Un appel. Tout avait été déclenché par un simple appel, celui des parents de Mika. Était-il avec moi ? Bien sûr que non. Le week-end, il était au club, il ne resterait jamais avec moi pour rater un week-end d’entraînement. C’était évident. Alors… Où était-il ? Pas au club, visiblement… Ce simple fait m’avait alarmé. Une chance que je passe mes week-end à Pré-Au-Lard, dans un coin reculé du village pour pouvoir profiter du portable et des communications avec Mika. J’avais d’ailleurs tenté de l’appeler. Au moins à dix reprises. En vain. Il n’avait pas répondu. Et j’avais alors transplané jusqu’à son club, sans attendre, sans me soucier de tout ce qui pouvait m’entourer pour agresser la première personne que je vis. Où était-il ? Où était Mika ? Il était parti au club, j’en étais sûr, il m’avait dit au revoir, il m’avait dit qu’il reviendrait dimanche, comme d’habitude. Rien n’avait changé de ses habitudes. Il était au club. J’en étais sûr et certain. Il y avait été alors… Où était-il maintenant ? Personne n’avait pu me répondre alors que les recherches s’activaient, que les parents de Mika étaient arrivés sur les lieux.

Je devais le protéger. J’avais promis de veiller sur lui. Mais le club devait être un lieu sûr alors… Où était-il passé ?! Il était au club ! Le club devait le protéger ! Qu’avaient-ils fait ?! J’allais d’ailleurs foncer sur son entraîneur lorsque nous fûmes appelés.

« Ici ! »

Ils l’avaient trouvé. Me précipitant sans attendre, j’étais entré en trombe dans sa chambre sans me soucier des personnes qu’il pouvait y avoir autour de nous. Je me moquais du reste. Il était là et… Je m’étais stoppé net en voyant son état. Il… Du sang. Il était plein de sang…

- 내 심장 ! M’exclamai-je en accourant vers lui, m’agenouillant devant lui pour prendre sa main, posant la mienne sur sa joue pour l’obliger à lever les yeux sur moi. Où est-ce que tu étais ?... Hae… Que… Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Avais-je murmuré, affolé. Que…

Ses yeux… Il… L’air terrifié, je m’étais tourné vers sa mère. Il y avait quelque chose. Quelque chose qui me poussa à observer son corps, à observer le sang qui avait séché sur ses vêtements, à soulever son t-shirt pour me figer à la cicatrice qui ornait désormais son corps. Un recul immédiat. C’est ce que je ne pus empêcher alors que je tombai en arrière. Je n’étais pas effrayé par ce que j’avais vu. J’étais effrayé par ce qu’il se passait, par ce que mon cerveau m’obligeait à comprendre.

- 큐비 의 여우… Avais-je articulé difficilement. 그건... 그건...

Je m’étais relevé soudainement, d’un bond, pour me rapprocher de Mika, pour lui attraper les épaules, l’air horrifié.

- Qu’est-ce qu’il s’est passé, Mika ?! Le grondai-je sans même le vouloir. Où est-ce que tu étais ?! Avec qui ?!

J’avais soudain peur. Peur de ce que je comprenais, de ce que je ne voulais pas comprendre. Peur de ce que le regard de la mère de Mika m’indiquerait, peur de ce que cela signifierait, de beaucoup de choses que mon esprit n’arrivait pas à saisir, à accepter.

- 와일드 부인... 말해 보세요... 그게 아닌데... 내 생각엔 그게 아닌 것 같아요... Suppliai-je alors sans quitter Mika des yeux. 제발요…

Je me trompais. C’était évident. J’étais en train de me tromper. Mon cerveau apeuré de l’avoir perdu de vue un instant ne faisait que me faire inventer je ne savais quelle bêtise… Je me trompais. C’était la seule solution…

Elle… J’avais relâché Mika. J’avais laissé sa mère approcher, le toucher, l’observer comme j’avais pu le faire. Elle… Elle venait de confirmer ce qui me semblait…

- 불가능한... Avais-je murmuré, la voix déformé par l’effroi.

Qui… Qui avait fait ça ? Qui s’en était pris à lui ?! Tremblant de toute part, je m’étais assis de l’autre côté, près de lui, laissant ses parents s’occuper de lui, incapable de savoir comment réagir, quoi dire ou quoi faire. La blessure se révélant davantage, mon poing s’était serré, ma main agrippant un instant celle de Mika dans une colère sourde. Quelqu’un l’avait touché…

- 내가 그들을 죽일 것이다... Ces mots, je les avais prononcés en même temps que sa mère. J’allais les tuer. Qui que ce puisse être, j’allais les faire souffrir au point qu’ils regretteraient jusqu’à leur naissance, jusqu’à la moindre seconde de leur vie…

Alors qui ? Comment ? Pourquoi ?! Les réponses ne venaient pas assez vite à mon goût mais sa mère semblait gérer, elle semblait s’occuper de cela. Il devait nous expliquer… Et pourquoi on avait… Je m’étranglai un instant alors que l’envie de le secouer se faisait soudaine ; une envie rapidement balayée par le reste. Son arrière-grand-père. Il… C’était lui qui… Me relevant soudainement, le souffle court, les poings serrés, j’observai bientôt le mur devant lequel je m’étais planté sans même réellement le voir. Il… Prendre la vie d’un adolescent innocent ne lui avait-il pas suffit ?! Il devait maintenant s’en prendre à la vie de son propre sang ?!

- 나는 그를 죽일거야 ... Avais-je répété en serrant le poing avant de me retourner vers Mika qui continuait de déblatérer ses inepties. Hae ! Ne pus-je m’empêcher de m’exclamer en m’approchant de nouveau de lui, m’accroupissant devant lui. Regarde-moi. Grondai-je.

Je savais ce que les cours me disaient de tout cela. Je n’en avais jamais vu. Je ne connaissais pas la réalité. Mais je savais tout sur la théorie et… Je savais. Mais je le refusais.

- Il ne t’a pas sauvé. Il…

Qu’avait-il fait exactement ? La voix de sa mère m’avait coupé, heureusement à vrai dire. Qu’avait-il fait ? Et ce fut trop pour moi. Trop pour mon esprit. Le visage devenu livide aux mots de Mika, je n’avais su m’empêcher de glisser ma main sur son torse, touchant ce que ce salopard lui avait fait avant de me redresser pour jeter à terre le premier objet qui me vint à la vue, sa lampe de chevet.

- IL T’A TUÉ, MIKA ! Hurlai-je plus fort que je ne le voulais tant il semblait absent, tant le fait de savoir, de comprendre ce qu’il avait fait m’horrifié. Il… Il veut t’utiliser. Il t’a utilisé… Il… 젠장! M’exclamai-je.

Je n’étais pas vulgaire. Je n’avais jamais appris à l’être. Le respect faisait parti de moi, de mon éducation mais cette fois… Impossible. Je n’y arrivais pas. Je ne pouvais plus. Pas plus. Pas alors qu’après mon cousin, il me prenait ma raison de vivre et… L’accès de rage passé, j’étais revenu près de lui, oubliant sa mère à côé de lui pour poser un genou sur le lit, pour l’attirer contre moi, retenant mes larmes.

- 미안해 자기야... Je suis désolé… Me forçai-je à reprendre en anglais. J’avais promis de te protéger… Je devais te protéger… Je suis désolé… A cause de moi, tu… Il…

A cause de moi… Oui. C’était ma faute. Ma faute car j’aurais dû le protéger, je l’avais promis à sa mère. J’avais rompu cette promesse. Ma faute car je connaissais, je savais ce que l’on disait… Des corps de femmes. Cette chose habitait les corps des femmes ou des garçons androgynes et… Et je l’avais poussé à… Je… Ce que nous faisions était…
La culpabilité m’entraînait dans plus d’excuses encore alors que mes larmes ne coulaient toujours pas, que ma voix se tordait de douleur autant que mon cœur explosait en milliers de morceaux. Il avait été tué. Presque. C’était… Il… On l’avait touché. On me l’avait arraché. On l’avait arraché à ses parents… J’allais le tuer… Je le tuerais… De n’importe quelle façon, je le tuerais…

- 죄송합니다... Avais-je repris à l’encontre de sa mère autant que de son père, oubliant même qu’il ne parlait pas coréen. J’étais… Tellement désolé…

Il allait mieux… Comment pouvait-il dire cela ? Comment pouvait-il même le penser un instant alors que cette blessure ornait son torse ?! J’avais explosé. Littéralement. Emportant une lampe dans ma colère, dans mon effroi. Mais me calmer. C’était ce qui m’était demandé dans un murmure, par sa mère. Me calmer, mais comment ? Ce fut la culpabilité qui apporta réponse à cette question alors que je l’attirai contre moi, que je m’excusai, beaucoup. Je ne l’avais pas protégé. Je… Il l’avait touché parce que je n’étais pas là, parce que… Parce qu’il était lui et… Je m’en voulais. Je m’en voulais terriblement. Et si ses mots ne servirent à rien pour m’apaiser, son contact, le fait qu’il se serre contre moi, au moins, me calma, au moins le temps de quelques secondes.

