisamment et si ce n’était pas naturel pour moi, j’avais trouvé un endroit où je pouvais étudier cela, comprendre comment cela fonctionnait. Un endroit où une seule personne semblait captiver les foules. Un endroit où je me rendais dès lors qu’il m’était possible de le faire.

Enfin. Aujourd’hui, ce n’était pas pour parler sortilèges ou maléfices que j’avais donné rendez-vous à Damian. Non. Aujourd’hui, nous allions utiliser les sortilèges pour autre chose que l’étude et la recherche. Nous allions les utiliser pour lui.
A vrai dire, cela faisait plus d’un mois que je travaillais, de mon côté, sur ce projet. Un mois que je concevais des plans abracadabrantesque dans une optique bien précise. Et aujourd’hui était la finalisation de mon plan… Ou tout du moins la première étape de la phase numéro 2 de ce plan particulièrement bien ficelé.

C’était dans le parc, à notre lieu habituel d’expérimentation que je lui avais donné rendez-vous. Un mug de Macchiato Caramel en main, j’esquissai un sourire sincère en le voyant apparaître dans mon champ de vision avant d’avancer en sa direction.
Il fallait admettre que j’avais fait quelques « efforts » aujourd’hui, m’étant surprise à chercher plus qu’habituellement quelle tenue serait la plus appropriée pour cet après-midi. Quelque chose de confortable et pratique mais… Peut être moins ample qu’habituellement. Pourquoi avais-je cherché cela ? Je ne m’étais pas réellement posé la question, m’étant contentée d’enfiler ce crop top et ce pantalon. J’admettais d’ailleurs ne pas avoir assez pensé aux températures un peu trop basses pour laisser apparaître mon ventre mais… Soit. J’assumerais.

- Tu en auras besoin je crois. Le saluai-je alors en lui tendant le mug. Comment ça va aujourd’hui ?

Il avait tout intérêt à être en forme, c’était certain car rapidement, attrapant son bras, je le tirai derrière moi jusqu’à mon objectif. Nous n’avions pas de temps à perdre, enfin, du moins, je ne voulais pas en perdre. Je voulais lui présenter mon « invention » toute relative. Et ce fut donc avec un enthousiasme bien assez rare chez moi pour être noté que je me retournai vers lui, présentant le balai anti-vertige qui se trouvait au sol.

- Tadam ! Soufflai-je doucement. Et avant que tu dises quoique ce soit, laisse moi t’expliquer. Je ne te forcerais à rien, d’accord ? Mais je te promets que normalement tu devrais te sentir en sécurité sur ce balai. Je l’ai entièrement revu, revisité et amélioré pour que tu aies l’impression d’être sur une surface dure et que tu ne te sentes pas attiré vers le vide. Tu auras un sol, des barrières… Comme si tu étais dans une des tours de Poudlard. Et moi je serais derrière toi.

Je ne l’avais pas prévenu de cette « expérience », pas même de ce projet qui m’avait pris de très, très nombreuses heures à monter. Mais je ne doutais pas qu’il comprenne rapidement ce que j’attendais de lui. Il était bien assez intelligent pour ça.

- Alors je te conseille de boire une grande gorgée avant tout pour te réchauffer. Il fait froid là haut. Plaisantai-je de cette façon si sérieuse dont il devait avoir fini par avoir l’habitude.

Devait-il avoir peur ? Potentiellement. Enfin, je me doutais de ce qu’allait être sa réaction. Une réaction logique, somme toute. Mais de là à le lui dire… Non. Pas encore. Pas avant de lui avoir présenter les choses. Détournant malgré tout légèrement le regard à sa remarque sur ma tenue, je me mis à tousser, pas forcément très à l’aise.

- Ça te plait ? Mais qu’est-ce que je racontais encore moi ? Secouant vivement la tête, je repris presqu’aussitôt. Enfin oublie, viens.

Attrapant son bras, retrouvant mon enthousiasme peut être un peu trop grand pour l’occasion, je le trainai jusqu’à mon « invention », si tant était qu’elle puisse porter ce nom, la lui présentant comme je le pouvais, preuve que j’avais encore quelques progrès à faire concernant l’oration.

- Plus ou moins. Admis-je en l’observant en haussant les épaules. Ce n’est pas que ça me chagrine mais…

Pourquoi avais-je fait cela finalement ? Parce que j’en avais envie, c’était une certitude, mais pourquoi en avais-je eu envie ? Il n’avait peut-être pas totalement tort. Cela me chagrinait qu’il puisse avoir le vertige car outre les sensations, le ciel me semblait être l’endroit le plus serein que l’on puisse trouver alors… Qu’il ne puisse pas y gouter m’attristait un peu, en effet. Mais ce n’était pas tout, à vrai dire.

- Je suppose que je ne veux pas que tu vives avec une peur. Même si elle te convient.

Une peur comme la mienne avec l’eau, somme toute. Ce n’était pas le même élément mais au vu de ce qu’il s’était passé avec Miles le mois dernier… Je savais que toute peur pouvait se retourner contre nous. Quand bien même il était vrai que le vertige n’était pas une peur à laquelle nous étions facilement confronté. Pas comme l’eau.

- Tu n’y es pas obligé. Lui rappelai-je alors avant de froncer les sourcils, baissant de nouveau les yeux. Et si tu m’y trainais je suppose que je te suivrais. Soufflai-je. Ça fait un mois et demi que… Que j’essaie de ne plus avoir peur du lac… Enfin de l’eau.

Ce n’était pas très concluant, certes. Mais au moins, j’écoutais Miles et je lui permettais de m’aider. Autant qu’il le pouvait. Autant que mes forces et mon "courage" me le permettait.

- Alors… Je peux quand même essayer de te proposer. Tu ne risqueras rien. Pas avec moi. Assurai-je dans un léger sourire. Et je te promets que si tu le fais, je me baignerais dans le lac avec toi.

Avec cinquante bouées, un bateau et une armée de sortilèges et de potions qui me mettraient KO.

- Fais moi confiance. Terminai-je en lui prenant doucement la main, tentant d’être rassurante là où l’idée même de ce deal me faisait craindre le pire.

En quoi est-ce que cela me concernait ? Mmh. La question pouvait être posée, effectivement. Et j’avais bien une réponse à cela mais… Baissant mes yeux sur ses chevilles l’espace d’une seconde, je me demandai s’il était réellement nécessaire d’en augmenter la taille avant de revenir sur son visage.

- Parce qu’en fin de compte, contre toute attente, il est possible que je t’apprécie un petit peu. Soufflai-je, sous-estimant bien largement mes propos pour tenter de ne pas élargir son égo – et surtout par un certain déni, il s’entend. Et ce n’est pas être mon cobaye. J’ai déjà testé l’engin seule. Soufflai-je comme pour tenter de le convaincre.

Pour ce qui était du défi… Je pris le parti de ne pas répondre autrement que par un sourire du coin des lèvres, énigmatique. En un sens, il en était un. L’apprécier en avait été un et le reste… N’était pas mieux. Mais ce n’était certainement pas le sujet du jour.
De toutes les manières, il refusa, de but en blanc, évidemment. Ce n’était pas étonnant. Equivalent de ce qu’il me demanderait en me proposant une baignade au lac… Quoiqu’il faudrait peut-être m’y trainer. D’ailleurs grimaçai-je légèrement, peinant à m’imaginer y aller de mon plein gré.

- Ca dépend si tu me le demandes avec beaucoup de café à la clé je suppose. Soufflai-je, ma fierté refusant d’admettre que me trainer serait quand même la meilleure solution.

D’autant que, pour ma défense, je m’entrainais déjà, avec Miles. Plus ou moins. Sans réelle grosse amélioration pour le moment, je l’admettais malgré tout. D’autant qu’il s’agissait de s’entraîner en milieu non naturel, ce qui avait tendance, malgré tout, à me rassurer, en quelque sorte… Et j’avais toute confiance en Miles… Un point supplémentaire pour lui.

- Mon frère, en quelque sorte, essaie de réhabituer à l’eau… Répondis-je ainsi, une légère grimace au visage. J’ai eu un… Léger souci au début du mois dans le lac et… Depuis il ne me lâche pas. Avouais-je en baissant le regard le temps d'une seconde.

Mais ma phobie n’était pas celle au centre du jour, même si… J’eus la brillante idée de lui proposer un deal. Sa peur contre la mienne, en quelque sorte. Idiote que j’étais… Ce n’était pas tant un manque de réflexion que l’espoir qu’il accepte de vaincre son démon… Un espoir qui ne fut pas vain. Il accepta. La bonne idée pour moi, donc. Parfait.