- Nous avons… Nous avons mis son loup garou hors d’état de nuire… Murmurai-je, gardant Mika serré dans mes bras. Il doit se sentir en danger…

Notre colère était évidente. Ce que nous avions fait à l’assassin d’Ho-Seok… Nous le ferions bien plus puissamment à celui qui l’avait ordonné. C’était une évidence alors… Se protégeait-il de cela ?... Cette idée m’enrageait. Elle m’enrageait au point que je m’obligeai à enfouir mon nez dans ses cheveux, tentant de trouver son odeur, tentant de ne pas de nouveau exploser jusqu’à ce qu’Alec se décide, à son tour, à parler et que je ne me fige.

Noyé dans son sang… Ces mots résonnèrent dans ma tête, tendant mon corps jusqu’au dernier muscle alors que je me relevai soudainement, le risque de blesser Mika en le serrant trop fort contre moi étant devenu important. Noyé dans son sang… Il était… On l’avait fait agoniser… Pour… ça…
Les larmes avaient fini par se révéler, dévalant mes joues alors que ce fut au tour de sa table de chevet d’être renversée, entraînant un vol de photos qui me figèrent à leur tour dans une angoisse démesurée. Il… Qu’est-ce que j’étais en train de faire ? Au lieu de le soutenir, j’explosais et… Tentant de sécher les larmes sur mes joues, j’avais rejoint Mika pour l’aider à ramasser les photos, m’excusant alors sans même le regarder.

Je n’avais levé les yeux que devant la mère de Mika alors que les larmes menaçaient de reprendre leur route. M’occuper de lui le temps qu’ils aillent chercher à manger… hochant doucement la tête, je n’avais dès lors plus fait de geste jusqu’à ce que la porte se referme, que je ne sois obligé de me tourner vers lui et que je ne puisse plus retenir.

Fonçant vers lui, je l’avais repris dans mes bras, le serrant plus fort que jamais.

- Je suis désolé… Je suis tellement désolée, Hae… Je… Je t’aime… Je t’aime plus que tout… Je suis désolé… Articulai-je difficilement. On va trouver une solution… Je t’aime… Car c’était encore la chose la plus importante, celle qui me faisait tenir alors que l’envie de le chercher pour le tuer immédiatement se faisait sentir. J’aurais dû être là… Je suis désolé…

Il avait souffert… Cette idée me brisait le cœur, me tuait à mon tour alors que mes bras se refermaient encore davantage autour de lui, mes sanglots étouffés du mieux que je le pouvais.

- Je… Il fallait pourtant que je me calme, que je sois là pour lui, quand bien même il ne comprenait pas. Viens… Avais-je articulé en le levant doucement pour le mener jusqu’à la salle de bain. Tes parents vont revenir avec de quoi manger… Tu vas… Il faut que tu te laves…

De l’eau chaude lui ferait peut-être un peu de bien alors que je l’attirai dans la douche, le déshabillant sans même prendre la peine de le faire pour moi avant de le laver, de l’aider à se débarrasser de tout le sang, de tout ce qui était la preuve de ce qu’il s’était passé, pour, finalement, l’attraper entre mes bras pour le redéposer, allongé, sur son lit, me séchant rapidement d’un coup de baguette.

- Tu… Il faut que tu te reposes… On va trouver une solution… Tentai-je de me rassurer, moi, plus que lui alors que je commençais à faire les cent pas dans la chambre, tournant comme un lion en cage, réparant ce que j’avais cassé comme pour occuper, l’espace d’une seconde, mon esprit. Mais… Repose toi, Mika… S’il te plait…

Il rentrait dans ce cadre depuis sa naissance. Il était… Je n’avais rien fait et… Mais si nous n’avions pas mis le loup garou hors d’état de nuire je… Un instant je grondai, malgré moi. Je ne pouvais pas savoir mais… Qu’aurais-je fait en le sachant ? Lui… Ou ma famille… La réponse me semblait claire mais… Je ne pouvais pas savoir. Je n’aurais jamais pu savoir…
Et sûrement ne voulais-je pas tout savoir. Les mots d’Alec me rendirent plus enragé, plus livide aussi, alors que la table de nuit de Mika volait à son tour, provoquant une retombée de photos… De nos photos. Au moins cela avait-il suffit, un instant, à me sortir de ma colère alors que je l’avais rejoint, que j’avais ramassé ce qui était nous, ce qui importait, m’excusant à mi-voix sans réussir à lever les yeux sur lui… Du moins jusqu’à ce que ses parents nous laissent seuls, que je sois obligé de lui faire face et que je ne cède alors à mon angoisse.
Franchissant les quelques pas qui me séparaient de lui, je l’avais rejoint, serré dans mes bras en m’excusant, les larmes dévalant trop rapidement mes joues alors que la culpabilité revenait de plus belle. J’étais désolé. Je… Je l’aimais tellement… Tellement fort… Pourquoi n’avais-je pas été là quand il le fallait ? Mais il allait bien et ces simples mots ne firent que m’obliger à le serrer davantage, à me briser encore un peu plus contre lui tandis qu’il continuait à parler et qu’à nouveau je me figeais. Il… Il avait envoyé un patronus. Il avait essayé et… Il avait eu peur… Il avait voulu me prévenir et… Me redressant, les larmes ne s’arrêtant pas, j’avais tenté de l’observer mais… Ses yeux et… Je n’avais pu que l’embrasser, difficilement, dans une retenue douloureuse.

- Je suis désolé… Avais-je de nouveau articulé. Je suis désolé… J’aurais dû être là… J’aurais dû te sauver… Murmurai-je avant que je ne me décide à le lever, à l’accompagner jusqu’à la douche pour l’y laver, pour le débarrasser de tout cet événement du mieux que je pouvais.

Quant à moi… Je n’avais pas pris la peine de me déshabiller. Je m’en moquais. Eperdument. Et tomber malade… Je préfèrerais encore tomber mille fois malade, ne jamais m’en sortir que de continuer ce que nous vivions là…. L’allongeant dans son lit, je m’étais néanmoins séché, plus désireux de ne pas tremper la chambre que par confort envers moi-même. Puis… Ce fut les cent pas. Je ne pouvais pas m’arrêter, je ne pouvais pas m’asseoir, pas quand mes pensées fusaient à cent à l’heure, pas quand je tentai de ne plus réfléchir, en vain et…

Mon prénom m’arrêta, me tournant vers Mika, sourcils froncés. Pourquoi est-ce que j’étais… Serrant les poings, je m’étais à nouveau détourné alors que cette question me donnait de nouveau cette envie de pleurer.

- Ca ne passera pas… Avais-je murmuré.

Tout comme il n’allait pas bien. Il était… Il était habité par un parasite et… Arrêter de marcher dans tous les sens… Baissant la tête, j’avais acquiescé. Il était fatigué… C’était… C’était normal après… Mon poing se serra d’autant. Ne pas y penser. Je ne devais pas penser à ce qu’il s’était passé, à ce qu’il avait vécu… Pas maintenant… Je devais… Me figeant à ses mots, cette fois, je levai les yeux vers lui.

- 뭐라고 하셨나요... Murmurai-je à nouveau avant de secouer la tête. J’avais répondu automatiquement par ma langue mais… Je… C’était… ミカ、何て言ったの？Soufflai-je alors en japonais, sans le quitter des yeux. キツネ…もし…あなたが話しているのなら…くたばれ。Articulai-je froidement, fusillant malgré moi Mika du regard avant que je ne me reprenne, que je ne ferme les yeux. C’était… C’était Mika… Il… 미안해... Avais-je prononcé en m’avançant pour m’asseoir sur le lit, l’obligeant à se recoucher avant que ma main ne caresse sa joue et ses cheveux. 나는 해결책을 찾을 것이라고 약속합니다... 나는 당신을 떠나지 않을 것이라고 약속합니다... 이 기생충... 내가 그것을 죽일 것이라고. 너한테 이런 짓을 한 놈을 죽여버릴 거라고... 내가 할 수 없다면 그 놈이 원하는 걸 주어서 널 풀어주겠다고... Avais-je soufflé, profitant de son incompréhension pour dire mes pensées. 사랑해요 내 사랑... 내가 당신을 얼마나 사랑하는지 상상도 못하실 거예요... Silencieux un instant, je m’étais alors penché vers lui, posant mon front contre le sien sans observer ses yeux. Je t’aime, Hae… Avais-je repris en anglais car c’était bien la seule chose qu’il devait vraiment comprendre. Je l’aimais. Plus que tout. Et cela suffisait à résumer le reste. Je donnerais ma vie entière, ma liberté, mon âme à quiconque pourrait le sauver… Définitivement. Repose toi mon cœur… S’il te plait…

Je ne pouvais pas lui faire entendre raison, pas maintenant, pas comme ça… J’en mourrais pourtant d’envie, j’avais envie de le secouer, de le sortir de cette torpeur dans laquelle il se trouvait. C’était infernal, impossible à accepter… Mais je n’avais pas le choix et… Du japonais ? Il… Avais-je bien entendu ? Non… C’était… Ce n’était pas possible… Il ne parlait pas autre chose que l’anglais ou difficilement. Il apprenait encore le coréen alors le japonais… Je devais avoir rêvé et… J’avais repris en japonais, je lui avais posé des questions en japonais, je l’avais insulté… J’avais insulté ce parasite en japonais et… Il me répondait. C’était peut-être le pire… Figé, je l’observai sans même croiser ses yeux que j’évitais soigneusement. Il…

J’avais eu un mouvement de recul mais… Il m’avait fallut toute ma concentration, tout mon amour pour m’en souvenir : il était Mika… Il était toujours Mika, l’homme que j’aimais plus que tout au monde… Il… Les photos l’avaient ne serait-ce que prouvées… Il était toujours lui et… M’excusant, je l’avais alors rejoint, caressant sa joue et ses cheveux pour l’apaiser autant que pour me calmer. Il était lui et… Et j’avais eu besoin de me défaire de mes pensées. Les prononçant en coréen, cela me permettait au moins de dire les choses. Il ne les comprendrait pas… Ce n’était pas grave et…
Fronçant les sourcils alors que mes yeux fuyaient encore les siens, je l’avais relâché, le laissant se redresser sans que je ne comprenne ni sa réaction ni la distance qu’il mettait entre nous et… Me figeant, je l’écoutai soudainement plus attentif que jamais.

Le japonais… Il… Il avait repris en japonais oui mais… Il…

- 이해하셨나요?... Articulai-je avec effroi.

Oui. Il avait compris… Tout compris… Et… L’entendre défendre cet enfoiré me fit trembler de rage alors que mes poings se serraient de nouveau, que les larmes revenaient au bord de mes yeux. Comment pouvait-il le défendre ? Comment pouvait-il ne pas voir ce qu’il s’était passé ?!

- 많은 걸 이해할 수 있어, 해... 할 수 있어... 물어보면 천문탑에서 뛰어내릴 수도 있고 이해할 수도 있는데... 그런데... 하고 싶었던 남자를 변호하는 게 이해가 안 돼. 너를 죽여라... ( Je peux comprendre beaucoup de choses, Hae... Je peux... Je pourrais sauter de la tour d'astronomie si tu me le demandais et le comprendre... Mais... Je ne peux pas comprendre que tu défendes l'homme qui a voulu te tuer...) Articulai-je sans même plus prendre la peine de traduire mon coréen, bien plus facile pour moi, pour m’exprimer. 그 사람은... 그 사람이 당신 몸에 기생충을 심었는데... 그건 당신이 아니예요! 그 사람은 당신을 이용했어요... 그 빌어먹을 키츠네를 얻기 위한 일종의 그릇처럼요! ( Il... Il t'a mis un parasite dans le corps, un... Ce n'est pas toi ! Il t'a utilisé comme... Comme un espèce de vase pour avoir sa saloperie de kitsune ! )

Mais qu’avait-il fait de mal ?... Je… Il… Non… Non, je ne pouvais pas le laisser imaginer quelque chose de la sorte. Il n’avait rien fait de mal. Strictement rien. Il n’y était pour rien. Il n’y serait jamais pour rien et… M’approchatn de lui, je l’avais allongé, fuyant de nouveau son regard alors que je m’étais pourtant hissé au dessus de lui, bloquant ses poignets dans les miens, les yeux baissés vers son torse, incapable de le regarder.

- 넌 아무것도 하지 않았어...

Mais il voulait en parler demain et…

- 내일은 아무것도 바뀌지 않을 거예요... 당신은 여전히 갇혀 있을 거예요... 당신은 이해하지 못할 것이고 저는...

Moi, je serais là, sans savoir quoi faire sans réussir à le regarder et… Il venait pourtant de me le demander… Mais… Que verrait-il dans mon regard alors que mes émotions se bousculaient… La peur, la colère, l’effroi comme la rage mais aussi l’amour infini que je lui portais qui provoquait tout cela…

- Mika… Je… Avais-je tenté de rétorquer.

Il m’avait fallut de longs instants pour enfin lever les yeux, sans même libérer ses poignets. Et ce que j’avais vu… J’avais tremblé. A nouveau. Mes larmes s’étaient remises à perler face à ces iris qui m’étaient inconnues. Il… Il n’était plus lui… Ce n’était plus… Il…

- Je suis désolé… Avais-je alors murmuré dans un anglais à l’accent affreusement difficile. Mon cœur… Je…

Tremblant de toute part, j’avais finalement relâché l’un de ses poignets pour m’obliger à caresser sa joue sans réussir à l’embrasser. J’avais pourtant besoin de ses lèvres, j’avais besoin de lui prouver que j’étais là, que je serais toujours là mais… Ces iris me retenaient, la présence qui m’avait été prouvé de ce parasite me retenait sans que je n’arrive à lutter.

- 당신의 눈을 다시 볼 수만 있다면 무엇이든 주고 싶습니다... ( Je donnerais tout pour revoir tes yeux...) avais-je murmuré bien plus bas en le fixant cette fois du regard, droit dans les yeux, plus douloureusement qu’il ne m’avait un jour vu l’être…

Depuis que nous nous connaissions, j’avais souvent eu peur… Il avait vu nombre d’émotion négative en moi mais… Jamais cela n’avait été à ce point. Jamais l’idée même de me tuer pour le sauver si cela avait été possible n’avait été aussi forte. Jamais je ne l’avais regardé de la sorte, mon amour, pourtant toujours plus que présent, perdu dans un désespoir bien trop visible.

- Je suis désolé… Avais-je fini par répéter en m’effondrant à côté de lui, en larmes, enfouissant ma tête dans son épaule, cherchant son odeur pour oublier ce que je venais de voir, ce qui s’imposait à moi.

Je voulais seulement le retrouver, lui… Je voulais seulement… Retourner en arrière…

- 난… 난 당신이 필요해요... 그 어느 것도... 바로 너에게서... 돌아와... 부탁드립니다...

Il ne se rendait pas compte. Il… J’avais beau tenter de lui expliquer, de lui faire comprendre… Rien n’y parvenait. Il… Il refusait d’admettre ce qui était pourtant la vérité. Je le comprenais, je savais mais… L’accepter… Je n’y arrivais pas.
Comme je n’avais pas réussi à rester sans réaction face à ses yeux… Je l’avais pourtant regardé, je lui avais obéi mais… Ses iris… Je… Je n’avais pas réussi. Impossible. Mes larmes avaient repris leur course. Je ne pouvais pas… Pas ces yeux… Juste… Je le voulais, lui, je le voulais, j’avais envie, besoin de lui et… Je n’arrivais pas. Je n’arrivais pas à le regarder sans détourner les yeux. Je n’arrivais pas à… à garder la place que je devais avoir, à l’aider, à le soutenir. Je n’y arrivais pas… Et je m’en voulais, plus que tout je m’en voulais tellement de n’être qu’un moins que rien face à ce qu’il se passait… Tellement que je ne le retint pas alors qu’il se soustrayait. Me décalant, je m’étais alors assis, presqu’hébété, l’observant aller dans la salle de bain et…
Le cliquetis m’avait indiqué qu’il s’était enfermé. Me relevant, je m’étais presque précipité sur la porte pour tambouriner dessus.

- Hae ! M’exclamai-je, le front contre la porte. Mika, s’il te plait, ouvre !

Je l’entendais, j'entendais ses larmes, sa respiration saccadée qui me paniquait davantage encore.

- Hae, je t’en supplie… Commençai-je à demander, plus bas, sanglotant de plus en plus. Je t’en supplie mon coeur… S’il te plait… J’ai besoin… Non… J’étais égoïste. Je m’en rendais compte. Je le savais et… J’étais un monstre. Ce n’était pas lui le monstre, c’était moi… Je suis désolé… Je suis tellement désolé… Mika… Mon… Mon coeur… Ouvre… Sanglotai-je d’autant en tombant, genoux au sol, les larmes dévalant mes joues sans s’arrêter.