Mais mieux valait ne pas me concentrer sur cela. Hochant la tête dans un sourire tout à fait mensonger je l’admettais, je serrais sa main dans la mienne pour le guider jusqu’à mon… Balais anti vertige ? Oui. Voilà. Préférant ignorer complètement la réflexion sur son frère. Mieux valait ne pas parler de risques, mais seulement de bénéfices.

Ainsi, dès lors qu’il fut installé, je me glissai derrière lui, à la place qui m’était attribuée. Une courte inspiration pour me donner un courage que je n’avais étrangement pas réellement et j’enroulai mon bas autour de sa taille pour me coller à lui avant de sortir ma baguette. Quelques sorts prononcés et tous les éléments se mirent en place correctement afin que tout puisse berner son cerveau. Du moins je l’espérais.

- Ca va aller. Lui soufflai-je doucement à l’oreille alors que j’élevai doucement le balai à l’horizontal dans le ciel, nos pieds bien fixés sur un matelas qui semblait dur comme de la pierre.

Je ne m’arrêtai qu’à deux mètres de hauteur. Pas plus. Le laissant prendre ses marques ou me demander de redescendre au besoin. Ma main posée sur son pull, je le gardai serré contre moi, comme tentant d’être une sorte d’ancre de sécurité.

- Tout va bien ? M’enquis-je doucement. Je peux monter encore un peu ou tu préfères qu’on avance comme ça ? L’avantage si on monte, c’est que personne ne te verra cela dit.

Une plaisanterie pour tenter de le détendre qui n’en était pas vraiment une. Je savais que cet engin était hideux, je ne l’avais pas conçu pour gagner le concours des inventions mais juste pour lui, à vrai dire alors… Il était vrai que nous pourrions peut être avoir légèrement un air ridicule comme ça.

- Tu peux toujours rêver. Avais-je répondu en le fusillant légèrement du regard.

Qu’il n’exagère pas. Admettre que je pouvais potentiellement l’apprécier était déjà suffisant. Je ne voulais pas qu’il fasse échouer mon balai par simple poids de ses chevilles déjà bien trop gonflées à mon goût. Quoique pour l’instant, son envie de s’en approcher soit légèrement inférieure au niveau de la mer. Evidemment.

- Tu me crois si horrible pour te proposer ça sans être un minimum sûre de ça ? M’enquis-je en arquant un sourcil.

J’admettais, certes, que je pouvais légèrement affabuler cela. Je n’étais pas réellement convaincue que cela fonctionne. C’était effectivement un test. Mais plus j’appuierais mes doutes, moins il pourrait se laisser convaincre. La solidité de mes propos était essentielle, et cela, je l’avais appris lors de ces meetings, comptant bien mettre mes nouveaux acquis à profit.
Bien sûr, Damian avait d’autres biais, d’autre façon pour moi de l’aborder. Le défi d’abord et… Ce deal. Ce satané deal que je venais d’accepter. Ce qu’il ne fallait pas faire pour qu’il accepte… J’allais le regretter, évidemment…

- Oh. Hé bien si c’est des litres de café que tu me proposes… Je ne peux qu’accepter. D’autant plus s’il y a un bonus. Soufflai-je, mi-amusée mi-paniquée, tentant de masquer cette dernière émotion par un sourire du coin des lèvres.

D’autant que je devais admettre que le « bonus » m’intriguait. Allait-il donc me ramener un muffin ? Oh. Un cinnamon roll peut être… Mmh. Nous verrions, je n’avais plus réellement le choix de toutes les manières que d’attendre et d’accepter mon sort. Quoique les cours de Miles allaient être utiles, si tant était que je fasse quelques progrès d’ici là, évidemment.

- Mmh. Grimaçai-je à sa question. Je… Disons que j’ai eu un problème avec mon balai pendant qu’on s’entraînait et… Et il a foncé dans le lac. Je… J’ai pas réussi à sortir. Sans Miles, je… Enfin…

Secouant vivement la tête, je fronçai les sourcils, mon corps ayant été parcouru d’un tremblement certain au souvenir de cette scène.

- Enfin. Je suis là, tout va bien et je sais mettre un pied dans une piscine maintenant. Feignis-je que tout était parfait malgré tout.