Je n’arrivais plus à me calmer, je n’arrivais plus à me concentrer sur rien alors que le bruit du miroir me faisait sursauter, me faisait pleurer davantage, les bras entourant bientôt mes jambes, mon visage enfoui contre mes genoux.

- Je t’en supplie… Je suis désolé… Murmurai-je sans même me rendre compte que ses parents étaient revenus.

Ce fut le bruit de la porte qui me fit relever la tête alors que j’ignorais complètement ses parents pour me relever, pour me précipiter vers lui et… M’arrêter derrière son père. Sa supplication… Je… Je devais… J’étais un monstre… J’étais un moins que rien… J’étais ce que mon père disait de moi, finalement…

J’avais envie de dire quelque chose, de le rassurer mais… Rien. Rien ne vint autrement que les larmes alors que son père lui tendait de quoi manger et qu’il… Ses mots me firent de nouveau trembler alors que… Le mouvement de son père attira mon attention et le sien… Cette fois, je n’hésitai pas. Me précipitant vers lui, mes bras l’avaient rapidement entourés pour le serrer contre moi, pour le retenir alors que mes larmes continuaient de perler.

- Respire… Articulai-je à mi-voix. Respire doucement… Je suis là, Hae… Je suis là… Je serais toujours là… Je t’aime… Je t’aimerais toujours, Mika, je te le jure… Respire… Essayai-je de le calmer en le berçant, mon nez enfoui dans ses cheveux. S’il te plait, respire mon coeur… Mon soleil… Sanglotai-je contre lui, incapable de me retenir malgré tous mes efforts. Je suis là… Je reste là… Tout le monde est là… Tout le monde t’aime plus que tout… Car cela restait le plus important et…

Non. Je ne pouvais pas rester loin, je ne pouvais pas l’observer s’écrouler sans venir, sans le serrer dans mes bras. Il était mon soleil, il était ma vie… Il avait toujours été celui qui, jusque là, me soutenait sans condition, m’aidait, m’aimait infiniment… Je ne pouvais pas le laisser ainsi, je ne pouvais pas l’abandonner seulement parce qu’il… Parce que j’avais l’impression de tout perdre soudain, que l’on me prenait ma raison de vivre, que l’on me changeait ce qui m’avait sauvé la vie, qu’on me volait ma lumière… C’était égoïste mais… Je n’arrivais pas à faire autrement.

- Hae… Continuai-je, regarde moi… Il fallait que je me force, que je ne détourne pas le regard alors que je l’observai, tentant de lui faire comprendre combien je l’aimais malgré tout jusqu’à ce que mes lèvres ne se posent sur les siennes.

Ceci, au moins, n’avait pas changé. Certes moins brûlant, mon baiser prouvait tout ce que je pouvais ressentir pour lui. L’amour. La tendresse. Cette fusion qui caractérisait notre relation jusque lors. Tout. Tout ce qui faisait que j’avais changé ces derniers mois. Pour lui. Par lui.
Relâchant ses lèvres, je l’avais alors porté jusqu’à son lit, le rallongeant, m’asseyant à côté, refusant, cette fois, de le lâcher des yeux pour caresser sa main.

- Je suis désolé… Avais-je ajouté tant envers lui qu’envers ses parents alors que mes larmes avaient cessé. Je… Je n’allais pas me définir. Pas lorsque le seul terme “moins que rien” me venait en tête mais… J’étais désolé. Définitivement. Il faut que tu manges, mon coeur… Suppliai-je alors à mi-voix en demandant d’un regard au père de Mika de rapporter ce qu’ils avaient prévu pour lui. Il faut que tu manges avant de rentrer… Je… Devais-je venir ? Me tournant vers la mère de Mika, je n’en savais rien. Droit ou pas droit… S’ils m’y autorisaient… Je quitterais Poudlard pour rester avec lui.

- Ne t’excuse pas… Avais-je murmuré. Je suis là… Je suis là mon cœur… Je t’aime… Je t’aime tellement…

Et je n’en doutais pas. Je serais là… Je ne pourrais pas l’abandonner. C’était impossible… Je ne le voulais ni n’y arriverais pas… Je l’aimais. Il était ma vie, mon soleil et… Et ainsi, je l’avais embrassé, lui demandant de relever les yeux vers moi, de me permettre de voir ses iris avant que je ne capture ses lèvres dans cette douceur qui m’avait souvent caractérisée à son contact, que je ne tente de lui montrer combien mon amour ne changerait pas… Pas quand il était ma vie, tout ce qui importait, mon âme sœur.

Au moins avait-il pu, alors, manger. Même un peu, il l’avait fait alors que ma main caressait doucement ses cheveux, sans discontinuer. Il avait repris un peu de force. Assez pour rentrer… Moi avec. Ses parents l’avaient accepté. Malgré tout. Et… M’arrêtant net face à sa mère, j’avais baissé les yeux.

Que pouvais-je dire pour me défendre ? Rien. J’étais égoïste, je… Je n’avais pensé qu’à moi. Pas à lui, je… Je n’étais qu’un moins que rien. J’avais été un abruti, un connard fini avec Mika et… Baissant davantage la tête, j’avais envie de pleurer, impossible de le cacher alors que j’hochais la tête.

- Vous n’auriez pas à le faire si je le faisais reculer… Avais-je articulé. Je… Je ne pouvais rien dire d’autre. Je suis désolé… Je… Je ne voulais pas… Je… J’ai… J’ai été égoïste… Il… Il ne mérite pas… Murmurai-je alors que ma voix s’étranglait, mon poing se serrant fortement, mes ongles rentrant dans ma peau. Je suis désolé… Je vous le promets… Je… Je l’aime… Je vous jure… Plus que tout… Il… Je me suis engagé… Avec lui… Fiancés… Murmurai-je d’autant plus bas. Je… Je ferais tout pour lui…

C’était évident. Pour moi. Sûrement pas pour elle après ce que j’avais provoqué. Mais je ne l’abandonnerais pas. Pas Mika. Jamais. Il… Il avait besoin de moi et… Mon égoïsme me dégoûtait… Je n’avais jamais tenu à quelqu’un à ce point, je n’avais jamais… Pensé à agir de la sorte. Je me pensais altruiste et… Je devais le faire. Je devais… Je devais arrêter d’être égoïste… Je devais… être là.
Et ainsi rejoignis-je la chambre de Mika que je connaissais désormais par cœur. Mika était là. Je ne devais pas en douter. Je ne devais pas l’oublier. Il était là. Il fallait qu’il reste là, qu’il reste avec nous.

- 男性はモンスターになる可能性があります… Répondis-je en m’asseyant sur son lit, près de lui alors que son regard se tournait vers son père qui… Ne comprit rien, évidemment. Il a demandé s’il pouvait aller au refuge demain. Pour aider avant de retourner à l’école… Mais allait-il pouvoir rapidement y retourner ?... Fronçant les sourcils à ma propre traduction, je m’étais alors tourné vers lui. Hae… Tu dois te reposer.

Je ne devais pas user du japonais, m’étais-je un instant fustigé. Je devais… L’anglais. Juste l’anglais. Ni coréen. Ni japonais. Juste ce qu’il connaissait : l’anglais.

- Je t’emmènerais demain au refuge si ton père veut bien… Soufflai-je en me tournant vers Alec. Mais pour Poudlard… Je… Je vais demander à ma sœur de te prendre les cours et les devoirs et… Je t’aiderais. On prendra du temps tous les deux pour tes cours mais… Tu vas rester un peu ici, mon cœur… Tu vas te reposer, d’accord ?

Il allait sûrement s’insurger, refuser de rester ici à se reposer mais… Nous n’avions pas le choix. Pas vraiment…

- Je… Je ferais l’aller-retour entre Poudlard et ici le soir si tes parents veulent bien. Je resterais les nuits avec toi et je retournerais à Poudlard la journée…

Je n’en avais pas le droit mais quand bien même. Tant que les préfets, les professeurs ou les responsables de dortoirs n’étaient pas au courant… Je n’aurais pas de problème. Et puisque je ne sécherai pas les cours… Il me faudrait juste supprimer mes cours particuliers pour le moment. Il était hors de question que je perde du temps loin de lui.

- Est-ce que tu as faim ? Est-ce que tu veux boire quelque chose ? M’inquiétai-je alors.

J’avais toujours du mal à observer ses yeux, à voir ce kitsune en lui mais… Je m’y efforçais. Je devais le faire. Je devais… Je ne devais pas changer. Pas… Complètement… En tout cas.

- Essaie de dormir, 나의 사랑… Murmurai-je. Hamster… Plus que tout… Je t’aime, Hae…

Mes lèvres s’étaient de nouveau posées sur les siennes avant que je ne le relâche, que je n’embrasse son front pour quitter la chambre, déglutissant difficilement en fermant la porte, fronçant les sourcils avant de me rendre auprès de sa mère, m’inclinant bien plus bas que je ne l’avais fait jusque-là avant de me redresser.

- Si vous le permettez… Je m’occuperais des cours de Mika. Ma sœur est avec lui en cours. Elle me donnera les devoirs et les leçons. Je l’aiderais en venant chaque soir… Quant à… Je ne voulais même pas donner le nom de cet enfoiré. Ce qu’il a fait… Je… Mes poings se serrèrent. Madame… Monsieur… Je… Je le tuerais. Soufflai-je en m’inclinant de nouveau. Je vous jure que je le tuerais…

Et j’en étais décidé. Plus que décidé même. Quoiqu’il se passe, quoiqu’il puisse être dit, je le tuerais. Cela étant dit, j’étais retourné auprès de Mika, m’installant près de lui pour chanter. Seulement… Chanter. Cette première chanson qu’il aimait tant… Je ne voyais pas ses yeux, c’était… C’était mieux ainsi alors que je le berçai, doucement, dans mes bras.

Evidemment, Mika n’était pas en total accord avec l’idée de rester chez lui, de quitter Poudlard, quoique je ne sois pas réellement convaincu par le fait de ne pas vouloir louper les cours mais bien plus par l’idée que rater les entraînements lui déplaisait. Mais dans tous les cas… Il n’aurait pas le choix. Personne ne lui laisserait le choix. D’autant que les cours avaient déjà leur solution. Ma sœur allait, finalement, être d’une grande aide et je viendrais. Tous les soirs. Ce que son père refusa, arguant que ma santé était importante.

- …

J’avais voulu protester mais… Je n’avais rien fait, ne faisant que baisser la tête. Il était le chef de famille… Je devais respecter sa décision, quand bien même l’idée de ne pas voir Mika tous les jours m’angoissait déjà.
Restés seuls dans la chambre, je lui avais alors rappelé que je l’aimais que… Que Hamster. Hamster toujours. Plus que tout… C’était le plus important. Ce serait toujours le plus important. Cela et sa santé… Car il devait dormir et moi… Je devais aller voir ses parents. Quittant la chambre, difficilement, j’avais alors informé ses parents de ce que je désirais faire… Et sa mère tint le même discours que son père.

- Ce sera tenable, Madame… Avais-je tenu à murmurer malgré tout en baissant la tête. Mais je serais reposé, je vous le promets…

Ou je ferais semblant… Car il y avait une chose qui m’était certaine… Sans Mika, je ne dormais pas ou je dormais mal. Sans lui, sans ma vie, je n’arrivais pas à être serein… M’empêcher de prendre soin de lui, même un seul jour sur deux… Cette torture m’épuiserait sûrement bien plus que me permettre de faire les allers retours chaque jours. Mais ils avaient décidé et… Je n’étais rien ni personne pour rétorquer. Alors… J’obéirais… Sauf s’il m’était possible de passer par la fenêtre… Enfin. Nous verrions… Quoique j’allais rapidement évaluer cette possibilité.
En attendant, Madame Wilde avait approuvé l’idée de tuer l’homme qui avait touché Mika… Ou presque. Je deviendrais le maître de son fils… A ces mots, je grimaçai. Fortement. Je n’étais pas un maître. J’étais son fiancé, son futur mari. Jamais son maître. Mais je comprenais… Hochant la tête, je soufflai alors.

- Je le protègerais de tout ce qu’il faudra d’ici là…

Comment… C’était une question, mais… Je le ferais. Quoiqu’il se passe, je le ferais. Il avait trop souffert, il avait agonisé… Il était hors de question qu’il subisse plus. Jamais.

Quittant les parents de Mika, j’étais alors revenu auprès de lui, me glissant à ses côtés pour le laisser se blottir dans mes bras alors que je les refermais autour de lui, chantant pour l’apaiser, comme j’en avais l’habitude et… Et cela fonctionna. Je le sentis rapidement sombrer. Quant à moi… Les heures passèrent sans que je ne ferme l’œil.

Au moins, lorsqu’il se réveilla, avais-je eu le temps de réfléchir, de penser, de peser chacun de mes mots, de me rappeler combien je l’aimais et combien sa vie importait plus que tout le reste. Et malgré les cernes qui commençaient à orner mes yeux, j’avais esquissé un léger sourire en l’observant s’activer sans bouger, sans parler. Il n’était toujours pas du matin – ou tout du moins du réveil… Cela ne changeait pas. Tant mieux…

Glissant ma main sur sa taille alors qu’il sursautait à mon contact, j’avais soufflé lentement.

- C’est moi. Je n’ai pas bougé…

Mais j’allais visiblement lui servir rapidement. Glissant mes bras autour de lui, j’avais hoché la tête alors que mes yeux, un instant, se perdaient dans ces iris qui m’étaient toujours inconnues, qui m’effrayaient toujours pour l’avenir, afin de m’exécuter dans un accio Coca Cola qui fit arriver rapidement une bouteille pleine que je réceptionnai pour la lui tendre.

- Du sucre dès le réveil ? Avais-je même osé plaisanter quoique l’effort soit présent tant je n’avais pas envie de rire à cet instant. Tu as bien dormi mon cœur ? Murmurai-je en embrassant sa tempe.

Mais ce furent plutôt des questions qui furent posées… Fronçant les sourcils, je m’étais alors redressé pour l’observer, pour le laisser boire avant de l’attirer à moi pour le caler dans mes bras, le câlinant autant que je le pouvais, bien plus, même, que d’habitude, comme pour essayer de me rattraper de la veille.

- Je peux t’expliquer mais… Ne m'interromps pas s’il te plait. Avais-je alors murmuré à son oreille, le blottissant contre moi. Son accord obtenu, j’avais alors repris. Hier, ton arrière-grand-père est venu au club. Il t’a entraîné je ne sais pas comment quelque part au Japon… J’avais pourtant répété mon discours toute la nuit mais je ne m’étais pas rendu compte des trous qu’il comportait… Tu te souviens que nous avons mis hors d’état de nuire le loup garou qui avait tué Ho-Seok ? Soufflai-je, tentant d’être le plus neutre possible pour ne rien provoquer chez le kitsune quand bien même cela m’était affreusement difficile. Ton arrière-grand-père s’est retrouvé, par notre faute, sans protection et toi… Tu étais là. Il avait visiblement un… Un artefact, je ne sais pas comment l’appeler… Il avait un artefact qui lui permettait d’user d’une très vieille malédiction bien connue en Asie, le Nogitsune.

Je parlais doucement, très calmement, de manière à ce qu’il puisse tout comprendre, qu’il puisse saisir chaque chose malgré le nombre important d’éléments.

- La malédiction du Nogitsune consiste à rattacher un yokai, un esprit, un dém… Non. Pas de mots négatifs. Un esprit, repris-je donc, au corps d’une personne. Et pour ça, il a utilisé un rituel… Ce rituel consiste en… Ma voix fut un instant étouffée par un sanglot difficilement retenu alors que je déglutissais pour reprendre, le plus sereinement possible malgré l’effroi que provoquait les mots que je prononçais lorsqu’ils étaient associés à Mika. Ce rituel consiste en le fait de tuer avec une lame maudite avant de faire rentrer l’esprit dans le corps, dans ton corps… Le Yokai est un Kitsune… C’est… C’est un renard, si tu préfères, en résumé. Et parce que ton arrière-grand-père lui a rendu la vie en utilisant ton corps… Il lui est redevable. Il veut le protéger. Ton arrière-grand-père va donc l’utiliser comme un soldat à la place du loup garou que nous avons empêché de nuire… Et toi avec… Alors… Il me devenait de plus en plus difficile de continuer. Prenant quelques secondes de répit, j’avais respiré profondément pour ne pas craquer. Tu es épuisé parce que ton corps a failli mourir hier, parce que ton esprit doit composer avec un deuxième esprit. Soufflai-je en caressant ses cheveux. Tu as des trous parce que c’était violent, très violent et que tu dois apprendre à faire avec le kitsune… D’ailleurs pendant la nuit, j’ai décidé de l’appeler Jizo.

Pourquoi Jizo ? Parce que Jizo était un dieu japonais protégeant les enfants. Mika n’était plus un enfant, certes, mais son innocence… Je voulais la protéger. Encore. Je voulais… Je voulais me convaincre que tout n’allait pas changer.