De toutes les manières, ce n’était certainement pas de moi dont nous allions devoir parler. Outre le fait que je n’étais pas des plus à l’aise pour cela, je voulais que l’on se concentre sur lui et sur sa peur. D’autant qu’il avait, merci au deal, accepté de s’installer.
Ainsi, doucement, j’avais élevé l’engin. Deux mètres. Cela suffisait pour le moment. Je sentais sa crispation, bien sûr. Mais je préférai l’ignorer, ne pas me concentrer sur cela, seulement sur le positif : il volait. Peut-être pas haut, mais il volait malgré tout. Alors acceptait-il plus ? La question fut posée, tentant un brin de dérision dans l’espoir de le détendre. Au moins un peu. Ce qui ne fut pas le cas, évidemment.

- Oui. Soufflai-je pour toute réponse, honnête. Mais je te promets de transformer en citrouille le premier qui dira quelque chose.

Quant au sortilège d’invisibilité, je secouai négativement la tête. Je n’avais pas trente mains. Tout avait déjà été étudié au millimètre pour se maintenir en place… Inutile, donc, d’en rajouter. Pas si je voulais, avant tout, assurer sa sécurité.

Et il désirait attendre. Alors nous attendrions. Autant qu’il le voudrait. Glissant ma main jusqu’au niveau de son cœur, je soufflai doucement dans son nuque, tentant de l’apaiser sans réellement savoir comment. Tout était prévu, j’avais tenté, du moins, de tout prévoir. Mais il était le seul à pouvoir décider de ce que nous ferions.
Et il décida. Ce serait « monter » donc. Sans plus attendre, j’obéis, faisant grimper notre balai jusqu’à une dizaine de mètre de hauteur. Un grand bond, certes, mais cela ne changeait pas grand-chose. Peut être l’air était-il légèrement plus frais là-haut, me faisant frissonner, collée contre son dos ; mais resté stable et droit, rien, à part la vue, n’était réellement différent.

- Alors ? Comment tu te sens ? Demandai-je ainsi, soucieuse, malgré tout – et bien plus que je ne voulais l’admettre – de ses ressentis et de ses peurs. Et ne joue pas les durs et les courageux. Je m'en moque. Dis moi juste la vérité. Soufflai-je alors, n'oubliant pas ses chevilles.

Bon. J’admettais que ce n’était peut-être pas le bon moment de parler d’un balai tombant dans le lac… Mais je ne savais ni ne voulais pas mentir. Je n’aimais pas cela et pire, j’aurais été capable de me faire prendre en deux phrases… Merlin quelle idiot, me fustigeai-je.

- Ce n’était pas un problème de balai, d’accord ? Et ce n’était pas celui-là… Tentai-je de le rassurer.

Au moins m’arracha-t-il un léger sourire à l’idée qu’il puisse vouloir étrangler Miles pour m’avoir sauvé. A vrai dire… Je ne doutais pas vraiment qu’il puisse finir par vouloir sa mort. Mais pour cela, il allait encore devoir monter sur ce balai…

Chose qu’il finit par faire. Avec un courage certain. A moins qu’il ne s’agisse là d’un égo surdimensionné… Avec lui, rien ne m’étonnerait vraiment. Mais je ne pouvais que le féliciter muettement, ma main sur son cœur, tentant, comme je le pouvais de l’apaiser, de le détendre alors que je le sentais plus crispé que jamais. En vain. Et ce même s’il accepta de monter davantage.

Cela ne dura pas. Fronçant les sourcils lorsque sa voix me parvint, la redescente fut immédiate. Je pouvais être une tortionnaire, certes, mais je n’aimais pas le son de cette voix, pas quand je la connaissais bien plus assurée. Alors, reposant pied à terre, je le laissai descendre, brisant mes sortilèges afin de me dépêcher vers lui, inquiète comme je ne l’avais jamais été.

Me laissant tomber à genoux à ses côtés, je n’osais pas le toucher, l’observant tenter de se calmer avant qu’il ne reprenne parole, admettant qu’il avait paniqué… Merlin… Je me sentais désolée, plus que désolée même de lui avoir infligé ce traitement. Mes yeux ne le quittant pas, j’avais envie de m’excuser, de lui dire que nous allions rentrer, qu’il n’aurait plus peur. Je détestais le voir ainsi. Sans réellement en comprendre le sens exact, mon cœur se serrait, douloureusement, à la vue que Damian m’offrait. Et il acceptait de recommencer ? Si j’étais devant lui ? En étant aussi pâle ? En venant de tomber à genoux ?