- Pardon… J’ai trop parlé… Avais-je alors soufflé.

Il devait maintenant… Intégré ? Il ne le ferait pas. Pas entièrement. Mais je le lui répèterais plus tard s’il le fallait. Au moins avais-je pris mon temps cette fois… Et sans panique apparente.

Il s’inquièterait car il était encore là… Oui. Je le savais mais…

- Ne vous en faites pas. Je resterais en forme.

Je ferais tout ce qu’il faut pour, ou au moins… Je ferais ce qu’il faut pour cacher ma fatigue, soit. Mais je le ferais. Je ferais tout pour que jamais il ne se sente coupable, qu’il ne se sente mal… J’avais déjà bien trop fait de dégât…

- Je ne serais pas un poids pour lui. Avais-je alors assuré avant de leur faire une promesse : je le vengerais. Oui. Mais pas tout de suite. Pas avant qu’il ne soit stabilisé et… Soit. Accédant pour ne pas avoir à me battre sans même oublier cette idée, j’avais alors promis de le protéger avant tout… Car cela restait le plus important à cet instant.

Revenant, finalement, auprès de mon fiancé, je l’avais laissé s’endormir, bercé par ma musique, l’observant autant que réfléchissant toute la nuit durant jusqu’à son réveil qui fut tardif. Peut-être allait-il falloir que je prévienne quelqu’un de mon absence… Mais… Pas maintenant. Maintenant, je devais me concentrer sur lui. Et il avait soif… Le rassurant sur ma présence, je lui avais donc fait parvenir une bouteille de coca et… Soupirant, j’avais levé les yeux au ciel face à son contre argument.

- Je note donc de te faire manger beaucoup de tomates au prochain repas. Et des légumes aussi, ils ont du sucre dedans.

Que ses goûts restent les mêmes, à vrai dire, me rassurait et… Sûrement allais-je encore chercher à me rappeler qu’il était là… Qu’il restait là… Quant à sa nuit… Une nuit à fixer un renard qui l’observait… Cela ne me paraissait pas étonnant… Pas avec ce qu’il était devenu… Une chose que je pouvais lui expliquer alors que mes mots avaient tous été répétés et pesés au cours de la nuit. Ses questions arrivaient et… C’était évident, normal, même. Il avait besoin de réponses, de reconstituer les faits alors… Alors je le fis. Tentant d’être le plus serein, le plus calme possible, je n’avais trahi mon mensonge qu’une fois, un sanglot m’échappant lorsque je dus imaginer la souffrance de Mika, ce qu’il avait vécu. Mais je m’étais repris et l’histoire avait ainsi été racontée du mieux que possible, le plus lentement et le plus doucement possible. Il ne s’agissait pas de l’effrayer ou de le brusquer… Simplement… Qu’il comprenne.

Je m’attendais à bien des réactions, mais à celle qu’il eut en premier lieu… Non. Arquant un sourcil alors qu’il se redressait, je m’étais alors laissé attirer à lui, plus tendu que jamais, la nuque autant que le dos raides avant que mes yeux ne se ferment au contact de ses lèvres sur mon front… Me laissant bercer, j’avais rapidement rouvert les yeux, fronçant les sourcils alors qu’il… Qu’il me rassurait et… Non… Enfin… Non ! Je… Je devais être son roc, il… Ce n’était pas à lui de me rassurer, comme d’habitude. Je… C’était à moi de le soutenir ! Pas l’inverse ! Et ses mots, pourtant, m’arrachèrent un nouveau sanglot contenu dans une toux que je forçai pour ne pas attirer son attention. Même s’il avait pu mourir… Je… Non… Je n’y arrivais pas… Pas comme ça, pas maintenant. La simple pensée de ce fait me donnait l’impression de sentir mon cœur être arraché de ma poitrine. C’était impossible… Formellement impossible…

Mais… Au moins réussit-il finalement à mettre des mots alors que je me redressai, que ma main se glissait dans la sienne, comme pour l’encourager à remettre ses idées en place. Du moins… J’aurais préféré que cela soit juste le cas… Car il vint le défendre. A demi-mot, je l’entendais défendre l’assassin de mon cousin… Son assassin. Pourtant, mes lèvres restèrent closes. Je ne devais pas aller à son encontre. Pas maintenant… C’était… Même aussi douloureux que cela puisse être, c’était inutile.

- Nous sommes sûrs, avais-je finalement repris, éloignant difficilement la question du grand père de nous en profitant de ses nouvelles questions. Nous sommes certains pour le Kitsune, répétai-je alors.

Mais il revint à la charge… Encore… Et si mon visage restait pratiquement neutre, si je n’émettais aucune émotion visible sur mes traits, j’avais glissé l’une de mes mains sur le matelas pour serrer le poing, tentant de me détendre autant que je le pouvais, pour lui. Juste… Pour lui. Le laissant continuer à parler, je ne l’avais pas coupé, le laissant s’exprimer sur son ressenti, même biaisé, même faussé, jusqu’à ce qu’il émette une idée que je refusais d’imaginer.

- Ne l’appelle pas. Jamais. Dis-je peut-être un peu trop brusquement avant de grimacer contre mon propre empressement. Mon cœur… Repris-je alors plus doucement, desserrant mon poing pour glisser mes mains sur son visage. Ecoute moi… Je sais que tu ne te sens pas différent, mais… Ce n’est pas toi le soldat… Tu n’es que sa façon de s’exprimer à travers ton corps, tentai-je de lui faire comprendre. C’est Jizo, le soldat, seulement parce qu’il est reconnaissant envers ton arrière-grand-père et… S’il te plaît, essaie de te concentrer, de ne pas lui donner de bonnes ou de mauvaises attention, juste… Essaie d’être… Logique, enfin… Me rattrapai-je pour ne pas brusquer son esprit qui, sans doute, devait s’estimer logique. Essaie d’être objectif. Il n’y a pas de mauvaise personne dans ma question, mais réponds-y… Est-ce qu’emmener une personne, quelle qu’elle soit, sous prétexte qu’elle est femme ou androgyne aux portes de la mort pour y implanter un esprit capable de contrôler son corps afin de s’en servir comme soldat est bien ? Il ne s’agit pas de ton arrière-grand-père. Juste… Répond à cette question sans penser à personne. Est-ce qu’une personne bien le ferait ? Est-ce qu’il y existe une justification autre que celle de donner vie à un kitsune pour avoir sa reconnaissance et sa fidélité ? Car je savais ce qu’il allait me répondre… Son arrière-grand-père l’avait sauvé… Mais… Ce ne serait pas lui mais le kitsune qui parlerait et… La différence, la part des choses était difficile. Je ne sais pas comment te le prouver autrement qu’avec ça… Murmurai-je en quittant son visage pour glisser ma main sur sa cicatrice, contre sa peau. Mais… お願いします... Soufflai-je à voix basse, posant mon front contre le sien. 내 말에 집중해라... 私はもう英語を話せません、ミカ... 그리고 이제 일본어도 못해요... J’avais alterné les deux langues, exagérant leur accent pour tenter de le faire réaliser une chose, simple… Il comprenait des choses qui n’étaient même pas envisageables avant pour lui et… 하지만 난 당신을 사랑해요, 의심하지 마세요... Car il fallait que je le lui répète, que je lui fasse oublier mes gestes de la veille, quand bien même la nuit n’avait rien changé d’autre que la haine grandissante que j’avais envers moi, envers mon comportement ; et mes pensées désormais entièrement tournées vers lui.

Au moins sa réaction ne mentait-elle pas… Ses goûts ne semblaient pas avoir changés ce qui me rassurait. Beaucoup. Mais la douceur du moment s’éteignit bien rapidement au profit de quelque chose de plus difficile : les explications. J’avais tenté d’être clair, de lui expliquer les choses au mieux et surtout de la manière la plus sereine possible. Je ne voulais pas le brusquer, ni lui ni celui que j’avais surnommé Jizo, comme pour me rassurer. Mais il ne comprenait pas. Il n’arrivait pas à tout comprendre et en venait encore à défendre son arrière-grand-père et… Non. Cela… Je ne pouvais pas. Tout comme je n’arrivais pas à accepter qu’il puisse vouloir l’appeler, l’approcher, même. Alors… Je tentai de faire appel à sa logique, à son esprit rationnel qui me calmait souvent. Il fallait qu’il se concentre, qu’il réfléchisse. Et… Rien. Un silence… Sûrement dû à une logique qui ne l’était plus vraiment intérieurement…
Il fallait que je trouve autre chose, que j’arrive à lui faire comprendre ce qu’il se passait… Et pour cela, le japonais et le coréen me parurent être de bonnes idées alors que son regard trahissait l’incompréhension face à, paradoxalement, sa compréhension des deux langues.