J’étais surprise. Réellement surprise. Autant que j’étais désolée, que je désirais le protéger ou tout du moins le soulager. Alors, aussi doucement qu’instinctivement, agenouillée à ses côtés, je passai mes bras autour de son cou, posant mon front sur son épaule.

- Désolée… Finis-je par murmurer, le serrant doucement. Ca va aller... ?

Je ne sus pas vraiment combien de temps je restais ainsi, mais, les joues rouges de cela, je finis par me détacher de lui, détournant les yeux. Je n’avais pas vraiment réfléchi à ce geste et si je ne le regrettai pas… Soit… Agir normalement me semblait être la meilleure chose à faire alors que je prenais une longue quoique discrète inspiration.

- On peut recommencer si tu veux, oui. Soufflai-je sans que je ne lève les yeux vers lui, autant pour éviter de le voir de la sorte que par gêne à vrai dire. Je vais devant. Si tu en as envie et que tu t’en sens la force. Tu sais que je ne t’obligerais pas, Dam. Tins-je à repréciser.

C’était à lui de décider. Rien qu’à lui. Et dans tous les cas… Je tenterais de le soulager, que ce soit avec un autre macchiato caramel sur le sol ou sur le balai, en me tenant devant lui.

- Non ! Me défendis-je.

Quand bien même j’avais utilisé cette excuse pour ne pas vouloir commencer à vaincre ma peur auprès de Miles. Quand bien même j’aurais presque préféré pour m’assurer que cela ne recommencerait pas… Ce n’était pas de mon fait. Je n’étais certainement pas exempte d’erreurs sur un balai mais jamais je n’en aurais conduit un dans le lac. Jamais je n’aurais perdu le contrôle de mon balai sans aide extérieure. Une aide que je n’avais vraiment cherché, me rendant incapable de répondre réellement à la question de Damian autrement qu’en l’encourageant, qu’en lui disant que je savais voler. J’étais la Capitaine de Gryffondor… Heureusement que je le savais.

Et Damian me fit confiance. Il s’était installé devant moi, me permettant de nous faire voler, tentant de l’apaiser autant que je le pouvais et cela avant que la panique ne le gagne, m’obligeant à nous faire retoucher terre pour l’observer s’écrouler un peu plus loin.
J’étais inquiète, c’était indéniable. Et je m’en voulais. Evidemment. Je l’avais poussé à monter sur le balai et le voir ainsi me serrait bien trop le cœur pour que j’arrive à rester de marbre comme je l’aurais fait habituellement.
Ainsi avais-je entouré son cou de mes bras pour enfouir ma tête dans son cou, dans un espoir d’apaisement, avant de m’excuser. Est-ce que cela allait aller ? Oui, disait-il quoique sa voix ne me rassure pas autant qu’elle l’aurait dû.  Le relâchant, fuyant son regard, je préférai alors lui rappeler qu’il n’en était pas obligé. Il ne serait jamais obligé à rien, pas avec moi. Et d’ailleurs ne le désirait-il pas. Soit alors… Alors il voulait malgré tout recommencer. Il n’aimait pas l’échec…
Relevant les yeux lorsqu’il se mit debout, je suivis son mouvement, les joues rosies avant que je ne fronce les sourcils.

- Si tu réussis, tu auras tout ce que tu veux. Soufflai-je à mi-voix en plissant les yeux à son sourire.

Je préférais ça. Définitivement. Alors, passant devant lui, je le laissai se réinstaller, remettant chaque chose à sa place avant que je ne fasse doucement monter le balai.

- Bien sûr. Répondis-je à sa demande. Je suis un monstre, pas une folle furieuse.

Il n’était peut-être pas temps de plaisanter, mais au moins tentai-je quelque chose alors que je me rendais compte que cette position était même plus agréable pour moi. Outre sa taille, je ne le voyais plus. Et… Et après l’avoir enlacé, c’était définitivement mieux de la sorte. Quand bien même je posai ma main sur l’une des siennes, comme pour le rassurer, alors que le balai, doucement, très doucement, s’élevait dans les airs.

- Tu me dis si ça ne va pas. Soufflai-je alors que je fermai un instant les yeux, profitant de l’air frais qui venait nous entourer, de cette petite altitude qui me faisait toujours du bien et qui m’apaisait.

Un apaisement mitigé alors que le sentir m’empêchait, visiblement, de me concentrer sur autre chose. Merlin. A croire que je m’en voulais vraiment plus que de raison de l’obliger à cela. Oui. C’était sûrement cela. De la culpabilité. Juste de la culpabilité qui m’avait poussé à le prendre dans mes bras.

- Désolée de… Désolée de t’avoir enlacé. Soufflai-je ainsi. Je n’aurais pas dû sans te demander ton accord.

…

Y avait-il encore à commenter mon manque de réflexion dès lors qu’il s’agissait de relations humaines ? Et ces temps-ci d’autant plus avec cet idiot de Serpentard qui me faisait donc culpabiliser. Juste. Culpabiliser.

- Tout à l’heure, je te promets que je t’offre le plus grand Macchiato Caramel que tu auras vu de ta vie. Finis-je par reprendre.

Je lui devais au moins ça.

Le contraire aurait été étonnant... Pourquoi avais-je donc dit qu'il aurait tout ce qu'il désirait ? Idiote. J'allais me faire avoir. Je l'imaginais déjà imaginé les pires choses non pas par manque de confiance mais... Au contraire, paradoxalement. Au moins... Il était décidé, de lui-même, à retenter l'expérience... Tant mieux. Enfin... Tant mieux tant qu'il allait bien. Oui, voilà.

Dans tous les cas, nous étions remonté sur le balai, échangeant nos places avant que je n'ose une plaisanterie qui, au moins, le fit rire. Ne serait-ce que légèrement. Soufflant doucement, j'esquissai un sourire, préférant bien plus l'entendre que rire que ce que j'avais pu voir.
Et enfin, le balai pu reprendre son envol. Ma main sur la sienne, je ne savais pas réellement comment faire pour le rassurer mais... Enfin... Il fallait réessayer. Nous élevant doucement, ce n'était peut être pas le meilleur moment de m'excuser pour le geste que j'avais eu sur le sol. J'imaginais sans mal la détresse de Damian et... Et finalement, c'était peut-être pour le mieux. S'excuser face à une personne coincée et paniquée. Le meilleur moyen de ne pas réellement perdre la face. Ou presque. Faisant une légère moue à son rire, je tournai la tête vers lui, incapable de bien le voir derrière moi, prête à rétorquer que je pouvais toujours le faire tomber du balai s'il riait de mes excuses avant de me stopper. Mauvaise idée.

- Mmh... Marmonnai-je pour toute réponse. J'avais juste envie que... Que tu ailles mieux. Me défendis-je sans que cela ne soit réellement utile.

Parler d'autre chose. C'était peut être la meilleure idée que je puisse avoir à cet instant et quoi de mieux pour cela que le café et le café qu'il aimait ? Bien. Il acceptait que je lui offre un immense café. En un sens, tant mieux, cela signifiait qu'il ne m'en voulait pas de lui faire subir cette épreuve. Et qu'on allait pouvoir passer du temps ensemble ap... Non. Enfin si mais... Soit. Bref.

Continuant notre ascension, je sentis bientôt sa prise se resserrer sur moi autant que son front se poser sur mon épaule, me figeant légèrement alors que mon coeur accélérait du fait de... Mmh... Sûrement de mon inquiétude quant à son état. Oui. Voilà.
Esquissant un léger sourire à sa remarque, je soufflai doucement, secouant la tête de gauche à droite.

- Je ne suis pas en sucre. Lui fis-je remarquer. Et tu veux vraiment savoir la hauteur ? Me penchant au delà du tapis-sol improvisé, j'observai un instant la distance qui nous séparait du sol. Pas plus de sept mètres. J'y avais visiblement vraiment été doucement... Bon...

Stabilisant le balai dans les airs, je me décalai un peu. On allait essayer autre chose... Sans réelle difficulté, quoique sa présence complique le mouvement, je me retournai alors face à lui, lui faisant face, les joues légèrement rosies de... De rien, je n'avais pas besoin de trouver des excuses à tout. Posant mes mains sur les siennes, je l'observai alors un instant, glissant mes mains autour de sa nuque pour l'attirer à moi, de plus en plus rouge. J'avais senti sa tête sur mon épaule... Il devait se sentir plus en sécurité sans rien voir alors... Logique. Enfin... Je l'imaginais.