- Je préfère Hamster… Avais-je malgré tout admis en murmurant.

Rien ne vaudrait Hamster… Surtout pas le japonais, à vrai dire… Pas quand il me faisait si mal. Arquant un sourcil à sa question sans le quitter des yeux malgré ses iris que je peinais encore à accepter, j’avais secoué négativement la tête.

- Je ne m’énerverais plus contre toi, Hae. Répondis-je doucement en venant caresser doucement sa joue. Alors dis moi tout ce que tu veux.

Et je ne dirais rien. Je ne ferais rien. Pas devant lui en tout cas. Pas quand il avait besoin de calme. Alors… Il pouvait parler. Au moins était-il conscient du mal et… Cachant mon poing derrière moi, je l’avais de nouveau serré, fortement… Si j’avais pu me briser les os tant sa réponse m’enrageait… Je l’aurais fait. Et pourtant… Mon visage restait impassible. Peut-être, d’ailleurs, trop froid mais… Je ne pouvais pas mieux faire. Pas quand le fait de l’entendre dire qu’il était consentant à tout cela me mettait hors de moi.

- Hae… Repris-je alors la voix la plus douce possible – voire même trop douce, je l’admettais, mais il m’était toujours aussi difficile de gérer mes émotions à cet instant – est-ce que tu n’aurais pas attendu la fin de ton entraînement pour le suivre si… Me stoppant je réfléchis quelques instants à la tournure de ma phrase. Imaginons un instant que tu aies été consentant, me forçai-je à articuler. Pourquoi n’as-tu pas attendu la fin d’un entraînement important pour toi ? Cela n’aurait rien changé à ce qu’il s’est passé, au final. Alors… Pourquoi est-ce que l’on t’a endormi pour te transporter avant de le faire dans la forêt, avec ton consentement ? Soufflai-je difficilement mais calmement.

J’avais l’impression que toutes mes tentatives de lui expliquer les choses, de le ramener à une raison logique seraient vaines mais… J’essaierais. Encore et toujours. Je ne cèderais pas ce point alors que sa prochaine question me figeait, malgré moi, un instant.

- C’est…

Que pouvais-je répondre à ça ? Oui. Il pourrait en faire si le maître du Kitsune – et non celui de Mika, je me le refusais – venait à le lui demander… Mais… Non. Je ne pouvais pas lui dire cela, je ne pouvais pas me permettre de le lui expliquer, je n’y arrivais pas et… Fronçant les sourcils alors qu’il secouait la tête, je tentai de chercher quoi répondre, de peser mes mots lorsque… Il avait faim ?... Arquant un sourcil, je l’observai quitter la chambre avant de soupirer de desserrer mon poing pour y voir la marque de mes ongles inscrits dans la paume de ma main. Le secouant, je l’avais finalement suivi jusque dans la cuisine, saluant ses parents pour m’arrêter dans l’entrée de la pièce et l’observer de loin. Il… Mon regard se posa sur ses parents dans un air surpris de son geste. Il… Il mangeait du kimchi ?... Sans broncher ?...

- Mika, tu…

Me stoppant, je préférai ne rien dire, le laisser faire ce qu’il voulait faire sans lui faire remarquer les incohérences de son comportement et… Ses goûts avaient donc changé ? Un instant, mon regard se mua en une inquiétude certaine, en cet effroi de le voir perdu et… Non. Je… Secouant doucement la tête, je repris ma respiration pour reprendre mon observation faussement sereine.
M’approchant de lui, je m’étais installé à ses côtés sans même prêter la moindre attention au bol qu’il avait posé pour moi, avant de glisser ma main dans son dos, le caressant légèrement. Si, habituellement, la présence de ses parents me gênait, aujourd’hui était bien différent alors que je me refusais de le quitter, de ne pas lui montrer ma présence à chaque instant.
Mais enfin, il reprit parole et… Était-ce fondamentalement une mauvaise chose ? Je… Baissant un instant les yeux, il avait continué à parler et… Soupirant, je repris à sa suite.

- Les gens changent… Soufflai-je, acquiesçant ses propos avant de froncer les sourcils pour glisser ma main dans la sienne. On ne saura pas tout de suite si le kitsune est… Compatible avec toi, mon cœur… Il faut attendre que ton esprit l’accepte et que le sien aussi… Mais… Je sais que tu es assez fort pour que ce soit le cas et… Il fallait le lui dire, le lui expliquer… Il peut être comme toi… Ce n’est pas… Ce n’est pas le fond du problème ou… J’hésitais, levant les yeux un instant vers ses parents et notamment vers sa mère pour chercher de l’aide, j’avais repris rapidement. Le problème est la loyauté de Jizo à ton arrière-grand-père car… Ce… Ce n’est pas exactement une loyauté… Enfin… C’est… S’il ordonne quelque chose… Tu le feras… Le kitsune le fera et tu n’auras pas le choix… Avais-je finalement dit. Quel que soit l’ordre qu’il donne… Que cela soit venir à lui ou… Ou pire… Face à n’importe qui…

Ou blesser voire tuer. Même ses proches. Et si je tentais de le dire toujours aussi sereinement, ma voix tremblante ne faisait que prouver ma crainte que cela arrive, que l’on doive le maîtriser, lui… Et… Plus que cela… Je craignais sa réaction alors que ma main serrait la sienne que j’étais prêt à réagir, à le serrer dans mes bras pour le calmer si le besoin se faisait sentir.

- En anglais, c’est bien…

Car l’anglais était sa langue, sa propre langue, la seule qui comptait lorsqu’il parlait. La seule que j’utilisais dès à présent ou presque. Tentant de lui faire comprendre les choses, de les lui faire accepter avec toute la douceur dont j’étais capable, j’étais passé du coréen au japonais avant que je ne tente de lui faire entendre raison, de faire appel à sa logique. Et… cela fonctionna. En partie. Il se retrouvait face à une contradiction entre son esprit et celui du kitsune. Je le sentais. Mais cela fonctionnait. C’était le plus important. Il savait que quelque chose n’allait pas. C’était le plus important. Le reste… Nous verrions cela plus tard. D’autant que je n’avais pas été capable de lui répondre, le laissant quitter sa chambre jusqu’à la cuisine.
Et si j’avais été surpris par son encas au kimchi, je n’en avais rien fait, m’asseyant près de lui alors que les questions venaient, que je tentais de lui expliquer le fond du problème. Non. La présence du kitsune, dans l’hypothèse où son esprit serait compatible avec celui de Mika, n’était pas « gênante » en tant que telle. C’était bien la loyauté de Jizo qui l’était. Celle qui le forcerait à tout…

- Oui. Avais-je simplement répondu à sa question concernant le Quidditch alors que le plus dur n’était pas là… Et qu’il le comprit.

Le laissant rejeter ma main, je n’avais pas fait un geste, l’observant alors qu’il semblait en pleine bataille intérieure. Il ne voulait pas nous faire du mal et… Je le savais. Il n’était pas comme ça. Il ne ferait jamais de mal à qui que ce soit. Il était une lumière que son arrière-grand-père risquait de faire basculer dans l’ombre et… cela m’enrageait. Plus que tout. Je n’avançai vers lui que lorsque j’aperçu réellement ses gestes sur sa peau. Attrapant ses poignets pour l’empêcher de se faire du mal, j’avais laissé sa mère répondre. Lui mentir… Il fallait lui mentir… Il fallait lui mentir pour son bien et… Je détestais cela, plus que tout. Je ne voulais pas mais…
Sourcils froncés, plus inquiet que jamais pour lui, je l’avais alors observé en silence, tentant de me convaincre que mentir était la seule solution et… Elle l’était. Définitivement.

- Je sais 나의 사랑… Murmurai-je alors qu’il venait se nicher contre moi, mes bras l’entourant fermement. Personne ne doute de ta loyauté. Moi compris. Je n’en douterais jamais. Même si je savais, même si j’étais sûr de ce qu’il se passerait… Me décalant, j’avais pris, tendrement, son visage en coupe pour le forcer à m’observer, à lever les yeux vers moi, retenant un tressaillement lorsque je croisai ses iris, m’efforçant à rester neutre, sérieux. Ecoute moi bien Mika… Soufflai-je, assuré alors même que le simple fait que je m’apprête à lui mentir droit dans les yeux me dégoutait, que je me dégoutais. Si nous venions à nous en prendre à ton arrière-grand-père, si je venais à m’en prendre à lui, nous savons tous ce qu’il ferait. Cela te mettrait toi en danger… Nous ne le ferons pas. Pas si tu risques quelque chose. Est-ce que tu m’entends ? Nous ne risquons rien et tu ne nous feras rien parce que nous ne serons pas un danger pour ton arrière-grand-père. Jamais. Pas parce que je ne suis pas en colère contre lui mais parce que cela ne nous apportera rien. Il est hors de question que nous te mettions en danger.