- Je te promets que tu es en sécurité avec moi. Lui soufflai-je alors que mes doigts caressaient distraitement sa nuque sans même que je m'en rende réellement compte. On est pas trop haut encore. On peut très vite aller au sol si ça ne va pas... Alors... Tu peux essayer de regarder autour de nous ?

- Tu as progressé au moment où tu as accepté de remonter sur le balai. Lui fis-je remarquer.

C’était, après tout, un effort gigantesque qu’il avait fait là. Après avoir paniqué, il avait accepté de recommencer, quand bien même nous avions échangé nos places, je trouvais ça particulièrement courageux. Alors… Quand bien même nous n’aurions été qu’à deux ou trois mètres – et ce n’était pas le cas – il avait, pour moi, progressé.
Evidemment, il était tendu, très tendu. Et je n’allais certainement pas l’en blâmer mais… Si je n’allais pas monter davantage pour le moment, je réfléchis un instant. Comment faire pour qu’il se détente. Si être derrière moi avait au moins permis qu’il ne panique pas pour le moment… Peut-être que lui faire face lui permettrait de se concentrer sur autre chose ? D’être un peu plus à l’aise pour observer, pour se rendre compte qu’il ne risquait rien même à sept mètres de hauteur.

Idée délirante en un sens mais seule idée que je pouvais avoir à cet instant. Je n’étais pas une très bonne professeur, il fallait l’admettre… Au moins avais-je des idées derrière la tête. Alors, me retournant sans trop de difficulté, j’avais osé – car c’était bien le terme au vu de mes joues rougies – entourer sa nuque de mes bras pour l’attirer à moi.

Et maintenant ?

C’était une bonne question. Une très bonne. Et je n’étais pas réellement particulièrement à l’aise de la sorte quoique le contact ne me déplaise étonnamment pas. Caressant distraitement sa nuque, j’avais fini par lui promettre la sécurité. Je ne l’obligerais à rien, nous pourrions remettre rapidement pied à terre s’il en avait besoin alors… Pouvait-il regarder autour de lui ?

Apparemment. Glissant mes mains sur ses cuisses pour lui permettre un peu plus de mouvement, je ne le quittai pas des yeux, fixée à la moindre de ses réactions, au moindre risque de panique que je pourrais déceler en lui.
Pourtant, il semblait… Bizarre ? Malade peut-être ? Sa voix me semblait enrouée et… Oh…

- Tu n’as pas attrapé froid ? Soufflai-je, légèrement inquiète. Il fait plus frais en hauteur…

Une logique implacable sur la météo qui me semblait bienvenue alors que sa cuisse semblait bruler la main que j’avais posé sur.
Esquissant un sourire, je secouai la tête avec un amusement, sa remarque m’ayant arraché un léger rire.

- Je n’y compte pas. Enfin… C’est pas le but. Mais si je peux t’emmener en vol de temps en temps je ne dis pas non. Et puis… Changeais-je de sujet en secouant la tête, il faudra que je pense à recycler ce balai quand tu seras plus à l’aise, répondis-je en baissant les yeux vers le tapis sous nos pieds. Peut-être un balai à piquenique… On mangerait à quinze mètres au-dessus du sol…

Si l’idée pouvait me paraître tentante, je secouai rapidement la tête en relevant cette dernière vers Damian, un sourire amusé aux lèvres.

- Promis, c’est pas toi que j’inviterais. Indiquai-je avant de regarder autour de nous. Dam ? Regarde-moi. Soufflai-je finalement en passant l’une de mes mains derrière moi pour me pencher en arrière et faire élever de nouveau le balai.

Trois mètres supplémentaires, je n’irais pas plus haut dans cette position. C’était trop risqué s’il paniquait.

- Tu voulais savoir si tu faisais des progrès ? Je pense que le fait que tu te trouves ici parle pour toi, non ? Lui soufflai-je dans un sourire en stabilisant le balai. T’es courageux. Mes félicitations Monsieur Rowle, vous remontez dans mon estime. Me moquai-je. Tu veux qu’on redescende ? Ou on ose le tour de Poudlard ? J’ai quelques endroits sympa à te montrer si tu as envie de tester. Mais tu n’es pas obligé. Vraiment pas.

Il avait chaud ? Cela ne correspondait pas vraiment ni à la météo ni à notre hauteur mais bien plus à ce que je ressentais. Nous étions tombé malade tous les deux ? Mmh. Non. Je ne pensais pas alors... Mmh. Mieux valait que je ne réfléchisse pas trop, pas maintenant. Je devais rester concentrée, bien que j'admettai aisément que le sentir près de moi de la sorte n'aidait pas à cela.

- Tu peux retirer ton...

Mais qu'est-ce que je disais ? Clignant des yeux, je secouai la tête de gauche à droite. Réfléchir avant de parler. Par Merlin, je devais réfléchir avant de parler. A croire qu'il finissait par aspirer mon intelligence et mes capacités de réflexion. Était-ce là son super pouvoir ? Outre sa fierté mal placée, évidemment. Au moins venait-il de changer de conversation. Heureusement. Pourrait-il être un jour plus à l'aise ?

- A force, j'en suis sûre. Soufflai-je en hochant la tête. Si tu en as envie surtout. Mais on pourra y travailler.

Dans tous les cas, et surtout s'il ne le voulait pas, j'allais devoir recycler ce balai. Pourquoi pas, d'ailleurs, en balai pique nique. Sans lui, évidemment, je ne lui imposerais pas une telle chose alors même qu'il n'était pas à l'aise en se tenant bien sur le balai... Cela l'empêcherait très certainement de profiter du moment et c'était bien tout ce que je ne voulais pas.

- C'est ce que je me disais. Approuvai-je. Je te garde la terre ferme, pour toi.

Il semblait capable de tenir une conversation... C'était le moment d'augmenter notre hauteur. Alors, tentant de capter son attention, sans le quitter des yeux, un sourire qui se voulait rassurant au visage, je me penchai en arrière. Son geste ne m'avait pas échappé. Il avait eu peur que je ne tombe ? Je n'eus pas le temps de me poser la question que sa main se posa sur la mienne, l'agrippa même, coupant mes pensées à son contact. Par Merlin. Cela m'agaçait. Je devais avoir un problème cardiaque ou quelque chose comme ça. Pourquoi avais-je l'impression que mon coeur ratait des battements dès lors qu'il me touchait ? Consulter. Il allait falloir consulter un médicomage. Mais avant cela... Je serrais sa main dans la mienne, la caressant doucement du pouce, stabilisant le balai pour ne pas trop exagérer.
J'étais fière de lui, de ce qu'il subissait. Vraiment. Et si je me moquais éhontément de lui, comme à mon habitude, je soufflai doucement en le voyant prendre quelque peu la mouche.

- Entre autre. Repris-je toujours aussi moqueuse avant de secouer la tête. Mais surtout parce que tu te bas contre ta peur et que c'est impressionnant. Soufflai-je, sincère.

D'autant qu'il avait accepté le tour de Poudlard... Par fierté suite à ma moquerie certainement plus que par réel désir, mais soit. Je n'allais pas revenir sur ce point. J'allais simplement réfléchir à quel trajet emprunté, ne désirant pas survoler des zones trop... peuplées d'élèves au cas où il veuille descendre. Je ne voulais pas le mettre dans l'embarras. Vraiment pas. Alors, esquissant un sourire, j'avais fini par me retourner, lui refaisant dos, bien plus facile pour avancer, pour voir où j'allais.

- Alors on y va. Lui indiquai-je en faisant doucement avancer le balai.

Notre premier arrêt fut au dessus des berges du lac. Refusant de moi même de le traverser, au cas où, je me penchai en arrière pour me rapprocher de lui.

- Tu vois, là-bas, la petite plage ? Demandai-je en lui montrant un point un peu plus loin. Un jour, promis, nous irons là-bas. Toi en balai, moi à la nage. Plaisantai-je en souriant avant de reprendre notre route pour m'arrêter devant Poudlard. Au moins, ici, la vue était imprenable, magnifique... Alors ? Qu'est-ce que tu en dis ? Murmurai-je, adorant toujours autant cette vue. Quand j'ai besoin de calme, je viens ici, sur le balai. Et je regarde Poudlard. A cette hauteur on entend seulement le vent et plus les élèves, c'est agréable... Fronçant les sourcils, je secouai la tête. Enfin... Quand on aime voler. Rectifiai-je. Tu as un endroit de repli, toi ? Je pourrais peut-être l'y amené... S'il en avait besoin.