Et pourtant… La vérité serait bien loin de la réalité que je lui offrais là. Quoique je ne puisse concevoir un instant de le mettre en danger… Il fallait que je le tue. Il fallait que l’on libère Mika de son influence car même si nous n’étions pas une menace, même si nous décidions de ne pas l’être… Mes cousins ne seraient, un jour, pas de cet avis, comme nous ne pouvions être certain que jamais Mika ne serait utilisé pour le protéger d’autres, pour le faire vivre plus longtemps… Non… Il fallait que je le libère. Mais… Mika ne devait pas savoir. Le kitsune ne devait pas savoir. Il fallait que je les apaise. Tous les deux.
L’attirant vers moi, je l’avais alors serré dans mes bras, fortement, glissant ma main jusque sur sa tête pour le maintenir contre moi.

- Je te promets que nous ne serons pas une menace… Pas quand cela te ferait du mal, Hae… Tu es plus important que tout… Et c’était bien pour cela que je mentais, même douloureusement, alors que des larmes silencieuses perlaient sur mes joues, entraînées par le dégoût que j’avais de moi, de mon mensonge face à l’homme que j’aimais, face à la seule personne à qui j’avais juré vérité. Je veux juste que tu vives et que tu sois heureux… Si ça passe par ne plus critiquer ton arrière-grand-père, par ne jamais le menacer ou même par le protéger, je le ferais… Un instant, même, l’idée de me rendre auprès de lui pour le supplier de m’utiliser moi en bouclier plutôt que Mika m’était venue à l’esprit… Idée inutile tant ses capacités dépassaient allègrement les miennes désormais… Mais… Si cela pouvait faire gagner du temps… Gardant Mika contre moi, je l’avais alors bercé, doucement, embrassant son front sans croiser son visage de peur qu’il n’y voit mes larmes que je peinais à faire arrêter jusqu’à ce que je me tourne vers ses parents et que je ne le lâche, minant une toux avant de faire volteface. Je reviens… J’ai… Toussant à nouveau, je secouai la tête. J’ai avalé de travers, je vais… Je vais me passer un coup d’eau sur le visage. Je mentais mal lorsque je ne réfléchissais pas, lorsque sa vie n’était pas en jeu mais… Mieux valait ça que la vérité.

Le laissant auprès de ses parents, je m’étais alors rendu dans la salle de bain, m’appuyant contre le lavabo pour souffler, pour laisser mes larmes perler sans me retenir, comme si cela me faisait du bien, comme s’il s’agissait de la haine que je retenais, pour moi, pour son arrière grand père, pour mes mensonges, s’échapper de mon corps dans un trop plein que je ne savais plus retenir.

- Tu ne perdras personne… Avais-je répondu en l’entourant de tout l’amour que je pouvais avoir pour lui, le serrant dans mes bras sans le relâcher.

Sa respiration s’était calmée… Avais-je réellement réussi à l’apaiser grâce à mon mensonge ? Je l’espérais. J’espérais ne pas avoir à lui mentir pour rien… Mais il se détendait, je le sentais alors que je venais d’affirmer être capable de protéger celui qui lui avait fait cela. C’était vrai, en un sens. Si cela pouvait protéger Mika, je l’aurais fait, j’aurais pu le faire, mais cela ne changerait rien… Au moins son esprit et celui du kitsune semblaient-ils s’être apaisés… Tant mieux… Mais… Je n’aimais pas cela. Je n’aimais pas lui mentir, pas quand j’avais promis l’inverse, pas quand les risques étaient aussi grands pour lui et… M’éloigner était devenu vital alors que les larmes ne semblaient plus être retenues.
Faisant volte face, j’avais ainsi quitté la pièce dans un prétexte plus mal choisi que jamais, afin de me rendre dans la salle de bain, de laisser mes larmes perler le long de mes joues, tentant de me calmer comme je le pouvais. J’étais épuisé, cela n’aidait pas, certainement… Mais j’étais aussi en colère, enragé devrait-on dire, triste et inquiet… Très inquiet pour cet avenir qui était désormais incertain.

Il m’avait fallu de longues, très longues minutes pour que ne cessent mes larmes alors que l’eau aspergée sur mon visage me faisait du bien, malgré tout. Yeux fermés, toujours appuyée sur le lavabo, je tentai ainsi de respirer convenablement, de chasser de mes pensées toutes les idées qui s’assombrissaient largement, me renvoyant des mois en arrière.

- 괜찮을 거야... Tentai-je de me convaincre dans un murmure. 해결책이 있습니다... 생각해야 합니다...

Il fallait qu’il y en ait… Ne serait-ce que pour le tuer, lui. Il fallait que je trouve un plan, une solution. Et rapidement. Quand bien même sa mère n’était pas en accord avec cela, il fallait que je trouve et que…
Mes pensées furent interrompues par le bruit de la porte alors que j’éteignais l’eau, m’efforçant à afficher un léger sourire quoique désolé face à Mika. Attrapant le verre qui m’était tendu, je soufflai doucement. Je m’étais réellement emmêlé les pinceaux dans ce mensonge…

- Je ne sais pas ce que j’ai fait en toussant… Mes yeux se sont mis à piquer, j’ai préféré les rincer avant tout, tentai-je d’expliquer en reprenant les choses, en les accrochant à la réalité : mes yeux rougis par bien autre chose qu’une toux ou je ne savais pas quoi d’autre. Mais merci pour le café… Tu n’étais pas obligé.

Cela allait pourtant me faire du bien alors que j’en bus une gorgée salvatrice. Il savait ce que j’aimais…

- Ne t’excuse pas s’il te plait. Soufflai-je en m’approchant de lui, posant mes mains sur ses hanches. Faisons ce que tu veux, d’accord ? Qu’est-ce qui te ferait plaisir, toi ? Retournai-je la question. Est-ce que tu te sens assez reposé pour sortir et…

Il y avait autre chose, une chose qu’il fallait changer avant que nous ne sortions. Mais j’étais épuisé et pas réellement sûr de pouvoir tenir toute une journée avec un sort pourtant basique… Un sort que je lui lançai alors, venant le porter pour le remettre au sol et lui faire faire face au miroir, me glissant dans son dos alors que ses iris semblaient être redevenues normales.

- Il ne faut pas que nous allions dans un endroit bondé ou les moldus seraient trop proches. Soufflai-je malgré tout. Je… Il ne fallait pas que je lui dise que j’étais épuisé et que je n’avais pas dormi alors… La métamorphose a ses limites et elle n’est pas tout le temps exacte. Soufflai-je en excuse. Mieux vaudrait qu’ils ne voient pas tes yeux sans sortilège pour le moment si je me déconcentre ou que mon attention est happée par quelque chose sans que je le veuille. Fronçant les sourcils alors que revoir les « véritables » yeux du sorcier me faisait un bien certain, je soufflai doucement, posant ma tête sur son épaule. Ça aussi… ça sera temporaire… Quand le kitsune aura vraiment fusionné, que vous ne chercherez plus votre place, tes yeux reviendront.

Le laissant quelques instants pour prendre mon sort en considération, je l’avais alors entraîné jusqu’à sa chambre, glissant sa main dans la mienne, tentant d’être un peu plus enthousiaste, feignant pouvoir sourire, m’y efforçant en tout cas, pour lui faire face.

- Alors vu que je sais que tu vas râler parce que tu veux savoir ce que moi je veux faire, je vais te répondre maintenant… Je veux faire tout ce que tu as envie de faire. Sans exception. Même faire une journée entière de voiture si tu as envie de faire de la voiture, ou manger des ananas toast… Tout ce que tu veux. Mais seulement si tu te sens assez en forme pour, sinon… On peut rester ici, aller dans la piscine même ou rester au lit avec ta console. Je n’ai pas ma guitare, je ne pourrais pas jouer mais le reste, on peut le faire… C’est à toi de me dire mon cœur.

Caressant lentement son bras, j’avais tenté de garder cet air serein quoiqu’emprunt de la froideur des Jeon qui m’avait alors maintenu des années durant face au reste du monde. Il fallait que tout aille bien de mon côté, il fallait qu’il soit le centre du monde et… Enfin… Il l’était, déjà, bien sûr mais… Aujourd’hui plus que jamais, je ne devais pas interférer face à son soleil. Je devais le faire briller. Je devais être là. Et pas un poids. Plus jamais.